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SAPEUR

N° 6
Sommair e
Juin 2006

ÉDITORIAL du Général de division CHINOUILH commandant l’ESAG .................................................... 3

ÉTUDES ET PROSPECTIVE

L’appui génie en opérations : une nécessité reconnue…


avec cependant des capacités toujours comptées
Plaidoyer pour une manœuvre génie intégrée .............................................. COL AUTRAN ............................ 7

Les armes à létalité réduite appliquées à la contre-mobilité.................... COL PARMENTIER .................. 11

La montée en puissance du mécanisme communautaire


de Protection civile et ses enjeux pour les armées ...................................... COL PONCELIN de RAUCOURT 17

Numérisation de l’espace de bataille .................................................................. LCL EGLEMME .......................... 21

SAPEUR Processus d’élaboration des concepts et de la doctrine AGESTER


Application à la sauvegarde-protection ............................................................ LCL PINOT .................................... 25
Revue d’études
du génie militaire français La théorie des trois blocs appliquée au domaine NRBC .......................... CES CAUDRILLIER .................. 29
publiée par la direction
Le combat du feu en zone urbaine ...................................................................... CNE BOUTOLLEAU ................ 31
des études et de la prospective
de l’école supérieure
et d’application du génie
DOSSIER : LA SAUVEGARDE-PROTECTION DES FORCES
106, rue Éblé - B.P. 34125
49041 ANGERS CEDEX 01
La protection-sauvegarde sur une base aérienne projetée ...................... COL BILBAULT .......................... 37

Protéger nos stationnements contre les attentats à l’explosif ................ COL LORIDAN
Directeur de la publication LCL MARTIN ................................ 41
Général de division Jean-Loup CHINOUILH

Rédacteur en chef Pour une approche globale de la sauvegarde-protection.......................... LCL (TA) SOUCASSE .............. 45
Colonel Pierre-Yves HENRY
Le rôle du génie de l’air dans la sauvegarde-protection
Conception-Réalisation
en opérations extérieures ........................................................................................ LCL CHAPELLE .......................... 49
PIR ESAG

Dépôt légal à parution Le RGBIA dans la mission de protéger les forces en 2005 ...................... LCL KIRSCHER .......................... 53
ISSN en cours
Opération CALAO : Le 5e RG en Côte d’Ivoire : acteur de la fonction CBA ANDRIAMOLISON
AGESTER ou simple prestataire de service ? .................................................. CNE MACHELON ...................... 57

Concept ISOPEX et sauvegarde-protection...................................................... CBA MERCURY .......................... 61

Montage d’un poste de combat de type HESCO BASTION ...................... CNE FOUQUET .......................... 65

Côte d’Ivoire : Retour d’expérience en sauvegarde-protection .............. CNE GEROUDET ...................... 69

-1-
SAPEUR

ÉQUIPEMENTS ET STRUCTURES

SPECTRE - 2006-2007 : années cruciales .................................................... LCL CORNEFERT ...................... 75

FORMATION

La sauvegarde-protection : repenser la formation ...................................... CNE CASTEL .............................. 81

LE GÉNIE DANS L'HISTOIRE

Les uniformes du génie de la Révolution et de l’Empire .......................... CDT GARNIER de LABAREYRE 87

Génération de forces et emploi du génie


Les sapeurs de la Campagne d’Alger ................................................................ CNE GIUDICELLI ...................... 93

Les ingénieurs dans les troupes émigrées ...................................................... M. FOUGERAY .......................... 97

-2-
SAPEUR

Général de division
Jean-Loup
CHINOUILH

Éditorial
Le général de division Jean-Loup
CHINOUILH commande l'école supé-
rieure et d'application du génie depuis
août 2003.

Entré à Saint-Cyr en 1969, il sert SAPEUR consacre aujourd'hui son dossier central à la sauvegarde-protection dont
comme chef de section au 13 e régi- l'importance n'est plus à démontrer face aux nouvelles menaces. Plus que dans les
ment du génie et commandant autres missions confiées au génie, nous avons là des progrès à réaliser pour renforcer
d'unité au 17 e régiment du génie nos moyens et les adapter au contexte urbain.
parachutiste, où il revient en 1988
au poste de chef du bureau opéra- Comment caractériser le bouclier qu'il nous faut en opération ?
tions-instruction.
Il est nécessairement passif pour protéger au minimum, dans la durée, les abris de
Il est chef de corps du 6 e régiment regroupement et les espaces sensibles activés en permanence (centres opérationnels,
du génie de 1994 à 1997. stations de production d'énergie etc.). Il comporte pour cela des obstacles à la pénétration
et des parois massives de terre ou de béton sur lesquelles travaillent aujourd'hui en
Il a commandé la brigade du génie commun l'École du génie et le Service technique des bâtiments, fortifications et
d'août 2001 à août 2003. travaux.

Il est breveté de l’école de guerre, Mieux encore, il doit être réactif en associant une capacité de détection et d'alerte
diplômé de l’institut d’administration immédiate d'une intrusion ou d'une amorce d'attaque par aviation ou artillerie afin que
des entreprises de Paris. chacun rejoigne sans délai, qui son poste de combat, qui son abri. Se déclencherait
alors instantanément une riposte de neutralisation, automatique ou humaine, corres-
pondant au type d'agression. Un lien est déjà établi entre sapeurs et artilleurs dont les
radars de détection d'approche et de trajectographie compléteront les capteurs répartis
sur le terrain. Une coopération se prépare également avec les transmetteurs dont les
brouilleurs mobiles pourraient venir à bout de certains dispositifs explosifs commandés
à distance.

Ce bouclier doit enfin et surtout se montrer proactif, le but étant de dissuader d'emblée
un agresseur potentiel de toute attaque en le persuadant d'un bilan dérisoire, d'une
riposte immédiate et, par là, d'une défaite médiatique. Il convient que l'effet psycholo-
gique recherché découle aussi d'un discours politique et d'une action militaire
conformes aux attentes de la population locale, incitée de ce fait à rejeter nos
adversaires.

Il s'agit bien d'une affaire interarmes, voire interarmées. Les sapeurs sont des
partenaires privilégiés, avec les protections passives dont ils ont la charge, mais
leur expérience dans ce domaine leur permet de se poser en pilotes.

Sparte, qui n'avait pas de remparts, comptait plus sur ses hommes que sur des
murailles pour assurer sa défense. Comme Vauban, je suis sûr qu'aujourd'hui les uns
ne vont pas sans les autres.

le général de division CHINOUILH


commandant l'école supérieure
et d'application du génie

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SAPEUR

-4-
SAPEUR

Études
et
pr ospective

L’appui génie en opérations : une nécessité reconnue… avec cependant des capacités toujours comptées
Plaidoyer pour une manœuvre génie intégrée .......................................................................................................................... COL AUTRAN .......................................................... 7

Les armes à létalité réduite appliquées à la contre-mobilité ................................................................................................ COL PARMENTIER ................................................ 11

La montée en puissance du mécanisme communautaire de Protection civile


et ses enjeux pour les armées ............................................................................................................................................................ COL PONCELIN de RAUCOURT .................... 17

Numérisation de l’espace de bataille .............................................................................................................................................. LCL EGLEMME ........................................................ 21

Processus d’élaboration des concepts et de la doctrine AGESTER


Application à la sauvegarde-protection ........................................................................................................................................ LCL PINOT ................................................................ 25

La théorie des trois blocs appliquée au domaine NRBC ...................................................................................................... CES CAUDRILLIER ................................................ 29

Le combat du feu en zone urbaine .................................................................................................................................................. CNE BOUTOLLEAU .............................................. 31

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SAPEUR

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SAPEUR

Colonel L’APPUI GÉNIE EN OPÉRATIONS :


Francis
AUTRAN
UNE NÉCESSITÉ RECONNUE…
AVEC CEPENDANT DES CAPACITÉS
TOUJOURS COMPTÉES

Saint-cyrien de la promotion MONTCALM PLAIDOYER POUR UNE MANŒUVRE GÉNIE INTÉGRÉE


(1980-1982) et officier du génie, le colonel
AUTRAN a servi dans les Troupes de
montagne comme chef de section puis The idea of an engineer support to an intervention force is never questioned basically.
commandant d’unité, à la 77 e compagnie However, this support is most of the time expressed in terms of means and equipment
du génie de la division alpine et au instead of effects to produce on the ground or on the belligerents.
7 e bataillon du génie de la division alpine.
Affecté aux Écoles de Coëtquidan en But this effect-based process must prevail over any other, considering simultaneously
1990, il commande une compagnie à the financial constraint on every military overseas operation.
l’École spéciale militaire de Saint-Cyr
(1990-1993). It is thus necessary that the engineer command must be associated from the start to
the decision making process and to the force generation.
Breveté de l’enseignement militaire supé-
rieur (3 e promotion du CID), il rejoint la In so far as engineer support never covers all units’ demands because engineer abili-
Légion étrangère en 1998. Il prend part ties are never sufficient, whatever the operation concerned, a real integrated engineer
manœuvre does exist.
comme chef du bureau opérations-ins-
truction à la création et à la montée en This manœuvre must be centralized with a proper command in order to give all neces-
puissance du 2 e régiment étranger de sary flexibility and reactivity to engineer units with efforts and priorities precisely defi-
génie, qu’il commande de 2001 à 2003. ned in regard to Force commander’s objectives.
À l’issue de son temps de commandement,
il est affecté à l’état-major de la 27 e brigade Centralization of engineer support conception must go hand in hand with a de-centra-
d’infanterie de montagne comme chef lization of the execution and if the mission demands it, engineer unit must be attached
d’état-major (2003-2005). to battle groups, even to the lowest level of responsibility (squad or even team).

En 2005, il est auditeur de la 55 e session


du Centre des hautes études militaires et AVERTISSEMENT par la marque durable de leur action sur
le terrain au profit des groupements tac-
de la 58 e session de l’Institut des hautes Le propos n’est pas ici d’amender la doc- tiques et des états-majors de forces opé-
études de défense nationale. trine d’emploi du génie en opérations et rationnelles qui les commandent.
encore moins de réécrire les règlements
Le colonel AUTRAN possède en outre
qui en découlent. Adaptés au nouveau Aujourd’hui comme autrefois, nul chef
une expérience opérationnelle variée à
contexte d’engagement des forces, ces désireux de conserver sa liberté d’action
des postes de responsabilités, notamment
documents couvrent l’éventail des mis- et de préserver ses moyens de comman-
chef G3 de l’état-major de la Brigade
sions pouvant être confiées au génie. dement, de combat et de soutien, ne peut
multinationale Nord (BMN-N) au Kosovo
Cependant, un certain nombre d’ensei- décemment remettre en cause la perti-
en 2000, chef de corps du BATGEN
gnements pratiques et fondamentaux nence, et même l’impérieuse nécessité
(12 e mandat) de la BMN-N au Kosovo en
apparaissent à la lumière de tous les pour la force de bénéficier d’un appui
2003 et sous-chef d’état-major opérations
engagements opérationnels auxquels génie direct. Toute la question est donc de
du Poste de commandement interarmées
les unités du génie, de la section au disposer d’un appui adapté et suffisant
de théâtre de la force LICORNE en
bataillon, ont participé, notamment ces dès l’engagement des unités quel que soit
République de Côte d’Ivoire en 2005.
dix dernières années. Il s’agit donc ici, le théâtre considéré. Cette question reste
de dégager des marges d’efficacité pour entière à chaque génération de forces.
un emploi optimal des unités du génie
en accompagnement de la force Être présent dès le lancement du proces-
déployée sur un théâtre d’opérations. sus de génération de forces en faisant
valoir les effets recherchés et non exclu-
sivement les moyens qui vont les pro-
*
** duire, fournir un appui génie qui soit
significatif d’emblée mais évolutif et en
Depuis près de 30 ans, les unités du prévoir un commandement centralisé
génie, quels que soient leur nature et permettant les bascules d’efforts et de
leur volume, sont omniprésentes dans le priorités par une mise en œuvre décon-
paysage tactique des forces engagées centrée des moyens pourraient être trois
en opérations extérieures. S’il en était pistes de progrès réalistes et réalisables
besoin, la preuve pourrait être donnée à coût limité.

-7-
SAPEUR

PRIMAUTÉ DES EFFETS À PRO- À ce stade, deux logiques s’affrontent : blée un appui approprié aux effets
DUIRE DANS LE PROCESSUS DE recherchés sur le terrain ou sur l’adver-
- une logique capacitaire, qui à partir
saire selon un emploi souple mais cen-
GÉNÉRATION DE FORCES d’effets à produire sur le terrain iden-
tralisé, la mise en œuvre étant le plus
tifie les capacités ad hoc et les
La gestion de crise, sous toutes ses souvent et logiquement déconcentrée.
moyens associés pour remplir la
formes et jusqu’à son paroxysme des- Cette conception de l’emploi du génie
mission. L’appui génie ainsi défini
tructeur s’il ne peut être évité, paraît s’appuie sur une structure de comman-
correspond alors aux besoins de la
être le cadre des opérations militaires dement adaptable, sans toutefois jamais
force et participe pleinement à la fusionner les niveaux de conception et
futures jusqu’à un horizon visible. cohérence de la manœuvre ;
L’expérience de l’armée française, et de mise en œuvre.
notamment des forces terrestres, est - à cette logique capacitaire s’oppose
grande et reconnue en la matière, parmi une logique de moyens, elle-même
DU COMMANDEMENT DU GÉNIE
ses partenaires alliés. dépendante de contraintes budgé-
taires fortes qui aujourd’hui dimen- EN OPÉRATIONS, OU L’ÉTERNELLE
Parmi les caractéristiques majeures de sionnent les contingents d’interven- REMISE EN CAUSE DU COMMAN-
ces opérations, deux ont un impact tion extérieure. DEMENT CENTRALISÉ DE L’ACTION
important en terme d’appui génie avec
des effets parfois antagonistes. Il s’agit Le processus de génération de forces
Le commandement du génie dans toute
en premier lieu de la réversibilité des reste alors un compromis entre un
volume de moyens à ne pas dépasser et opération doit impérativement obéir à des
situations tactiques. Elle impose aux
forces terrestres une grande réactivité et des capacités opérationnelles les plus principes intangibles, que des querelles
par conséquent de disposer en perma- cohérentes et complètes possibles pour de personnes ou des mésententes chro-
nence de la capacité de rétablir la liberté remplir avec succès la mission dans niques ne peuvent remettre en cause au
de mouvement pour les unités de com- laquelle la France s’engage. C’est pour- risque de rompre la cohérence du disposi-
bat et les flux logistiques, mais égale- quoi, il est indispensable que le " com- tif génie et de l’appui qu’il doit fournir.
ment la capacité de réorganiser rapide- mandement génie " participe au proces-
ment le déploiement de la force. En sus de génération de forces et à l’élabo- Les principes définis dans le GEN 100,
second lieu, ces opérations s’inscrivent ration de la manœuvre par le biais de la sont plus que jamais d’actualité, d’au-
toutes dans la durée. Les conséquences MEDO, au même titre que cela est tant qu’ils ont été largement éprouvés
sont alors mesurables en termes de can- demandé au DL génie de BIA lors des aussi bien au Kosovo qu’en République
tonnements, d’infrastructures et de sou- exercices AURIGE. de Côte d’Ivoire, pour ne retenir que les
tien au stationnement. deux dernières opérations d’importance
Aujourd’hui, l’optimisme peut être de mise en volume de forces déployées. Dans
Or, un constat s’impose à l’étude des en raison de la dynamique capacitaire l’opération TRIDENT, le choix a été fait
opérations récentes ou en cours, au qui se met en place au sein des armées. d’engager d’emblée des moyens génie
regard de cette exigence opérationnelle conséquents. En revanche, pour l’opéra-
croissante : les moyens génie sont tou- La manœuvre génie doit donc permettre tion LICORNE, l’appui génie s’est limité à
jours comptés. L’emploi du génie doit à la fois de concentrer les capacités et de une compagnie de combat renforcée
donc être conçu globalement avec un basculer rapidement les efforts par le d’une section organisation du terrain.
effort capacitaire initial selon des effets à biais d’un commandement unique et
produire clairement identifiés, cet effort d’un emploi centralisé des moyens. En La continuité des douze mandats du
capacitaire génie variant logiquement en effet, l’objectif est bien de fournir d’em- bataillon du génie de la brigade multina-
fonction de l’évolution de l’opération
dans le temps. Malheureusement, hor-
mis le cas des crises majeures (Kosovo),
la tendance a longtemps été de choisir
sur catalogue des moyens (perversité du
principe de modularité), avant de raison-
ner en termes effets à obtenir sur le ter-
rain (pour quoi faire ?). De façon plus
générale la fonction agencement de l’es-
pace terrestre (AGESTER) est le plus
souvent évoquée sous l’angle de l’articu-
lation des moyens, avant même que soit
abordé le niveau d’emploi (qui com-
mande ?). Si l’idée d’un appui génie n’est
pas discutée, c’est bien à ces deux ques-
tions fondamentales qu’il convient de
répondre dès la génération de force, en
tenant compte bien entendu des
contraintes fixées par notre employeur
politique et en toute connaissance des
conséquences des choix à effectuer. Schéma organisation du commandement génie dans le cas d’un BATGEN

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SAPEUR

tionale Nord de la KFOR (1999-2003) et


l’adaptation terrain des principes édictés
ont permis d’identifier les structures de
commandement du génie souhaitables
et leur évolution au cours d’une opéra-
tion. L’organisation du commandement
doit par conséquent rester souple et
représentative du volume de moyens
déployés, avec un positionnement impé-
ratif au niveau d’emploi le plus haut
dans l’état-major considéré. On peut
citer deux configurations, qui d’expé-
rience, concourent à l’efficacité opéra-
tionnelle en jouant sur la complémenta-
rité des moyens.

1. Tous les moyens du génie, et plus lar-


gement de la fonction AGESTER, sont
regroupés sous un commandement
unique génie (COMGENIE) qui dispose
des structures pour valider l’emploi,
conduire la mise en œuvre des moyens,
assurer la gestion du personnel et le
soutien des matériels. Les moyens don-
nés en renforcement et dédiés à une Schéma organisation du commandement génie dans le cas d’une UE GEN
mission particulière sont alors placés
sous contrôle tactique (TACON, voire
mis en place, soit directement au niveau UNE CAPACITÉ D’APPUI GÉNIE
sous TACOM) du commandant de la for-
mation qui assure la coordination géné- de la cellule G3-2D de l’état-major (bri- COHÉRENTE DANS LA CONTINUITÉ
rale de l’action génie sur le théâtre. gade, task force ou PCIAT) dans le cas où MÊME À PETITE ÉCHELLE
l’appui génie se limite à une compagnie
2. Lorsque le niveau de responsabilité du renforcée voire à des sections spéciali- Considérant, nous l’avons vu, qu’il ne
COMGENIE n’est plus représenté en rai- peut y avoir d’opérations sans un appui
sées (cas de la Bosnie). À cet égard, il est
son de la disparition du bataillon du génie, la Force doit bénéficier de cet
indispensable de positionner au sein des appui dans tout le spectre de sa mission,
génie, la cohérence opérationnelle d’em-
GTIA, un DL ou une " cellule de mise en soit en action d’ensemble ou en appui
ploi, voire de mise en œuvre, est alors
centralisée soit au niveau d’un détache- œuvre " qui de fait sont aux ordres du direct des GTIA. Or, les moyens génie
ment de liaison et de mise en œuvre commandant d’unité génie voire directe- étant limités, les GTIA ne peuvent se voir
(DLMO) dans le cas où un DETGEN est ment aux ordres de la cellule G3-2D. détacher en permanence des moyens de
combat. En revanche, parce que l’emploi
centralisé des moyens permet de varian-
ter les efforts et de faire face à un besoin
inopiné, les capacités existantes doivent
être détachées et mis sous contrôle tac-
tique (TACON) du GTIA dès lors que la
mission l’exige. Le commandant d’unité
ou le chef de section a alors toute lati-
tude pour mettre en œuvre ses moyens
en fonction des effets souhaités par le
commandant du GTIA. Cette articulation
des moyens génie peut aller jusqu’à dis-
socier le groupe de combat en équipes
pour des actions spécifiques comme les
fouilles par exemple ou le combat en
zone urbaine. On mesure ici toute l’im-
portance de la formation de métier et de
l’entraînement interarmes pour les
jeunes cadres et caporaux, qui sur le ter-
rain peuvent être investis de missions
délicates dans une relative autonomie.
On mesure aussi tout l’intérêt pour le
génie de disposer d’un système de com-
Schéma organisation du commandement génie dans le cas d’un DETGEN munication performant.

-9-
SAPEUR

Cette cohérence de l’appui génie s’ex- Enfin, la capacité d’appui génie doit qui fixeront in fine le format de la Force.
prime également à travers le renforce- suivre l’évolution de la mission ou de Toutefois, cette réalité ne doit pas
ment de la capacité " organisation du l’état de la Force (volume, (re) déploie- estomper la nécessité de disposer dès le
terrain-travaux " et " aide au déploie- ment) et non pas être en décalage com- début de crise, des capacités en effets et
ment " des compagnies d’appui des plet avec l’action envisagée. Cette évolu-
en volume suffisantes pour marquer son
RGBIA, et le maintien de capacités certes tion ne peut être strictement homothé-
ascendant sur l’adversaire et préserver
échantillonnaires mais indispensables à tique et indexée sur le volume global de
l’appui d’une Force d’intervention, et la Force. À cet égard, il faut logiquement sa liberté d’action.
dont le génie lui-même ne doit pas consentir un volume significatif de
remettre en cause la nécessité. Ce sont moyens lors de l’entrée sur le théâtre et Dans ce cadre, seule une véritable
la section équipement montagne du 2e lors du retrait de la force, en tolérant une manœuvre intégrée du génie permet de
REG et les sections spécialisées équipe- fois la phase d’installation terminée un répondre aux exigences opérationnelles
ment plage et équipement piste du 6e volume minimum strictement néces- qui vont toujours croissantes avec des
RG et du 17e RGP. Ces capacités doivent saire mais cohérent pour l’appui des moyens toujours comptés. Il faut pour
non seulement être pérennisées mais groupements tactiques. cela, être présent au moment où tout se
elles doivent surtout l’être en simple décide, voire en amont ; mettre en place
qualification, peut-être au détriment CONCLUSION un système de commandement génie
d’autres capacités plus facilement unique, adapté et représentatif du
exploitables en double qualification Considérant la gestion de crise dans un
niveau d’emploi considéré ; et surtout
comme le franchissement. En effet, en cadre national ou en coalition, les condi-
cas de besoin opérationnel plus impor- maintenir les capacités génie dans un
tions d’engagement d’une force opéra-
tant, elles pourraient dériver au sein de tionnelle resteront toujours dépen- spectre large en recherchant l’aptitude à
chaque corps des sous-ensembles spé- dantes de la part que la France souhaite agir sur tous les terrains (y compris la
cialisés qui seraient alors employés en prendre dans la résolution de la crise, et zone urbaine), la robustesse des équipe-
action d’ensemble. soumises aux contraintes budgétaires ments et la suffisance technologique.

- 10 -
SAPEUR

Colonel LES ARMES À LÉTALITÉ RÉDUITE


Denis
PARMENTIER
APPLIQUÉES À LA CONTRE-MOBILITÉ

Non-lethal, hardware dedicated weapon systems seem to be well adapted tools for
Admis en 1980 à l’école spéciale peace keeping operations, and they could constitute a main axis of development.
militaire de Saint-Cyr, le colonel
Parmentier choisit l’arme du génie They provide new and non-conventional capabilities to armed forces, especially in
et effectue son stage d’application counter-mobility actions.
à l’ESAG (1982-1983).
Nevertheless, the efficiency and even the concept of these weapons are subject to
Sa carrière d’officier se partage debates. There remain a lot of controversies, and regarding to legal, political, military
entre des affectations en régiment and moral aspects, this is a very sensible domain.
ou en administration centrale.
Therefore, a conceptual and standardizing work is necessary before any further deve-
Il a notamment servi au 11 RG et
e lopment.
au 6 e RG comme CDS et CDU. Il a
été chef du BOI du 34 e RG. En 2001, l’état-major de l’armée de terre réactif (SYCOMORE) qui permettra, avec
rédigeait et validait un nouveau concept un nombre réduit d'opérateurs, de sur-
Promu colonel en 2001, il a de contre-mobilité1. L’élaboration de ce veiller, contrôler, interdire des itinéraires
commandé, de 2002 à 2004, le document tenait compte des deux évolu- d'accès et des compartiments de terrain,
13e régiment du génie à EPERNAY tions majeures suivantes : en particulier en zone urbaine, face à des
puis au VALDAHON. Pendant véhicules ou à du personnel débarqué. Il
cette période, il a pris le comman- • d’une part, la mise en œuvre des
s'intégrera dans l'architecture générale
dement du BATFRA 6 au moyens relevant du domaine clas-
du système de contrôle de zone futur. Le
KOSOVO. sique de la « contre-mobilité », c’est-
premier maillon de cette chaîne devait
à-dire la constitution d’obstacles,
être constitué par le système HPD F4.
Il a également servi au bureau de devient de plus en plus contrainte
conception des systèmes de par la nature des engagements dans
Or, d’arbitrages budgétaires en indéci-
forces de l’EMAT, une première lesquels il s’agit plus de maîtriser la
sions structurelles, il devient de moins
fois de 1998 à 2002 en tant que violence que de vaincre un ennemi.
en moins probable de pouvoir lancer et
chargé de la fonction « Agencement Cependant, il est clair que, sur le
mener à terme un programme d’arme-
de l’espace terrestre », puis de long terme, ce domaine reste perti-
ment concernant des mines et leur sys-
2004 à 2005 en tant qu’adjoint et nent et justifie la poursuite des tra-
tème de pose. Volens nolens, l’armée de
officier en charge de la cohérence vaux engagés, qui doivent cepen-
terre risque à moyen terme de perdre sa
opérationnelle du système de dant tenir compte des contraintes
capacité de contre-mobilité.
forces « Maîtrise du milieu aéro- juridiques et d'opinions publiques,
terrestre ». • d’autre part, la technique offre de Cependant, aujourd’hui, les évolutions
plus en plus de possibilités pour en matière de technologie permettent
Ingénieur de l’école nationale des satisfaire de multiples besoins opé- d’envisager des développements capaci-
ponts et chaussées, il a suivi la rationnels, dont ceux de contre- taires à court et moyen terme, en parti-
108 e promotion du cours supé- mobilité, ce qui élargit singulière- culier dans le domaine de la contre-
rieur d'état-major et la 3 e promo- ment le spectre de mise en œuvre mobilité, tout en s’affranchissant de
tion du CID. des activités correspondantes et des l’emploi des mines antichars et des
techniques auxquelles elle peut faire destructions irréversibles des infrastruc-
Depuis l’été 2005, il occupe les tures. En effet, si les armes à létalité
appel, permettant ainsi de satisfaire
fonctions de chef du Bureau réduite ont trouvé une application régle-
les nouveaux besoins générés par
APPUIS au sein de la Direction du mentaire, à défaut d’être consensuelle,
les évolutions des engagements.
Personnel Militaire de l’armée de dans les armées, leur application dans le
Terre. Le nouveau concept de contre-mobilité domaine de la contre-mobilité n’est tou-
se fonde, d'une part sur l'optimisation jours pas envisagée, or, elles offrent des
des capacités existantes par la gradua- potentialités importantes qui devraient
tion des effets2 et d’autre part sur le attirer l’attention des sapeurs dans le
développement de deux aptitudes, la cadre du combat futur des forces
réversibilité et la réactivité. Il sous-tend terrestres.
le projet de système de contre-mobilité

1) Concept de contre-mobilité XXI n° 46/DEF/EMAT/BCSF/AET du 02/02/2001


2) La capacité de graduer les effets permet d'accroître les possibilités d'emploi d'un système de
combat et, en conséquence, la liberté d'action du commandant de la force.

- 11 -
SAPEUR

DE QUOI S’AGIT-IL ? conduites à bord de véhicules chargés sence de dommages occasionnés aux
d’explosifs et aux risques de méprise, le équipements visés. On admettra cepen-
RECHERCHE D’UNE DÉFINITION Pentagone vient de retenir comme dant quelques exceptions dictées par le
besoin prioritaire la capacité d’arrêter un bon sens. Par exemple, l’emploi d’un
La notion de létalité ou de mort ren- véhicule sans mettre en cause la vie du projecteur de micro-ondes destiné à
voyant à l’homme, il s’agit tout d’abord conducteur et des tiers. neutraliser le dispositif électronique de
interrogé sur la définition d’armes à léta- mise à feu d’un individu soupçonné de
lité réduite. Le Chef d’État-Major des Les expressions « Armes à Effets pouvoir commettre une attaque suicide.
Contrôlés » ou « Armes à Effets Colla- Les ALRM n’incluent pas non plus les
Armées a diffusé, en date du 27 janvier
téraux Réduits » sont parfois utilisées opérations psychologiques, ni celles
2005, un premier concept d’emploi
pour définir ce type d’équipements ; liées à l’information qui revêtent une
applicable par l’ensemble de nos forces
elles trouvent un écho favorable auprès connotation immatérielle et agissent
armées. Ce document donne la défini-
des États-majors. Je me tiendrai cepen- dans un champ particulier.
tion suivante :
dant à l’expression « Armes à Létalité
Les armes à létalité réduite sont des Réduite visant le Matériel » que, dans En revanche, certains moyens NBC peu-
équipements spécifiquement conçus l’intention d’alléger la lecture de cet vent entrer dans cette catégorisation
et mis au point pour mettre hors de article, je désignerai sous le sigle ALRM. dans les limites autorisées par les lois et
combat ou repousser les personnes, et traités en vigueur : en effet, certaines
qui, dans les conditions normales pré- Il s’agit bien de moyens qui, par la spéci- ALRM relèvent de processus chimiques,
vues pour leur emploi, présentent une ficité de leur conception, ne sont prévus les polymères par exemple, d’autres de
faible probabilité de provoquer une que pour réduire ou neutraliser les capa- processus biologiques.
issue fatale, des blessures graves ou cités des équipements et des matériels
des lésions permanentes. de l’adversaire, ainsi que la disponibilité
des infrastructures en s’efforçant de POURQUOI DES ALRM ?
Ce document précise que les matériels limiter les dommages indésirables,
qui permettraient de limiter les dom- en particulier envers les personnes. UN ENVIRONNEMENT STRATÉGIQUE
mages sur l’environnement et tous les L’emploi de ces armements ne peut MOUVANT
moyens qui visent à mettre hors d’état exclure totalement le risque de létalité,
les matériels sont à exclure de cette notamment du fait d’un enchaînement Le nouvel environnement géostraté-
catégorie, sauf lorsqu’ils sont employés imprévisible de réactions ou d’une utili- gique conduit à repenser l’usage de la
dans le but de réduire par effets indirects sation non conforme. Il convient d’ad- force. Il ne s’agit plus de démoraliser un
les dommages aux personnes. mettre également à ce stade de la ennemi bien identifié et de le battre par
réflexion que certaines des technologies la destruction de ses forces armées et
Cette définition est assez proche de celle qui seraient développées à cette fin puis- de son potentiel économique. En effet,
adoptée par l’OTAN, à ceci près que cette sent trouver, avec des caractéristiques sans pouvoir être exclu, l’engagement
dernière utilise l’expression « non létales », ou des réglages différents, des applica- de nos forces armées dans un conflit
au lieu de « létalité réduite », tout en recon- tions létales et capables de détruire leurs majeur est communément considéré
naissant les risques de létalité et qu’elle cibles. En tout état de cause, il s’agit bien comme peu probable pour les vingt à
admet explicitement que ces armes puis- d’armes dont l’emploi ne peut être envi- trente prochaines années. En revanche,
sent avoir une finalité anti-matériels « Les sagé que dans le cadre plus général de la gestion de crises de diverses natures
armes non létales (ANL) sont des armes l’usage de la force. constituera très vraisemblablement l’es-
spécifiquement conçues et mises au point sentiel de notre activité opérationnelle
pour mettre hors de combat ou repousser PÉRIMÈTRE sur cette période.
le personnel, avec une faible probabilité
d’issue fatale ou de lésion permanente ou Le nombre important de systèmes Dans la plupart des cas, l’engagement
mettre hors d’état le matériel, avec un d’armes, de protection ou d’information de nos forces a pour objet la séparation
minimum de dommages non intentionnels qui, en apparence, satisfont à la défini- de groupes hostiles ou l’imposition
ou d’incidences sur l’environnement ». tion retenue nécessite d’en préciser le d’une volonté politique, en cherchant à
périmètre. limiter l’emploi de la force au plus bas
Nos forces étant le plus souvent appe- niveau compatible avec le succès de la
lées à intervenir en milieu urbain, face à Dans la typologie des ALRM, ne peuvent mission et en évitant, autant que faire se
des éléments hostiles pouvant disposer être retenues comme telles que celles peut, d’endommager gravement les
d’équipements diversifiés et innovants, qui, en dehors de leurs effets indirects infrastructures dont le bon fonctionne-
il paraît justifié d’envisager de les doter sur l’homme, agissent sur les capacités ment est indispensable au retour à la
d’armements capables de neutraliser ou physiques des matériels et des infra- paix. Le développement de l’urbanisa-
de détruire certains moyens adverses structures. En conséquence, les moyens tion, avec une fréquente imbrication,
tout en limitant à la fois les pertes de guerre électronique et en particulier délibérée ou non, des installations mili-
humaines, en particulier dans la popula- les moyens d’agression (intrusion, taires et civiles, conduit également à
tion, et les dégradations des infrastruc- brouillage…) ne peuvent pas être imaginer de nouveaux modes d’action.
tures dont la disponibilité est indispen- normalement considérés comme des
sable au retour à la paix. On observe ALRM. Les effets recherchés par ce type La logique de choix des options mili-
d’ailleurs que, confronté en Irak à la mul- de moyens n’ont en effet rien à voir avec taires en soutien des actions politiques
tiplication des attaques suicides la notion de non-létalité, malgré l’ab- de résolution des crises et des conflits

- 12 -
SAPEUR

doit désormais prendre en compte les


données suivantes :
• L’emploi aussi maîtrisé, gradué et
mesuré que possible de la force afin
de limiter les pertes humaines chez
les différents acteurs du conflit ou de
la crise. En effet, assez souvent, l’ad-
versaire ne sera plus une nation
mais une partie de la classe diri-
geante, un groupe actif, des parties
antagonistes de la population…
• La présence des populations : sur tout
théâtre d’opérations, nos forces ont
à faire face à la présence de non-
combattants (populations civiles,
ONG), ce qui interdit l’acceptation de
ÉVALUATION DU BESOIN OPÉRA- trise de l’ensemble des effets des armes.
TIONNEL En effet, la capacité de réponse à la gra-
pertes collatérales. Simultanément,
dation des formes d’engagement, de la
tout ou partie des populations tend à
Ces armes doivent permettre de neutra- crise au conflit, nécessite l’obtention
s’ériger en acteur des crises et des
liser des matériels ou des infrastructures d’effets contrôlés (désorganiser, neutra-
conflits et n’hésite plus à rechercher
pendant une période limitée, ou éven- liser, détruire). Enfin, la décision d'em-
l’affrontement avec nos forces, ou à ploi d'un moyen d’action ne repose plus
tuellement de les détruire, tout en ayant
provoquer des bavures. La notion de uniquement sur l'efficacité des effets
également des effets réduits, et si pos-
ligne de front tend alors à disparaître. directs obtenus sur la cible, mais égale-
sible réversibles, sur les personnes
• La nécessité de la reconstruction : comme sur l’environnement des cibles ment sur la maîtrise des effets indirects
l’effet final recherché des engage- visées. Cette réflexion s’inscrit dans une ou « collatéraux » au sens large (effets
ments vise généralement à faire plier vision de conduite d’opérations visant à non planifiés et non intentionnels, mais
la volonté adverse, tout en se gardant obtenir des effets politico-militaires défi- aussi effets environnementaux), aux-
la possibilité de rétablir au plus vite nis, théorisée par le concept d’ " opéra- quels les opinions publiques, acteurs
les conditions permettant la restaura- tions basées sur les effets " (EBO). importants de la gestion de crise, sont
tion d’une vie économique, sociale et particulièrement sensibles.
administrative normale. Les atteintes Selon la situation opérationnelle rencon-
aux infrastructures devront donc être trée, le choix entre la neutralisation ou la EMPLOI DES ALRM
aussi limitées que possible. destruction d’une cible pourra répondre
à l’un ou plusieurs des critères suivants : Les leçons apprises des crises et des
• Le facteur temps : les méthodes
• besoin de donner un avertissement, opérations récentes, leur nature, leur
modernes de conduite des opéra-
environnement médiatique, l’évolution
tions militaires en ont considérable- • besoin d’immobiliser des mobiles de la sensibilité des opinions publiques
ment accéléré le tempo. La phase de terrestres ou maritimes, occidentales montrent l’intérêt de doter
stabilisation et celle de reconstruc-
• auto-protection de nos forces, les forces d’armes non létales, notam-
tion interviennent donc très vite
ment dans le cadre du contrôle urbain.
après les combats ; elles sont même • volonté de préserver des infrastruc- Toujours plus engagées dans la durée et
souvent imbriquées. La rapidité de tures en vue de la sortie de crise, au contact de la réalité complexe des
remise en route des installations milieux humain et physique, particuliè-
• risques d’effets collatéraux inaccep-
devient alors un facteur déterminant rement dans des conflits asymétriques,
tables,
pour gagner la confiance des popula- s’engageant parfois au sein d’alliances
tions, lorsqu’il en est encore temps. • niveau de protection de la cible,
internationales, les armées doivent pou-
• cible contenant des produits dangereux. voir répondre à tout type de situation
Les caractéristiques des armes doivent relevant du concept de juste suffisance.
répondre à ces nouvelles exigences. La Les cibles doivent pouvoir être choisies Dépassant le seul contrôle des foules,
diversité des menaces implique par en fonction de l'effet politico-militaire les ALRM ouvrent des horizons nou-
ailleurs une grande variété de moyens recherché, ce qui justifie un premier veaux dans la résolution des engage-
de riposte. Dans ce contexte, l’emploi besoin de diversification des effets des ments futurs, notamment lorsqu’ils don-
d’armes classiques, létales et explo- armes. Les impératifs tant logistiques nent lieu à des actions relevant essen-
sives, comme les mines ou les charges qu’opérationnels amènent ensuite natu- tiellement de la maîtrise de la violence.
formées, peut dans certains cas se révé- rellement à favoriser une aussi grande
ler inadapté et disproportionné au polyvalence que possible de ces armes. Ainsi, dans le cadre d’opérations comme
regard des missions à accomplir. C’est la Côte d’Ivoire ou la Bosnie, quels que
pourquoi des Armes à Létalité Réduite Par ailleurs, l’environnement politique, soient le type d’opération et le mode
visant le Matériel (ALRM) leur seront médiatique, et juridique de ces actions opératoire retenu initialement, la force
alors préférées. rend de plus en plus nécessaire la maî- peut être confrontée à une foule, par

- 13 -
SAPEUR

définition versatile. Après avoir imposé de décision, que sur des objectifs Elles constituent une capacité, parfois
un cessez-le-feu et afin d’éviter les tactiques comme, par exemple, des indispensable, qui contribue à diversifier
affrontements interethniques, il s’agit de axes de pénétration ou des colonnes la gamme des moyens mis en œuvre par
contrôler ou sécuriser une zone (effet sur de véhicules. les forces, et à compléter le vide existant
le terrain), de s’interposer entre deux entre le « tout ou rien » d’une action qui
- Pour l’auto-protection de nos forces,
factions ethniques (effet sur la popula- pourrait paraître dans certaines opéra-
comme la protection de nos installa-
tion, les milices) tout en assurant sa tions disproportionnée ou inadaptée. La
tions et infrastructures en opérations
propre sécurité et sauvegarde (effet sur conception, comme l’utilisation de ces
les amis). extérieures.
armes, s’inscrivent pleinement dans le
cadre d’une opération basée sur les effets
Dans le cadre d’une opération de guerre3, L’emploi des ALRM peut concerner trois
et ne doivent être pensées qu’en complé-
comme le conflit irakien, il s’agit de grandes catégories d’objectifs : des
mentarité des moyens classiques qui
mener des actions de combat intensives infrastructures (usines électriques,
garantissent la supériorité opération-
parfois en zone urbanisée tout en limitant centres d’émission radioélectrique…),
nelle. Cependant, il est à noter que l’effet
les dommages collatéraux. Enfin, lors des des matériels militaires et particulière-
maximum des ALR et ALRM est obtenu
opérations aériennes au Kosovo, il s’agis- ment les véhicules de combat (blindés,
lorsque celles-ci sont employées de façon
sait, avant de lancer une opération ter- aéronefs au sol, systèmes d’armes), et
« coordonnée » avec des armes classiques.
restre, d’entamer la force morale de l’ad- enfin des véhicules de gamme commer-
versaire, et plus particulièrement de ses ciale (bus, voitures).
Cependant, même si l’utilisation des
dirigeants, par la destruction ou la neu- ALR-ALRM ne peut exclure des pertes
tralisation d’objectifs politiques (bâti- Grâce à la réversibilité de leurs effets ou
humaines, leur emploi reste moins létal
ments administratifs), économiques (pro- à la limitation de leur pouvoir destructif,
que les armes « classiques » employées
duction d’énergie, ponts) et militaires les ALRM peuvent grandement contri-
dans les mêmes conditions et sur le
(réseaux de télécommunications). buer au succès tactique en maintenant
même type d’objectifs. Il s’agit donc
ou ramenant la violence au plus bas
d’accepter le risque avec un niveau de
L’emploi des ALRM paraît pouvoir être niveau possible. En limitant l’effet per-
létalité contrôlé par rapport aux armes
envisagé : manent des destructions endurées par
existantes.
l’adversaire, ou l’ami sur le territoire
• Dans tous les types d’engagement :
duquel on intervient, elles concourent à
en coercition, pour neutraliser tem-
une sortie de crise plus rapide LES ASPECTS JURIDIQUES DU
porairement, ou si nécessaire plus
durablement, des infrastructures,
DÉVELOPPEMENT DES ALR-ALRM4
barrer des axes ou des points de pas- COMMENT UTILISER LES ALRM ? Les armes non létales constituent dans
sage. Dans le cadre de la maîtrise de
les faits une nouvelle génération d’arme-
la violence, et des actions de basse
PRINCIPES D’EMPLOI OPÉRATIONNEL ments que ne régit spécifiquement
intensité, pour contrer la mobilité
des foules. Dans le cadre d’opéra-
DES ALR ET ALRM aucun texte de droit ; il n’existe aucune
définition commune internationale des
tions de contrôle d’embargo pour
Il n’existe pas d’opérations non létales. ALR, lesquelles ne constituent pas, au
lutter contre les trafics et l’immigra-
L’emploi de la force armée a pour objet regard du droit international, une caté-
tion illicites.
d’exercer un effet décisif sur l’adversaire gorie d’armements distincte. Les États et
• Sur l’ensemble de la zone d’opéra- pour détruire, réduire ou neutraliser ses différentes organisations internationales
tion, aussi bien sur des objectifs capacités de manœuvre. Dans ce cadre, ont ainsi développé leur propre politique
stratégiques par la neutralisation l’utilisation des seules ALR ne peut donc vis-à-vis de ces armes et en donnent leur
d’une infrastructure ou d’un centre pas correspondre à un principe d’emploi. propre définition. L’OTAN par exemple

3) Au sens de l’IM 1000


4) Cette analyse vaut pour les ALR comme pour les ALRM.

- 14 -
SAPEUR

déclare que « la recherche et le dévelop- MEDIA ET ARMES A LÉTALITÉ jours possible, il peut être nécessaire
pement, l’acquisition et l’emploi d’armes RÉDUITE d’utiliser des armes de guerre pour assu-
non létales sont à tout moment rer la sécurité de nos forces, sans oublier
conformes aux traités, aux conventions L’engagement des forces armées occi- le risque de provocation ; face à des bles-
et au droit international applicables, en dentales se déroule désormais en temps sures graves ou des pertes mortelles,
particulier le droit des conflits armés, réel sous le regard de l’opinion publique
l’adversaire pourrait considérer qu’il y a
ainsi qu’à la législation nationale et aux internationale. Les scènes les plus vio-
rupture des règles du jeu, tandis que les
règles d’engagement agréées ». En lentes et les plus sensibles peuvent être
2001, la France a adopté la définition projetées à de nombreuses reprises afin médias internationaux estimeraient
donnée par l’OTAN en 1999, en introdui- que nul ne l’ignore. devoir dénoncer ce qu’ils jugeraient
sant la notion de létalité réduite5. comme une faute grave de notre part.
Qu’elle soit relayée ou façonnée par les
Cependant, les armes non létales peu- médias, l’opinion publique pèse sur le Il y a donc lieu de bannir l’expression
vent être juridiquement rattachées aux déroulement des conflits au point de « armes non létales » et de faire perce-
textes nationaux, communautaires et présenter un pouvoir de dénonciation voir les armes à létalité réduite comme
internationaux réglementant les armes d’actes jugés immoraux mais aussi de
un des moyens, à côté des armes de pré-
conventionnelles et les armes chimiques (dé-) légitimation de décisions gouver-
cision en particulier, de réduire les
et biologiques. L’usage des armes non nementales sans que le dossier à charge
soit toujours convenablement instruit ; pertes humaines et de minimiser les
létales doit en effet se conformer aux
l’extrême judiciarisation dont font l’objet effets collatéraux indésirables, sans que
dispositions du droit international
humanitaire et du droit des conflits les conflits armés et les interventions cela puisse faire douter de notre déter-
armés, et il est possible d’étendre aux militaires ajoutent d’ailleurs à la diffi- mination.
ALR les conventions sur les armes tradi- culté de l’exercice. La couverture média-
tionnelles, chimiques et biologiques. tique des opérations militaires condi-
tionne donc en partie leur déroulement, POUR CONCLURE
Cependant, le problème commun de ces elle est de nature à compromettre la
textes réside dans leur imprécision : ils marge de manœuvre des décideurs poli- En dépit de la rapidité et de la nature des
portent tous interdiction totale de déve- tiques et à introduire des changements changements qui affectent tous les types
loppement et d’emploi d’agents biolo- dans les modes d’action des forces et d'engagement dans les domaines géo-
giques et chimiques qui ne sont pas des- leurs armements. Les exemples sont politique, éthique, juridique, opération-
nombreux. Sur le plan militaire, on nel et technique, la contre-mobilité reste
tinés à une utilisation pacifique, et ce
citera l’interdiction des mines anti-per-
sans exception. Mais dans aucun de ces un besoin opérationnel permanent des
sonnel, celle des obus à uranium appau-
textes n’est établie la distinction entre le forces.
vri ou encore celle des lasers d’aveugle-
caractère létal et le caractère non létal
ment. Face à des images de violence, les
des armes concernées. Les intentions Il ne serait pas raisonnable de continuer
réactions des opinions publiques sont
finales des ALR et des armes chimiques à penser et donc à baser notre doctrine
d’autant plus vives qu’il s’agit d’opéra-
et biologiques classiques sont très diffi- sur d’improbables financements d’équi-
tions destinées à ramener la paix ou à
ciles à différencier tant les produits utili-
protéger les populations. Ainsi, récem- pements dont ni les décideurs politiques
sés et les processus mis en œuvre sont ment, lors des opérations de Côte ni une partie des chefs militaires n’envi-
similaires. Ainsi, selon l’interprétation d’Ivoire, la presse française s’étonna de
faite de ces textes, le développement et sagent plus l’emploi face aux contraintes
l’usage d’armes à feu par nos forces,
l’emploi d’ALR est légal ou non, puisqu’il diverses et variées.
tandis que ceux qui s’employaient à
n’est pas explicitement interdit d’utiliser gêner leur mission prenaient à témoin
des moyens chimiques ou biologiques si En revanche, il nous appartient d’arrêter
l’opinion internationale.
les fins sont pacifiques. une stratégie générique qui soit claire-
L’apparition d’armes à létalité réduite ment orientée vers les moyens d’inter-
Le développement des armes non paraît donc de nature à répondre à l’at- vention au détriment de certains vec-
létales devrait conduire à court terme à tente de l’opinion, mais il faut se garder teurs conventionnels. Elle permettrait de
un réajustement de la législation inter- de laisser penser qu’il est toujours pos- mettre à la disposition de la force des
nationale. En tout état de cause, l’EMA sible d’employer les forces armées sans équipements contribuant à sa spécifi-
précise dans sa « Doctrine d’emploi des faire de victimes. L’emploi d’ALR, y com- cité, à savoir la capacité à adapter son
armes à létalité réduite », du 21 janvier pris celles visant les matériels, risque
2005 : « L’encadrement juridique de action aux circonstances, sans réduire le
d’être perçu par des observateurs ou les
l’usage des ALR en opérations est assuré parties en présence comme l’engage- conflit à une relation manichéenne ami-
au moyen des ROE (règles opération- ment moral de ne pas faire courir de ennemi. Le Génie se doit d’être présent
nelles d’engagement), élaborées au risques létaux à l’adversaire du moment. dans ce domaine exigeant en matière
cours de la planification ». Or, outre le fait qu’un accident est tou- d’innovation.

5) OTAN, « Politique de l’OTAN sur les armes non létales », Déclaration de presse, 13 octobre 1999.

- 15 -
SAPEUR

- 16 -
SAPEUR

Colonel LA MONTÉE EN PUISSANCE DU MÉCANISME


Gaëtan
PONCELIN COMMUNAUTAIRE DE PROTECTION CIVILE
de RAUCOURT
ET SES ENJEUX POUR LES ARMÉES

On October 2005, the North of Pakistan was hit by a strong earthquake. The
Monitoring and Information Centre (MIC) at the European Commission sent a French
Army officer on scene as deputy head of a coordination team to monitor the EU emer-
Le colonel Gaëtan PONCELIN de RAUCOURT
gency relief from Islamabad.
est le chef de corps du 3 e Groupement
d’incendie depuis l’été 2004.
On January 2006, an other French Army officer followed an EU training program in
order to take part in civil protection assistance interventions through the Community
Saint-cyrien de la promotion Grande
Mechanism.
Armée (1981-83), il sert successivement
aux 2 e et au 3 e Groupements d’incendie,
Issued in 2001 by the 2001/792/CE statement, this Mechanism is triggered on request
ainsi qu’au Bureau Opérations de la
in case of a disaster inside or outside the EU. Its main purpose is to send a rapid reac-
BSPP.
tion force composed of civilian and military experts, ready to commit on short notice
and to coordinate the different contributions.
Admis à l’EMSST en 1994, il est diplômé
de l’IEP de Paris.
In this context, the Army officers from the civil affairs component have an important
role to play. Thanks to their operational background and their culture in military and
Breveté de l’Enseignement militaire
civil protection, these officers may claim to be relevant counterparts for building up
supérieur (110 e promotion du CSEM et
the European civil defence and asserting the French leading role in the EU.
5 e promotion du CID), il sert successive-
ment au Centre de relations humaines
de l’armée de terre (CRH), au Bureau Le 8 octobre 2005, un séisme d’une ment par un officier français du COM-
études générales de la BSPP. magnitude de 7,6 sur l’échelle de Richter FORMISC (capitaine Bourgoin) et par un
frappe le nord du Pakistan. Le 9 octobre, fonctionnaire du MIC.
En 2003, il rejoint le 3 e Groupement d’in- la Commission européenne décide de
cendie en tant que commandant en déclencher le Mécanisme Communautaire Pendant 11 jours, du 9 au 20 octobre
second. de Protection civile. Étant à Islamabad inclus, les missions dévolues à cette
dans le cadre de l’aide bilatérale fran- cellule de coordination déployée sur le
çaise, je suis désigné coordonnateur terrain se résument aux points suivants :
européen adjoint de l’ensemble des
contributions fournies par les 25 États • évaluer les besoins d’assistance
membres sur le théâtre. complémentaire,

L’équipe de coordination, désignée par • informer quotidiennement les États


le Centre de suivi et d’information de la membres, via le MIC, de la situation
Commission européenne (MIC1), est ini- sur le terrain, des besoins supplé-
tialement composée d’un anglais (chef mentaires ou ultérieurs et de l’em-
de la coordination) et d’un français (moi- ploi des contributions des États
même). Elle sera renforcée ultérieure- membres,

1) MIC : Monitoring and Information Center (situé à Bruxelles)

- 17 -
SAPEUR

Suède, République tchèque, Belgique,


Bulgarie, Hongrie, Pologne, Italie et
France.

L'élément central du stage est une resti-


tution d'une journée sur le terrain, sur
un thème de sécurité civile : mission
d’évaluation dans un pays fictif, sous
l’égide UE, ponctuée d’incidents.

**
*

Ces deux missions réalisées par deux


officiers de la BSPP soulèvent une
question de fond : qu’est-ce que le
Mécanisme communautaire de protec-
tion civile et en quoi est-il susceptible de
concerner les armées ?
• fournir une assistance technique et Ce stage, financé par l'Union Européenne,
scientifique aux autorités pakista- constitue le premier volet d’un cycle de **
*
naises compétentes et aux services formation (« évaluation », « management
de la Commission, opérationnel », « coordination »), destiné à Le mécanisme communautaire de
former un réservoir d'experts en sécurité protection civile ne cesse de monter en
• coordonner l’assistance fournie par
les États membres participant au civile pour l'Union Européenne. Il dure six puissance et les forces armées y seront
mécanisme communautaire, jours pleins et est dispensé en langue de plus en plus étroitement associées.
anglaise par des spécialistes de l'action
• coordonner cette assistance avec humanitaire de la THW, des consultants Le mécanisme communautaire de
celle délivrée via l’ONU, internationaux en sécurité civile des protection civile a été établi en 2001 par la
• assurer la liaison entre les autorités Nations Unies ou de l’OTAN. décision 2001/792/CE du Conseil2 afin de
locales requérantes et les équipes faciliter la mobilisation des secours pro-
d’assistance provenant des États L'objet de cette formation est de donner venant des États membres en cas d’ur-
participant au mécanisme, les bases réglementaires et institution- gence majeure. Il couvre tous les États
nelles d'une mission d'évaluation man- membres, les pays candidats et les pays
• maintenir des relations étroites avec datée par le MIC, en coopération avec de l’EEE3. Il prévoit des interventions
la nation hôte, les autres organisations l'UN Office for Cooperation in Humani- aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de
internationales sur place et le chef tarian Affairs (UNOCHA). Elle est fonciè- l’Union européenne. Il ne s’agit pas d’un
de la Délégation de l’UE au Pakistan. rement orientée vers l'étude pratique de instrument financier ; le mécanisme est
cas et procède du travail de groupe. axé sur la mobilisation des moyens exis-
Le 23 janvier, je suis convié à Bruxelles tants (habituellement du matériel de
pour participer au RETEX sur cette Les participants à ce stage sont de hauts recherche et de sauvetage, des services
mission, en présence des représentants fonctionnaires civils ou militaires des médicaux, des hébergements tempo-
des différents États membres. Il en directions européennes de sécurité raires, des installations sanitaires, etc.)
ressort très nettement que l’équipe de civile. La représentation des pays de nécessaires pour sauver des vies et sou-
coordination sur le terrain doit être l'UE est la suivante : Allemagne, Irlande, lager les souffrances dans les premiers
significativement renforcée, en termes Slovénie, Chypre, Grèce, Pays-Bas, jours qui suivent une catastrophe.
d’effectifs et de soutien logistique, pour
lui permettre d’assumer efficacement
l’ensemble des missions qui lui sont
dévolues.

**
*

Du 20 au 27 janvier 2006, le colonel


MONARD, commandant le 1er Groupe-
ment d’incendie, participe à un stage
intitulé « European Union Community
Mechanism Induction » à la Teknisches
Hilfwerk (THW) Schule.

2) Décision 2001/792/CE du 23 octobre 2001


3) EEE : Espace Economique Européen

- 18 -
SAPEUR

suite à une demande d'aide envoyée


par le Centre de suivi et d'informa-
tion de l'UE (MIC) ;
• de resserrer les liens entre le méca-
nisme et les systèmes d'alerte
rapide, et de renforcer les capacités
d'analyse et de planification du MIC ;
• d'améliorer l'évaluation, sur le terrain,
des besoins spécifiques en matière
de protection civile et la capacité
de coordination du déploiement des
moyens communautaires de protection
civile, en totale coopération avec les
autres parties concernées ;
• d'améliorer l'accès aux ressources
À la suite de la tragédie du tsunami qui a secours européens en matière de protec- militaires de l'UE en cas d'opérations
frappé l'Asie du Sud en décembre 2004, tion civile et améliorer la capacité de de secours ;
le Conseil des ministres de l'UE a décidé l'UE dans ce domaine.
d'examiner les différents moyens de per- • d'octroyer un financement commu-
fectionner le mécanisme communautaire Cette communication proposait diffé- nautaire pour couvrir les coûts de
de protection civile et les possibilités de rentes mesures pouvant être immédiate- transport.
doter l'UE d'une force d'intervention ment mises en œuvre afin de perfection-
Le 26 janvier 2006, la Commission a
rapide en cas de catastrophe. Le Parlement ner le mécanisme et d’optimiser ses
adopté un nouvel ensemble de proposi-
européen a également appelé de ses effets sur le terrain. Il s’agit notamment :
tions visant à renforcer le mécanisme et
vœux la création d'un groupe d'unités
• d'améliorer le niveau de préparation à élargir le champ de l’action commu-
spécialisées dans la protection civile.
grâce à de nouvelles actions de for- nautaire.
Le 31 janvier 2005, la présidence luxem-
bourgeoise a présenté un plan d'action mation et de nouvelles analyses ;
Elles reposent sur les idées exposées
portant sur divers aspects des opérations • d'établir des scénarios couvrant tous dans sa communication d'avril 2005
de secours en cas de catastrophe. les types de catastrophes afin de citée ci-dessus. Parmi les propositions
déterminer quelles sont les lacunes les plus récentes figure l'adoption d'une
En avril 2005, la Commission a proposé et les faiblesses du système européen nouvelle approche de la question des
un instrument de préparation et de réac- de protection civile, avec l'entière transports. Bien que la responsabilité
tion rapide aux urgences majeures qui participation des États membres ; des transports relève toujours des États
fournit le cadre juridique futur permet-
• d'élaborer une approche modulaire membres, la proposition permettrait à la
tant de financer les opérations de protec-
fondée sur des modules nationaux Commission de mobiliser et de financer
tion civile. Elle a proposé une augmenta-
des moyens de transport si cela s’avère
tion notable du financement, avec des de protection civile pouvant être
nécessaire.
montants annuels allant de 16 millions déployés rapidement. Tous les pays
d'euros en 2007 à 30 millions d'euros participants doivent recenser à
Les nouvelles propositions permet-
en 2013. La Commission reconnaît ainsi l'avance les modules autonomes de
traient aussi à la Commission de mobili-
l'importance d'une mobilisation immé- protection civile (épuration de l'eau, ser des secours et des équipements sup-
diate des secours en tant que manifesta- opérations de recherche et de plémentaires indispensables pour une
tion concrète de la solidarité de l'Europe sauvetage, télécommunications, etc.) situation d’urgence donnée et que les
en cas d'urgence majeure. pouvant être déployés rapidement

Également en avril 2005, la Commission


a adopté une communication intitulée
« Renforcer la capacité de réaction de
l'UE en cas de catastrophes et de
crises ». Cette communication présente
la réponse globale de la Commission au
plan d'action communautaire et propose
une série de mesures visant à améliorer
la capacité générale de réaction de l'UE.

La Commission a aussi adopté une


communication spécifique intitulée
« Perfectionner le mécanisme commu-
nautaire de protection civile », qui
explique en détail les moyens proposés
par la Commission pour renforcer les

- 19 -
SAPEUR

L'intérêt marqué de l'OTAN pour la mon-


tée en puissance d'une Joint Task Force
de sécurité civile se développant en
coopération avec l'UE et les Nations
Unies, s’illustre en outre par la présence
à la SHAPE NATO SCHOOL d’une cellule
CIMIC4 dirigée par un officier inséré.

La prestation des militaires du stage a


été particulièrement remarquée lors des
travaux de groupe et des exercices de
restitutions par les observateurs de l’UE
et prouve toute la pertinence pour les
armées d'investir ce champ de compé-
tences.

Elles disposeront en effet d’un vivier


d’experts susceptibles de détenir les
différents niveaux de qualification requis
dans le domaine de la coordination
européenne, afin d'insérer dans ce
réseau des officiers capables d'activer
États membres ne peuvent pas fournir. Il Ainsi, lors de son dernier stage de for-
des passerelles avec l'OTAN, les Nations
est apparu, lors d’urgences passées, mation, le colonel MONARD a pu noter
Unies et les différents États contribu-
qu’en cas de catastrophes simultanées, la présence de deux officiers supérieurs teurs dans le cadre d’engagement de
certains types d’équipements risquent de la division LOG des forces armées moyens civilo-militaires au profit de
d’être difficilement mobilisables via le irlandaises et d’un hongrois inséré à populations sinistrées.
mécanisme, comme le matériel de l’OTAN.
décontamination de masse en cas d’at- Dans cette perspective, les officiers du
taques terroristes simultanées, ou les Cette participation montre la volonté de domaine sécurité présentent l’avantage
pompes à grande capacité en cas d'inon- créer dans ces pays un pool d'excellence de bénéficier d’une double culture (mili-
dations. Les nouvelles propositions et d'expertise militaire en sécurité civile. taire et sécurité civile). Ils constituent
visent à faire en sorte que l’Union dans En effet, l'OTAN a créé en 1998 l'Euro- dès lors un atout majeur pour les armées
son ensemble puisse réagir à tout type Atlantic Disaster Response Coordination en matière d’emploi et de coordination
d’urgence majeure. Center (EADRCC), organe de centralisation des forces en cas de catastrophe, natu-
de l'Euro-Atlantic Partnership Council relle ou non, en ou hors d’Europe.
Par ailleurs, la Commission sera aussi (46 pays). Comme le MIC, ce centre est
mieux à même de contribuer à l’élabora- situé à Bruxelles, à l'état-major de
tion de systèmes d’alerte précoce per- l'OTAN. Il travaille en liaison avec
mettant au MIC et aux États participants
l'UNOCHA.
d’agir dans les meilleurs délais. La coor-
dination des interventions dans les pays
tiers serait renforcée, qu’il s’agisse
d’opérations menées en autonomie ou
de contributions à des opérations diri-
gées par une organisation internatio-
nale. Les propositions chargent aussi la
Commission de fournir un appui logis-
tique de base aux experts et aux équipes
envoyés sur les lieux d’une catastrophe,
notamment sous la forme d’équipe-
ments de communication.

**
*
Cette montée en puissance incontes-
table du mécanisme communautaire
s’inscrit dans un contexte plus large de
coopération internationale destinée à
répondre, à un niveau politico-militaire,
aux catastrophes majeures, qu’elles
soient naturelles ou non.

4) CIMIC : Civil-Military Cooperation

- 20 -
SAPEUR

Lieutenant-colonel NUMÉRISATION DE L’ESPACE DE BATAILLE


François
EGLEMME
French Army is facing a huge challenge with the Network Centric Warfare (calling
« NEB » in French for battle space digitalisation). The aim is to gain superiority on the
enemy using faster communication data tools and computer systems. Army Chief of
Staff wants to have two Combat brigades plus, CS and CSS units fully operational for
2009. These two brigades have to be deployable on short notice and immediately ope-
rational in a digitalized environment.
Avant d’intégrer l’EMIA - promotion
« Capitaine Legrand » (1987-1989), le But digitalisation offers new opportunity in terms on C2 structures. By sharing infor-
LCL EGLEMME sert comme aspirant puis mation, units are more reactive. Concentration of units for a specific task will be pos-
ORSA au 5 e Dragons. sible by navigation system.

À sa sortie de Coëtquidan, il choisit However, « NEB » requests more training and drill for regimental and company HQ
l’arme du génie et sert successivement level because of the always more and more complex software systems. But in digitali-
aux 32 e et 9 e RG avant de commander la sation matter also sappers are in the vanguard.
Compagnie de Génie Aéromobile du
1 er Régiment d’Infanterie.
En fixant comme objectif à l’armée de terre par la STAT que par les premières unités
Après son temps de commandement, de pouvoir disposer d’ici 2009 de deux bri- numérisées (2e BB et 6e BLB), il ne saurait
il rejoint l’état-major de la 4 e DAM à gades entièrement numérisées avec leur être question de baisser les bras devant
Nancy. environnement (Commandement, Appui les difficultés rencontrées.
et Soutien) et « immédiatement aptes à
Après sa scolarité EMS 2 (113 e promo- l’engagement », le CEMAT oriente l’action Après un rapide rappel des attendus de la
tion du CSEM et 8 e promotion du CID), il de multiples acteurs vers ce but opération- NEB, cet article mettra successivement
rejoint la brigade du génie à Strasbourg nel. Fruit d’un travail commencé à la fin en perspective les évolutions possibles
avant d’être, de 2003 à 2005, chef du BOI des années 90, cette numérisation de l’es- des structures de commandement des
au 1 er RG. pace de bataille (NEB) traduit la volonté de unités et leurs conséquences en matière
disposer d’une armée de terre profession- d’organisation et d’instruction.
Le LCL EGLEMME a servi au Cambodge nelle à la pointe des innovations technolo-
(1993 - DAMI déminage), en Bosnie giques. Actuellement, les 2e BB et 6e BLB *
(1996-Cellule Génie de la DMNSE), en **
terminent leur équipement, 2006 verra
Afghanistan (2002 - ACOS J3/J5 du PC l’équipement de la 7e BB et 2007 celui de la
ISAF) et au Liban (2005 - chef de corps 9e BLBMa. L’environnement opérationnel LES OBJECTIFS DE LA NUMÉRI-
du 420 e DIM). permettant un engagement immédiat n’est SATION DE L’ESPACE DE BATAILLE
pas oublié puisque des unités de toutes
les fonctions opérationnelles réalisent La maîtrise de l’information constitue un
simultanément leur montée en puissance facteur-clé du succès des opérations. En
(4e RMAT de Nîmes, 511 e RT d’Auxonne, aidant la prise de décision, par une
1er GLCAT de Brétigny, etc.). connaissance globale et instantanée de la
situation tactique dans tous les domaines,
Si le processus de numérisation est la numérisation permet de prendre l’as-
connu, au-delà des erreurs de jeunesse, il cendant sur l’adversaire en devançant son
s’agit maintenant d’intégrer ses capacités action. Le partage permanent de cette
dans les modes opératoires liés au information à tous les niveaux sera rendu
contexte nouveau des opérations : action possible, à terme, par la compatibilité des
en zone urbaine, combat lacunaire, trois principaux systèmes concernés : le
« three block war »1. La mise en perspec- SIC.F du niveau LCC jusqu’aux brigades, le
tive de tous ces éléments doit servir de SIR pour les régiments et les unités élé-
base de travail aux réflexions à venir. mentaires, enfin le SIT2 pour les sections,
groupes et engins spécifiques. Sur ces
C’est pourquoi, au-delà du simple affichage, trois outils se greffent ensuite des sys-
tous les acteurs doivent être persuadés tèmes spécifiques à certaines fonctions
qu’au regard des sommes déjà investies, opérationnelles (ex : ATLAS pour les
ainsi que des travaux réalisés aussi bien liaisons de l’artillerie ou le support de

1) Concept lié aux retours d’expérience d’engagements récents, mettant en avant la conduite simultanée, sur
de faibles distances d’actions d’intensité variable (coercition, maîtrise de la violence et aide aux populations).

2) Les SIT (Systèmes d’Informations Terminaux) se déclinent en plusieurs versions selon les fonctions
opérationnelles. Le précurseur est constitué du SIT V1 du char Leclerc. De cette base ont été déclinés des
systèmes spécifiques à chaque fonction opérationnelle (pour le Génie, SITEL pour « SIT Élémentaire ») et
comprenant des applicatifs systèmes génériques et des applicatifs métiers particuliers.

- 21 -
SAPEUR

transmission MAESTRO-GRANITE initiale-


ment développé pour répondre aux
besoins de la fonction RENS).

La compatibilité totale des échanges sera


rendue possible au travers d’un Modèle
Pivot Global Terre (MPGT). Il s’agit à la fois,
au travers de niveaux de couplage, de
mettre en concordance un langage com-
mun et des modes d’échanges inter-sys-
tèmes compatibles ainsi qu’un niveau de
sécurité adapté. Cette interopérabilité
complète est attendue à l’horizon 2010.
La fédération de tous les outils informa-
tiques divers, réalisés dans des langages
différents et par des industriels parfois
en concurrence, rend donc l’Opération
d’Ensemble des Systèmes d’Informations
et de Communications de l’Armée de
Terre (OE-SIC Terre) lourde et complexe.
À titre d’exemple, 180 millions d’euros
sont destinés à financer le MPGT et
45 autres millions sont destinés à la
version 3 du SIC.F.
VERS UNE ÉVOLUTION DES STRUC- identifié, répond à la fois au principe de
Après les travaux exploratoires du SIR- liberté d’action et à celui de concentra-
TURES DE COMMANDEMENT ?
GEX, le génie n’est pas dépourvu dans la tion des efforts. Ce constat d’écrasement
NEB. Toutefois, confronté à la position en L’accélération des échanges d’informa- des chaînes de commandement était
« double étage » de la fonction AGESTER tions permis par la NEB amène à s’inter- abordé dès 2000 par le général Guy
(cellule G3/2D de niveaux 2 et 3 équipée en roger sur la validité de l’organisation HUBIN dans son ouvrage « Perspectives
SIC.F et PC régimentaire doté de SIR), la pyramidale du commandement. En effet, Tactiques »3.
mise en place de la totalité de la message- la connaissance par un CO de brigade de
rie papier dans les SIC représente un coût la situation sur une zone d’action impor- Les mentalités sont difficiles à faire évo-
financier important. C’est pourquoi, paral- tante peut avoir pour corollaire un écra- luer. Pourtant la NEB doit permettre de
lèlement aux travaux réalisés au sein du sement des niveaux de commandement. profiter de la totalité des opportunités
Land Engineer Working Group de l’OTAN, Ainsi, on peut s’interroger sur l’utilité de offertes pour repenser nos structures
dans un souci permanent d’interopérabi- maintenir le niveau régimentaire alors actuelles de commandement.
lité, la France cherche à réduire le nombre qu’un CO de brigade plus étoffé pourrait
de messages génie en rationalisant leur être capable de conduire la manœuvre *
formatage. Toutefois, jusqu’à l’aboutisse- **
de plusieurs S/GTIA pour des phases
ment des travaux de l’OTAN et la mise en particulières. Alors, le PC de GTIA ne
service du MPGT, la cohabitation de la serait plus en charge de façon perma- LES CONSÉQUENCES EN MATIÈRE
procédure numérisée et celle de l’OTAN nente de l’action. Les études menées par D’ORGANISATION ET D’INSTRUCTION
(APP-11) entraînera un surcoût d’instruction. la 6e BLB sur une organisation du PC BIA
en deux entités égales (un PC principal Dans l’optique de la NEB, le point-clé
Au travers des exercices numérisés et un PC détachable) offrent des pers- des enseignements tirés des exercices
déjà réalisés, les enseignements sont pectives dans ce sens. Ces études trou- (FATEXTEL, PALMEX 2, ANVIL) est l’im-
nombreux et variés. Si de redondants vent un champ d’application naturel périeuse nécessité d’une formation du
problèmes techniques liés aux matériels dans le combat décentralisé qui caracté- personnel, quel que soit son niveau.
et aux logiciels associés existent, la rise l’action en zone urbaine. Cette formation doit s’appuyer sur la
démarche « d’apprendre en marchant » démarche volontariste dans laquelle les
permet une grande réactivité. Ainsi, le La connaissance exacte de la situation régiments s’inscrivent totalement. En
comité annuel de satisfaction des usagers tactique, rendue possible demain par effet, la complexité des procédures liées
représente une remarquable opportunité la mise en service du Drone de aux contraintes techniques des sys-
d’échange d’informations et d’expériences Renseignement Au Contact (DRAC), tèmes de commandement, comme de
entre directions (DCMAT, STAT) et usagers permet de repenser les engagements l’évolution très rapide des logiciels asso-
(écoles, brigades et régiments). futurs, au travers de la manœuvre vecto- ciés imposent un entraînement à un
rielle dans des espaces lacunaires. Pour rythme régulier. En effet, les principaux
*
** les moyens nécessaires à une action par- défauts constatés résident dans un
ticulière, la faculté pour toutes les unités manque de pratique consécutif à des
de rejoindre un point de regroupement périodes d’activités différentes, ce qui

3) Guy HUBIN « perspectives tactiques » éditions Economica janvier 2000.

- 22 -
SAPEUR

officier serait chargé de conseiller le chef


de corps dans l’organisation des réseaux
SIC, de coordonner le travail de la sec-
tion SIC régimentaire, ainsi que des cel-
lules MSI et SSI4. Le profil d’un tel offi-
cier devrait être un NR 4 issu de l’arme
(afin de bénéficier d’une culture propre à
la mise en œuvre). Il devrait suivre pour
tenir ce poste le stage d’officier SIC en
corps de troupe (durée 5 semaines) dis-
pensé par l’ESAT. Le DUO 2006 devrait
voir la traduction en organisation des
premiers postes.

*
**

Pour conclure, si le défi est lourd, il est


indispensable de garder présent à l’es-
prit que la démarche de numérisation
entraîne la perte de savoir-faire face au notamment l’alimentation électrique des est maintenant dans une phase irréver-
système. Cela est difficilement compa- matériels. sible au regard des sommes déjà inves-
tible avec le rythme des activités (projec- ties et des bénéfices probants obtenus
tions, stages, concours, etc.) mais aussi L’organisation et le suivi de l’instruction grâce au partage de l’information. Si la
avec les mouvements de personnel liés spécifique NEB représentent une charge projection de la 6e BLB à Licorne au
au PAM et les aspirations du personnel à de travail conséquente et nécessitent du second quadrimestre 2006 se fait sous
des conditions de travail toujours plus personnel compétent dans ce domaine format numérisé, elle devrait permettre
proches de celles que connaît l’évolution toujours plus complexe. Il est envisagé de quantifier les gains obtenus en
de la société civile. En outre, cette ins- de mettre en place dans les régiments, réactivité opérationnelle. Alors, il faudra
truction nécessite de posséder des « sous enveloppe constante », un officier penser à revoir l’organisation de notre
moyens dédiés, prenant en compte spécifiquement en charge de la NEB. Cet commandement…

4) Section SIC : section des Systèmes d’Informations et de Commandement – MSI : management des systèmes informatiques – ACSSI = article classé de la sécurité
des systèmes d’information.

- 23 -
SAPEUR

- 24 -
SAPEUR

Lieutenant-Colonel PROCESSUS D’ÉLABORATION


Jean-Henri
PINOT
DES CONCEPTS
ET DE LA DOCTRINE AGESTER.
APPLICATION À LA SAUVEGARDE-PROTECTION
Le lieutenant-colonel Jean-Henri PINOT
est l’officier traitant du domaine AGESTER
depuis 2005 au sein de la Division A part of the concepts and doctrine of « AGESTER » - French designation for Engineer,
Emploi-Organisation du Centre de CBRN and Geography area of expertise - are validated or approved by the Center for
Doctrine d’Emploi des Forces (CDEF) Force Employment Doctrine (CDEF), located in Paris.
situé à l’École Militaire (Paris).
Working closely with the Prospective and Study Department of the Arm Centers and in
Issu de l’école militaire interarmes charge of either the control or the supervision of studies, it is not less than ten studies
(promotion lieutenant LHUILLIER 1985- or experimentations, which are currently followed by the consulting officer.
1986), il est diplômé de l’école d’état-
major depuis 1996. Il détient les qualifi- Among these studies, two of them have a connection with survivability and protection
cations d’officier NBC d’état-major et area of competence.
d’officier NEDEX.
One relates to the treatment of the threat generated by the improvised explosive devices
Il a servi au 13 RG (Trèves) et au 6 RG
e e (IEDs) and for the other one the recasting of former regulation documents in a new
DIMa (Angers) en qualité de chef de « TTA 702 », a regulation book on the use and the realization of obstacles by land forces.
section puis d’officier adjoint et de
commandant d’unité entre 1987 et 1995.

Après un temps d’officier génie au sein


de la 9 e DIMa (Nantes) de 1995 à 1998,
il rejoint le 19 e RG pour y servir en tant
qu’adjoint BOI jusqu’en 2002.

Jusqu’à son affectation au CDEF en


2005, il assurait de nouveau la fonction
d’officier génie, cette fois à l’état-major
de force n° 1 (EMF1) de Besançon.

Il a participé à six opérations extérieures


(FORPRONU - IFOR - SFOR - KFOR -
CONCORDIA) dans la région des Balkans
entre 1992 et 2003.

Fidèle à sa devise «… par les Forces, Le domaine AGESTER y tient son rang et
pour les Forces… », le centre de doctrine ce ne sont pas moins de dix études et
d’emploi des forces (CDEF), commandé expérimentations qui sont suivies par
par le Général DESPORTES, est par voca- son officier traitant, en liaison étroite
tion à l’écoute des forces. Une des quatre avec les directions des études et de la
divisions de cet organisme, la division prospective (DEP) des différentes écoles
emploi-organisation (DEO) que dirige le d’armes. Ainsi, cet officier est chargé de
colonel DESTRIBATS, coordonne le pilo- piloter ou de conduire les études et
tage et la conduite des études opération- expérimentations qui relèvent de ce
nelles tout en veillant à la cohérence de domaine (Génie - NBC - Géographie).
la doctrine de l'armée de terre.
Le bilan des études ainsi que le plan de
Dans le cadre du comité de coordination des charge de l’année à venir sont examinés
études opérationnelles (COCOOPS), cette lors des comités directeurs ou de coor-
division élabore ou fait élaborer l'ensemble dination des études opérationnelles
des documents d'emploi des forces (CODIROPS ou COCOOPS). Ces études
terrestres (niveaux tactique et opératif). sont répertoriées dans une base infor-

- 25 -
SAPEUR

matique, dite « base COCOOPS1 », véri- concept, cité précédemment, et aura risque de modifier la problématique de
table outil de gestion et de suivi des pour objectif, d’une part, de fixer les la réalisation des obstacles. Certaines
études. La consultation de cette base est conditions d’emploi des capacités incertitudes relatives à l’aptitude des
accessible par tout un chacun sur le site interarmées (renseignement, inter- armes, autres que le génie, à réaliser ou
du CDEF. vention NEDEX…) et, d’autre part, prendre en compte des obstacles
d’optimiser l’interaction des compé- simples à base d’explosif ou de mines
Aussi est-il intéressant d’apporter un tences spécifiques de chacune des AC doivent être levées. Ainsi, quid :
éclairage sur deux études majeures du armées. La composition du groupe
- des obstacles simples à bases de
domaine AGESTER, et plus particulière- de travail, qui rédigera ce document,
mines ou d’explosifs réalisés par l’IA?
ment génie, ayant trait à la sauvegarde- sera à l’identique de celui ayant
protection, thème de ce numéro de la rédigé le précédent concept. - des savoir-faire concernant la mise
revue « Sapeur ». Actuellement, ces en œuvre d’explosifs ou la pose de
- Un mémento de mesures pratiques à
études présentent un caractère priori- mines par un soldat n’appartenant
prendre contre les EEI, en déplace-
taire pour les forces. pas au génie ?
ments et lors des stationnements.
Ce document est en cours de diffu- En filigrane, se pose la question du
*** sion, jusqu’au niveau unité élémen- devenir de l’emploi des mines AC à plus
taire ou équivalent interarmées. ou moins long terme et de l’intégration
En ce début 2006, nul doute que la lutte L’étude, pilotée par le CDEF, a été
contre les Engins Explosifs Improvisés de systèmes de protection de zones tels
conduite tambour battant par la DEP que SPECTRE - Système de protection
(EEI) ou « Improvised Explosive Devices ESAG en liaison étroite avec l’éche-
(IED) » est parmi les études qui occupent des éléments terrestres - ou SYCOMORE
lon central NEDEX et en association - Système de contre mobilité réactif 3.
le devant de la scène. L’État-major des avec les autres armées et orga-
armées (EMA) et son bras « armé » en Actuellement la phase de concertation
nismes de la défense. des principales fonctions opération-
matière doctrinale, le centre interarmées
de concepts, doctrines, expérimenta- - Un aide-mémoire, distribué jusqu’au nelles impliquées est en cours.
tions (CICDE), ont défini un ensemble soldat permettra la sensibilisation
d’actions à réaliser en réponse à cette immédiate du combattant. Réalisé D’ores et déjà, si la nécessité de mainte-
menace qui connaît depuis ces dernières par l’échelon central NEDEX en liai- nir la capacité de mise en œuvre d’explo-
années une forte recrudescence à tra- son avec la DEP ESAG, il rappelle sifs et de conserver certains savoir-faire
vers le monde, notamment sur le théâtre l’essentiel des mesures de préven- est reconnue, la capacité à réaliser des
afghan et bien plus encore en Irak. tion, d’alerte, de protection et de obstacles minés préliminaires ou de
lutte que chaque combattant doit manœuvre est discutée et cela en fonc-
L’objectif est clair : traiter la menace connaître. Il sera édité au format de tion des contextes d’engagement. En
engendrée par les EEI et cela dans des poche et sera résistant à l’humidité offensive, par exemple, le combat « à
délais contraints. Sur le plan doctrinal, il et au sable. temps » (actions brèves mais intenses)
s’agit de créer une série de documents et la rapidité des mouvements ne justi-
cohérents entre eux et balayant l’en- Ainsi, cette production s’inscrit dans la série fient plus la réalisation d’obstacles de
semble du spectre : de travaux, lancée par l’état-major des combat par les unités de cavalerie blin-
armées, en matière de prévention et de lutte dée. En revanche, pour l’infanterie, dans
- Un concept interarmées de lutte contre ces dispositifs dans les domaines son emploi tactique, la notion d’autono-
contre les EEI (le quoi faire), de la doctrine et de l’équipement. mie, même si ce point est discutable4, en
échéance : juin 2006. Ce document, matière de réalisation d’obstacles ponc-
en cours d’approbation par le chef **
* tuels est primordiale pour appuyer sa
d’état-major des armées a été rédigé manœuvre, réaliser son effet majeur et
Dans la sphère d’intérêt de la sauve-
en groupe de travail interarmées renforcer sa sûreté. Dans tous les cas, le
garde-protection, une autre étude, du
entre novembre 2005 et janvier 2006. besoin d’une protection de proximité
niveau EMAT pour son approbation,
Son préambule insiste sur le côté pour toutes unités en stationnement
possède des applications interarmes.
multiforme et éminemment évolutif semble permanent, que cela soit avec le
Pilotée par le CDEF, conduite par
de cette menace. En outre, la lutte concours du génie ou non.
l’ESAG/DEP, elle devrait aboutir dans le
contre les EEI est devenue inéluc-
courant du second semestre 2006.
table. « Elle s’inscrit pleinement dans Il reste à définir précisément ce que la
la problématique, de plus en plus « sape » peut apporter aux uns et aux
Il s’agit de la refonte du TTA 702 en un
prégnante, de la protection de la autres en fonction de son organisation et
règlement sur l’emploi et la réalisation
force, voire de la population, et celle de ses possibilités. Il convient d’expri-
des obstacles par les forces terrestres2.
de la lutte contre le terrorisme ». mer le besoin sous forme de résultats à
Compte tenu des contextes d’engage-
- Une doctrine interarmées de lutte ments actuels et à venir ainsi que des obtenir et d’étudier la meilleure façon
contre les EEI (le comment faire), équipements et systèmes d’armes en d’y parvenir dans le cadre des dévelop-
échéance : fin 2006. Elle déclinera le cours de développement, cette étude pements actuels de la modularité ainsi

1) Base COCOOPS : base de données consultable et modifiable en temps réel par les pilotes ou conducteurs d’études. Elle est l’unique référence en
matière de suivi des études opérationnelles.
2) Étude OPS 2002 GEN 12 : refonte du TTA 702 : synthèse des anciens TTA 703, 704, 704 TER sur les obstacles à base de mines.
3) Ces systèmes sont en cours d’étude et de développement (STAT et DGA).
4) À l’autonomie, il semble plus pertinent d’opposer une génération de force qui associe les compétences.

- 26 -
SAPEUR

que de l’interarmisation aux plus bas L’imbrication de la sauvegarde-protec- femmes du terrain » les éléments de
niveaux. Cette étude, d’apparence ano- tion apparaît encore dans bien d’autres réponse et d’emploi dont ils ont besoin
dine, aura des conséquences non négli- études, pilotées ou conduites par le pour remplir au mieux leurs missions.
geables en matière d’actions de forma- CDEF, et cela à des niveaux variables.
tion et de dotations. Être à l’écoute des forces, c’est le rôle
Ainsi, en prise directe avec les diffé- de la doctrine qui s’inscrit, avec les
rentes DEP et les organismes de la hommes et les équipements, comme
** défense, le CDEF et plus particulière- l’un des trois piliers fondateurs de la
* ment la DEO fournit « aux hommes et capacité opérationnelle5.

5) Directives annuelles 2005-2006 du CDEF.

- 27 -
SAPEUR

- 28 -
SAPEUR

Chef d’escadrons LA THÉORIE DES TROIS BLOCS


Marc
CAUDRILLIER APPLIQUÉE AU DOMAINE NRBC
More than 9/11 events, letters send full of Anthrax in United States deeply removed
the context in CBRN defence. French government decided to build a modern defence
system in front of a new threat : the 2nd Dragoons Regiment, located in Fontevraud,
Recruté sur titre avec un diplôme which will finally be composed of five compagnies in 2008. This battalion can carry out
d’ingénieur, le CES CAUDRILLIER Marc a large scale of different missions : regarding what happened in Kosovo, CBRN assets
a effectué une première partie de carrière must be layed out from the beginning of the mission to redeployment.
dans la maintenance et a commandé
l’escadron de maintenance du 501-503 e In june 1999, with the french brigade in Kosovo, the CBRN team was in charge of three
régiment de chars de combat. missions : support deployment of forces, perform intelligence about industrial net-
work for CIMIC, and supply french headquarters in health topics. Even if these three
Breveté technique dans le domaine missions are carried out simultaneously during the operation, they don’t have the
NRBC, il a obtenu en 2003 un Mastère same importance, depending on the different phases of this operation.
« Génie des procédés et environnement »
de l’École Centrale de Paris et a servi au
Centre d’Études du Bouchet (DGA) dans Autant que les attentats du 11 septembre, technologiques au profit de la coopération
la détection d’agents biologiques patho- l’explosion d’AZF à Toulouse ainsi que civilo-militaire (CIMIC), et soutenir l’état-
gènes. Dans ce cadre, il a participé, l’envoi de lettres chargées de charbon major de la KFOR dans le domaine de
depuis Dugway Proving Ground (Utah, ont profondément changé la donne dans l’hygiène et la sécurité en opérations
USA) au déploiement d’une équipe le domaine NRBC. Aujourd’hui, la France (HSO).
multinationale de réaction de l’OTAN, au s’est dotée d’un moyen de défense : le
titre du laboratoire opérationnel français 2e Régiment de Dragons, Nucléaire, En réalité, l’accomplissement de ces trois
de détection biologique. Biologique et Chimique, stationné à missions ne se fait pas à parts égales. En
Fontevraud, composé de trois escadrons fonction de la phase à laquelle en est
Après avoir suivi le Cours Supérieur d’É- de défense actuellement et jusqu’à cinq rendu l’accomplissement de la mission,
tat-Major en 2004, le CES CAUDRILLIER a escadrons en 2008. Or, le champ des l’une ou l’autre des composantes sera
suivi le Cours Supérieur d’État-Major à missions que peuvent remplir les différents traitée prioritairement. Mais les change-
l’Institut Royal de Défense, équivalent modules NBC apparaît de plus en plus ments de postures pouvant être fréquents
belge du Collège Interarmées de vaste, au fur et à mesure que le comman- et brutaux, la théorie des trois blocs
Défense. dement découvre les matériels et les s’applique parfaitement aux troupes
savoir-faire de ces modules. Il faudra spécialisées de la défense NRBC : un jour
Le CES CAUDRILLIER est depuis juillet d’ailleurs du temps pour parvenir à cerner participant au déminage d’un engin
2005 le chef du Bureau Opérations l’étendue de nos possibilités d’emploi, tant explosif chargé au charbon (action
Instruction du 2 e Régiment de Dragons, elles sont larges et variées, mais aussi menée en synergie avec les EOD), le chef
régiment spécialisé de la défense NBC. parce que le domaine NRBC est en du module rédigera le lendemain un
constante évolution, ainsi que ses équi- rapport sur les risques encourus par les
pements. À l’expérience de la crise du troupes déployées travaillant à proximité
Kosovo, les modules de défense NRBC d’un fût de chlore, tandis que ses équipes
doivent être déployés depuis le premier renseigneront sur les capacités de
jour d’une opération, jusqu’au retrait des production d’une usine pharmaceutique.
forces. Il reste néanmoins logique d’attribuer
une priorité à l’une des trois missions en
En juin 1999, la deuxième brigade blindée, fonction de l’évolution de la situation
renommée pour l’occasion brigade Leclerc globale.
entrait au Kosovo et implantait ses unités
dans la partie la plus industrialisée de Lors d’une phase d’imposition de la
cette province. Le raid blindé mené par paix, le module NRBC, dont la taille
l’escadron Leclerc (du nom des 15 chars dépend à la fois de la force soutenue et
mis en œuvre par le 2e escadron du de la mission (nature de la menace,
501e Régiment de Chars de Combat) se géographie de la zone d’opérations),
faisait sous menace NRBC, les troupes doit absolument être intégré dans les
serbes n’ayant pas encore quitté le forces d’entrée en premier. En effet, le
territoire et une division mécanisée facteur primordial d’efficacité dans une
adverse étant encore déployée au nord mission de décontamination est le
de la zone des opérations. L’équipe temps écoulé entre l’attaque et le début
NRBC déployée en appui de la brigade de la restauration. D’autre part, les
(niveau tactique) menait trois missions patrouilles de reconnaissance, dotées
générales : appuyer les troupes de véhicules blindés de reconnaissance
déployées, renseigner sur les capacités (VAB RECO NBC), exécutent leur mis-

- 29 -
SAPEUR

sion en avant des troupes, sur la ligne Dans une phase de maintien de la paix, plus en plus d’importance, devenant
de front. Enfin, il faut que les équipes de le renseignement au profit de l’action primordiale lors de la phase de stabili-
reconnaissance et d’évaluation (ERE) civilo-militaire prend toute son ampleur. sation et jusqu’au désengagement.
soient déployées au plus près des Cette mission a évidemment débuté dès
forces afin de leur éviter une implanta- l’entrée des forces sur le théâtre, mais L’exemple du Kosovo dans ce domaine
tion hasardeuse dans une zone présen- elle devient à ce moment-là prioritaire, est très révélateur de cette perma-
tant un niveau de risque technologique sans pour autant être exclusive. nence des missions NRBC. Après avoir
élevé. Bien entendu, ces forces NRBC appuyé les troupes déployées, le
participent également à la collecte du Enfin, la mission de soutien effectuée module armé alors par le Groupe de
renseignement tactique, opératif et au profit du HSO, si elle a débuté dès Défense NBC a participé à la collecte
stratégique. l’implantation des troupes, prendra de du renseignement et soutenu l’état-
major dans le domaine HSO. Parce que
la situation s’est stabilisée, il a été
décidé au printemps 2005 le désenga-
gement de ce module. Mais, assez
rapidement, des lacunes ont été
constatées sur le terrain, tant dans le
domaine du renseignement que dans
celui du HSO. Aussi ont-ils demandé,
et obtenu, la réactivation de cette
équipe. Le 2e Régiment de Dragons,
nucléaire, biologique et chimique
projettera ainsi une ERE dès la mi-
mai au profit de la Task Force
Multinationale Nord (TFMN). Gageons
que son action restera déterminante
jusqu’au désengagement de la KFOR.
Engagement du module NRBC sur toute la largeur du spectre

- 30 -
SAPEUR

Capitaine (TA) LE COMBAT DU FEU EN ZONE URBAINE :


Gérald
BOUTOLLEAU
OCT-NOV 2005 DANS LE 93

FIBUA : Firefighting In Built-Up Areas ?

The last events in Seine-Saint-Denis have testified that an important milestone in vio-
lence was overtaken when using lethal weapons against police forces. Systematic
Le capitaine (TA) BOUTOLLEAU est offi- harassment of the emergency services through physical aggression, destruction of
cier supérieur adjoint au 1 er groupement numerous warehouses and thousands of vehicles have resulted from heavy anger
d’incendie et chef de la section comman- against every representation of the State authority in a democracy.
dement de son état-major, depuis juin
2003. Then, the Paris Fire Brigade SOPs for urban unrest have become a blueprint for emer-
gency organization during riots. It will become a zonal emergency plan on the AOR of
Après la sortie de la division d’applica- the Fire Brigade. Therefore, new steps are taken as for dealing with emergency calls or
tion de l’ESAG en 1996, il est affecté à la leading the overall operation.
13 e compagnie d’incendie, centre de
secours AULNAY-SOUS-BOIS, en tant Everyone must preserve the firefighter resource, worn out by the length of such ope-
que chef de garde incendie, pendant rations and disabled with such mugging against men and women dedicated to serve
3 ans. their fellow citizen.

Puis il est affecté à la 12 e compagnie, Plus de 3300 véhicules incendiés, 14 des Si le fait générateur des agitations sur
centre de secours MENILMONTANT , en plus gros incendies de la Brigade de le secteur de la 14e compagnie est clair
tant qu’adjoint au commandant de com- Sapeurs-Pompiers de Paris, 13 sapeurs (le décès de deux jeunes à Clichy/Bois),
pagnie, puis en tant que CDU. pompiers blessés suite à des agressions la flambée de violence qui s’est étendue
directes, 56 engins endommagés, voilà à l’ensemble du département peut
Il quitte son commandement en 2003 et le bilan-choc que l’on pourrait livrer des s’expliquer par un souci de mimétisme,
est affecté à l’état-major du 1 er groupe- violences urbaines qui ont frappé du de médiatisation et de défi à l’autorité
ment d’incendie. Il intégrera la 120 e pro- 27 octobre au 12 novembre 2005. La quasi- républicaine.
motion du cours supérieur d’état-major totalité du personnel des trois groupe-
en janvier 2007. ments d’incendie, soit 4300 militaires sur De tels événements bouleversent nos
les 8000 que compte la Brigade, a été conceptions traditionnelles et portent
Le capitaine (TA) BOUTOLLEAU est issu impliquée une nouvelle fois dans ce type
atteinte à la vie économique et sociale
de l’EMIA, promotion capitaine MAINE d’opération particulière, à la limite de la
(1993-1995). de quartiers entiers.
guérilla urbaine, où les voitures brûlent
dans les rues, où les sapeurs-pompiers
Prendre en compte le phénomène, en
interviennent sous protection policière
connaître les caractéristiques propres,
et où les projectiles fusent.
en déduire les modes opératoires en
Lors du précédent épisode (juin 2001), fonction des niveaux de violence, tels
le phénomène avait été localisé à une sont les enseignements qui ont permis à
seule cité de la Seine-Saint-Denis et la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris
avait duré six nuits. Cette fois, la violence d’améliorer les normes d’engagement
est montée d’un cran : plus étendue et, partant, la sécurité de nos interven-
(presque toute la petite couronne), plus tions et de notre personnel lors de ces
longue (12 nuits d’affilée), plus intense. nuits agitées.

- 31 -
SAPEUR

VIOLENCE ET GRANDS ENSEMBLES Degré Manifestations Nombre de quartiers


concernés en 1997
URBAINS
1 Petits groupes.
Vandalisme, vol à l’étalage.
La violence urbaine, en tant que telle, n’a Dégradation de l’environnement.
été prise en compte par les services de Pillage, intimidation sur les commerçants.
Racket et vol sur les écoliers.
l’État qu’au début des années 1990. En Rodéos de voitures volées avec incendie à l’issue.
2001, la BSPP, confrontée brutalement à ce Affrontement et règlement de compte entre bandes rivales. 439
phénomène, a été jusqu’à chercher chez 2 Agressions verbales et gestuelles ceux qui symbolisent la réussite ou l’autorité
(police, pompiers, chauffeurs de bus, facteurs, enseignants).
ses collègues de Belfast une expérience Attaque furtive contre des locaux de police ou de gendarmerie.
dont elle ne disposait pas jusqu’alors. Vandalisme contre les écoles, notamment lorsqu’il y a eu exclusion, mauvaises notes ou punitions. 143
Depuis, les Renseignements Généraux ont 3 Agressions physiques contre les porteurs d’uniforme et les représentants de l’ordre scolaire.
classé les différentes manifestations de la 4 Protestation de manifestants contre une intervention de police dans un quartier.
Menace téléphonique aux familles de policiers.
violence urbaine en 8 niveaux (ci-contre). Jets de pierre sur les voitures de patrouille et les engins de secours.
Manifestation devant les commissariats. 167
5 Regroupements agressifs et vindicatifs de jeunes.
État des lieux Invasion de commissariats pour libérer un suspect.
Développement visible de recel et des trafics de drogue.
Mise en place d’une économie parallèle.
Les cités sensibles ont toutes été édi- Amplification de la toxicomanie.
fiées dans les années 1960, avec le souci 6 Agressions physiques contre des policiers qui reçoivent des cocktails molotov, sont attirés dans des pièges
architectural de rétablir un sentiment de par de faux appels téléphoniques, des incendies volontaires ou des rodéos automobiles. 21
communauté humaine, à défaut de créer 7 Mini-émeute.
un « esprit village ». Ainsi, les entrées Escalade de violence brève et sans lendemain. Potentiellement tous.
des bâtiments sont-elles généralement 8 Émeute (plusieurs jours) avec affrontement en règle des forces de l’ordre et des institutionnels. Potentiellement tous.
orientées vers l’intérieur de la cité, les Source : Violences urbaines, des vérités qui dérangent – L. BUI TRONG – Éd. Fayard.
routes périphériques sont rares, les che-
minements sont sinueux et les espaces dégâts. On ne compte plus, en effet, le d’armes, la prostitution, l’extorsion…
verts sont relativement nombreux, avec nombre de locaux vide-ordures marqués Une véritable économie souterraine se
une forte présence de talus, visant à par les incendies à répétition, les car- développe, économie qui a besoin de
créer une certaine intimité. casses de véhicules brûlés, les portes calme. Les aînés se chargent donc de lut-
d’immeubles forcées, les vitres fractu- ter contre la petite délinquance qui attire
Les bâtiments sont généralement de grande rées, les murs souillés de tags en tous également les forces de l’ordre.
taille (entre 28 et 50 mètres de hauteur donc genres… Les commerçants ont déserté
de 4e famille) et ne sont, généralement, plus les lieux et les services publics (EDF, On assiste également à une montée du
aux normes de sécurité incendie. Afin de GDF, La Poste) interviennent avec parci- communautarisme, avec une emprise
compléter cette recherche de sentiment monie et sont la cible de malveillances plus ou moins forte de la religion, selon
identitaire, l’installation de commerçants a importantes et coûteuses. les zones. L’errance à toute heure du jour
été encouragée par les pouvoirs publics. et de la nuit, le refus d’aller à l’école,
De véritables zones de vie prennent donc Les jeunes qui habitent dans ces cités ne ainsi que le rejet des institutions placent
pied en bas des immeubles : magasins, aires sont pas tous des délinquants, loin s’en rapidement les jeunes en position
de jeux, salles associatives et de culte… faut. Mais une part infime de cette d’échec scolaire. L’école n’a plus la maî-
jeunesse concentre sur elle toute la délin- trise sur ceux-ci. Certains sont même
On peut mesurer aujourd’hui à quel point quance, sous toutes ces formes. Sans parfois non-francophones. Les parents,
la volonté des urbanistes s’est retournée chercher à dramatiser la situation, il faut quant à eux, peinent à exercer leur auto-
dans un sens diamétralement opposé à bien être persuadé que les trafics ne rité parentale, souvent déléguée à un
l’effet recherché ! En effet, les cités, pas concernent pas que les stupéfiants et les « grand frère », lui-même piètre exemple
aussi radieuses que l’avait imaginé Le voitures. Il convient d’y ajouter les trafics pour les plus jeunes.
Corbusier, sont devenues des camps
retranchés où le droit d’entrer se négocie.
Les bâtiments ont mal vieilli, par défaut
d’entretien et par détérioration volontaire
de l’existant. Le vieillissement prématuré
des installations a contribué ensuite au
sentiment d’insécurité ou, à tout le
moins, de malaise de populations de
moins en moins volontaires pour vivre
dans cet univers artificiel. Les sociologues
s’accordent aujourd’hui à reconnaître que
le type même de cette architecture
génère également, par lui-même, des
comportements agressifs.

Il n’y a qu’à s’aventurer dans ces


ensembles pour mesurer l’étendue des

-32 -
SAPEUR

Enfin, du point de vue des policiers, les


suites judiciaires de leur travail ne sont
pas toujours à la hauteur de leurs espé-
rances. Les tribunaux compétents sont
souvent saturés, regroupant dans leur
ressort une grosse concentration de
cités dites sensibles.

Les formes de la violence

La violence est, hélas, familière du


sapeur-pompier. Celle-ci se construit
essentiellement autour d’un rapport de
force entre l’Institution et le fauteur de
troubles.

En juin 2001, la cité des Beaudottes à


Sevran a ainsi été le théâtre d’émeutes « troubles urbains » au niveau de la Le dispositif a été reconduit chaque nuit,
(degré 8) six nuits durant. Plusieurs véhi- BSPP, qui comporte 3 niveaux : douze fois de suite. La fatigue s’accumu-
cules de police et de sapeurs-pompiers lait, mais l’expérience de 2001 a appris
ont été endommagés. Cette violence - Vigilance (niveau vert) ;
qu’il fallait durer. L’enchaînement des
s’est prolongée en juillet, à Aulnay-sous- - Alerte (niveau orange) ; nuits blanches risquant d’entraîner des
Bois, avec la charge d’un véhicule de accidents, il était impératif de prévoir
chantier volé contre un fourgon de - Déclenchement du plan (niveau rouge).
des relèves et de tempérer la fougue du
sapeurs-pompiers qui intervenait pour personnel de repos s’étant spontané-
éteindre l’incendie d’une PMI, dans Lorsque le nombre de feux criminels,
notamment sur voie publique, augmente ment porté volontaire pour épauler leurs
laquelle une femme était prisonnière des camarades. Lorsque les violences se
flammes. de manière significative et que le déclen-
chement du plan est décidé, il est défini renouvellent plusieurs jours, l’organisa-
une zone d’engagement composée des tion de la vie du centre de secours doit
Nous pouvons aussi évoquer, pour
quartiers concernés par ces actes, dans être revue, avec la mise en place de
mémoire, les attaques à la voiture-bélier
lesquels les secours interviennent après repos en journée, la préparation logis-
contre des engins de secours, le tir avec
sécurisation de la zone par la police, et tique de la nuit, la remise en état des
un pistolet à grenailles, les embuscades,
lorsque le feu présente un risque d’ex- engins et les mesures de sécurisation
les agressions en règle, dont les consé-
tension (une poubelle située sur la voie croissantes de nos infrastructures (plu-
quences physiques (jours d’incapacité
publique et ne menaçant aucun bâtiment sieurs centres de secours ont été la cible
totale de travail) sont toujours (heureu-
s’éteindra d’elle-même par manque de de bandes organisées, menaçant direc-
sement, dans une certaine mesure)
combustible et ne justifie pas la prise de tement les ménages y résidant).
moins importantes que les consé-
quences psychologiques ou éthiques risque de l’envoi de secours).
L’intensité et le nombre des interven-
pour le sauveteur et sa famille.
Lorsque deux jeunes ont péri dans un tions ne faiblissant pas, le général com-
transformateur à Clichy-sous-Bois, il deve- mandant la Brigade décida, pour la pre-
Ces nuits tragiques sont relayées par
nait évident que cette commune allait être mière fois dans l’histoire de la Brigade,
celles d’octobre et novembre 2005 sur
le théâtre de scènes de violences urbaines de demander, en renforcement, des
l’ensemble de la Seine-Saint-Denis, dont
« classiques ». L’extension départementale, colonnes de sapeurs-pompiers civils
les conséquences sont énormes : de
puis quasi-nationale qui a suivi était moins (6 colonnes ont été envoyées, chaque
nombreuses entreprises en chômage
prévisible. colonne étant l’équivalent d’une compa-
technique, des infrastructures scolaires
gnie). L’état-major de la Brigade a été
inutilisables, des commerces détruits…
Très rapidement, un officier de perma- réellement utilisé en tant que PC OPS,
nence par compagnie a été dédié au suivi durant une semaine entière. Toutes les
SAPEUR-POMPIER PENDANT LES des opérations du plan. Deux chaînes de cellules composant traditionnellement
VIOLENCES URBAINES commandement parallèles coexistaient un PC OPS ont été activées (même celle
donc : celle traitant les interventions cou- MANFUT), armées par bordées par les
Le 1er groupement d’incendie a, le pre- rantes et celle, dite « de délestage », cadres des différentes sections.
mier, pris en compte la question des dédiée au plan « troubles urbains ».
troubles urbains, en apportant une Au bilan, treize sapeurs, blessés légers,
réponse opérationnelle à ces événe- Une soudaine flambée de violence a seront à déplorer. Du côté des dégâts
ments, lesquels, désormais, se répètent frappé le secteur du 1er groupement d’in- matériels, le bilan est beaucoup plus
traditionnellement les nuits de 14 juillet cendie, entraînant de nombreux incen- lourd. De très nombreux engins sont
et de 31 décembre. dies majeurs (garage, entrepôts, écoles, endommagés et nécessiteront de lourdes
gymnase…) et de très nombreuses nuits réparations. La protection, par film anti-
Les travaux conduits depuis 1996 ont blanches pour les hommes et les explosion, des vitres de la totalité des
abouti en 2005 à l’adoption d’un plan femmes de la BSPP. engins de la Brigade est décidée.

-33 -
SAPEUR

Bibliographie.

• Guide d’intervention du sauveteur : vic-


times, violences, secours - Loïc
CADIOU - Editions Estem, De Boeck
Diffusion - 2005 (notamment le cha-
pitre 30).

• Violences urbaines, des vérités qui


dérangent - Lucienne BUI TRONG -
Paris : Bayard éditions - 2000.

• Violences : les racines du mal - Gordes :


Le Relié - 2002.

• Les racines de la violence : de l’émeute


Les officiers de permanence des compa- souffert. En effet, c’est maintenant un
au communautarisme - Paris : éditions
gnies feront le point des dégâts endurés long travail qui commence, afin de res-
par le personnel et les véhicules et enga- taurer la confiance des ménages, ainsi Louis Audibert - 2003.
geront la procédure contentieuse, par un que celle des jeunes des cités à l’égard
dépôt de plainte initial au nom de la de leurs pompiers. Les menaces et les • Violences et insécurités urbaines -
Brigade. Cette étape est essentielle, car intimidations, notamment à l’école à Alain BAUER, Xavier RAUFER - PUF
elle est la seule qui témoigne adminis- l’encontre des enfants des pompiers, « Que sais-je ? » - 1999.
trativement des incivilités à l’encontre continueront encore quelques semaines,
des sapeurs-pompiers. perturbant la scolarité des enfants. • La dimension cachée - Edward T. HALL.

CONCLUSION Enfin, nul doute que l’expérience de la


BSPP dans ce domaine peut être d’une
Au-delà des séquelles que ces événe- utilité certaine pour l’armée de terre.
ments laisseront sur nos engins et dans Celle-ci a, d’ailleurs, bien compris son
l’esprit de nos sapeurs-pompiers, ce intérêt, en associant des officiers de la
sont surtout les familles logées dans les brigade au groupe de travail concernant
casernes concernées, qui ont le plus le CENZUB (piloté par le CFAT).

- 34 -
SAPEUR

La sauvegar de-pr otection


des for ces

La protection-sauvegarde sur une base aérienne projetée .................................................................................................. COL BILBAULT ........................................................ 37

Protéger nos stationnements contre les attentats à l’explosif ............................................................................................ COL LORIDAN
LCL MARTIN ............................................................ 41

Pour une approche globale de la sauvegarde-protection ...................................................................................................... LCL (TA) SOUCASSE .......................................... 45

Le rôle du génie de l’air dans la sauvegarde-protection en opérations extérieures .................................................. LCL CHAPELLE ........................................................ 49

Le RGBIA dans la mission de protéger les forces en 2005 .................................................................................................... LCL KIRSCHER ........................................................ 53

Opération CALAO : Le 5 e RG en Côte d’Ivoire : acteur de la fonction AGESTER CBA ANDRIAMOLISON


ou simple prestataire de service ? .................................................................................................................................................... CNE MACHELON .................................................. 57

Concept ISOPEX et sauvegarde-protection .................................................................................................................................. CBA MERCURY ...................................................... 61

Montage d’un poste de combat de type HESCO BASTION .................................................................................................. CNE FOUQUET ...................................................... 65

Côte d’Ivoire : Retour d’expérience en sauvegarde-protection .......................................................................................... CNE GEROUDET .................................................... 69

- 35 -
SAPEUR

- 36 -
SAPEUR

Colonel LA PROTECTION-SAUVEGARDE
Bernard
BILBAULT
SUR UNE BASE AÉRIENNE PROJETÉE

The French Air Force (FAF) capability to send far and fast troops fully fitted with their
logistics, and fire systems thanks to never-ended upgraded aircraft is balanced by the
vulnerability of the air base.
Le colonel BILBAULT est chef du bureau
infrastructure en opération de l’armée French Air Force has defined three different types of DOB with a 400, 800, 1500 men
de l’air depuis 2002. strength, to perform the deployments of the immediate reaction force (FRI), the rapid
reaction force (FRR), and the main reaction force (FAT).
Originaire de l’EMIA (73-74), il a servi
aux 71 e RG (chef de section), 32 e RG Nowadays the deployable air base (DOB) may have to be deployed in a versatile threat
(commandant d’unité), 1 er RG (chef de environment. If therefore the main task of air engineer support units was rapid
BOI) et 10 e RG (chef de corps). runway repair, the current needs of a DOB abroad lead to shift the air sapper skills to
protection and survivability knowledges. So, these units can either reinforce the air
Stagiaire de la 101 e promotion de l’ESG, force protection or ensure themselves the defense of the DOB as they did during the
il a commandé la promotion 93-95 de ARTEMIS-MAMBA operation in BUNIA.
l’EMIA.
As preceding, the concept of « soldier - sapper - specialist » occures fully relevant.
Avant d’occuper son poste actuel, il a
tenu les fonctions successives de DEP et Even if the measures described are not novelties, the task to accomplish is hugefull.
de DGF à l’ESAG. A DOB is larger than a traditional one thousand men french post plus aeronautic areas
with logistic points, which matches with a three to five square km area. The preparation
of the deployment is an essential stage and the decisions have to be made accurately.

The protection and survivability have to be the very first concern during the decision
making process concerning the DOB deployment type forward operational base (FOB).

Si l’armée de l’air a la capacité de porter, il en est de même aujourd’hui avec les


vite et loin, les hommes et le feu grâce à bases aériennes projetées (BAP) suscep-
des vecteurs performants aux capacités tibles d’être mises en œuvre dans un
sans cesse améliorées, la base aérienne environnement de menace multiforme.
est son talon d’Achille, comme le faisait
remarquer récemment le général (2S) Si alors, la mission quasi-exclusive du
Copel1.
génie de l’air était la réparation rapide
Il en était ainsi au temps de la guerre de piste, aujourd’hui le bon fonctionne-
froide, où il s’agissait d’assurer la viabi- ment d’une BAP en OPEX conduit à
lité des aires aéronautiques pour per- réorienter ses savoir-faire, et plus
mettre l’emploi de la force aérienne, précisément dans le domaine de la
notamment celui de la force nucléaire ; « protection - sauvegarde ».

1) Un penseur bien connu de l’armée de l’air

- 37 -
SAPEUR

Après avoir défini les conditions de mise


en œuvre d’une BAP, puis examiné ses
vulnérabilités et les menaces encourues,
il sera précisé la nature de l’appui que
peut apporter le génie de l’air, en coopéra-
tion avec les compagnies d’infrastructure
opérationnelle (CIO) de l’armée de l’air, en
terme de protection et de sauvegarde, dès
lors qu’il ne peut être envisagé de faire
appel à des unités spécialisées du génie
de théâtre engagées par ailleurs.

CADRE GÉNÉRAL DE MISE EN


ŒUVRE DES BAP

Faute d’un corpus doctrinal aussi struc-


turé que celui de notre CDEF, l’armée de
l’air ne dispose pas encore aujourd’hui
de concept et de doctrine relatifs à la
BAP. Au mieux s’appuie-t-elle actuelle- - les bases « mixtes », qui constituent VULNÉRABILITÉS, MENACES
ment sur un besoin capacitaire défini par le plus généralement des points
l’EMA, lui imposant d’être apte à mettre d’entrée du théâtre (AIRPORT OF Vulnérabilités
en œuvre 1 à 3 BAP (400/800/1500 h) sur DEBARKATION - APOD) et sont
différents théâtres afin d’assurer le situées dans un pays voisin de la Les vulnérabilités d’une BAP sont liées
déploiement progressif d’une force de zone d’engagement (Entebbé, en premier lieu à l’accessibilité de l’em-
réaction immédiate (FRI), puis celui Douchanbé). prise. Ainsi :
d’une force de réaction rapide (FRR) et
enfin celui d’une force de réaction à N.B. : En dépit d’une menace de nature - la zone environnante, pour ce qu’elle
temps (FAT), les conditions environne- terroriste jamais à négliger du fait des offre de lieux de dissimulation et
mentales n’étant pas définies. opérations, la vulnérabilité des MOB et d’emplacements de tir,

Aussi, à la lumière des OPEX de ces des APOD reste très limitée, au regard de - les accès routiers, véritables points
15 dernières années, françaises ou leur site d’implantation. Aussi sera-t-il de passage obligés où transitent
alliées, il est possible de retenir les considéré uniquement le cas des FOB, tous types de mouvements entrants
constantes majeures suivantes : l’expérience américaine et britannique et sortants,
en Irak montrant la nécessité de mesures - la clôture périphérique dont l’inté-
a) trois types de BAP peuvent être définis : de protection-sauvegarde conséquentes. grité est le premier élément anti-
- les bases principales ou Main b) pour être au plus près des zones intrusion,
Operating Bases (MOB), accueil- urbaines, où œuvrent le plus sou- - les réseaux souterrains éventuels.
lant essentiellement des avions de vent les forces terrestres, ces BAP
combat ainsi que des ravitailleurs s’appuient de préférence sur une La planéité d’une BAP constitue un autre
et des ATS2, situées assez loin des infrastructure existante, générale- facteur de vulnérabilité car elle permet,
zones d’opération sur des sites ment un aéroport civil, car situé le par simple vision au ras du sol ou a for-
alliés ou amis et qui permettent à plus couramment à la périphérie, tiori sur tout point en surplomb, de
nos chasseurs, avec un minimum voire à l’intérieur, des zones urbaines. constater l’agencement de l’infrastruc-
de contraintes, la maîtrise du ciel Toutefois l’utilisation d’une emprise ture existante et l’ensemble des mouve-
et l’action contre des objectifs au existante un peu plus éloignée (ex. : ments et stationnements.
sol (Al Kharj, Istrana) ; base aérienne située à 50 à 100 km
- les bases avancées ou Forward de la zone urbaine) reste à privilégier Par ailleurs, les zones à concentration
Operating Bases (FOB), accueillant afin de limiter une vulnérabilité liée permanente ou ponctuelle de personnel
quasi exclusivement des avions de à la proximité urbaine. sur la BAP (zone vie, zone OPS, zone de
transport et des hélicoptères, transit, etc…) doivent être une préoccu-
c) les infrastructures utilisées sont pation majeure du commandement, en
situées sur le théâtre au plus près
souvent dégradées du fait généra- raison du nombre important de victimes
des zones d’engagement des
lement d’opérations antérieures ou pouvant résulter d’une attaque.
forces terrestres, afin d’acheminer
d’un manque d’entretien.
le personnel et les matériels et
d’assurer les opérations logis- Enfin le périmètre et les élongations
* internes de l’infrastructure rendent plus
tiques (Kaboul, Sarajevo, Bunia) ; **

2) Avions de transport stratégiques

- 38 -
SAPEUR

complexe l’organisation du système sur une BAP est essentiel, au regard de nefs, rehaussés par des filets ou des
défensif même si, a contrario, ils favori- leurs compétences et de leurs capacités. grillages.
sent les possibilités de dispersion des
différentes implantations en les rendant Au titre du soldat, elles peuvent interve- Les unités d’infrastructure auront aussi à
moins vulnérables. nir en renforcement des commandos de agir au profit du COMDETAIR par des
l’air pour la défense de la BAP, voire en travaux limitant la vulnérabilité de l’in-
substitution en leur absence comme ce frastructure telle que les zones :
Menaces
fut le cas à Bunia lors de l’opération
- OPS (PC OPS, tour de contrôle,
Artémis-Mamba. Un renfort limité doit
L’implantation d’une BAP sur une zone radars, systèmes d’aide à la navi-
pouvoir aussi être apporté dans le
où une force terrestre est engagée, n’est gation) ;
domaine du contrôle des foules, en par-
concevable que si les opérations mili-
ticulier lors de livraison d’aide humani- - techniques (dépôt de munitions et
taires ont abouti au contrôle des centres
taire. de carburant, centrales électriques) ;
déterminants de l’adversaire et à celui
de la zone d’engagement. - vie (hébergement, transit, etc.).
Au titre du sapeur, ces unités d’infra-
structure peuvent appuyer les unités
Aussi, si l’on exclut de ce propos les Dans ce cadre, les travaux à exécuter
opérationnelles. Ainsi :
actions contre les appareils au décollage consisteront à cloisonner les différentes
ou en approche finale, pour lesquelles la - les commandos de l’air, chargés de la zones (réalisation de murs, merlons, fos-
parade relève de leur auto-protection, et protection-défense de la BAP, en dur- sés et écrans), à durcir l’infrastructure
celles en provenance d’aéronefs hostiles, cissant les accès par des obstacles (toits, planchers, ouvertures), à enfouir
traitées par les unités sol-air, les menaces passifs et des corridors, en réalisant éventuellement le ou les PC en incluant
à considérer sont essentiellement liées des points d’appui, des emplace- leur approvisionnement en énergie et
au fait terroriste. ments de combat et autres fossés, en eau.
mettant en œuvre tout un système
Ainsi convient-il de prendre en compte : d’éclairage nocturne permettant, à En outre, la dispersion des installations,
l’intérieur de la BAP, de détecter plus nécessaires pour une moindre vulnéra-
- les tentatives d’intrusion par les
facilement tout mouvement suspect bilité, doit résulter d’un compromis avec
accès et les ouvertures existantes ou
autour des zones sensibles et, à l’ex- les contraintes techniques de mise en
créées dans la clôture ;
térieur, d’éblouir tout observateur ou œuvre des différents réseaux.
- les actions contre les convois au agresseur potentiel ; il pourra égale-
moment de leur entrée ou sortie de ment être nécessaire de réaliser un Toutes ces mesures doivent permettre
la BAP ; autre accès moins vulnérable que l’obtention d’une bonne protection face
- les tirs directs aux armes légères d’in- celui d’origine, avec son raccorde- aux tirs directs. Bien qu’elle ne relève
fanterie effectués par des snippers ment au réseau routier ; pas des unités d’infrastructure, la combi-
ou groupes armés ; - les unités sol-air, essentiellement en naison d’un contrôle de zone à l’exté-
embossant leurs systèmes d’armes rieur de la base associé à des systèmes
- les tirs semi-directs ou courbes (mor-
(Aspic, Crotale) ; de contre-mesure devrait réduire sensi-
tiers de circonstance) ;
blement la vulnérabilité face aux tirs
- la mise en œuvre de moyens RBC - les escadrons déployés en réalisant
indirects.
(utilisation des réseaux d’eau) ; des merlons de protection autour
*
des aires de stationnement des aéro- **
- l’action de foule à l’extérieur, voire à
l’intérieur de la base.

*
* *

LES MESURES DE PROTECTION-


SAUVEGARDE
De ce qui précède, il apparaît clairement
que le concept « soldat-sapeur-spécia-
liste » trouve ici toute sa pertinence.

Si les missions de spécialistes restent


valides (maintien de la viabilité des aires
aéronautiques incluant la réparation
rapide de pistes pour le génie de l’air,
réalisation d’infrastructure opération-
nelle, eau et énergie pour les CIO), l’ap-
pui du soldat et du sapeur que peuvent
apporter ces unités aux différents déta-
chements de l’armée de l’air œuvrant

- 39 -
SAPEUR

des aires aéronautiques avec leurs servi- - définition de priorités pour la mon-
tudes, sur une surface totale de trois à tée en puissance de la BAP (place
cinq kilomètres carré. Tout est alors des moyens nécessaires à la protec-
affaire de choix au moment de la tion-sauvegarde dans le plan d’ache-
conception de l’opération : minement) ;
- décision ou non d’implanter une BAP - renfort des moyens du génie de
au plus près ; théâtre.
- durée d’existence de la BAP ;
Aussi, lors du processus de planification
Les mesures préconisées ne sont pas - prise en compte totale ou partielle du déploiement d’une BAP type FOB, la
novatrices, sauf que la tâche est incom- des vulnérabilités, avec détermina- protection et la sauvegarde doivent être
mensurable. En effet, une BAP repré- tion d’un niveau de protection accep- la préoccupation essentielle de l’état-
sente un gros camp 1000 hommes, plus table en fonction de la menace ; major qui en a la charge.

- 40 -
SAPEUR

Colonel PROTÉGER NOS STATIONNEMENTS


Philippe
LORIDAN
CONTRE LES ATTENTATS À L'EXPLOSIF

The soldier has become increasingly a very sensitive resource that has to be preserved
Saint-cyrien de la promotion Général Lasalle on any theatre of operation. Therefore, protecting him was and remains a main worry
(79-81), il sert comme lieutenant au 9 e régi- of any commander.
ment du génie de 82 à 86. Après avoir suivi la
formation du diplôme technique de l'ESGM
de Versailles, il commande à Mont-de-Marsan The individual protections, from the breastplate to the latest recent flak jackets are
la 2 e compagnie du 15 e régiment du génie de more and more efficient. However, the protection when the soldier is back to the
l'air puis sert comme chef du bureau d'études military compound, has not been so deeply studied.
de la direction des travaux du génie de Lille.
By this way, the officers, NCO and soldiers are vulnerable when they are standing at
Admis dans le cycle de l'EMS2 par la voie du ease or working in a staff or a workshop.
brevet technique, il est ingénieur civil des
Ponts et Chaussées et breveté de l'enseigne-
ment militaire supérieur (CSEM et CID). In this case the infrastructure needs to be adapted in order to face the threat considered
by the commander. So the understanding of the different phenomena occurring, and the
Chef des moyens opérationnels du 25 e Ré- way they interact with buildings, is essential to design efficient protection systems.
giment du génie de l'air de 1996 à 1998, il
commande ce même régiment de 2001 à 2003.
La protection du soldat, lequel représente Quelle que soit la mouvance dont il est
Chef du bureau maîtrise des coûts du service plus que jamais une ressource précieuse issu, le terroriste qui n'est pas rapide-
technique des bâtiments, fortifications et tra- qu'il importe au plus haut point de pré- ment mis hors d'état de nuire se perfec-
vaux (STBFT) de 1998 à 2001, il y revient
comme adjoint opérations en 2004 et en est le server, a toujours constitué l'une des pré- tionne très vite dans le maniement des
directeur adjoint depuis l'été 2005. occupations principales du commande- armes et des explosifs. Par ailleurs, il est
ment lors des opérations. Si les moyens de plus en plus rarement inculte : « les
d'améliorer cette protection pour le com- terroristes ne deviennent pas intelli-
battant en action, depuis la cuirasse des gents, ce sont des intelligents qui
origines jusqu'au gilet pare-éclats de 2006, deviennent terroristes ». À cet égard, les
Lieutenant-Colonel ont fait l'objet d'améliorations continues, attentats qui ont frappé les grandes
Patrick la prise en compte de cette sauvegarde métropoles depuis quelques années
MARTIN sur les lieux de stationnement n'a pas tou- attestent de la compétence de ceux qui
jours été traitée de façon aussi approfondie. en ont été les organisateurs et les logisti-
ciens. Enfin, l'indifférence des terroristes
Il y a là une vulnérabilité singulière pour à leur propre sort, voire leur volonté
Saint-cyrien de la promotion de LINARES , il notre personnel présent dans les infra- affirmée de sacrifier leur vie, car ils sont
est affecté successivement au 32 e RG à Vieux structures, qu'il se repose dans les can- très souvent des kamikazes, en fait des
Brisach, au 5 e RG, à l’École Supérieure du tonnements ou qu'il s'active dans les vecteurs d'une efficacité redoutable.
Génie Militaire, au 10 e RG, à la Direction de
travaux de Paris. états-majors déployés. Comprendre les
phénomènes en jeu, et tout particulière- Ces « combattants » (d'un genre particu-
En 1988 il rejoint le STBFT où il participe à la ment leurs interactions avec l'infrastruc- lier) s'attaquent à des cibles plus ou
conception d’ouvrages spécifiques comme ture, doit permettre d'adapter cette der- moins vulnérables, habituellement quali-
l’infrastructure du missile nucléaire préstraté- nière pour minimiser autant que faire se fiées de « molles » ou de « dures » selon
gique HADES ou le centre de guerre électro- peut les effets d'un attentat à l'explosif. leur degré de protection physique.
nique, puis rejoint le groupe « Nucléaire
Protection » où il participe à la conception et à Entrent dans la première catégorie, des
la validation de divers dispositifs de durcisse- objectifs comme les gares de Madrid ou
ment des réseaux stratégiques, aux essais CONNAÎTRE LA MENACE de Londres, les Twin towers de New-
des magasins de stockage des munitions et à York…, dans la seconde, les bureaux
la rédaction d’ouvrages relatifs à la protection. Si une action militaire de type « haute
du représentant de l'ONU à Bagdad
intensité » (tir d'artillerie, bombarde-
(M. Vieira de Mello) en 2003, les gendar-
Il intègre la DCG pour y servir successivement ment…) visant nos installations ne peut
au sein de la sous direction travaux puis de la meries de Corse…, sans que cette distinc-
jamais être totalement exclue, elle ne
sous direction opérations d’infrastructure en tion ne semble dissuader les agresseurs.
constitue plus la menace principale pour
tant que conducteur d’opérations puis chef de
la section planification. les forces déployées hors du territoire Si les installations que nos forces occu-
national. pent en opérations sont censées être
En 2000 il retrouve le STBFT comme chef plus « dures » que « molles », elles n'en
de la section « Protection effets des armes » En revanche, une agression par attentat
puis du bureau « Protection et Sécurité des restent pas moins très exposées a priori.
à l'explosif est toujours possible (et pas
Infrastructures ». Il y conduit des études liées à D'une part, elles représentent une cible
seulement à l'extérieur, malheureuse-
la sécurité pyrotechnique puis d’autres sur la fixe, adaptée à la préparation minutieuse
protection offerte par l’infrastructure face aux ment), avec une forte probabilité qu'elle
de l'attaque car nombre de leurs caracté-
armes conventionnelles ou asymétriques en soit conçue et préparée pour causer le ristiques sont invariantes ou répétitives.
opérations extérieures ou en métropole. maximum de dommages.

- 41 -
SAPEUR

D'autre part, elles abritent des occupants


suffisamment nombreux pour que
l'agresseur puisse escompter un bilan
significatif. Enfin et surtout, elles sont
par nature un symbole qui garantit par
avance le retentissement recherché par
les terroristes.

Par ailleurs, trouver de l'explosif en


quantité suffisante ne représente guère
de difficulté majeure pour des terroristes
déterminés. Il peut avoir été pris dans les
réserves à usage civil (carrières…), fabri-
qué artisanalement à partir d'engrais ou
de désherbants (les recettes sont acces-
sibles sur Internet), ou plus simplement
issu d'anciens stocks militaires aujour-
d'hui dispersés. Notons au passage la
propension des « bombes humaines » à
doper la charge qu'ils transportent par
des projectiles aussi divers (billes, clous,
écrous…) que vulnérants.

QUELS EFFETS SUR LES INFRA-


STRUCTURES… ET LEURS OCCU-
PANTS ?
Parmi les différents phénomènes causés
par la détonation d'une charge explosive
« classique », c'est le souffle qui pro-
Ainsi, les immeubles massifs de type mement rapide des effets du souffle en
voque le plus d'effets. Il convient donc
« murs et refends porteurs » s'avèrent fonction de la distance, un choix de
d'en connaître les caractéristiques, et
bien plus robustes que les structures types de structures aussi peu sensibles
surtout les effets sur l'infrastructure.
« poteaux-poutres ». Dans ces dernières, que possible à ces effets, et un emploi
la propagation de l'onde de choc peut judicieux des matériaux et équipements
Une explosion engendre un pic de pres-
provoquer la rupture des poteaux et potentiellement dangereux.
sion qui s'atténue extrêmement rapide-
entraîner l'effondrement de la totalité de
ment quand il se propage à l'air libre.
l'immeuble, tel un château de cartes (cf. En premier lieu, il convient de mettre la
attentats du Drakkar - Beyrouth 1983 - ou plus grande distance possible entre tout
Ainsi, à charge équivalente, les effets
Oklahoma City - 1995). site potentiel d'explosion (circulation
d'une explosion seront réduits dans
d'importantes proportions si la distance publique, parking, local courrier…) et les
Enfin, il a souvent été constaté qu'une immeubles ou locaux sensibles.
avec le point zéro s'accroît. Par contre, la
grande partie des dommages causés
même explosion dans un volume
aux personnes, résulte de la projection Pour ce faire, l'on se doit de classifier les
confiné (tunnel, bunker…) générera une
de débris divers et tout particulièrement différents locaux selon leur sensibilité et
onde de choc bien plus durable et dont
les éclats de verre des vitrages dont les de les positionner en conséquence. Quatre
les effets seront multipliés (il est par
effets sur les personnes non protégées groupes génériques sont à considérer :
exemple connu que le bilan de l'attentat
sont particulièrement dévastateurs.
du 20 juillet 1944 contre Hitler aurait été • un sanctuaire : partie de l'emprise
tout autre s'il avait été commis dans un hébergeant le personnel et les maté-
bunker et non dans un bâtiment trop PREMIÈRE PARADE : ORGANISER riels dont la perte ne permet pas de
léger pour confiner l'explosion). L'ESPACE poursuivre la mission ;
À ces effets primaires s'ajoutent ceux, Ces effets peuvent être sinon annihilés • une zone tampon : partie de l'em-
secondaires, consécutifs à l'effondre- mais à tout le moins minimisés dans prise dédiée aux installations dont la
ment des structures ou à la projection de d'importantes proportions par la mise perte ne remet pas en cause l'exécu-
débris divers dans les volumes occupés en œuvre d'une infrastructure raison- tion de la mission principale ;
par le personnel. née, pensée en fonction de cette menace • un glacis : espace périphérique per-
particulière. mettant de détecter puis de prendre
La résistance d'un bâtiment à une onde
à partie et d'arrêter un éventuel
de choc est fonction de sa fréquence Pour cela, les principales parades
agresseur ;
propre : plus elle est élevée, plus il est consistent en une organisation de l'es-
fragile, plus elle est basse plus il résiste. pace qui exploite la décroissance extrê- • des accès : partie du glacis traversée

- 42 -
SAPEUR

dédiant les étages supérieurs à l'usage


de glacis d'autre part.

COMPLÉTER CETTE ORGANISATION


SPATIALE EN ADAPTANT LE BÂTI À
LA MENACE
Quelle que soit l'organisation spatiale
retenue, la nature du bâti est d'une telle
importance en cas d'explosion qu'elle
doit au mieux constituer un critère essen-
tiel dans le choix des immeubles de sta-
tionnement et à tout le moins être adap-
tée et modifiée pour gagner en sécurité.
par les voies de circulation et équipée Le diagramme ci-dessous permet d'esti-
Ainsi, les ouvrages de structure
des moyens de contrôle du personnel mer les dommages, humains et maté-
« poteaux-poutre » doivent si possible
et des véhicules accédant au site. riels, en fonction de la quantité d'explo-
être évités, et ce tout particulièrement si
sif utilisée et de la distance par rapport
leur façade est constituée de murs
D'évidence, la répartition des différentes au siège de l'explosion.
rideaux. Cependant, ils sont si répandus
fonctions entre les groupes définis ci-dessus
que leur emploi doit être envisagé.
ne relève pas du technicien mais constitue Cet abaque, d'un usage simple, peut être
un choix majeur de commandement. d'une aide précieuse lors des choix d'or-
Dans ce cas, préférence doit être accor-
ganisation de l'espace « horizontal ».
dée à ceux dont les façades les plus
Puis, l'organisation ainsi établie, il
exposées sont constituées d'un pare-
convient de mettre en place les mesures Par exemple, si la distance « sûre » autour
ment lourd (béton armé) et comportent
qui permettront de lui conserver toute sa du sanctuaire est de 400 m, il ne sera que
peu d'ouvertures. En effet, les possibili-
pertinence, en équipant le glacis et les peu affecté par les effets de l'explosion
tés de propagation des ondes de choc
accès pour interdire toute approche du d'une charge de 500 kg (équivalent TNT).
sont alors bien moindres que dans le cas
vecteur et de la charge transportée. Il
d'un remplissage léger des façades.
peut s'agir de points de contrôle ou De même, si la menace retenue est une
d'obstacles passifs : dénivelées périphé- charge de 700 kg, il apparaît d'emblée À défaut, il faut renforcer les murs exis-
riques (escaliers), chicanes, bornes qu'aucun personnel ni matériel impor- tants par des procédés additionnels appli-
rétractables ou non, mobilier urbain… tant ne devrait être positionné à moins qués sur la face externe (par exemple par
de 200 m de la limite extérieure du glacis. ajout d'un mur extérieur constitué de blocs
Leur implantation sera fonction d'une part creux de ciment ou de bois remplis de
de la menace prise en compte, d'autre part Enfin, cette organisation de l'espace doit béton et liaisonnés par des fers à béton) ou
du risque consenti : là encore, le comman- être considérée dans les 3 dimensions, sur la face interne (blindage par ajout de
dement, conseillé mais non pas remplacé en parant aux possibilités offertes par poteaux métalliques connectés au plan-
par les spécialistes, doit au préalable se les égouts, tunnels et autres voies de cher et au plafond et sur lesquels sont
prononcer clairement. pénétration souterraine d'une part, en

- 43 -
SAPEUR

fixées des plaques d'acier, projection de Cette solution, certes radicale, présente Si les principes qui doivent guider ces choix
films polymères, collage ou fixation de tis- de nombreux avantages (simplicité, effi- semblent aisés à appréhender, leur mise en
sus spéciaux…). cacité, faible coût…). pratique nécessite de solides connaissances
dans le durcissement des infrastructures.
Dans tous les cas, les éléments porteurs Si son maintien s'avère indispensable, il Cette culture particulière ne peut s'acquérir
(poteaux, poutres) et les liaisons entre les convient alors de protéger les éléments en quelques semaines ni par la lecture
éléments de structure devront être renfor- vitrés (pose d'un film de sécurité, rem- d'aide-mémoire spécifiques. Elle est le fruit
cés pour, si possible, prévenir toute rupture placement du vitrage par du verre d'une double expérience, dans le bâtiment
fragile et à défaut en contenir les effets de feuilleté ou du polycarbonate…) en d'une part et dans le raisonnement sécuri-
façon à éviter un l'effondrement total du veillant de plus à ce que le panneau taire d'autre part, et se trouve chez nos ingé-
bâtiment par effet domino. Les techniques verrier complet ne puisse pas être lui- nieurs militaires du domaine TOI (tech-
à employer (chemisage métallique, pose même projeté dans le volume à protéger niques des opérations d'infrastructure).
de fibres de carbone ou composites…) (renforcement des huisseries et de leurs
sont, pour certaines, inspirées des savoir- fixations, mise en place de barres ou de C'est en s'appuyant sur ces spécialistes,
faire de la construction parasismique. câbles de rétention…). que l'on trouve principalement dans le ser-
vice d'infrastructure de la défense (SID) et
Enfin, les menuiseries, vitrées ou non, De même, les portes devront être renfor- plus particulièrement au service technique
doivent faire l'objet d'une attention par- cées, voire remplacées par des portes des bâtiments, fortifications et travaux
ticulière en raison de leur grande vulné- blindées fortement ancrées dans des (STBFT), que le commandement pourra
rabilité et de leur dangerosité affirmée. parois elles-mêmes résistantes. faire stationner nos formations dans les
meilleures conditions de sécurité.
Quand la menace est élevée et qu'une Il apparaît donc nettement que les choix
fenêtre n'est pas indispensable, l'on doit concernant l'infrastructure de stationne- Ce ne sera alors plus seulement la sueur,
tout d'abord envisager de retirer la vitre ment sont lourds de conséquences poten- mais aussi l'expertise technique, qui
et condamner, voire murer l'ouverture. tielles sur la sécurité de notre personnel. épargneront le sang.

- 44 -
SAPEUR

Lt-colonel (TA) POUR UNE APPROCHE GLOBALE


Jean-Jacques
SOUCASSE
DE LA SAUVEGARDE-PROTECTION

This article is an initial look at the potential application of emerging technology to


support force protection and physical security enablers for the force as a means of
maximizing layered and integrated force protection and physical security capabilities
across the range of operations.
EMIA de la promotion Lieutenant
Lhuillier (85/86), commande le 1 er régiment It will examine innovative ways and means of increasing these capabilities without
du Génie depuis le 28 juillet 2005. excessive logistical and manpower burden in order to ensure greater survivability of
the personnel and assets performing the main mission.
Il a servi successivement au 71 e, 6 e RG
comme chef de section, puis de com-
The engineer force employment through its battlespace management tasks remain
mandant d’unité au 3 e RG. Il a servi
particularly relevant in supporting a proactive approach to an integrated, layered
comme instructeur à l’ESM de Saint-Cyr
et commandant de compagnie élève à and modular force protection system for both static and on-the-move mission
l’ENSOA. requirements.

En 1999, il intègre la 113 e promotion du Les opérations menées depuis le début L’examen de la menace conduit à propo-
CSEM puis la 8 e promotion du CID. des années 1990 avaient souligné le ser la constitution d’éléments de protec-
besoin en matière de protection, malgré tion dédiés et à examiner, pour la com-
Après avoir été chef de BOI au 31 e RG
le caractère souvent semi-permissif de posante AGESTER, des voies de déve-
(2000-2002), il a été affecté comme
officier de liaison de l’armée de terre l’environnement dans lequel évoluaient loppement possible pour répondre aux
française auprès de l’US Army nos forces. En outre, les opérations en besoins désormais identifiés.
Maneuver Support Center de Fort cours en Afghanistan et en RCI pour nos
Leonard Wood (Missouri) jusqu’à l’été Il s’agit de proposer des solutions qui
forces ou sur le théâtre irakien pour des
2005.
forces alliées, nous rappellent la néces- augmentent significativement les capa-
sité de préserver toute force engagée, cités d’une force déployée, atténuent ses
son personnel et son potentiel, afin de vulnérabilités, réduiraient l'empreinte
contribuer à sa liberté d’action. logistique tout en participant à une
meilleure appréciation de situation par
La menace évolue, sa nature est plus le commandement, afin d’augmenter la
hétérogène, en particulier dans les liberté de manœuvre et de mouvement
conflits de type asymétrique, ses effets se pour la force.
trouvent amplifiés par la résonance
médiatique. L’emploi de modes d’action LA MENACE ET SES CONSÉ-
contre insurrectionnels nous impose une
QUENCES
protection accrue et une mise à distance
de la menace qui doit permettre une La menace continue à se développer
meilleure discrimination pour une appli- rapidement. L’emploi par l’adversaire
cation graduée et réversible de la force. potentiel de stratégies adaptatives de
plus en plus sophistiquées est actuelle-
L’approche en matière de sauvegarde ment démontré sur des théâtres tels que
protection ne peut plus seulement l’Irak ou la Tchétchénie. Ses manifesta-
concerner quelques spécialistes ou fonc- tions seront de nature conventionnelle
tions spécialisées, elle doit être multidis- ou non, les éléments chargés de la mise
ciplinaire et intégrée, usant de combinai- en œuvre seront assurément plus
sons de dispositifs actifs ou passifs qui mobiles. La menace est donc multiforme
emploient des technologies désormais dans ses effets : tirs directs et/ou indi-
disponibles et qui participent à la dimi- rects, emploi possible d’armes à effet
nution de l’empreinte logistique et des thermobarique, de moyens NRBC,
besoins en main-d’œuvre tout en répon- attaques suicides ou par dispositifs
dant au besoin opérationnel. explosifs improvisés.

- 45 -
SAPEUR

Il est d’ores et déjà évident que l’adver- contraintes de protection du personnel interroger et évaluer l'intention adverse à
saire s'efforcera d'identifier les fai- interarmées et/ou interarmes et de leurs des portées accrues qui permettent de
blesses et les vulnérabilités des forces moyens. développer rapidement les réponses
auxquelles il sera confronté, en particu- adaptées et d’obtenir les effets désirés
lier celles des dispositifs ou procédures Les opérations récentes démontrent que létaux ou non, graduels et réversibles.
de protection des forces, pour profiter de la réponse à ce défi est d’un faible Ces capacités pourraient être obtenues
ces vulnérabilités dans l'accomplisse- niveau technologique et recourt généra- par l'emploi de la robotique (terrestre ou
ment de ses buts. lement à une main-d’œuvre importante. aérienne), l’emploi de radars, de détec-
teurs et d'autres technologies émer-
L’adversaire, en particulier dans des gentes en matière de protection balis-
conflits de nature asymétrique, a surtout LA RÉPONSE
tique ou NRBC.
un but politique plus que militaire et
Les forces comptent naturellement sur
recherche l’accroissement de sa puis- Une solution envisageable pourrait être
leurs moyens tactiques organiques pour
sance politique, de son image et de son la constitution de détachements de pro-
obtenir le niveau de protection adéquat,
influence. Il compense le rapport de tection qui ne nécessiteraient pas forcé-
ce qui détourne le plus souvent une par-
force défavorable en termes de capaci- ment de personnel spécialisé. Des unités
tie des troupes de ses missions essen-
tés armées en visant les objectifs de type PROTERRE seraient potentielle-
tielles et limite leur potentiel de combat.
majeurs. Par ces modes d’action, il ment utilisables pour ce type de mission.
cherche à gagner l'attention à sa cause
Les unités d’appui et de soutien ont, en
en infligeant des pertes et en détruisant Ce détachement pourrait être du volume
outre, des capacités intrinsèques limi- de la compagnie et serait employé par le
des cibles symboliques, y compris par
tées pour assurer leur protection et sont commandant d’une force déployée pour
l’emploi de commandos suicides.
souvent les plus vulnérables aux assurer la protection de ses unités ou de
Cette tactique est souvent couronnée de attaques. ses sites importants (PC, base logis-
succès. tiques ou base vie, etc.), rendant ainsi
La protection doit être le fruit d’une
disponibles les soldats préemptés par
La sauvegarde-protection permet à la action combinée et concertée qui
les services de garde.
force de préserver son intégrité, c’est-à- implique de la recherche de renseigne-
dire son potentiel militaire et humain, ment, de l’analyse du terrain, de la Avec l'évolution actuelle de la technolo-
ses installations. La protection vise à la coopération entre armes de mêlées et gie, il est dès à présent concevable de
préservation du potentiel de combat d’appui, de l’utilisation de réseaux de pouvoir réduire ses éléments à des
d'une force afin de permettre au com- capteurs et de communication, de l’amé- volumes inférieurs (sections, groupes)
mandant d’appliquer la force à l’endroit nagement du terrain et des infrastruc- en maintenant, voire en améliorant leurs
et au moment décisifs avec les effets tures permanentes ou semi-perma- capacités.
requis. Toutefois, les mesures de protec- nentes.
tion sont le fruit d’un compromis entre L'élément de protection pourrait
impératifs d'accomplissement de la mis- Pourtant, il ne semble plus concevable employer des capteurs ou des réseaux
sion et acceptation d’un risque. de dédier un volume de force important de capteurs du champ de bataille, voire
aux missions de protection. des radars pour la détection, des sys-
La sauvegarde-protection a pour but de tèmes de surveillance vidéo qui autori-
réduire au minimum les effets de la puis- Les technologies disponibles actuelle- sent l'identification et facilitent l’inter-
sance de feu ennemie et de sa ment offrent des possibilités d’améliora- ception de toute menace.
manœuvre. Elles sont le plus souvent tion de la protection en accroissant les
traduites en mesures passives par le capacités des unités investies de ses Les plates-formes robotisées, terrestres
biais d’ouvrage de protection réalisé par missions par le biais de solutions à base ou aériennes ou des ballons captifs
le Génie. de systèmes intégrés. Leur combinaison pourraient être utilisés pour fournir les
avec un juste volume de forces, qui portées de détection nécessaires et pour
La protection de la force sur un espace pourraient être non spécialisées, per- réduire les zones cachées du terrain.
de bataille lacunaire est encore actuelle- mettrait d’atteindre un niveau satisfai-
ment une carence capacitaire. Les sant. Ces moyens doivent être complétés par
besoins en main-d'œuvre et en res- des systèmes de contre-mobilité alliant
sources détournées de la mission princi- Cela passe par la conception d’un sys- aménagement du terrain, emploi de sys-
pale pour mettre en œuvre les mesures tème combinant différents moyens et tèmes télécommandés actifs avec muni-
ou dispositifs de protection réduisent les permettant une meilleure détection, iden- tions létales ou non, et de moyens pas-
ressources opérationnelles et tactiques tification et évaluation de la menace, sifs. Ces systèmes seront intégrés, coor-
disponibles et limitent ainsi la liberté ainsi que des capacités de réponse rapide donnés et dirigés à partir d’une station
d'action de la force. qui doivent être plus précises et persis- portable de commandement connectée
tantes dans leurs effets. Il est nécessaire, au réseau tactique, permettant à une
Le besoin en unités, en systèmes de pro- dans les opérations contemporaines, de petite équipe de faire fonctionner tous
tection intégrés et redondants conti- pouvoir bénéficier d’une meilleure capa- les systèmes et de répondre aux
nuera à croître pour répondre aux cité d’observation à distance, de pouvoir menaces.

- 46 -
SAPEUR

Ce détachement de protection procurerait : Ainsi, ce détachement de protection ne teurs et un centre de contrôle sur
fournit pas seulement une capacité ordinateur portable qui offre des
- la détection et l’identification de la
simple d'avertissement contre toute configurations multiples.
menace à distance accrue ;
intrusion, comme les capacités actuelle-
- Des ensembles de capteurs montés
- la précision, le maintien et la persis- ment employées, mais une capacité plus
tance des capteurs employés ; sur véhicules ou engins pilotés ou
globale de dissuasion, de détection,
robotisés qui fournissent des
- la capacité de déterminer les inten- d’évaluation, d’alerte et de défense.
moyens de détection, de vérification
tions adverses à plus grande dis- des alertes, des capteurs anti-intru-
tance ; sion ou anti-dérangement, une capa-
LES CAPACITÉS ACTUELLES OU À cité automatique de détection des
- la capacité de répondre par des
moyens létaux ou à létalité réduite à COURT TERME mouvements et de leur suivi reliés
distance ; par réseau de communication sécu-
Les technologies actuelles et émer- risé.
- des éléments supplémentaires à l’ap- gentes qui pourraient être mises en
préciation de situation et de son - Des systèmes anti-intrusion compre-
œuvre par des éléments de protec-
environnement par le commandant nant des radars de surveillance ter-
tion de force, qui étendraient signifi- restre portables qui permettent une
de la force ;
cativement la portée de mise à dis- alerte avancée, la détection d'intru-
- une réduction des coûts en main- tance (standoff) de la menace tout en sion et la discrimination entre une
d'œuvre dédiée et une restauration autorisant son suivi (tracking) puis menace constituée de véhicules (à
du potentiel de combat des unités l’identification précise dans des opé- roues ou chenillés) ou de personnels
chargées de la mission principale ; rations de sécurité opératives et tac- au niveau section ou au-dessus, y
- un accroissement corrélatif de l’effi- tiques sont listées ci-dessous : compris au moyen de radar terrestre.
cacité de la force déployée ; - Les systèmes de surveillance vidéo - Une capacité de commandement des
- une approche systémique et un pro- qui incluent des systèmes de sur- éléments de réaction qui permet la
cessus aboutissant à une capacité de veillance périmétrique, des localisation, le suivi, l’interception
protection multiple et intégrée. ensembles ou des réseaux de cap- des menaces potentielles hors du
contact.
- Des systèmes d’armes létaux et à
létalité réduite qui fournissent une
réponse graduelle, qui réduisent le
temps de latence dans la boucle de
« détection - décision – engagement »
et démultiplie des technologies
prouvées pour l'économie de force
et fournit l'offensive éloignée dans
des capacités défensives 1.
- Des capacités conventionnelles de
contrôle et de protection des accès
de type barrière pour limiter l'accès
aux sites critiques.
- L’interconnexion avec les moyens de
détection et d’alerte contre les
menaces non conventionnelles
NRBC, y compris la détection des
substances explosives.

La fonction de protection est par consé-


quent une fonction transverse qui assure
une posture permanente de sûreté à plu-
sieurs niveaux. Ainsi, l’emploi d’une par-
tie de ses moyens pourrait être adapté
aux besoins pour les points de contrôle
ou les installations temporaires.

1) Comme le système de contrôle LACS (Local Area Control System), pour la protection des zones de vie contre les intrusions pédestres (détache-
ments armés, groupes terroristes…) et mécaniques. Le LACS, est un outil fondé essentiellement sur un travail de senseurs et d’intégration de sys-
tèmes, de Thales. En décembre 2005, Thales s’est vu notifier par la DGA le Spectre (système de protection des éléments terrestres, avec une cin-
quantaine de partenaires), un démonstrateur visant notamment à quantifier le besoin opérationnel des forces pour leur protection (sécurisation
de cantonnement…).

- 47 -
SAPEUR

RÔLE DE L’AGESTER siques, offre des perspectives intéres- lations selon le niveau de protection
santes. Leur emploi peut être combiné requis par le besoin opérationnel ;
Le rôle de la fonction agencement de avec des structures composites à base
- le développement des solutions
l’espace terrestre (AGESTER) reste émi- de fibres qui offrirait en outre des capa-
techniques ;
nent par sa participation à la conception cités de contrôle des signatures ther-
au travers de l’appui géographique, la mique ou électromagnétique. Des pan- - l’évaluation des effets spécifiques des
détermination des vulnérabilités par une neaux peuvent être moulés selon des armes sur les structures conçues.
analyse terrain ou structurelle, les tra- gabarits modulaires préétablis et assem-
vaux d’aménagement et d’organisation blés selon des formes qui diminuent les Ainsi, afin de maintenir la liberté d’action
du terrain pour canaliser, protéger, voire effets des armes. et l’intégrité d’une force sur un théâtre
par l’emploi d’actions de déception ou d’opération, il est désormais impératif de
de camouflage. Cela comprend naturel- Des expérimentations menées aux États- concevoir un système de protection inté-
lement des actions de contre-mobilité Unis au sein de l’Engineer Research and gré qui combine l’ensemble des moyens
face à une menace diversifiée en nature Developement Center (ERDC) ont indispensables pour assurer le niveau de
et en volume, de protection contre la démontré le pouvoir de protection de protection requis par le commandement
menace NRBC et de réalisation d’infra- tels composants contre les effets de en fonction de la menace. Ce système
structures adéquates tant en phase fragmentation d’obus de 155 mm par doit être de nature proactive et aisé de
d’aide au déploiement que de soutien au rapport aux solutions classiques. mise en œuvre, tout en réduisant les
stationnement. coûts en main-d’œuvre et la charge logis-
En zone urbanisée, des solutions de tique. Une approche modulaire qui com-
Cet appui doit être envisagé et entrepris valorisation des structures existantes bine les moyens, qui participe à leur
de façon graduelle dès la phase de l’en- (murs, planchers, plafond,) existent, interconnexion avec les systèmes de
trée sur le théâtre. basées sur l’application par projection commandements tout en autorisant une
de couches sur la partie arrière de ces mise en œuvre graduelle, apparaît envi-
Un effort particulier doit être entrepris structures avec des matériaux de type sageable grâce aux capacités offertes par
pour la protection des installations fixes élastomères thermoplastiques ou l’évolution technologique.
ou semi-permanentes ; en effet, les feuilles de plastiques (polymères) ren-
forcées de fibre qui accroissent la résis- Cela aboutit à un système de systèmes
mesures de sauvegarde classique ne
tance aux effets mécaniques de souffle qui couvrirait l’ensemble des domaines
répondent plus aux besoins et à l’évolu-
au minimum d‘un facteur 2. Les essais concernés et des fonctions opération-
tion de la menace car elles ont recours à
pratiqués ont par ailleurs démontré des nelles impliquées. L’emploi de briques
des solutions qui n’ont pas évolué
temps de séchage compris entre 10 déjà existantes (détection NRBC, radar de
depuis le second conflit mondial. De
minutes et 72 heures, selon les maté- trajectographie ou de surveillances, sys-
plus leur empreinte logistique est deve-
riaux employés, compatibles avec une tèmes Moder, etc.) et de systèmes de
nue trop importante.
utilisation opérationnelle. communication et de commandement
tactiques doit être associé à des éléments
Il est donc nécessaire de recourir à
Ses solutions ont l’avantage d’offrir une dédiés à la protection. Enfin, le rôle de la
d’autres matériaux de type cellulaire, à
charge logistique moindre ; il est en effet fonction AGESTER, par sa maîtrise de
base de géocomposites comme les bas-
plus facile de transporter les compo- l’espace de bataille, les compétences
tions de type Hesco pour des structures
sants spécifiques qui mélangés aux détenues et les synergies entre ses trois
de protection modulaires dont la valeur
matériaux communs empruntés sur le composantes, reste primordial.
de protection anti-balistique serait gra-
théâtre seront la base des assemblages
duelle et pourrait être renforcée par l’uti- La prise en compte des aspects liés à la
modulaires réalisés sur place.
lisation de mélanges d’additifs dans les protection des forces doit par conséquent
matériaux de remplissage, afin de satis- Enfin l’utilisation de logiciels d’évalua- se traduire par une étude globale dans les
faire aux besoins de protection accrue tion et d’analyse de la résistance structu- domaines de la doctrine, de l’organisa-
face aux tirs ALI directs, aux tirs indirects relle d’infrastructure comme le logiciel tion, de la formation, de l’équipement et
et aux tirs de roquettes. SSA (Simplified Survivability Assessment de l’entraînement, afin de fournir à la
Software) compléterait les moyens en force les capacités requises pour agir
L’usage de matériaux avancés combinés offrant une capacité d’analyse et de dans l’environnement actuel et futur.
avec des préformes ou des moules pour conception des structures ou des
la constitution de renforts de protection mesures de protection adéquates, in situ
ou de protection (murs, chicanes, déflec- ou à partir du théâtre national.
teurs, barrières anti-véhicules, etc.)
quand la physionomie des lieux ne per- Ce logiciel est basé sur des modules qui
met pas de travaux classiques de merlo- permettent :
nage, est à rechercher.
- d’établir le dessin et le devis et le
L’usage de ciments composites et de niveau de protection estimé selon
poudres réactives qui procure des l’installation envisagée ;
bétons aux caractéristiques supérieures - de déterminer le temps et les moyens
pour des épaisseurs aux bétons clas- requis pour la réalisation des instal-

- 48 -
SAPEUR

Lieutenant-colonel LE RÔLE DU GÉNIE DE L’AIR


Laurent
CHAPELLE
DANS LA SAUVEGARDE-PROTECTION
EN OPÉRATIONS EXTÉRIEURES

Though Rapid Runway Repair is still the core of the missions of the Air force Engineers,
these units are more and more tasked in operations with protection and sustainability
Le lieutenant-colonel Laurent CHAPELLE works or with hardening works.
est ingénieur de l’école nationale supé-
The 25th Air force Engineers Battalion, endowed with a large quantity of various earthmoving
rieure d’arts et métiers.
equipment, as well as concrete production means, has a good capacity to perform this kind
Il a servi au 4 e régiment du génie puis au of works and it demonstrated this on many theatres of operations in the past few years.
15 e régiment du génie de l’air comme
Its most recent experience took place in Abéché (Chad) in 2005, where it built a 1200 m2 ammunition
commandant de compagnie.
storage with Bastion-Walls and local made pre-cast concrete beams. The cost of this operation,
Engagé dans le cycle de l’enseignement about 460 000 A, is low compared with the cost of a classical infrastructure operation, and its
militaire supérieur à partir de 1997, il est length of life remains coherent with the usual term of settlements on theatres of operations.
ingénieur SUPELEC depuis 1999 et suit
l’enseignement du collège interarmées
La projection d’un détachement du et l’emploi des unités d’infrastructure
de défense (7 e promotion), à l’issue
génie de l’air sur un théâtre d’opérations en opérations. Il s’agit de faciliter le
duquel il est affecté au service technique
extérieures s’inscrit le plus souvent dans déploiement d’une composante aérienne
des bâtiments fortifications et travaux
le cadre du déploiement d’une force sur une ou plusieurs bases aériennes
(STBFT).
aérienne multinationale. Le volume du projetées en lui livrant et en maintenant
Il est chef du BOI du 25 e régiment du détachement varie suivant la nature des en état l’infrastructure opérationnelle et
génie de l’air depuis août 2004. missions et l’ampleur des travaux à de soutien nécessaire à l’accomplissement
réaliser. Le rétablissement des surfaces de ses missions. Les deux compagnies
aéronautiques après une attaque d’infrastructure en opérations (CIO) ont
aérienne reste la mission la plus spéci- vocation à traiter l’infrastructure « verti-
fique du génie de l’air, son « cœur de cale », le 25 e régiment du génie de l’air
métier ». Cependant, lors des opérations (25 e RGA) étant, quant à lui, chargé de
récentes, où la coalition détient la l’infrastructure « horizontale » (surfaces
supériorité aérienne, les capacités du aéronautiques, dalles, terrassements…).
25 e régiment du génie de l’air ont
surtout été employées à des travaux Pour assurer efficacement ce rôle, il faut
d’aide au déploiement et de sauvegarde- successivement :
protection accompagnant le déploiement - préparer l’installation initiale de la
et l’installation de la composante composante aérienne : à cet effet, les
aérienne de la coalition. unités d’infrastructure en opération
doivent faire impérativement partie
Après un rappel des principales des échelons de reconnaissance et
missions et capacités du génie de l’air, des éléments précurseurs pour assurer
un exemple récent de réalisation sera le déploiement rapide des premiers
présenté. Il peut être considéré comme éléments dans les meilleures conditions;
emblématique de nombreux besoins
actuels sur les théâtres, en ce que - prendre toutes les dispositions
l’ouvrage en question répond à la fois nécessaires en fonction de la situation
aux besoins de sauvegarde-protection (environnement, menaces…) en
de la force et à l’exigence d’application vue de préserver la capacité opéra-
des normes de sécurité du temps de paix tionnelle du détachement projeté,
qui caractérisent les opérations y compris dans la durée : suscep-
actuelles, de basse à moyenne intensité. tibles d’être engagées avant le gros
de la force, les unités d’infrastructure
en opération participent à l’établisse-
RÔLE, MISSIONS ET CAPACITÉS DU ment des conditions de vie adaptées
GÉNIE DE L’AIR à la durée des opérations, au climat
et aux réserves locales. Leur action
Le concept et la doctrine d’emploi des comprend en particulier des travaux
unités d’infrastructure en opération de de protection, de dépollution, de
l’armée de l’air (approuvés respective- rétablissement ou d’aménagement
ment en 2003 et 2004) définissent le rôle des infrastructures.

- 49 -
SAPEUR

- assurer le désengagement de la Pour répondre le mieux possible à la port (matériaux et engins), de produc-
force : les unités d’infrastructure en problématique de simultanéité des crises, tion et de mise en œuvre de matériaux.
opération appuient le désengagement la préparation des forces de l’armée de Cette palette assez complète de moyens1
en restituant aux autorités locales et l’air s’articule autour d’une montée en lui permet d’« agir vite et puissamment2 »,
nationales les infrastructures occupées puissance progressive et modulaire des et en particulier d’obtenir, en des délais
par la force. Dans des circonstances forces (FRI, FRR, FAT), dont la composition très courts, un impact sur le terrain
plus exceptionnelles, elles peuvent pourra varier en fonction des objectifs permettant d’accroître significativement
être amenées à neutraliser les infra- assignés et de la nature de la menace. la protection des unités appuyées.
structures utilisées.
Ainsi, l’armée de l’air devra-t-elle être Ces capacités reconnues se traduisent
Le format des unités d’infrastructure en capable de mettre en œuvre, en moins de dans les faits par un niveau d’engage-
opération découle directement du deux mois et sur deux théâtres d’opéra- ment du régiment en constante augmen-
contrat opérationnel de l’armée de l’air. tions au minimum, une centaine d’avions tation 3 . Le 25 e RGA s’est notamment
Dans le cadre des cinq scénarios du livre de combat avec leur soutien opérationnel illustré à Sarajevo (Bosnie), Manas
blanc, l’armée de l’air, tout en assurant selon les principes suivants : (Kirghizstan), Petrovec (Macédoine),
le maintien de la posture permanente de Antebbé (Congo), Abéché ou N’Djaména
sûreté (PPS) et son renforcement éven- - déploiement d’une vingtaine d’avions (Tchad). Les missions confiées aux déta-
tuel, doit être en mesure de s’engager de combat et de leur soutien dans un chements du génie de l’air projetés com-
selon trois hypothèses d’emploi exclu- délai d’intervention de 72 heures portent systématiquement des travaux
sives (A pour mission AIR) : pour une première mission à J + 3, de sauvegarde-protection, ou, comme
- A1 : Opération multinationale conduite - projection de 1500 hommes et de leur dans le cas du dépôt de munitions
par l’alliance au titre de la défense équipement dans les mêmes délais, d’Abéché, de durcissement d’installa-
collective, tions sensibles.
- déploiement de 40 avions de combat
- A2 : Simultanéité d’une opération en moins de 15 jours,
multinationale et d’une opération - déploiement d’une centaine d’avions
LE DÉPÔT DE MUNITIONS D’ABÉCHÉ
nationale, de combat en moins de 2 mois. (TCHAD) : UN EXEMPLE EMBLÉMA-
- A3 : Simultanéité de plusieurs enga- TIQUE DES BESOINS ACTUELS EN
gements de gestion de crise. Les forces doivent pouvoir se déployer OPÉRATIONS
sur 3 bases aériennes projetées, dont
Ainsi la défense collective et les engage- une majeure, sur des pistes susceptibles Le dépôt de munitions d’Abéché (Tchad)
ments multinationaux régionaux (scéna- d’avoir été endommagées du fait de l’en- a été réalisé par une section du 25 e régiment
rios 1 & 2 du livre blanc) peuvent impli- nemi, sinon du fait d’une action natio- du génie de l’air au printemps 2005. Il
quer l’engagement, limité ou non dans nale ou multinationale. L’absence de s’agissait avant tout de mettre ce dépôt
la durée, de la totalité des forces proximité de ports n’est pas à exclure. en conformité avec les normes de
aériennes sur trois bases aériennes pro- sécurité relatives aux établissements
jetées dont au moins une majeure Lors des projections, le déploiement des pyrotechniques. Cependant, dans un
(hypothèse A1 & A2), le déploiement de structures de commandement natio- environnement plus hostile, une réalisa-
structure de commandement se faisant nales, voire alliées lorsque la France est tion similaire aurait pu être conçue pour
en priorité sur une de ces bases. Par nation-cadre, est prévu sur une de ces répondre simultanément aux besoins de
ailleurs, la simultanéité d’un engagement trois bases de théâtres, même si leur sauvegarde-protection d’une infrastruc-
multinational de moyenne ampleur et installation sur un autre site ne doit pas ture de stockage sensible. En effet, en
d’engagements nationaux ou multina- être exclue. opération, un dépôt de munitions ne
tionaux sur d’autres théâtres d’opéra- manquerait pas de constituer une cible
tions n’est pas exclue (hypothèse A3). Pour lui permettre de tenir le rôle qui lui privilégiée. Au-delà du durcissement
Dans ce domaine, la défense de l’inté- est dévolu dans ce contrat opérationnel, inhérent à la sécurité pyrotechnique de
grité du territoire hors métropole (scé- le 25 e RGA armé par quelques 900 hommes, l’ouvrage, il importe donc de le protéger
nario 3), la mise en œuvre d’un accord est articulé en quatre compagnies opéra- des tirs et de le concevoir de manière à
de défense (scénario 4) ou des actions tionnelles aux effectifs de 4/25/128. limiter les conséquences d’un tir : empê-
en faveur de la paix et du droit interna- Chacune de ces compagnies dispose, cher la destruction complète du stoc-
tional (scénario 5) peuvent obliger outre du matériel spécifique nécessaire kage et la perte de capacité opération-
l’armée de l’air à répartir ses moyens au rétablissement d’urgence d’une nelle qui en résulterait et limiter le dan-
sur un ou deux autres théâtres d’opé- plate-forme aéronautique, de capacités ger pour les troupes et les matériels
rations éloignés. importantes de terrassement, de trans- majeurs que représente l’explosion

1) 24 VBR et VIB dotés d’un canon de 20 mm, 170 engins de terrassement divers (tracto-chargeurs, dont certains sont blindés, tracteurs niveleurs,
niveleuses, compacteur, pelles hydrauliques, dont certaines sont blindées), 97 camions-benne de 8, 10 et 20 m3 , 67 attelages porte-engins, deux
centrales mobiles de production d’enrobé (120 et 220 t/h), 3 finisseurs à enrobé, 2 fraiseuses, deux centrales mobiles de production de béton
(60 et 160 m3/h), 3 finisseurs à béton, divers moyens de production de béton (dont 4 auto-bétonnières de 10 m3/h chacune et 10 bétonnières à
moteur thermiques) et de pose manuelle (coffrages, règles vibrantes, pervibrateurs), matériels de topographie, de laboratoire des sols…
2) Devise du 15 e RGA (dissous en 1999).
3) 22000 hommes/jours en 2001, 33000 hommes/jours en 2005.

- 50 -
SAPEUR

Dépôt de munitions d'Abéché (mars 2005).


Réalisation de dalles en béton hydraulique

d’une alvéole de stockage. Les principes


à appliquer lors de la conception du
dépôt sont identiques à ceux qui visent à
la sécurité pyrotechnique en temps de
paix. Il s’agit de compartimenter le dépôt
pour éviter la transmission de la détona-
tion d’une alvéole à l’autre et de proté-
ger le personnel contre les effets de Dépôt de munitions d'Abéché. Mise en place de la clôture (mai 2005).
souffle et les projections d’éclats.
ayant des groupes de compatibilité diffé- teurs) et de l’ensemble des moyens
L’exemple du dépôt de munitions rents et appartenant aux quatre divisions nécessaires à la maintenance et la répa-
d’Abéché démontre que ces objectifs de risque. Chacune des alvéoles permet le ration des matériels engagés.
peuvent être atteints sur les théâtres stockage dans des conditions conformes
d’opérations dans des délais et à des à la réglementation en vigueur de Les travaux, qui ont duré deux mois et
coûts raisonnables. Ce dépôt situé sur le quelques centaines de kilogrammes de demi, n’ont pas présenté de difficulté
camp CROCI à ABÉCHÉ, en plein désert matière active. Il est réalisé en « bastions- technique particulière. Le seul point déli-
Tchadien, a été conçu par la section walls » (avec comme matière première de cat de cette opération concerne les élé-
« infrastructure protégée » du service remplissage le sable du désert) et en pou- ments préfabriqués par entreprise civile
technique des bâtiments, fortifications et trelles de béton armé préfabriquées par locale, dont le suivi et l’assurance de la
travaux (STBFT) au profit du commande- entreprise sur le théâtre. qualité peut obéir à des procédures bien
ment des éléments français au Tchad. différentes de celles en vigueur en
L’ensemble des travaux a été réalisé par métropole. Néanmoins, moyennant
Destiné au stockage des munitions pré- un détachement du 25 e RGA du volume quelques précautions lors la mise en
positionnées (obus de mortier, gre- d’une section (1/4/21) disposant de œuvre (en particulier surveillance des
nades…) ce dépôt ainsi réalisé est géné- 11 engins de terrassement divers (dont flèches observées à la mise en charge), il
rateur de zones de danger d’une très certains sont également aptes au levage), a pu être confirmé que les poutrelles
faible étendue. Dans le cas d’un accident 2 arroseuses, 6 camions-bennes, 1 auto- étaient aptes à remplir leur fonction.
pyrotechnique, la structure arrêterait la bétonnière (moyen mobile permettant la
totalité des éclats primaires provenant production d’environ 10 m3/h de béton), Le coût d’une telle réalisation est de
des munitions. Cette particularité per- un lot de pose manuelle de béton (rails l’ordre de 460 000 A : environ 300 000 A
met de l’insérer sans danger à proximité de coffrage, règles vibrantes, pervibra- de matériaux et fournitures - essentielle-
des différentes activités du camp et
notamment au plus près du stationne-
ment des troupes.

Il présente une surface au sol d’environ


1200 m2. Il est composé de 6 alvéoles
permettant le stockage des munitions

Accident pyrotechnique à Doha (Koweit),


lors d’un exercice en 1991.
49 blessés, dont deux gravement,
105 véhicules détruits, 15M$ de dégâts. Dépôt de munitions d'Abéché. Mise en place sur bastion walls des poutrelles préfabriquées (avril 2005).

- 51 -
SAPEUR

CONCLUSION
« The large ground organisation of a
modern air force is its Achilles heel » 4.
Plus généralement, qu’il s’agisse de la
composante « air » ou de la composante
« terre » d’une force projetée, la com-
plexité et la vulnérabilité des systèmes
déployés, accrue par la nécessité, dans
bien des cas, d’un emploi de la force
limité à un très bas niveau par nos
troupes, rend plus nécessaire que jamais
la mise en œuvre de mesures de sauve-
garde-protection. Dès lors qu’elles
concernent des concentrations de forces
importantes, des zones logistiques ou
des centres de commandement, ces
mesures nécessitent l’engagement de
moyens de travaux lourds, seuls suscep-
tibles de produire une action significa-
Dépôt de munitions d'Abéché en cours d'achèvement (mai 2005). tive sur le terrain.

Pour être parfaitement optimisée, la


ment les bastions-walls et les poutrelles tchadien. Cette somme est relativement détermination des moyens à engager
préfabriquées, 125 000 A de surcoût faible au regard du coût d’une opération doit résulter de la confrontation d’un
OPEX (soldes), le reste représentant le d’infrastructure de même nature lancée effet à obtenir, exprimé par le comman-
coût des billets avions des précurseurs sur le territoire métropolitain. La durée dement, et de l’examen du terrain et des
qui ont dû emprunter une VAC et le car- ressources locales. Le plus souvent,
de vie de cette installation est évidem-
burant nécessaire au millier d’heures seule l’insertion d’un élément du régi-
d’engins exécutées et aux 4000 km par- ment plus courte que celle d’un ouvrage
ment lors des reconnaissances et/ou
courus. Le coût de la projection des de construction classique, mais elle parmi les éléments précurseurs permet
engins est réparti sur plusieurs opéra- demeure tout à fait adaptée à la durée la constitution du détachement le plus
tions successives réparties sur le théâtre habituelle de ce type d’engagement. adapté.

4) « La forte implantation au sol d’une armée de l’air moderne est son talon d’Achille » Captain Sir Basil Liddell Hart, Thoughts on War, 1943.

- 52 -
SAPEUR

Lieutenant-colonel LE RGBIA DANS LA MISSION


Philippe
KIRSCHER
DE PROTÉGER LES FORCES EN 2005

French engineers have resumed operating force survivability since the resuming of
peace support operations at the end of the seventies.

Le lieutenant-colonel Kirscher est chef One of the most important lessons learnt, either in Lebanon, Gulf war, former
Yougoslavia or Western Africa, is that it is worthy foreseeing the worst situation.
du bureau opérations instructions du
2 e REG depuis août 2005. The current concept of « three block war » is, regarding the current situations encoun-
tered on overseas operations, is deemed highly valuable.
Saint-Cyrien de la promotion 86-89
(général CALLIES), il a successivement Our forces, supported by our combat or heavy engineers, must plan engineering sup-
servi comme chef de section au 25 e RGA, port in matter of survivability as early as possible, including the full spectrum of
puis comme lieutenant et capitaine au threats ; i.e. terror or large calibre attacks in most the areas of operations.
5 e Régiment étranger de 1993 à 1994.
In such a case, French engineers, especially in combat units, need more accurate
equipment, especially for hardening combat positions and deflecting potential blasts.
Il a commandé la compagnie d’appui du
6 e Régiment étranger de génie de 1995 à Generally speaking, our forces must look closely to their initial layouts, including from
1997. the beginning in the OPP1 such features as force protection, taking in account those
points, engineers’ job on the field will be easier and they will spare useful workforce,
Il a été chef du bureau de préparation warranting effective survivability to our forces.
opérationnelle de l’état-major de la bri-
gade du génie, à l’issue de son passage La protection est devenue ces dernières lité la plus grande possible, une bataille
au CSEM/CID , 9 e promotion. années l’essentiel des activités - au même permanente pour les cœurs et les âmes,
titre que les missions relatives à l’aide au et une grande aptitude à basculer dans
Le lieutenant-colonel Kirscher est titu- des actions de coercition tout en limitant
déploiement des unités - des bataillons ou
laire d’un diplôme d’études approfon- les pertes au plus faible nombre pos-
compagnies du génie projetés.
dies sur le rôle du génie du C.E.F. dans sible. La protection-sauvegarde, depuis
les bases aéroterrestres en Indochine l’attentat du poste Drakkar 2, a son mot à
Il s’agit ici, à partir de l’expérience passée
1953-1954, période riche d’enseigne- dire en la matière.
des unités du 2 e REG, de dresser un
ment en matière de protection pour
tableau des actions entreprises pour
notre armée.
renforcer la protection de nos forces sur
S’INTÉGRER AU PAYSAGE
Le lieutenant-colonel Kirscher a servi les différents théâtres. Il est manifeste que,
comme « chief engineer » au sein de dans le cadre de corps expéditionnaires C’est en effet le trait prédominant des
l’ONUCI de décembre 2004 à juin 2005. qui cachent leur nom et au mandat actions de protection au début du
bien souvent mal défini dans le temps, XXI e siècle, gage de la meilleure protec-
nos forces sont entrées dans le cadre tion passive. Les sapeurs, chargés de
désormais familier de la « 3 block war » contribuer au déploiement de la force,
tel que défini par nos amis britanniques. doivent prendre en compte :
Celui-ci exige, dans une alchimie bien
- les infrastructures qui leur sont
compliquée, une aptitude à la réversibi-
confiées par les belligérants ou les
acteurs locaux bienveillants (cas de
la RCI) pour déployer les troupes
dans la relative sécurité que ces
emprises offrent. À ce titre, la pro-
tection - passive - passe tout d’abord
par l’intégration au paysage. La force
se veut bienveillante et assume
entièrement son rôle de maintien ou
d’imposition de la paix avec un profil
le plus bas possible. S’il n’y a pas là
Construction d’un dépôt de munitions à de camp Bondsteel 3, il faut bien
Mitrovica. Hiver 2005 admettre que dans ce cas les incon-

1) Operational planning process. MedO


2) Le poste Drakkar, immeuble de Beyrouth tenu par la 3e compagnie du 1er RCP, appartenant à la
FMNSB , fut volatilisé par un attentat qui fit plus de 60 morts.
3) Camp de déploiement initial de la brigade US au Kosovo, réalisé en 6 mois par la société
Brown and roots en 1999, et qui intégrait des abris 10 hommes dans chaque bâtiment troupe
du modèle « Sea huts » (Sea = South East Asia).

- 53 -
SAPEUR

SÉCURISER : L’ESSENTIEL DE LA
MISSION
Autre pan de la sauvegarde, un cran au-
dessus de l’indispensable intégration au
paysage de la crise moderne, la mise en
sécurité de nos emprises demeure un
souci constant :
- face aux incursions, des plus clas-
siques, lesquelles se traduisent par
des pertes de matériels ou une
acquisition parfois insensible de
renseignement sur nos emprises ou
nos capacités. Ainsi, la base de tout
dispositif demeure encore le réseau
de ronce et de concertina. Même
renforcé de mines éclairantes, il pré-
sente une efficacité parfois discu-
table. Trop sensible à la végétation
tropicale, il demande un entretien
permanent pour une efficacité rela-
RCI (Odiénné) Printemps 2005 : avant
tive surtout lorsque par ailleurs les
unités ont pris l’habitude de faire
vénients s’appellent emplacement termites, voire aux coups directs. exécuter une multitude de services
tactiquement discutable, espace- par de la main-d’œuvre civile
- les contraintes imposées par l’inter-
ment des bâtiments aléatoires, librement acceptée aux heures
armes et les paramètres de l’opéra-
faibles épaisseurs des couches de ouvrables dans les emprises.
tion : à ce titre, l’une des plus
protection, concentration des troupes Jusqu’à mise en œuvre et autorisa-
grandes inconnues est la durée.
avec les matériels et les munitions… tion d’emploi du MODER dans sa
Outre les mandats à 4 mois, qui font
- les matériaux de dotation ou locaux : changer les usagers - et donc l’ex- version non-létale, et même si les
l’équipement du sapeur de 2006 res- pression des besoins - très réguliè- chiens de guerre - lorsqu’ils sont dis-
semble bien à celui de 1950 en ponibles - sont d’une efficacité
rement, la planification initiale de
matière de protection : hormis l’in- complémentaire redoutable, aucune
l’opération est déterminante pour la
troduction des bastion-walls et solution plus probante ne paraît être
qualité de la protection : l’adage
autres Flexmac™, les matériaux de disponible.
« first in, last out » appliqué au
base les plus disponibles sont toujours sapeur doit rester dans toutes les - face aux intrusions programmées :
le sac à terre, les ronces et concertina, mémoires, de façon à trouver tout en vivant au mieux au milieu
les tôles cintrées fortes. Les maté- les infrastructures présentant le des populations, il s’agit désormais
riaux locaux présentent bien souvent meilleur compromis et à les amé- de pouvoir s’en protéger : passées
d’autres inconvénients : ressource nager avant l’arrivée du gros de la les premières opérations de contrôle
chère car rare ou chèrement mon- force. de foule au Kosovo, les opérations
nayée par des acteurs trop intéressés
sur un théâtre en crise, parfois diffi-
cile à acheminer, comme souvent en
zone nord de République de Côte
d’Ivoire (RCI). Ils présentent égale-
ment des défauts de qualité propres
à des pays au développement moins
avancé et ou la qualité ne se conçoit
pas selon les mêmes normes qu’en
Occident. Ces paramètres logistiques
font souvent oublier un trait essentiel :
un bon ouvrage est un ouvrage qui
dure, donc construit avec des maté-
riaux d’une durée de vie supérieure à
l’année : nos anciens avaient appris
à construire des postes de combat en
béton en Indochine. Certes, leur
démontage est fastidieux : mais ce
sont ceux-là qui garantissent la
meilleure protection et la meilleure
durée face aux intempéries, autres RCI (Odiénné) Printemps 2005 : après

- 54 -
SAPEUR

en RCI ont démontré qu’il fallait


développer des solutions plus perti-
nentes pour parvenir à dissuader,
canaliser, arrêter autant que faire se
peut des populations lancées à l’as-
saut des emprises ou des cordons de
troupes déployés et ce avant le
contact. Déterminées à user de tous
les moyens possibles, du harcèle-
ment à pied jusqu’à la voiture ou le
camion-bélier, ces foules représen-
tent, à l’heure du « combat camera »,
un risque nouveau pour toute
enceinte, aussi bien construite soit-
elle. Le 2 e REG a pu ainsi contribuer
au renforcement des emprises du
43 e BiMa, après les événements de
novembre 2004 à Abidjan. Il en res-
sort qu’il faut se montrer toujours
Ouvrage de protection du DETGEN.
plus imaginatif pour développer des
Les sacs à terre blancs, de mauvaise qualité, vont se décomposer peu de temps après…
solutions efficaces à moindre coût.
Des miradors ont ainsi été confec-
tionnés avec des structures à base pu essuyer les tirs de mortier de rebelles où les dépôts de munitions sont
de containers seuls capables de sup- parfois sous-estimés. La leçon est là : la isolés et suffisamment cloisonnés, et
porter le poids du niveau de protec- protection conçue pour le rétablissement d’autre part en recourant à des solu-
tion balistique requis et d’offrir la de la paix dans une zone en crise, c’est-à- tions durables, qui, si elles ont l’in-
hauteur requise. dire avant tout pour résister à des tirs convénient de figer les dispositifs,
d’ALI, doit pouvoir encaisser les tirs du occasionneront des économies en
plus gros calibre et limiter les effets les moyens et en main-d’œuvre ; de la
SE PROTÉGER DES COUPS plus dévastateurs du souffle de charges sorte seront évitées les réfections
d’explosif dépassant la tonne, aussi bien hiver après hiver, saison des pluies
L’armée de terre française avait redécou-
en termes d’organisation du terrain que après saison des pluies ;
vert au Liban, longtemps après la fin de
de renforcement des infrastructures. Si
la guerre d’Indochine, l’efficacité des tirs - adapter l’équipement des RGBIA à
le GEN 150 donne des solutions efficaces
d’artillerie ennemis. Elle y a fait aussi la ces nouvelles exigences : il faut peu
et rôdées, il s’agit de revoir nos procédés
terrible expérience de la confrontation de choses pour disposer d’une capa-
d’élaboration des réseaux d’abris et des
avec le terroriste déterminé et organisé cité à couler du béton en coffrage
rideaux de protection :
face à un dispositif de maintien de la paix (genre coffrages modulaires), ainsi
figé. 20 ans après, sur la terre africaine, - dès la conception, à laquelle le RGBIA que d’une petite capacité de produc-
elle a subi les frappes aériennes d’une doit être associé, en optant pour des tion de béton, autre que celle - très
aviation jugée amie, tout comme elle a dispositifs les plus aérés possibles, limitée - de la SAD. La mise sur le
marché d’écrans amovibles en Kevlar
est intéressante, de même que le
recours, bien connu, aux vitres blin-
dées. Ces capacités pourraient se
trouver dans la section appui de
chaque compagnie de combat. Les
abris du centre retranché de NA SAN
ont résisté aux tirs de mortier Viet-
Minh parce qu’ils étaient ancrés dans
des semelles en béton. Ce n’est plus
le cas de nombre de nos ouvrages
depuis longtemps ;
- revoir les concepts contribuant au
déploiement de la force, ce qui peut
parfois ou devrait être débattu au
niveau du D.L. génie, à l’aune des
leçons apprises sur la menace terro-
riste. L’équivalent d’une Skanderja
ou d’un PTT building 4 ne sont plus
RCI (MAN)/ Pas d’enceinte sans ses ribards et son no man’s land. Qui désherbera ? admissibles de nos jours. Les unités

4) Infrastructures de déploiement de la FORPRONU à Sarajevo ayant fréquemment servi de cibles à toutes sortes de projectiles.

- 55 -
SAPEUR

doivent être installées La protection des forces en opérations


dans des bâtiments de en 2006 demeure à la portée des RGBIA.
plain-pied, le double Encore faudrait-il qu’ils se voient accorder
accès aux emprises quelques moyens supplémentaires et
systématique, les mer- surtout que les principes d’emploi du
lons ou murs anti-blast
génie, dont l’anticipation, soient appli-
doivent être implantés
qués à la lettre.
en fonction de la
menace principale et la
plus dangereuse si elle
est avérée. De même
des normes doivent
être rendues dispo-
nibles pour l’élabora-
tion des postes de fil-
trage, dont on a vu que
l’usage le plus courant
est de contrôler des
mouvements routiniers
de militaires et de civils Abri en terrain enneigé : une ressource
non comptée.
réputés inoffensifs.

La meilleure des enceintes demeure un mur patrouillé et éclairé.

- 56 -
SAPEUR

Chef de bataillon OPÉRATION CALAO - 3 e MANDAT


Patrick
ANDRIAMAHOLISON
LE 5e RÉGIMENT DU GÉNIE
EN RÉPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE :
ACTEUR DE LA FONCTION AGESTER OU
SIMPLE PRESTATAIRE DE SERVICE ?
EMIA promotion Général DABOVAL
1990-1992. Since April 2004, pursuant to Security Council resolution 1528, the 5 th (FR) Engineer
battalion has deployed an engineer detachment composed of one road work company
DA ESAG 1992-1993. and one logistic company in Côte d’Ivoire.
CDS travaux lourds 72 e RG 1993-1995. It is the only French contribution to UNOCI. After almost 2 years, some lessons-learned
have been identified, among them one is detailed in the two following articles.
OA c i e travaux 4 e RSMA LA RÉUNION
1995 -1998. The main point is that, to be efficient, force protection requirements have to be consi-
dered as early as possible, i.e. at the beginning of the planning process.
CDU 4 e COGA AVORD 1998 - 2000 (opex
Kosovo). It is not currently the case, political and financial reasons are too often the predomi-
nant ones, and force protection is neglected.
Adjoint chef de bureau instruction
travaux SDGA 2000-2004.
Présent sur le théâtre ivoirien depuis Le 3 e mandat du détachement du génie a
Chef BML 5 RG depuis septembre 2004.
e
avril 2004, le détachement du génie fran- été très souvent confronté à la probléma-
çais, majoritairement armé par le 5 e tique suivante : réaliser un dispositif pas-
Chef DETGEN ONUCI avril à octobre Régiment du génie, représente la seule sif de sauvegarde et de protection sur
2005. participation française à l’opération des une infrastructure choisie unilatérale-
Nations-Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI). ment (sans concertation avec les mili-
taires) par les fonctionnaires de l’ONUCI,
Fort de 171 hommes et femmes, le déta-
sur des critères économiques et poli-
chement, formant corps de 2 e niveau,
tiques. Leur seul et unique but étant d’at-
a pour mission principale, aux côtés des
Capitaine tribuer rapidement une zone aux diffé-
sapeurs pakistanais et bangladais, d’ap-
Gilles puyer le déploiement et de soutenir le rents bataillons et de dicter les travaux à
MACHELON stationnement des forces onusiennes, réaliser sans schéma directeur clair ni
fortes de 7200 soldats. Mais dans un vision à moyen terme du besoin. Les réa-
contexte politico-militaire instable et à lisations confiées aux unités de travaux
l’avenir incertain, la sauvegarde et la incluaient rarement les ouvrages de sau-
protection de la force multinationale font vegarde et protection, les matériaux
partie des principales priorités du DET- nécessaires à leur réalisation étant par
GEN ONUCI. ailleurs présents en très faible quantité.
ESM promotion CES RAFFALI 1998-2001.

DA ESAG 2001-2002.

CDS Travaux lourds 5 e RG Mourmelon


2002-2004.

Dont MCD Polynésie CDS chantier de la


piste traversière de La Papenoo début
2003.

OA 5 e RG 12 e CAS 2004-2005.

- 57 -
SAPEUR

Pourtant les expériences passées Les émeutes de janvier se sont calmées problématique se répétera encore souvent
auraient dû sensibiliser les autorités d’elles-mêmes et tout s’est bien terminé tant que l’on n’admettra pas que le sapeur
onusiennes quant à l’importance de ce pour cette fois. Certes « Le contrôle de doit être intégré dès la phase de concep-
type de travaux. Les derniers événe- foule est un combat d’attitude » comme tion, dès la première reconnaissance de
ments de janvier 2006 sont là pour le déclare le lieutenant Edouard, chef de terrain. De plus, la fonction AGESTER est
mettre en évidence cette probléma- section de combat du Régiment de une fonction qui exige d’énormes moyens
tique. En effet, sur le théâtre ivoirien, Marche du Tchad, déployé pour renfor- techniques, humains et financiers ainsi que
trop rares sont les dispositifs onusiens cer la défense de l’état-major onusien à les fameux délais du sapeur. Elle demande
offrant un dispositif de sûreté satisfai- Abidjan, mais l’existence d’un bon dis- concertation, réflexion et technicité qui exi-
sante. Les installations aux vues et aux positif passif offrant une bonne assise de gent la participation de spécialistes dès la
coups directs du premier venu sont défense permet d’économiser le poten- genèse d’une opération. Sur le théâtre, il
incapables de résister à la moindre tiel humain et renforce l’image volonta- est impératif que le sapeur soit en mesure
pression d’émeutiers : « bastion riste de la force. À moins de faire fi des de donner son avis technique et de trans-
walls » en guise de poste de combat et règles d’engagement. mettre ses besoins en matériaux, afin que
concertinas pour matérialiser les les mêmes erreurs ne se reproduisent pas
limites du camp constituent souvent le Ces événements serviront-ils de leçon pour avant l’arrivée éventuelle des 3000 renforts
seul rempart. l’avenir? Il est à craindre que non car cette demandés par l’ONUCI.

- 58 -
SAPEUR

Le capitaine MACHELON a été projeté au protection de l’emprise. 15 jours plus confiance dans la région de Bouaké,
sein du détachement français du génie tard le camp est abandonné sous la pres- nous avons pu intervenir en amont de
de l’ONU en Côte d’Ivoire, en tant que sion des jeunes patriotes qui perdent l’installation de la troupe. Le choix du
Chef de l’équipe de reconnaissance tra- 5 tués à cette occasion. site a pu donc respecter les impératifs
vaux, d’octobre 2005 à avril 2006. Des d’une emprise compacte, éloignée du
missions de sauvegarde et de protection Le bataillon concerné occupait une zone centre-ville, disposant d’un accès princi-
des forces ont été confiées à ce détache- de 8 hectares située en centre-ville, atte- pal et d’un accès secondaire, entourée
ment. Ses réalisations et l’expérience nante à une place de marché et longée d’un mur d’enceinte et d’un possible
des événements qui sont survenus sur par plusieurs axes urbains. Protégée par « no man’s land ».
le territoire en janvier 2006 ont montré un rouleau de ribard et quatre postes
que le plan de défense des implantations d’observation, ce dispositif défensif s’est Le souci légitime du bien-être des
de la force était un point clé de la sauve- révélé nettement insuffisant. Suite à troupes, ne doit pas prédominer dans le
garde et de la protection. Pour être plei- notre reconnaissance, des travaux cor- choix de l’emprise. D’ailleurs les élé-
nement efficace, l’action du génie doit se rectifs avaient été demandés nécessitant ments de confort ne sont pas intrinsè-
situer dès l’amont de l’installation des de gros moyens sans que pour autant quement liés à la situation de la zone
troupes. Les travaux engagés doivent cela change la situation géographique d’installation, en revanche la sécurité
être adaptés à la menace et leur impact défavorable. Bien sûr, il était délicat et l’est. L’électricité est en général fournie
sur la mission de maintien de la paix est coûteux de déménager l’emprise vers un par des groupes électrogènes, l’eau est
essentiel. lieu plus resserré et plus isolé. Une fois stockée dans des bacs souples et distri-
installé, il est difficile de déplacer un buée par des motopompes, les sani-
**
* camp tant pour des raisons matérielles taires et les logements sont installés
que politiques. Le choix initial de l’em- dans des structures préfabriquées type
CORIMEC. Anticiper en intégrant le
ANTICIPER prise est donc primordial.
choix d’un site adapté est donc le maître
Début 2006, au cours d’une reconnais- Inversement, amenés ensuite à effectuer mot dans le cadre de la mission de pro-
sance à Guiglo dans l’ouest de la une reconnaissance en vue de réaliser le tection des forces.
République de Côte d’Ivoire, l’équipe a déploiement du bataillon marocain à
**
constaté de graves faiblesses dans la Sakassou au nord de la zone de *

- 59 -
SAPEUR

S’ADAPTER À LA MENACE ET À LA chicanes et un poste de sécurité durci paix. Par ailleurs, un dispositif surpro-
MISSION seront réalisés. La zone vie, quant à elle, tégé au regard de la menace inquiéterait
située hors des vues des passants, n’est les populations au lieu de les rassurer.
Une fois l’emprise choisie vient le pas voisine d’un axe de circulation lon- Il importe donc d’adapter ces travaux
deuxième temps de la réflexion : adapter geant le camp. La menace venant de aux justes besoins de la protection des
la défense à la mission de maintien de manifestants équipés d’armes légères a troupes face à la menace la plus probable.
la paix et à la menace identifiée. été prise en compte et le plan de défense
Reprenons l’exemple de Guiglo précé- du camp adapté en conséquence. Le **
demment cité. La région de la Moyenne camp ne sera pas pour autant durci *
Cavilly - capitale Guiglo - fut le théâtre contre une attaque de plus haute
d’affrontements au début du conflit. Les intensité peu probable actuellement. En conclusion, la sauvegarde et la pro-
milices de jeunes patriotes restent Cependant, le caractère resserré et tection des forces est une nécessité qu’il
encore actives dans cette zone. En excentré du camp permettra si la situa- faut anticiper et adapter à la situation et
conséquence, la menace à prendre en tion l’exige de renforcer le plan de à la mission. Cet équilibre est lourd de
compte ne se limite pas au risque de vol défense. Être en mesure d’adapter son conséquence et engage la responsabilité
mais doit inclure le contrôle d’une foule plan de défense à la menace est donc un du chef tant à l’égard de la sécurité de
violente et hostile qui peut se mobiliser prérequis à la réussite de la mission. ses subordonnés qu’à propos de la réus-
rapidement. Cette absence d’adéquation site de la mission. Cependant, les événe-
entre la menace et le plan de défense de Quel impact les mesures de sauvegarde ments de janvier ont aussi et surtout
l’emprise de Guiglo a eu les consé- et de protection d’un détachement ont-
prouvé l’importance de l’implication des
quences que l’on connaît. elles sur sa mission de maintien de la
troupes dans leur défense. En effet, les
paix ? Une emprise dotée d’un plan de
Revenons à l’exemple des travaux envi- défense adapté et cohérent donne de la Sénégalais à San Pedro face à des mani-
sagés à Sakassou : un no man’s land va crédibilité et du poids aux forces impar- festations hostiles ont tenu leur position.
être créé devant le mur d’enceinte grâce tiales. En effet, une troupe bien défen- Enfin, Gengis Khan disait bien à propos
à 3 rouleaux de ribard, des postes d’ob- due sait être dissuasive sans être agres- de la muraille de Chine : « Le mur
servation et de combat vont être sive vis-à-vis des populations dans le dépend moins de sa hauteur que de la
construits. À l’entrée principale des cadre d’une mission de maintien de la valeur des défenseurs ».

- 60 -
SAPEUR

Chef de bataillon CONCEPT ISOPEX


Frédéric
MERCURY ET SAUVEGARDE-PROTECTION

In 1999, a combined working group produced the ISOPEX concept, that aimed to stan-
dardize the general conception and the realization of a 1000 men camp in a theatre of
operation. The main target of this working group was to provide facilities enabling the
Saint-Cyrien promotion Lieutenant Tom
Morel (87-90) forces to survive in good conditions in order to operate.

A servi au 6 e R.E.G. puis a commandé The force protection aspects were concerned by a all chapter of the ISOPEX concept,
une compagnie de combat au 2 e R.G. but they were never really taken in account, and no major evolution could be observed
in this domain after 6 years of permanent deployment of French forces in operations.
Titulaire du DT TOI en 2001.
This article deals with some sensitive points in force protection and survivability
A servi à l’EG de Châlons-en-Champagne. during long term operations.

Actuellement instructeur « conduite


d’opération » à l’ESAG. En 1999, un groupe de travail interarmes LA PROTECTION DES PERSONNELS
a donné naissance au concept ISOPEX. Il
OPEX et MCD : Centrafrique 1992, s’agissait de « définir la conception Sur le plan technique et pour le confort
Cambodge 1993, Bosnie 1994, Gabon du soldat en opération, l’élaboration du
générale et la réalisation de l’infrastruc-
2002, Kosovo 2004.
ture d’un camp pour une force de 1000 concept ISOPEX a mis en exergue le
hommes » afin de répondre à la problé- sous-équipement de l’armée française
matique du stationnement longue durée dans le domaine du stationnement
de forces armées engagées dans des en opération. Ainsi depuis 1999, les
opérations de maintien de la paix. programmes d’équipement ont intégré
des marchés variés allant du bungalow
Le souci premier de ce groupe de travail d’habitation jusqu’à la station d’épuration
était de « déployer et d'installer des en kit, en passant par des cuves de
troupes dans des conditions de vie réserve d’eau ou des centrales élec-
indispensables à la conservation des triques. Tous ces matériels sont achetés
effectifs » 1. et pré-positionnés en métropole pour un
départ immédiat à la demande, en cas
Le document publié en novembre 1999 de besoin (c’est notamment le cas de
n’a jamais été approuvé. Néanmoins le gros matériels électriques qui deman-
concept a été appliqué sur plusieurs dent des délais de livraison importants).
théâtres et notamment au KOSOVO.
Toutes les difficultés techniques ont été Curieusement les moyens de protection
résolues pour obtenir maintenant d’ex- des forces restent classiques et les évo-
cellents résultats pour le confort des lutions depuis les « années SARAJEVO »
troupes en campagne et parfois même n’ont pas été décisives. Il est vrai que
l’esthétique des bâtiments. pour les héritiers de Vauban, la BOSNIE
a été un formidable laboratoire de la
Curieusement la sauvegarde-protection protection, mais on aurait pu, à juste
qui fait pourtant l’objet d’un sous- titre, en attendre des évolutions
dossier complet dans le document majeures. En bref, nous sommes passés
n’a vu aucune évolution majeure se de l’ère du sac à terre à celle du « bastion
dessiner sur le terrain. wall » sans véritable changement des
pratiques sur le terrain.
Cet article voudrait apporter un éclairage
génie sur quelques points sensibles de La protection recouvre « toutes les
la sauvegarde-protection des troupes mesures et moyens destinés à minimi-
afin qu’ils soient mieux pris en compte ser la vulnérabilité du personnel ou des
sur les théâtres. installations par rapport à toutes les
1) Objectifs du mandat :
- établir le dossier de définition d'une infrastructure de stationnement en opération extérieure (ISOPEX);
- effectuer l'inventaire des études et programmes d'équipement en cours ou programmés;
- recenser les moyens existants.

- 61 -
SAPEUR

menaces ». c’est ainsi que le groupe de tion, les bâtiments existants2 ou le relief3. étudier le renforcement de la protection
travail ISOPEX a retenu une liste de Concernant les tirs indirects, chaque du camp de « Film City » abritant le PC
menaces applicables à la plupart des baraquement ne pouvant être protégé de cette force. Ses directives incluaient,
théâtres ; face à ces menaces le maître- individuellement, la solution à retenir non seulement l’étude des points faibles
mot de la protection réside dans l’utilisa- est celle de l’abri enterré proche d’un du camp, mais aussi la sécurisation des
tion du « bastion wall » dans toutes ensemble de bungalows. réseaux de distribution d’eau potable et
les configurations possibles. Le dossier d’électricité. De plus, une étude particu-
donne un large choix de construction et lière devait aboutir à l’autonomie com-
de protection à base de ce système. Pour plète du camp en eau et en électricité.
autant, on est surpris de la pauvreté de
nos protections sur certains théâtres et Cet exemple montre bien la préoccupa-
le travail du sapeur nécessite parfois de tion du commandement par rapport à la
revoir la mise en œuvre de principes de vulnérabilité de deux vecteurs vitaux
base. En effet, face à des « immeubles » d’une force : l’eau et l’électricité.
de bungalows orientés par rapport au
soleil et à la vue panoramique du paysage L’EAU : L’eau est un fluide sensible car il
(cf. camp du BELVÉDÈRE, KOSOVO), Camp américain de BONDSTEEL (KOSOVO). peut devenir facilement un vecteur de
le sapeur aura quelques difficultés à Entrée d’un bunker enterré prévu pour 80 hommes propagation d’épidémies ou de sub-
entre deux baraquements logement.
persuader le chef interarmes de Les baraquements en bois ont été achetés en kit en Autriche.
stances toxiques utilisées par des terro-
construire des murs de « bastion wall ». ristes. Le sapeur, conseiller du comman-
Dans le même ordre d’idée, que Sans adopter les solutions lourdes à dement, ne doit pas manquer de cher-
deviendrait l’esthétique de la façade l’américaine, on peut aisément imaginer cher la solution qui permettra d’effectuer
vitrée d’un PC protégée par une muraille des containers enterrés (dans ce cas ses le cycle complet de l’eau (forage, traite-
de sacs à terre… parois devront être renforcées) ou des ment, stockage, distribution, épuration
constructions en « bastion wall » en surface des eaux usées) sans avoir recours à une
comme préconisées dans le dossier entreprise ou à un système local. Le
ISOPEX. schéma préconisé par le groupe de tra-
vail ISOPEX admet l’hypothèse d’une
arrivée d’eau extérieure. Ce mode de
LA SAUVEGARDE fonctionnement ne doit pas devenir la
norme car la dépendance dans le
À la suite des événements de mars 2004 au domaine de l’eau est un facteur de vul-
KOSOVO, le général (GE) KAMMERHOFF, nérabilité.
commandant la KFOR, a demandé la
constitution d’un groupe de travail pour
PC français à NOVO SELO.
La façade vitrée protège une coursive
de plusieurs dizaines de mètres de long
contre les éclats… de rire !

Le sapeur, conseiller du commande-


ment, aura soin de vérifier l’application
des mesures élémentaires de protection
autant que l’efficacité et la solidité des
postes d’observation et de combat.

Ainsi avant de vouloir tout résoudre à


coup de m3 de « bastion wall », on aura
soin de choisir les emplacements des
zones vie (habitations, mess) et des
zones de commandement (centre opéra-
tion, transmission) afin de les abriter des
vues et des coups directs par la végéta- Plan du camp 1000 hommes. Réseau de distribution de l’eau.

2) C’est le cas du camp de PLANA, KOSOVO où les bungalows ont été construits au milieu de bâtiments existants.
3) Sur le camp américain de BONDSTEEL l’ensemble de la zone vie est judicieusement protégé des coups directs par le relief ; il est vrai que la
surface du camp le permet…
4) On est parfois surpris de voir le nombre important de personnels locaux qui travaillent dans les camps des forces de maintien de la paix. S’ils sont
une manière de montrer notre intégration dans le tissu social d’un pays ils restent néanmoins une source de renseignement pour les belligérants
et une menace potentielle pour nos installations.

- 62 -
SAPEUR

Actuellement le génie peut, avec les conisée pour un camp 1000 hommes est
matériels en dotation, accomplir cette fournie par 8 groupes de 400 kW dont 6
mission. Néanmoins le coût du traite- fonctionnent en permanence en régime
ment pour un contingent de 1000 normal d’où une puissance disponible
hommes (150m3/jour) peut s’avérer, sui- d’environ 2,4 MW (pour des raisons bud-
vant la qualité de l’eau puisée, extrême- gétaires les lots génie ne comportent
ment élevé. Selon le concept ISOPEX, que 6 groupes au lieu de 8 prévus).
les Unités Mobile de Traitement de l’Eau À noter que l’indépendance électrique
et les MATEM sont normalement utilisés n’est pas forcément liée à un environne-
uniquement pour les phases de montée ment hostile ; pour exemple, le raccorde- Centrale électrique de NOVO-SELO
en puissance ou de démantèlement. En ment électrique du camp de « Film City » (KOSOVO)
régime normal, la potabilisation de l’eau sur le réseau local aurait privé de cou-
se fait avec des matériels civils achetés rant plusieurs villages aux alentours. « bastion wall » on se contente facile-
« sur étagère » comme cela a été joué au En terme d’image, ce raccordement, ment de la solution des merlons.
Kosovo ! Il sera alors nécessaire d’éviter inacceptable pour le commandement,
Ces derniers prennent beaucoup de
le puisage d’eaux superficielles et d’es- n’a jamais été effectué.
place et demandent un entretien pério-
sayer, si possible, de rechercher des
Ainsi la variante n° 1 du concept ISOPEX dique (rechargement et tassement).
nappes souterraines suffisamment pro-
paraît très réaliste et est d’ailleurs, pré- L’utilisation de murs de béton (murs
fondes assurant une qualité minimale ;
conisée par la plupart des spécialistes en « T ») ou de gabions devra être pré-
dans le cas cité plus haut, l’état-major de
électromécaniciens : une seule centrale conisée en priorité.
la KFOR a retenu cette solution et dès le
mois de Juin 2004 une équipe d’hydro- d’énergie sur un seul site, couplage de
En phase de déploiement, les électromé-
géologues du génie allemand 5 est venu tous les groupes pour une production
caniciens sont capables de gérer la pro-
prospecter sur le camp de « Film City ». sur une seule boucle (distribution de
duction et la distribution de l’énergie
préférence en haute tension pour dimi-
avec les lots en dotation. En revanche,
Le reste du cycle, et notamment l’épura- nuer les chutes de tension) ; néanmoins,
pour une installation longue durée, les
tion des eaux usées, est bien maîtrisé ce choix concentre les moyens sur un
matériels de dotation sont remplacés
par les sapeurs du service d’infrastructure seul site et rend vulnérable la production
par des groupes fournis, posés et entre-
de la défense qui travaillent naturelle- d’énergie. Il est cependant possible
tenus par des entreprises civiles qui,
ment en étroite collaboration avec les d’imaginer une production sur plusieurs
même si elles sont françaises,
spécialistes de l’infrastructure opéra- sites mais pour des raisons techniques
emploient souvent des autochtones.
tionnelle des unités génie des forces. de couplage, la boucle sera « comparti-
L’épuration de l’eau apparaît souvent mentée » par des cellules de coupure ; Le dossier ISOPEX est une réponse de
comme une contrainte démesurée dans ainsi en cas de défaillance ou d’attaque spécialiste à un mandat technique pre-
des pays détruits qui ne peuvent pas d’une centrale, la charge électrique mini- nant en compte des données chiffrées. Le
prendre soin de l’environnement. Pour male pour le fonctionnement des sapeur, en tant que conseiller du com-
autant, l’image et la réputation d’une organes sensibles sera reprise par mandement, doit connaître ce concept et
force se jugent aussi par ce genre d’obli- l’autre. Ce système peut être doublé par le garder en fil conducteur de son étude
gations et les médias ne manqueraient des groupes de secours répartis sur les génie. En revanche, il doit impérative-
pas d’exploiter une faille dans ce points névralgiques du camp préservant ment l’adapter au terrain et aux menaces.
domaine. essentiellement les organes de com-
mandement de la force. Mais son souci permanent sera aussi
L’ÉLECTRICITÉ : dans le domaine élec- d’appeler l’attention du commandement
trique, le principe de l’autonomie com- Compte tenu des nuisances sonores des sur les manquements, les défaillances
plète des camps n’est pas remis en centrales, celles-ci sont, en règle géné- ou les améliorations à apporter à un sys-
cause et a été adopté par le groupe de rale, placées en périphérie des camps tème de protection.
travail ISOPEX. loin de la zone vie. Cette position en
accentue la vulnérabilité. Le sapeur Ce n’est pas la technique qui commande
Même si la possibilité de se fournir en devra donc apporter une attention toute mais le terrain; aussi devra-t-il trouver la
électricité sur le réseau local est évo- particulière à la protection de cet élé- réponse adaptée à l’environnement tactique.
quée en variante n° 2, les forces devront ment vital tout en évitant un confine-
pouvoir, en toutes circonstances, subve- ment complet incompatible avec son Selon le principe « la sueur épargne le
nir à leurs propres besoins par des système de refroidissement par air. sang », aucune concession ne peut être
groupes électrogènes. La puissance pré- Compte tenu du coût des gabions ou des admise dans ce domaine.

5) Le génie français ne possède pas de spécialiste en recherche de nappes souterraines. Néanmoins, il serait illusoire de croire que l'on puisse trou-
ver de l'eau sous chaque camp. La solution du forage extérieur sécurisé sera souvent retenue. En outre, la recherche hydrologique demande non
seulement des spécialistes mais aussi du matériel de prospection… En international, les Allemands et les Anglais, voire les Américains avec leurs
réservistes, ont ce qu'il faut.

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SAPEUR

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SAPEUR

Capitaine MONTAGE D’UN POSTE DE COMBAT


Patrick
FOUQUET DE TYPE HESCO BASTION

Engineering units have to face two major problems, namely time and equipment.
Particularly when it’s about building a fighting compartment. In 2005, the 3rd company
Issu de l’EMIA, promotion LTN of the 6th engineer regiment tried to cope with the matter by using a fighting com-
SCHAFFAR (1995-1997), le capitaine partment HESCO BASTION (ready-to-make). Let us weigh up the pros and cons of the
FOUQUET a été chef de section au invention.
17 e RGP de 1998 à 2001 puis au
1 er bataillon de l’École Spéciale Of course there are drawbacks. Soldiers don’t appreciate that firing ports are installed
Militaire de Saint-Cyr de 2001 à once and for all and therefore can’t be moved. Moreover, right-handed people will
2003. Il a commandé la 1 re compa- have difficulties to shoot through two firing ports out of three. And obviously, it’s
gnie de combat du 6 e RG de 2003 à quite expensive.
2005. Il est depuis officier traitant au
bureau opérations toujours à On the other hand, there’s an important benefit of time and people since it takes 3 to 4
Angers. hours to build such a fighting compartment with 2 to 5 sappers. The installation is
easy (the direction for use is drawn) and the result is an efficient shelter, easily put
Il a participé aux opérations away. Eventually, it’s quite handy as it weighs 600 kg and only needs 20 m3 of material
en République Centrafricaine (earth, sand,…).
(MINURCA-1998), Albanie (1999)
et Côte d’Ivoire (mandat 7-2004) In a nutshell, qualities of the fighting compartments HESCO BASTION will be major
et à une mission de courte durée advantages in emergency or when units are first in a dangerous place.
en Martinique (2004).
Lors d’une projection, la force est géné- Le principe d’ouvrages livrés en kit par
ralement dimensionnée au plus juste. La l’industriel peut alors trouver toute sa
présence en son sein d’un détachement pertinence.
du génie pose plusieurs problèmes :
manque de place, matériels encom- En 2005, la 3 e compagnie du 6e régiment
brants, micro-parcs d’engins difficiles à du génie a mis en œuvre un poste de combat
soutenir… Ce détachement est donc de type HESCO BASTION. Après un rapide
souvent largement sous-dimensionné et descriptif du matériel livré et des étapes de
son emploi doit être optimisé et rentabi- la mise en œuvre, cet article cherchera à
lisé. Pour être efficace rapidement, il faut faire le point des avancées réalisées ainsi
donc pouvoir s’appuyer sur des maté- que du chemin encore à parcourir à travers
riels simples et disponibles, faciles à le bilan proposé par le capitaine GINDRE,
monter voire réutilisables. commandant la compagnie à l’époque.

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SAPEUR

MONTAGE DE L’ABRI :
Le montage nécessite une équipe de
quatre personnes renforcée d’un engin
pendant trois à quatre heures. Schéma-
tiquement, le montage comprend trois
étapes majeures :
• Construction du 1 er étage : opéra-
tion qui consiste en un montage de
bastion-wall complété par la mise
en place de raidisseurs ;
• Mise en place du 2 e étage : opéra-
tion qui consiste à mettre en place
une deuxième hauteur de bastion-
wall, de disposer les meurtrières,
les raidisseurs et les éléments de
liaison 1er/2e étage ;
• Mise en place du 3 e étage : opéra-
tion qui consiste en la pose d’un
PRÉSENTATION DU MATÉRIEL Dans l’expérimentation décrite un MPG a toit surmonté d’une bâche en géo-
été utilisé mais l’emploi d’un EMAD textile puis d’un pourtour en petits
L’abri est livré sur une palette pesant (Engin Multifonctions d’Aide au Déploie- éléments de bastion-wall.
environ 600 kilogrammes. Cette palette ment) serait peut-être plus judicieux.
comporte :
• les rangées de Bastions-Wall des 1er,
2 e étages et du toit. Chaque élément
est livré avec une bâche géotextile
pour retenir la terre ;
• 4 raidisseurs qui permettent de rigidi-
fier le 1 er étage lors de la mise en
place du sable ou de la terre ;
• 3 morceaux de tôle ondulée pour le
toit ;
• 1 bâche géotextile imperméable pour
éviter les infiltrations par le toit ;
• 3 meurtrières en 2 éléments avec les
vis et les boulons ;
• 1 dessus-de-porte en métal ;
• des éléments métalliques permettant
de relier le 1er au 2e étage ;
• des éléments de BW pour renforcer la
protection de l’abri contre les tirs de
RPG7.

Pour le montage, le groupe désigné a


besoin de :
• pelles US ;
• pelles de lot de bord ;
• tournevis ;
• marteaux ;
• clés anglaises ;
• clous ;
• pinces.

- 66 -
SAPEUR

Pourtant, le coût du fardeau (3 000 euros),


son relatif encombrement et la fragilité
des matériels sont des paramètres
importants à prendre en compte. Aura-
t-on les budgets nécessaires pour mon-
ter des postes autant que de besoin ?
Y aura-t-il suffisamment de place dans
les avions ou dans les bateaux pour dis-
poser rapidement des kits ? Pourra-t-on
monter et démonter les postes autant
de fois que nécessaire en fonction des
évolutions de la situation ? Autant de
questions auxquelles il faudra répondre
pour être réellement efficaces.

Enfin, d’un point de vue purement


technique, il convient de noter plusieurs
inconvénients : la mauvaise disposition
des meurtrières, la difficulté pour les
tireurs droitiers d’utiliser leur arme,
l’étroitesse du poste. Ces problèmes,
mineurs, peuvent être résolus faci-
lement.

Au-delà du matériel décrit et expéri-


menté ici, il est intéressant d’explorer la
piste de ces kits qui peuvent permettre
de rentabiliser et rationaliser l’emploi du
génie. En effet, les délais seraient nota-
blement revus à la baisse, le sapeur ne
serait pas dépendant de la ressource
locale et de la manne financière dispen-
sée avec parcimonie par le G4, enfin les
effets sur le terrain seraient réversibles
et évolutifs. Dans le cadre des projec-
tions, notamment des entrées en pre-
miers sur les territoires, ces avantages
se transformeraient rapidement en
atouts maîtres.
De cette expérimentation, nous pouvons mise en œuvre sont autant d’avantages Plus qu’une évolution technique envisa-
tirer quelques enseignements. qui prennent tout leur sens en opération geable, c’est une réflexion sur la place
extérieure, notamment dans le cadre du génie en opération qui peut ainsi être
Du point de vue du sapeur, ce type de d’une entrée en premier sur le territoire. ouverte.
matériel permet un gain de temps très
appréciable : un poste de combat habi-
tuellement monté en trois jours par une
section est, avec ce procédé, construit en
quatre heures par un groupe. Une compa-
gnie d’infanterie peut alors être protégée
en un jour. Facile à monter, simple de
mise en œuvre, le poste de combat
HESCO est livré en une palette de 600 kilos
contenant tout le matériel nécessaire à
son montage. Ainsi, il n’est pas besoin de
démarcher les fournisseurs locaux, de
trouver un financement et de perdre du
temps : le groupe est immédiatement au
travail et rapidement utile.

Les délais, souci et contrainte perma-


nents du sapeur, sont ainsi maîtrisés.
Simplicité, rentabilité, et rapidité de

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SAPEUR

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SAPEUR

Capitaine CÔTE D’IVOIRE :


Sébastien
GEROUDET
RETOUR D’EXPÉRIENCE
EN SAUVEGARDE-PROTECTION
The 2nd Eng. Coy part of the 31rd Eng. Bn was committed in Ivory Coast at autumn
2005. His lessons learned provides us some topics to deal with force survivability.
D’origine 15.2, le capitaine GEROUDET
effectue son temps de chef de section au In charge of force base camp survivability improvement, this Coy had to solve
31 e Régiment du génie à Castelsarrasin concerns as regard C2 relations, materials supply, prevention against intrusions and
de 1998 à 2002. local weather conditions.

Il rejoint ensuite Pointe-à-Pitre, pour un The task-organization was rather similar with the engineer concept of maneuver. That
séjour de deux ans au 2 e Régiment du means that the platoons were officially as General Support units, due to the very low
strength effectiveness of the Eng component in Ivory Coast. In fact, the very important
service militaire adapté. distance between the supported unites (up to 300 kmts) imposed them to work as
Direct Support, with an Eng. adviser located at the supported unit CP.
Le capitaine GEROUDET commande la
2 e compagnie de combat du génie du Only a few « conventional materials », as depicted in survivability manuals, were avai-
31 e Régiment du génie depuis août 2004. lable on place. So, it was necessary to find alternative solutions. As a first step, to see
opponents approaches, a no man’s land was created and enhanced with digs. Then the
combat posts were raised. For building foundations, the most accurate asset was cur-
ved iron sheets. Cheap and easily available, they were arc-welded to build a kind of
tower. Against burglars or teenagers intrusion, barbed-wire was emplaced on the top
of the walls. The sand bags were filled with ground providing a less protection against
shoots but a better stability when wet.

The main conclusion as regard the lessons learned is that the engineer units are not
enough tasked on their own capabilities. The sapper skills are various and sophistica-
ted. So, it’s impossible to prepare units and soldiers before their commitment on every
case that could occur. The most important is to develop spirit of enterprise, provide
basic references to compare with the current situation and equip engineer units with a
panel of assets giving them the chance to deal with any problem. For information
before their departure, they could visit a demonstration camp, to build using skills and
materials depicting diverse solutions performed on different theatres, including
contingency materials.

The current task-organization of our engineer Coy is not perfect but is a good compro-
mise answering two opposed concepts : cohesion and modularity. May be more flexi-
bility in our employment rules, allowing temporarily a Coy leader to task-organize
depending on the situation and the mission, even under the platoon level, could
satisfy both supported units and engineers themselves.

Finally, survivability is not a new need due to current fashion or « 0 death » concept
but a necessity : during offensive operations, mobility provides survivability ; among
defensive operations, survivability is achieved by field fortification.

Le 31e Régiment du Génie a engagé à


l’automne 2005 une compagnie de combat
renforcée en République de Côte
d’Ivoire. La mission majeure de cette
unité a été centrée sur des travaux de
protection. S’appuyant sur le retour
d’expérience du commandant d’unité,
les quelques réflexions qui suivent
visent à présenter des pistes d’améliora-
tions applicables aussi dans le domaine
« sauvegarde-protection ».

La 2 e CCG du 31 e RG a été engagée


en RCI du 16 juin au 20 octobre 2005,
pendant le mandat 9 de l’opération
LICORNE. Articulée en 3 sections de
combat à 4 VAB, 2MPG et une benne, et
renforcée d’une section travaux de la

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SAPEUR

22 e CA, la compagnie assurait l’appui Devant le souci des GTIA de renforcer grumes utilisées pour la force doivent
Génie de la totalité de la force compo- leurs positions, les sections Génie être marchandées).
sant de trois GTIA distants de 300 km. durent trouver une première solution
Cette organisation sur le territoire pré- face au problème primordial qui se Des remblais en terre furent réalisés :
sentait immédiatement une ambiguïté posait à elles : avoir des vues malgré la cette technique consentait une surface
dans le commandement des éléments végétation. Celui-ci a été résolu en au sol utilisable importante pour les
génie, théoriquement conservés aux conjuguant surélévation des postes et postes, mais le faible délai imparti aux
ordres du commandant d’unité mais en création d’un « no man’s land ». Ce der- travaux et la disponibilité du seul com-
réalité directement subordonnés aux nier présente le double avantage d’offrir pacteur, extrêmement sollicité, ne per-
GTIA appuyés. des vues, toutefois limitées, et la symbo- mettait cependant pas d’obtenir un
lisation pour les éléments hostiles d’une résultat pérenne dans la durée.
La caractéristique de ce mandat tint en la zone à ne pas franchir sous risque de se
volonté du nouveau commandant de la voir considérer comme une cible. La méthode du coffrage métallique a été
force de renforcer toutes ses emprises Valorisé par scarification et/ou réalisa- promue sur place par un chef de section
jusqu’alors faiblement protégées. Pour tion de fossés, ce compartiment de ter- imaginatif, détournant de sa véritable
réaliser ces travaux de protection, la rain correspondait donc à la première destination une ressource abondante :
compagnie disposait de matériel « orga- étape du processus de protection. En les tôles cintrées. L’assemblage par sou-
nisation du terrain » acheminé de métro- parallèle, l’élévation des postes de com- dure de trois « demi-lunes » en cercle
pole, notamment un large stock de tôles bat répondait totalement aux attentes de constitue ainsi un « étage » de soubasse-
cintrées mais très peu de sacs à terre et l’interarmes mais nécessitait d’adapter ment. Le nombre d’étage peut aller aisé-
de « flex-mac ». En complément de ce les procédés conventionnels aux res- ment jusqu’à quatre. L’ensemble ainsi
matériel codifié EMAT, du matériel d’in- sources et conditions climatiques créé forme une tour qui est remplie de
frastructure (IPN, madriers…) pouvait locales. terre. La stabilité de l’ensemble est obte-
être commandé et acheté sur place par nue grâce à une semelle en bois, type
la voie « J4-INFRA », mais sous Pour la base de l’ouvrage, trois tech- calage de plaque d’appui pour pont
contraintes de délais et de coûts. niques étaient envisageables, présentant BAILEY. La surface utile pour le poste de
chacune avantages et inconvénients : combat est faible, mais la juxtaposition
Les principales difficultés auxquelles la matériaux en remblais, coffrage métal- d’une deuxième tour permet de pallier
compagnie a dû faire face pour mener à lique et coffrage bois. cet inconvénient. Les avantages de l’édi-
bien sa mission de protection de la force fice sont sa solidité et sa grande facilité
sont le dégagement de vues, la lutte Les deux premières furent utilisées au de réalisation. En revanche, les possibili-
contre les intrusions pédestres et l’adap- détriment de la troisième, beaucoup tés de protection sont réduites en raison
tation au climat et aux ressources. plus coûteuse en temps et en argent (les du peu de place disponible.

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SAPEUR

Face aux intrusions de personnes sensible à l’humidité sous l’aspect de la mandement que représente le capitaine
(voleurs, adolescents…) à l’intérieur des stabilité. reste indispensable, sa localisation en
camps de la force, la parade fut trouvée, renforcement de la cellule 2D, semble
en complément du « no-man’s land » En résumé, le bon déroulement de la la mieux adaptée au cas consistant à
créé, par la valorisation des murs d’en- mission a largement reposé sur la détacher toutes les sections.
ceinte avec du concertina au sommet et connaissance des techniques par les
à la base. Le concertina était soutenu par plus anciens, soulignant une fois encore La seconde porte sur les compétences
des piquets soudés en forme de V, pla- la nécessité de projeter les unités Génie du sapeur. Les projections extérieures
cés en faîte et renforcés par du fil de fer dans le cœur de métier pour perpétuer et dans le cœur de métier, certes trop rares
barbelé, afin d’empêcher le soulèvement transmettre les savoir-faire spécifiques. comme beaucoup le soulignent, mettent
de la base du réseau ou l’affaissement en relief la variété des actions et savoir-
de celui-ci sous le poids d’une planche L’analyse de ce retour d’expérience faire qui sont l’apanage du sapeur. Les
posée dessus. La compagnie a dû mettre amène plusieurs réflexions. différences entre théâtres, voire au sein
en œuvre pour ces missions un perfora- d’un même théâtre, montrent qu’aucune
teur puissant et des postes à souder. La première d’entre elles porte sur préparation en métropole ne peut traiter
l’organisation du commandement. exhaustivement de tous les cas de figure
Enfin, les violentes pluies provoquent un Le sous-dimensionnement chronique rencontrés. En revanche, développer
ravinement du terrain sur le pourtour et des moyens génie projetés au sein d’une l’esprit d’initiative, fournir des réfé-
sur les plates-formes, voire dans les sacs force conduit à un écartèlement des rences permettant de travailler par com-
à terre eux-mêmes. Cette eau doit donc moyens incompatible avec un emploi paraison, doter les groupes du génie
impérativement être canalisée et éva- traditionnel, tel qu’il est défini aujour- d’un large panel d’outillage et d’équipe-
cuée, sous peine de fragiliser grande- d’hui en doctrine. Dans le cas de la RCI, il ments permet par la suite de faire face à
ment les postes. Ceci a été réalisé à est matériellement impossible au com- tous les types de situation. La crainte
l’aide d’un système d’écoulement type mandant d’unité de commander vérita- toutefois est de voir disparaître progres-
gouttière, jusqu’au bas de la plate-forme. blement sa compagnie. La mise en place sivement certains savoir-faire éprouvés
La création d’avant-toit débordant large- d’un DL Génie au sein de chaque GTIA mais peu utilisés car la réalisation d’ou-
ment protège les sacs à terre, emplis de s’est avérée capitale, mais sa subordina- vrages de protection est consommatrice
préférence avec de la terre mouillée, tion officielle au capitaine commandant d’un temps trop rare à consacrer en
naturellement compactée en séchant au la compagnie n’était qu’apparence. métropole à l’instruction et les moyens
soleil, qui offre certes une qualité La coordination de l’emploi du génie est associés sont parfois réservés aux
moindre que le sable - quand celui-ci en l’occurrence assurée par la cellule 2D OPEX. La réalisation d’un petit camp
reste sec - mais est beaucoup moins du PC de la force. Si l’échelon de com- « modèle » comprenant les différents

- 71 -
SAPEUR

ouvrages de ce type, empruntant des modularité, destiné à fournir les moyens de mission, sans considération exagérée
techniques utilisées sur différents adaptés à une situation donnée, et à du niveau que représente la section, per-
théâtres et issues des retours d’expé- celui de la cohésion des unités, qui veut mettrait peut-être de répondre de façon
riences, pourrait compenser des lacunes qu’elles œuvrent sur des structures plus satisfaisante à la fois aux attentes
d’expérience dans ce domaine : sa visite organiques hors projection. Ces deux des unités appuyées et aux aspirations
au titre de la MCO montrerait aux futurs concepts étant antinomiques et les chan- des sapeurs eux-mêmes.
acteurs différentes possibilités de faire gements de structures trop fréquents
face aux difficultés rencontrées, parfois En conclusion, d’aucuns pourraient être
causant plus de déstabilisation que de
avec des moyens de fortune, et pourrait tentés de qualifier la protection de « phé-
bénéfice, il semble que la solution
utilement devenir une source d’inspira- nomène de mode », provoqué par le
actuelle, centrée sur les compagnies de
tion lors de leur mise en situation. concept « zéro mort ». Il s’agit plutôt
combat organiques, reste finalement la d’une composante permanente du com-
Enfin, l’éternelle question, hélas récur- plus adaptée. Toutefois, nos règlements bat dont le mode d’application change
rente, des différences de structures entre d’emploi restent peut-être un peu rigides selon le type d’engagement : la
organique, alerte GUEPARD, unités PRO- quant au niveau considéré comme meilleure protection dans un combat
TERRE et modules projetés est une fois acceptable pour le détachement. Une dynamique est offerte par la mobilité ;
de plus soulevée. La difficulté à résoudre souplesse plus grande, autour de réarti- celle qui convient dans un combat sta-
ce problème montre qu’il n’est pas culations temporaires internes à la com- tique reste indiscutablement l’aménage-
simple. Il tient à la fois au principe de la pagnie, définies selon l’effort et le type ment du terrain.

- 72 -
SAPEUR

Équipements
et str uctur es

SPECTRE - 2006-2007 : années cruciales ...................................................................................................................................... LCL CORNEFERT .................................................. 75

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SAPEUR

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SAPEUR

Lieutenant-colonel SPECTRE
Olivier
CORNEFERT
2006-2007 : ANNÉES CRUCIALES

SPECTRE is a future antipersonnel system designed to protect ground deployments. It


will allow detachments, as from the platoon level, to be warned of any intrusion of
personnel in a 400-meter radius. In addition to an evaluation of intrusion, the system
will provide a capacity of deterrence, neutralisation or destruction of the threat.
Le lieutenant-colonel Olivier
CORNEFERT est officier de pro- In December 2005, the DGA (French defence procurement agency) awarded a demons-
gramme au groupement mobilité trator contract to THALES. This two-year contract to assist the design phase is based
défense nucléaire biologique on studies and tests carried out in operational conditions.
chimique de la section technique
de l’armée de terre depuis 2003. The year 2006 will be devoted to the development of the system architecture while
Il conduit les opérations d’arme- ensuring the operational, technical and financial criteria are met. Choices will be based
ment des domaines « systèmes de
on demonstrations of systems and components (sensors or weapons) carried out by
combat du génie » (appui direct au
industry with experts from the DGA and the STAT (French Army technical depart-
combat), « aide au déploiement »
ment).
(eau, énergie, infrastructure opé-
rationnelle, travaux) et « sauve-
In 2007, THALES will deliver a demonstrator representative of the end system. Its tech-
garde » (organisation du terrain,
nical and operational aspects will be successively tested.
systèmes de protection locale).

Il a auparavant servi comme chef After these two crucial years for the project, the French army will have all elements to
de section et commandant d’unité proceed with the implementation phase.
au 6 e REG, instructeur aux Écoles
de Coëtquidan, officier traitant au SPECTRE (Système de Protection des terrestre le 30 décembre 2005 permet
Commandement des Formations Éléments terrestres) est une opération à l’équipe de programme intégrée de
Militaires de la Sécurité Civile d’armement au stade de préparation finaliser le besoin militaire en optimisant
puis, de 2001 à 2003, comme chef dont le but est de renforcer la sûreté le fameux triptyque coûts - délais -
du BOI et commandant en second immédiate des déploiements terrestres. performances et en identifiant les
du 1 er REG. Initié en 2000 par un objectif d’état- risques de la réalisation.
major rédigé par l’état-major de l’armée
Saint-Cyrien de la promotion
de terre, il passera au stade de conception
« Cadets de la France Libre » LA PROBLÉMATIQUE
en 2006 au terme d’études technico-
(1985-1988), il est breveté de
opérationnelles ayant permis d’alimenter Les efforts entrepris par l’armée de terre
l’enseignement militaire supérieur
(Cours Supérieur des Systèmes la fiche de caractéristiques militaires en matière de protection sont nom-
d’Armes Terrestres et 8 e promo- exploratoire. Ces études ont également breux. Après les engins de combat,
tion du CID). souligné les fortes contraintes opéra- d’autres véhicules (EGAME, EGRAP,
tionnelles, techniques et financières PVP) mettront d’ici peu leur équipage à
du projet. l’abri de la ferraille du champ de bataille.
Inconnu il y a vingt ans, le port permanent
C’est pourquoi il a été décidé de s’armer, des éléments de protection balistique
pour la conduite du stade de conception, individuel est maintenant naturel.
d’un outil efficace et novateur visant à Pourtant ces mesures, nécessaires pour
disposer, dès 2008, de tous les éléments limiter les pertes pendant les engage-
nécessaires au stade de réalisation. ments, ne présentent qu’une efficacité
réduite dès lors qu’une unité met pied à
Plus que la réalisation d’un simple terre et s’installe dans la durée.
démonstrateur, le marché notifié par le
service des programmes d’armement La sûreté immédiate, par définition assu-
rée à partir des moyens matériels et
humains de l’unité en stationnement,
pèse sur son rendement opérationnel.
Elle distrait des effectifs de la mission
principale et, celle-ci demeurant tou-
jours prioritaire, contribue à une fatigue
prématurée des hommes. Les facteurs
sont nombreux qui, dans nos opérations
actuelles, aggravent cette situation.

- 75 -
SAPEUR

Basé sur des essais et des évaluations


réalisés en conditions opérationnelles
sur le terrain, le marché du démonstra-
teur doit permettre d’apporter la bonne
solution au problème militaire.

LA DÉMARCHE
Ce marché, notifié à la société THALES,
comprend à la fois des études et la mise
à disposition pour des évaluations
étatiques d’un démonstrateur qui, sans
être un prototype, doit être représentatif
des performances du système final.

Les études conjuguent deux approches.


La première approche, traditionnelle dans
la conduite des opérations d’armement,
part du besoin opérationnel en faisant
Les déploiements des unités sur un ception notable de l’acquisition des struc- abstraction des solutions technolo-
théâtre ne forment pas de dispositif tures multicellulaires de protection plus giques. Elle se traduit par la réalisation
continu dont la protection pourrait être connues sous le terme de bastion wall. d’un cahier des charges fonctionnelles,
partagée. Les détachements, souvent c’est-à-dire par l’inventaire exhaustif et
engagés en mission d’interposition, doi- détaillé des fonctions à remplir par le
vent se prémunir contre des menaces LA CONTRIBUTION DE SPECTRE système, leur hiérarchisation et leur
omnidirectionnelles. Ces menaces sont caractérisation selon des critères de
Dans ce contexte, le but de SPECTRE est performances eux-mêmes hiérarchisés.
variées et imprévisibles. Tirs de mortier de fournir aux unités, dès le niveau
ou de snipers, attaque de véhicule sui- Ce travail, long et fastidieux mais indis-
section, un dispositif local de protection pensable à la bonne appropriation du
cide, actions terroristes, jets de grenade antipersonnel. Cet objectif peut paraître
et manifestations de foules hostiles ne besoin opérationnel, est considérablement
modeste au premier abord ; il est, après raccourci au stade de conception du fait
doivent pas faire oublier les assauts examen, ambitieux et réaliste. de l’antériorité acquise durant le stade
conventionnels, les tentatives de vols de
de préparation. Les avis recueillis auprès
matériels, ni - l’enseignement est dou- L’opération d’armement SPECTRE est de la totalité des écoles d’armes en 2005
loureux - les attaques aériennes. Après réaliste parce qu’elle ne se disperse pas ont pu ainsi être pleinement exploités.
de longues périodes de calme, les unités à traiter simultanément toutes les
peuvent se trouver confrontées à des menaces évoquées ci-dessus par la L’originalité du marché du démonstra-
flambées de violence sans disposer d’un conception ex nihilo d’un bouclier omni- teur vient de la seconde approche de
préavis suffisant pour adapter leur pos- potent dont la faisabilité technique ne l’étude conduite simultanément. Elle
ture de protection. relève pas du moyen terme. En revanche, consiste à élaborer des architectures de
SPECTRE s’inscrit dans une politique dispositifs locaux de protection à partir
Le choix des sites de déploiement subit interarmées dont la cohérence est assurée de systèmes et de composants dispo-
de fortes contraintes opérationnelles par le projet fédérateur PROTIS (protection nibles sur étagère à l’horizon 2010.
(imposées par la mission) ou juridiques des infrastructures et des sites). Ce processus comprend une expertise
(imposées par la nation hôte). Le retour technique et une analyse financière, se
d’expérience montre que les arbitrages Le système SPECTRE est ambitieux traduisant par une estimation fine du
sont rarement favorables aux critères de parce qu’il vise : détecter, dissuader, coût global de chaque solution. La perti-
sûreté immédiate. neutraliser et détruire tout intrus ou nence de ces architectures sera validée
groupe d’intrus identifiés comme tout au long de l’année 2006 par des
Enfin, soucieuses de la maîtrise perma- menace dans un rayon de 400 mètres démonstrations réalisées par l’industriel
nente de la force, les armées françaises autour d’une unité en stationnement. sur son site d’expérimentation de La
restreignent parfois spontanément l’em- Ferté Saint-Aubin en présence d’experts
ploi de certaines de leurs armes. Ainsi L’atteinte de ces performances n’a de la délégation générale pour l’arme-
les mines antipersonnel ont, de facto, cependant de sens que si elles sont ment, d’officiers de marque et de sous-
disparu de l’arsenal français bien avant cohérentes avec les ressources finan- officiers expérimentateurs de la section
la signature de la convention d’OTTAWA. cières que l’armée de terre peut technique de l’armée de terre. L’expé-
Et d’autres exemples comme parfois consacrer à cette capacité nouvelle rience du personnel de la section protec-
celui des mines éclairantes peuvent être et les contraintes admissibles par les tion intrusion du service technique des
également cités. forces en terme de charge (formation, bâtiments fortifications et travaux sera
souplesse d’emploi et de mise en également sollicitée. Au cours du
Dans le même temps, la panoplie des œuvre), de capacité logistique (emport premier semestre de 2006, ce sont
moyens d’organisation du terrain n’a pas et énergie) et de confiance (fiabilité et des systèmes de protection qui seront
évolué depuis des dizaines d’années à l’ex- disponibilité). évalués, le second semestre étant

- 76 -
SAPEUR

consacré à des démonstrations de com- CONCLUSION efficace de maîtrise des délais étatiques
posants (capteurs ou armes). En vue du du stade de conception par la contrainte
stade de réalisation, la délégation géné- Le marché du démonstrateur SPECTRE contractuelle qu’il impose.
rale pour l’armement veillera à ce que n’est pas un marché de délégation de
cette approche soit menée avec le souci maîtrise d’ouvrage et le lourd investisse- Dans le monde froid des opérations
constant de sélectionner des solutions ment des services étatiques au cours de d’armement un projet qui ne se concrétise
ouvertes à la concurrence. pas dans les délais escomptés se présente
ces deux années le prouve aisément.
d’abord comme une opportunité tentante
Néanmoins, compte tenu de la com-
Ces deux approches se rejoignent de de relâcher une contrainte budgétaire
plexité physico-financière du projet et
manière itérative dans une analyse de la permanente. Grâce au marché de
des précisions à apporter au besoin mili- démonstrateur, l’équipe de programme
valeur permettant de faire converger taire pour la conception d’un matériel
objectivement les caractéristiques intégrée de SPECTRE veillera en 2008 à
nouveau, la prise en compte anticipée proposer l’approbation d’un dossier de
militaires de référence avec une solution
des contraintes industrielles se révèle lancement de réalisation solidement
techniquement mature et d’un coût
indispensable. De manière anecdotique, argumenté en vue de la livraison aux
global maîtrisé. Pour cela, une fois les
ce marché se révèle également un outil forces des premiers matériels en 2012.
architectures grossièrement définies, les
travaux porteront également sur tous
les aspects transverses de l’opération
(sûreté de fonctionnement, dossier de
sécurité, analyse du soutien).

La phase d’essais qui sera conduite en


2007 sur le démonstrateur comprend
deux phases. Une première phase
dirigée par la délégation générale pour
l’armement validera les performances
techniques attendues du système final.
Les évaluations technico-opération-
nelles, conduites par la STAT avec le ren-
fort d’unités désignées par le CFAT, per-
mettront de vérifier la qualité du service
rendu par SPECTRE dans son environne-
ment opérationnel. Les enseignements
recueillis au cours de ces deux périodes
alimenteront à leur tour et de manière
ultime le processus décrit ci-dessus.

- 77 -
SAPEUR

- 78 -
SAPEUR

For mation

La sauvegarde-protection : repenser la formation .................................................................................................................. CNE CASTEL .......................................................... 81

- 79 -
SAPEUR

- 80 -
SAPEUR

Capitaine LA SAUVEGARDE-PROTECTION :
Stéphane
CASTEL
REPENSER LA FORMATION

The safeguard and the protection of the french forces which are deployed overseas are
getting more and more difficult to ensure because of the evolution of the conditions of
the commitments, variying from high intensity to low intensity warfare, against symi-
Issu de l’École Spéciale Militaire de trical or asymmitrical enemy forces, including peace enforcing, peace keeping or even
Saint-Cyr (1993-1996), le capitaine peace making operations.
CASTEL a commandé la 971 e compagnie
énergie du 2 e régiment du génie à METZ. As a matter of fact, safeguard and protection are among the missions naturally dedi-
cated to the Corps of the Engineers. But engineer training has to evolve and to be
Depuis l’été 2005, il est instructeur génie improved in order to take into account the new threats of modern conflicts. The
1 er niveau à la direction de la formation French Engineer Military Academy is involved in the reflexions that are led to adapt
opérationnelle (DFO) de l’ESAG. the current courses to these new tactical challenges.

Il participe au groupe de travail sur la


sauvegarde-protection crée à l’ESAG La sauvegarde-protection regroupe un • définir les besoins en protection face
depuis la rentrée 2005. ensemble d’actions multiples et complé- à ces nouvelles menaces (DEP),
mentaires qui permettent de prévenir et
d’atténuer les actes hostiles contre nos • mettre au point des procédés de réa-
lisation de nouveaux types de protec-
forces, nos ressources et nos installa-
tion (DGF/DES),
tions. Elle vise donc à participer à la
conservation du potentiel de combat de • vérifier l’efficacité de ces ouvrages en
la force en déniant toute opportunité à liaison avec le Service technique des
l’ennemi de l’amoindrir. bâtiments fortifications et travaux
(STBFT),
La nécessité de protéger nos personnels
et nos infrastructures en opérations n’est • faire évoluer la formation et la docu-
pas nouvelle. Quel que soit le scénario mentation (DGF).
(conflit haute intensité, basse intensité,
maîtrise de la violence, maintien et réta- Concrètement, trois grands domaines
blissement de la paix), la sauvegarde et d’études ont été retenus et sont exposés
la protection deviennent des tâches de dans cet article :
plus en plus difficiles à réaliser. 1 - la réalisation d’abris à partir d’un
KC20 renforcé,
Or, la sauvegarde-protection est une des
missions permanentes du génie. En 2 - la réalisation de murs de protection
effet, le génie joue un rôle primordial en béton,
dans le durcissement des infrastruc-
3 - la réalisation d’un point de contrôle
tures, dans la protection contre les
au standard OPEX.
armes et les forces conventionnelles,
contre les forces non conventionnelles,
L’effet à obtenir est de mener des études
contre la menace terroriste, mais égale-
et des essais dans un seul but : tester
ment contre les menaces asymétriques. l’efficacité de ces protections, leur tenue
dans le temps et leur fonctionnalité.
Pour cela, les programmes de formation
doivent évoluer. La direction des études
et de la prospective (DEP) et la direction ABRI A PARTIR D’UN KC 20
générale de la formation (DGF) - et tout RENFORCÉ
particulièrement la division de l’ensei-
gnement scientifique (DES) - de l’École Les KC20 sont une ressource abondante
supérieure et d’application du Génie sur un théâtre d’opérations et ils sont
(ESAG) doivent ainsi relever le défi facilement projetables. Ils constituent
d’adapter la formation dispensée aux donc une bonne base pour réaliser un
stagiaires aux nécessités des engage- abri. Pour cela, le conteneur peut être
ments opérationnels d’aujourd’hui. enterré, semi-enterré ou en surface. Le
choix de l’une ou l’autre de ces solutions
Dans ce domaine, en 2006, l’ESAG a dépend de la disponibilité en matériaux,
pour ambition de mettre à contribution de l’existence de moyens de terrasse-
ses deux directions afin de : ment et des contraintes techniques.

- 81 -
SAPEUR

RÉALISATION DE MURS DE PRO- modules d’un mètre de largeur et à leur


TECTION EN BÉTON assemblage afin de créer un abri en
forme de tunnel. Cet abri lourd offre une
Des essais vont être réalisés pour mesurer protection contre tous les types de muni-
la stabilité, la pérennité et la résistance aux tions de petits calibres et les éclats pri-
impacts et au souffle de murs de protec- maires d’obus de 155 mm explosant à
tion. Il existe deux types de murs : murs en 3 m. Toutefois, il convient encore d’étu-
« T » et murs en « L ». Le choix de murs en dier la résistance à l’effet de souffle pour
« L » de hauteur 2,7 m et d’épaisseur 30 cm les mortiers, les munitions d’artillerie et
a été retenu pour mener des expérimenta- les bombes.
tions. Celles-ci vont être conduites à
Les effets de la poussée de la terre Captieux en liaison avec le STBFT. Elles
si l’étaiement est insuffisant seront faites sur la base d'agression à
l'arme légère (jusque 12,7 mm), à la
Placé en pleine fouille, le retour d’expé- roquette anti-char et peut-être jusqu’au
rience a montré que les résistances ver- 155 mm. Un des objectifs est également de
ticale et latérale des parois du KC20 tester la modularité du concept.
étaient trop faibles et en tout cas insuffi-
santes pour résister dans le temps à la
seule poussée de la terre. Il s’agit donc
de résoudre cette difficulté en proposant Abri en mode utilisation
un étaiement judicieux de la structure
intérieure du KC20, tout en conservant
une excellente protection face aux effets CHECK POINT ISOPEX
des armes.
L’entrée d’un camp type ISOPEX est un
point névralgique. Depuis plusieurs
décennies, la multiplication des attentats
Exemple de mur en béton armé touché par utilisant des véhicules banalisés ou des
une roquette de 107 mm bombes humaines contre les check-
points doit nous amener à une profonde
Trop lourds pour être projetés depuis la réflexion. Le check-point doit être conçu
France, ces murs de protection peuvent et durci en conséquence. Plusieurs don-
en revanche être fabriqués sur le nées doivent être prises en compte lors
théâtre. L’épaisseur et le type de béton à de sa réalisation : voies de circulation
utiliser dépendront des menaces et de la séparées pour les piétons et les véhi-
ressource présente sur place. cules (civils et militaires), zones de
L’étaiement possible d’un KC20 enterré fouille piétons et véhicules durcies pour
parer à toute tentative d’attentat-suicide
(avec murs de protection en béton par
Pour l’abri en surface, le conteneur peut, exemple), position des postes de com-
par exemple, être protégé par une épais- bat, dispositifs de ralentissement des
seur de bastion-walls en périphérie et en véhicules, etc. L’idée consiste à fabriquer
toiture. Ces renforcements sont simples un modèle sous forme de maquette,
à réaliser car les matériaux sont faciles à dont chacun pourra s’inspirer, et qui
trouver sur un théâtre d’opérations. pourra être adapté sur le terrain en fonc-
Néanmoins, dans cette configuration, la tion de la menace et des ressources dis-
partie supérieure du KC20 présente là ponibles. L’objectif est que les militaires
encore une résistance faible et il s’agit Mur de protection de « T » qui en assurent la garde en opérations
de trouver une solution de mise en extérieures soient protégés et qu’ils
œuvre simple qui permette au toit du Dans le même ordre d’idée, un abri lourd puissent réaliser dans les meilleures
conteneur de porter la couverture. modulaire en U renversé en béton armé conditions de sécurité, le filtrage, le
a été expérimenté en Afghanistan. Le contrôle et l’identification des véhicules
principe consiste en la réalisation de et personnels civils et militaires.

La mise au point de nouveaux procédés


et la réalisation de nouveaux types de
protection nécessitent une profonde
réflexion. Il s’agit de recenser et d’analy-
ser les réalisations effectuées en France
et à l’étranger, de sensibiliser l’inter-
armes sur le besoin de développer
KC20 en surface Abri terminé les actions de sauvegarde-protection,

- 82 -
SAPEUR

Réflexion sur un Check Point durci contre les EEI

d’augmenter le nombre de réalisations


pratiques, etc.

Le TTA 714 « Notice sur la protection


directe par l’organisation du terrain » et
le TTA 722 « Notice relative au durcisse-
ment des infrastructures de stationne-
ment en zone d’opérations » proposent
des solutions faciles à mettre en œuvre
sur le terrain. Mais, il est nécessaire
d’y apporter des compléments. Il faut
notamment développer les capacités du
sapeur à conseiller l’interarmes dans le
domaine de la sauvegarde-protection.
Il s’agit donc d’imaginer et de mettre
au point une formation à enseigner aux
officiers du génie afin qu’ils soient
mieux armés face à des agressions
modernes. C’est la réflexion que conduit
actuellement l’ESAG. Dès la rentrée
2006, les programmes de formation des
futurs commandants d’unité, des futurs
chefs de section et des jeunes sous-
officiers prendront en compte cette
dimension. Le chantier semble complexe,
mais le sapeur saura une nouvelle fois
apporter des solutions concrètes.

Schéma d’un abri lourd modulaire en U renversé

- 83 -
SAPEUR

- 84 -
SAPEUR

Le Génie dans l'histoir e

Les uniformes du génie de la Révolution et de l’Empire ...................................................................................................... CDT GARNIER de LABAREYRE .............................. 87

Génération de forces et emploi du génie : Les sapeurs de la Campagne d’Alger .................................................... CNE GIUDICELLI .................................................. 93

Les ingénieurs dans les troupes émigrées .................................................................................................................................. M. FOUGERAY ...................................................... 97

- 85 -
SAPEUR

- 86 -
SAPEUR

Commandant LES UNIFORMES DU GÉNIE


Pierre
GARNIER
DE LA RÉVOLUTION ET DE L’EMPIRE
de LABAREYRE

Les textes en italiques sont tirés des lois, décrets et arrêtés. Ils respectent l’orthographe originale.

L’armée n’échappe pas à l’avalanche de


Le commandant Pierre GARNIER de réformes qui bouscule la France en ce
LABAREYRE est le conservateur du début de « Révolution ». Ainsi, l’ancien
musée du génie depuis septembre 2003.
corps des ingénieurs du roi va dispa-
Officier sur titre, ayant choisi l’artillerie, raître pour donner naissance sous le
il sert au 3 e régiment d’artillerie puis au Consulat à une arme structurée avec des
93 e régiment d’artillerie de montagne où officiers et des troupes directement sous
il crée et commande la batterie des opé- leurs ordres.
rations.

Il est titulaire du diplôme d’état-major et LES OFFICIERS DU GÉNIE


du diplôme technique option sciences
humaines. La loi du 31 octobre 1790 réduit le corps
du génie à 310 officiers, y compris les
Après trois années au centre de sélec- élèves de l’école de Mézières, à compter
tion et d’orientation de Lyon, il suit une du 1er janvier 1791. L’uniforme reste le
scolarité à l’école du Louvre avant d’être même que celui prescrit en 1775 et 1776
muté à Angers. avec les quelques changements surve-
nus en 1786. Cependant, il semble que
les collets, parements et revers aient
toujours été liserés de rouge alors que Officier du génie vers 1805,
aquarelle d’André Marcy, collection Musée du génie
cela n’est pas spécifié dans le règlement
du 1er octobre 1786. De plus, une loi
nueront de porter les épaulettes de leurs
du 4 octobre 1792 précise que tous
grades respectifs, et prendront ; savoir :
les boutons porteraient la mention
les Officiers supérieurs, les mêmes
« République française ». Il n’est pas sûr
marques distinctives aux paremens, col-
que cela ait été fait 1.
lets, chapeaux et équipages de cheval,
Le Directoire exécutif, par la loi du 3 jan- que les Adjudans généraux ; et les
vier 1795 (14 ventôse an III) rend les offi- Capitaines, Lieutenans et Sous-lieute-
ciers du génie partie intégrante de l’état- nans celles fixées pour les Adjoints aux
major des armées. Un arrêté du 24 avril adjudans généraux. Ainsi, les officiers
1797 (5 floréal an V) fixe l’uniforme du génie portent l’habit bleu, la veste et
des officiers du génie. Article 1 : À dater la culotte blanches avec le chapeau
du 1er prairial prochain, l’uniforme des bicorne sans galon d’or.
Officiers du Génie sera en tout
conforme, tant pour la couleur que pour Un arrêté des Consuls de la République
la coupe, à celui de l’État-Major des du 14 juillet 1800 (24 messidor, an VIII),
armées, à la réserve des paremens et article IV, prescrit les dispositions sui-
collets, qui seront de velours noir, lisérés vantes : les Officiers du corps du génie
de rouge, avec pattes blanches aux pare- conserveront le fond de l’uniforme qui
mens aussi lisérés de rouge, et des bou- leur a été précédemment affecté, mais
tons, qui demeureront tels qu’ils ont sans galon ni bordure. Leur chapeau
été déterminés par l’ordonnance du sera bordé en soie noire, et les bords rat-
31 décembre 1776 2. L’article 2 précise le tachés à la forme par des ganses aussi
droit aux épaulettes : ces Officiers conti- en soie noire.

1) Un bouton avec une cuirasse surmontée d’un bonnet de la liberté avec l’inscription « ingénieur
de la république française » est dessiné dans l’ouvrage, le bouton d’uniforme français,
L. FALLOU, p 169 ; autre version avec un faisceau de licteur.
2) Voir SAPEUR n° 5, juin 2005, p 113.

- 87 -
SAPEUR

Une circulaire signée Carnot et datant L’uniforme des officiers du génie va être L’épaulette et la dragonne seront du
du 9 août 1800 (21 thermidor, an VIII) sensiblement le même pendant toute la modèle du grade de l’officier.
fixe à tous les officiers du génie leur période impériale. Il est fixé par le règle-
La redingote est identique à l’habit. Elle
uniforme : habit bleu national, coupe de ment du 20 juin 1803 (1er messidor an
se croisera sur la poitrine et le collet sera
l’infanterie de ligne, doublure rouge, XI), chapitre IV 3. renversé sur un collet droit de sept à huit
paremens, revers, et collet de velours centimètres ; parements et manches
noir, lisérés de rouge ainsi que l’habit ; « L’habit… sera de drap bleu national, seront coupés en dessous.
bouton actuel, veste blanche, pantalon coupe d’infanterie de ligne (voir figure
ou culotte bleue ; marques distinctives 1), doublure écarlate, collet, revers et Le manteau sera en drap national ; la
de leur grade ; armement et équipage paremens de velours noir, liserés de retonde bordée d’un galon d’or de 4 cen-
du cheval tels qu’ils sont actuellement ; rouge ainsi que les pattes de poches, qui timètres de largeur, le collet droit de
velours noir, liseré de rouge, ainsi que la
le chapeau tel qu’il est prescrit dans seront en travers et à trois pointes. Les
rotonde.
l’arrêté du 24 messidor. Ils pourront pans de l’habit seront agrafés derrière ;
porter, comme petit uniforme, un frac les retroussis ornés d’un corset d’armes Comme dans le règlement de 1776, la
bleu national avec des boutons et des brodé en or. La veste et la culotte seront cuirasse et le pot-en-tête sont représen-
épaulettes. de drap blanc. tés sur les boutons. Un dessin, planche 7
du règlement, reproduit le modèle. Les
boutons seront de métal doré, fond
sablé, et timbrés en relief d’un corset
d’armes et pot en tête. L’emplacement
des boutons est particulièrement détaillé :
l’habit sera garni de trois gros boutons
au bas du revers droit, trois sur chaque
poche, un sur chaque hanche, sept petits
à chaque revers, trois à chaque pare-
ment, un sur chaque épaule, près la cou-
ture du collet, pour fixer les épaulettes.
Veste et culotte seront garnies de petits
boutons d’uniforme. Sur la redingote,
parements et manches se fermeront par
trois petits boutons d’uniforme. De plus,
il sera mis sept gros boutons sur chaque
devant, un à chaque hanche, deux sur la
patte de chaque poche, qui sera dans les
plis. Petits boutons pour veste et culotte
en drap blanc.

Le chapeau sera uni, sans panache, sans


plume ni plumet, bordé d’un galon de

Bouton du génie d’époque 1er Empire,


Lettre de L. Carnot sur l’uniforme du génie, collection Musée du génie collection Musée du génie

3) La plupart des auteurs traitant des uniformes mentionnent la date du 1er vendémiaire, an XII. Il semble que celui-ci ait repris les dispositions du 1er messidor
qui est consacré exclusivement au génie.

- 88 -
SAPEUR

d’or uniforme. Cette housse sera mise


sous la selle ; les chaperons seront en
peau d’ours.

L’armement n’est pas oublié. L’épée, le


sabre et les pistolets seront du modèle
affecté aux officiers de l’état-major des
armées.

Ce même règlement précise les parti-


cularités de l’uniforme des gardes du
génie dont nous parlerons ultérieure-
ment.

Un décret du 9 novembre 1810 simpli-


fie la coiffure. En effet, le cordon du
shako est supprimé et remplacé, pour
les officiers, par un ou deux galons
d’or (pour les colonels). De même sont
supprimés les plumets sauf pour les
officiers supérieurs et, pour les autres,
remplacés par une houppette en laine.
La plaque de shako a la forme d’un
Sapeurs sous l’Empire, gravure du XIXe siècle, collection Musée du génie
losange. Elle est en cuivre jaune avec
poil de chèvre noir de six centimètres de retroussis rabattus en cuir jaune. Les grenade estampée au-dessus du
largeur ; ganse en or de dix-huit milli- éperons seront plaqués en argent. Le numéro. Cependant, cette plaque fut
mètres de largeur ; glands dans les modèle est proposé en gravure sur la peu portée 4.
cornes dont les franges seront corres- planche 13 du règlement. Les boucles
Le long décret du 19 janvier 1812 a pour
pondantes au grade. La couleur n’est des souliers en argent.
but de renforcer l’uniformisation de
pas indiquée mais est sous-entendue
l’armée tout en essayant d’être plus
dorée. La cocarde tricolore dite « natio- Le ceinturon sera en buffle blanc, de la
attentionné au confort du soldat.
nale » est, bien sûr, présente. largeur de six centimètres deux milli-
L’habillement de base est celui de l’in-
mètres et la plaque en cuivre doré avec
fanterie (voir figure 2).
Le règlement stipule que le col sera le corset d’armes et pot-en-tête en relief.
blanc en temps de paix, et noir en Pour le génie : habit bleu avec collet,
campagne ! L’équipement du cheval est lui aussi
revers, parements, pattes de parement
décrit minutieusement. La selle sera à la
en velours noirs avec liseré rouge, pas-
Un petit uniforme est aussi prescrit pour française, en veau-laque. La housse et
sepoil rouge figurant les poches à trois
les officiers du génie : habit de drap bleu les chaperons, en drap bleu national, pointes en long. Les retroussis sont
national, doublure écarlate, sans revers ; seront bordés d’un galon d’or de la lar- rouges avec passepoil de velours noir
les poches seront dans les plis ; le collet geur de 5,5 centimètre pour les officiers avec deux haches en drap bleu et en sau-
et les paremens seront en velours noir, supérieurs, de 4,5 centimètre pour les toir comme ornement. Les boutons sont
liserés de rouge ; collet droit et pare- capitaines et de 3,8 centimètre pour les plats, jaunes avec le trophée d’arme. Le
mens ouverts sous la manche et fermés lieutenants (le galon est représenté à pantalon est bleu et les guêtres plus
par deux petits boutons. Cet habit bou- l’échelle 1 en gravure, planche 7). Les courtes, de couleurs noires. Ainsi, l’habit
tonnera sur la poitrine ; les pans s’agra- bossettes ovales, unies et plaquées en couvre maintenant le ventre et cache la
feront derrière ; il sera garni de neuf gros argent, ainsi que toutes les boucles veste. Les revers sont droits. Les
boutons sur le devant, un à chaque apparentes ; les étriers noirs, vernis ; basques sont plus courtes 5.
manche, deux dans les plis, et de deux tous les cuirs noirs, compris ceux de la
petits à chaque parement. Il est précisé bride et du bridon. Le shako reste identique à celui prescrit
qu’en petit uniforme, la veste sera en 1810 sauf la plaque qui est en cuivre
blanche, la culotte en drap bleu. En campagne, les officiers du génie jaune surmonté d’une aigle couronnée
pourront se servir de la selle à la hus- avec le numéro du bataillon de sapeurs
En grande tenue, les bottes seront sarde ; la housse, dite de pied, sera en ou de la compagnie de mineurs.
à l’écuyère et en petit uniforme, à drap bleu national, bordée du galon

4) BLONDIAU, Aigles et shakos du 1er Empire, Paris, 1980.


5) Voir l’habit de caporal du génie, modèle 1812, présenté dans le hors série n° 23 de Tradition Magazine, p 66.

- 89 -
SAPEUR

Il semble que les haches en sautoir ne forme que les officiers du corps du génie.
furent pas utilisées et que seul la grenade Ainsi est enfin amalgamé dans une
ait continué à être portée 6. De même, le même entité l’ancien corps des ingé-
passepoil de velours noir sur les retrous- nieurs du roi, les mineurs et les sapeurs 10.
sis ne semble pas avoir été exécuté.

LES SAPEURS DE LA GARDE IMPÉRIALE


LES MINEURS ET SAPEURS
Corps d'élite par excellence, la Garde
Le 4 mars 1795 (14 Ventôse an III), les six impériale se devait de posséder une
compagnies de mineurs sont réunies défi- unité du génie. Cependant, ce n'est que
nitivement au corps du génie. En effet, les vers la fin de l'Empire qu'une compagnie
mineurs avaient été rattachés au génie le du génie fut créée avec une mission très
15 décembre 1792 sans intégration de particulière. Un décret impérial daté du
leurs officiers au corps du génie. Les 10 juillet 1810 ordonne la création d'une
mineurs avaient alors pris la dénomination compagnie de sapeurs au sein de la
d’« ouvriers militaires du génie 7 ». Garde Impériale dont la mission est le
service des pompes dans les palais
impériaux. Ainsi, la mission première de
ses sapeurs est d'être des pompiers !
D'un effectif initial de cent trente-neuf
Sapeur vers 1795, hommes, celui-ci va régulièrement aug-
aquarelle d’André Marcy, menter jusqu'à monter à trois cent
collection Musée du génie
soixante-seize hommes au printemps
1813 dont les deux tiers dans la Jeune
L’uniforme de ces sapeurs est spécifié Garde. Des pompes patiemment ache-
Bouton du 2 bataillon de sapeur
e dans ce décret qui stipule que celui-ci minées vers Moscou serviront à essayer
époque début XIXe siècle serait le même que celui des compa- d'arrêter l'incendie de la capitale mosco-
collection Musée du génie
gnies de canonniers, sauf les épaulettes vite. Lors des Cent jours, une compagnie
qui seront jaunes 8. Ainsi, les collets, sera de nouveau reconstituée.
Les mineurs vont conserver l’uniforme parements et revers étaient bleus liserés
qu’ils avaient lorsqu’ils dépendaient de de rouge. La culotte et la veste sont L'uniforme des sapeurs de la Garde est
l’artillerie. Le règlement du 15 janvier bleues. Il semble que rapidement, ils pri- très proche de celui des bataillons de
1792 prescrit des épaulettes à franges à rent le velours noir et les épaulettes sapeurs. Seule la coiffure et les boutons
laine écarlate. Ils les garderont lors de rouges comme les mineurs. L’extrémité sont spécifiques. Il faut aussi rappeler
leur passage dans le corps du génie et de chaque retroussis des basques est
adopteront aussi les parements noirs garnie d’une pelle et d’une pioche en
liserés de rouge. sautoir 9. Le chapeau est adopté comme
coiffure.
Un décret du 15 décembre 1793 (25 fri-
maire an II) crée douze bataillons du Le règlement qui suit la publication de
génie destinés aux travaux de fortifica- ce décret précise, dans son article VI,
tions et d’aménagement tant en cam- que le drapeau sera porté par le plus
pagne que dans les places. Ce décret ancien sergent-major.
peut être considéré comme l’acte créa-
teur de l’arme du génie. Cependant, il L’arrêté des consuls du 10 octobre 1801
est important de noter que ses (18 vendémiaire an X) unifie l’arme du
sapeurs, mis à la disposition des offi- génie en homogénéisant les structures
ciers du corps du génie, étaient com- des six compagnies de mineurs et les
mandés par des officiers dits « offi- quatre bataillons de sapeurs seulement
ciers de sapeurs » qui n’appartenaient effectifs. En complément, le décret du
pas à ce corps. 27 décembre 1801 (6 nivôse an X) donne Sapeur de la Garde Impériale,
aux officiers de sapeurs le même uni- L. Rousselot, collection Musée du génie

6) TERRIENNE, op cit.
7) TERRIENNE, Notes sur l’organisation et l’uniforme des troupes constituant le génie, titre III, p 54.
8) AUGOYAT, Aperçu historique sur les fortifications, les ingénieurs et sur le corps du génie en France, 1864, tome III, page 60. Décret de la convention
nationale du 25 frimaire, an II, section troisième, article 1.
9) C’est-à-dire croisé. La couleur devait être bleue.
10) TERRIENNE fait débuter l’arme du génie à partir de ce décret; op cit, titre III, p 72.

- 90 -
SAPEUR

que les uniformes de la Garde sont vaux des mineurs et des sapeurs. Son même loi crée « les archives des fortifi-
généralement taillés dans un tissu de organisation changea plusieurs fois cations ». Ainsi, un dépôt d’archives spé-
meilleure qualité et que l'armement a avant de se stabiliser à un bataillon à cifiques au génie voit-il officiellement le
aussi sa propre spécificité. sept compagnies dont une de dépôt jour. Cette spécificité cessera en 1985.
(1er juillet 1811). En général, il y a une
Fabriqué en acier et laiton, le casque est compagnie du train du génie par corps L'article 4 de la loi du 5 floréal an V
singulier et particulièrement seyant. d'armée. L'uniforme est spécifique bien stipule que « les Gardes-éclusiers des
C'est un casque à bombe avec une que la couleur de fond de l'habit soit la fortifications porteront l'uniforme de
visière et un couvre-nuque en acier poli. même que celle du train des équipages : sous-officiers de mineurs, avec les
Le cimier estampé, le cerclage, le port du habit gris de fer avec collet, revers, pare- marques distinctives du grade affecté à
plumet, les jugulaires à écailles posées ment et pattes de parement noirs vrai- la classe de garde dans laquelle ils sont
sur un cuir, les rosaces avec une étoile semblablement en panne (et non en compris ». Le règlement du 20 juin 1804
au centre et la plaque sont en laiton. La velours !) ; poches, doublure et retrous- (1er messidor, l’an XII) dans son article II
plaque représente une aigle éployée très sis de couleur distincte ; boutons et orne- du chapitre IV traite de l’uniforme des
caractéristique. Le plumet est écarlate et ment (grenades aux retroussis) blancs. gardes du génie. Les gardes du génie
la chenille du cimier en poils d'ours La veste est blanche ; culotte de peau porteront l'habit bleu national, doublure
noirs. Les sapeurs de la Jeune Garde avec surculotte et bottes à la dragonne. écarlate, collet, paremens et revers en
portent un shako en feutre noir avec une La capote, du même type que l'infante- panne noire liserés de rouge, veste et
plaque en laiton à l'aigle couronnée, rie, est en drap gris de fer. La scha- culotte de drap bleu garnies de petits
deux jugulaires avec écailles et rosaces braque est en peau de mouton blanc. Le boutons d’uniformes. Le chapeau sera
étoilées en laiton avec un cordon natté shako est du même type que l'infanterie uni, la ganse en galon de laine jaune
écarlate et un plumet de même. Au avec plaque en losange et jugulaires avec cocarde national, boutons jaunes et
bivouac ou en tenue de travail, le port du timbré d’un corset d’armes avec la
blanches, aigrette rouge. Le décret du 9
bonnet de police est autorisé. Celui-ci légende : garde du génie. Les gardes de
février 1812 précise que les passepoils
est en drap bleu avec galon, passepoil et première classe portent les épaulettes
figurant les poches, la doublure et les
grenade écarlate pour les sapeurs et or d'adjudant (fond de soie couleur de feu,
retroussis seront bleus ; les boutons sont
pour les officiers. traversée dans le milieu de deux cor-
plats et blancs (argent) frappés d'une
dons de tresse d’or), ceux de deuxième
cuirasse surmontée d'un pot en tête.
Les boutons sont en cuivre jaune voire classe les galons de sergent-major (deux
dorés pour les officiers, timbrés d'une galons en or sur chaque manche, du
aigle. ÉCLUSIERS, CASERNIERS11, GARDES côté de l’extérieur de l’avant-bras et près
du parement), ceux de troisième classe
ET GARDIENS DES FORTIFICATIONS
La capote est en drap bleu, croisée sur le les galons de sergent (un seul galon en
devant avec deux rangées de sept gros or sur chaque) et ceux de quatrième
Le chapitre XV de l'ordonnance du 1er
boutons ; deux autres gros boutons à la classe les galons de fourrier (un galon
octobre 1786 traite de l'uniforme des
taille, derrière. Les parements sont agré- en or sur le dehors de la manche, au-
employés aux fortifications : les Éclu-
mentés de trois petits boutons chacun, dessus du pli du bras).
siers, Caserniers, Gardiens des fortifica-
plus un sur chaque épaulette. En effet,
tions, jetées, digues, fascinages et épis,
les galons ou les épaulettes se portent
ainsi que tous autres employés, porte- LES OUVRIERS DU GÉNIE
aussi sur la capote. En petite tenue et en
ront l'habit avec collet renversé ; dou-
tenue de ville, les officiers portent le cha-
blure, veste et culotte bleu de roi. Les Le 12 novembre 1811, les ateliers du
peau à ganse noir bordé de soie de la
boutons des fortifications seront de dépôt du train du génie de Metz sont
même couleur et glands dorés dans les
métal jaune, ornés dans le milieu d'une transformés en arsenal du génie. Il est
cornes avec bouton de la Garde et
rosette, avec la légende au pourtour : alors créé, dans cet arsenal, une compa-
cocarde nationale.
fortifications. gnie d’ouvriers du génie.

LE TRAIN DU GÉNIE Par la loi du 10 juillet 1791, tous les L’uniforme est le même que celui du
employés de fortifications seront dési- génie avec des grenades en drap bleu
Le développement des armées révolu- gnés dorénavant sous les noms de aux basques et des boutons à cuirasse
tionnaires puis impériales va entraîner la gardes des fortifications et d’éclusiers portant l’inscription : ouvriers du génie.
création du train du génie le 1er octobre des fortifications 12. Ils sont au nombre Le shako est celui des mineurs avec un
1806. Sa mission était de convoyer les de 200 13 et doivent obligatoirement por- pompon rouge surmonté d’une petite
outils et matériaux nécessaires aux tra- ter l’uniforme qui leur sera affecté. Cette aigrette en crin noir 14.

11) Le règlement du 30 thermidor, an II , dans son titre deuxième traite du rôle des caserniers.
12) Journal militaire du 11 septembre 1791, numéro 37, p 444 et 445.
13) Le chiffre citée est 300 mais, dans cette même loi, un tableau précise et détaille le coût et leur nombre pour 200.
14) TERRIENNE, op cit, titre III, p 121.

- 91 -
SAPEUR

LES ADJOINTS AU GÉNIE Le décret du 5 floréal an V, dans son première compagnie participera à la cam-
article III, précise que l’uniforme reste le pagne d’Égypte. Cette situation entraînera
Ils sont créés par la loi du 21 février 1793 même que celui attribué le 22 septembre une modification de son uniforme. L’habit
qui traite, dans son titre VII, du génie. 1796 (1er vendémiaire an V), à l’excep- est vert foncé avec passepoil rouge au col-
L’article II stipule que dans les places qui se tion de la doublure, qui sera bleue et les let; le reste, sans changement. Cet habit
trouveraient dépourvues du nombre d’in- revers qui seront supprimés. est encore modifié en Égypte : habit et
génieurs suffisant pour le service, le veste bleue avec collets et parements
ministre est autorisé à nommer des Les adjoints furent supprimés par décret du verts, retroussis verts, passepoil blanc et
adjoints en nombre suffisant, sur la pré- 11 octobre 180116 (19 vendémiaire an X). boutons en bois recouverts d’étoffe bleue.
sentation des chefs du génie, et à leur attri- Les compagnies d’aérostiers furent dis-
buer un traitement analogue à leur genre LES AÉROSTIERS soutes en 1799 par le Directoire. Cette spé-
d’utilité 15. La loi du 5 août 1794 (18 thermi- cialité réapparaîtra dans l’armée française
dor an II) limite leur nombre à 200 répartis Dans la tourmente révolutionnaire, les lors de la guerre de 1870-1871.
en deux classes. nouvelles idées foisonnent tant dans le
domaine politique que dans le domaine
Ils portent l’uniforme de sous-lieutenant militaire. Dans ce dernier domaine, il est
de sapeur. créé, par décret du 2 avril 1794 (13 germi-
nal, an II), une compagnie d’aérostiers à
Meudon sous les ordres du capitaine
Coutelle. Ce décret 17 indique l’uniforme de
la nouvelle compagnie dans son article 4.
Il consiste en un habit, veste et culotte
bleus avec passepoil rouge au collet, pare-
ments noirs, boutons d’infanterie 18 prévus
par le décret du 4 octobre 1792 (13 vendé-
miaire, an III) avec veste de coutil bleu
pour le travail. L’armement est composé
d’un sabre court (vraisemblablement type
briquet) et de deux pistolets 19. Une
Uniforme type d’infanterie 1801-1810, deuxième compagnie fut créée le 23 juin Uniforme type d’infanterie 1812,
dessin Michel Pétard (5 messidor, an II) de la même année. La dessin Michel Pétard

15) AUGOYAT, op cit, tome troisième, p 28.


16) TERRIENNE, op cit, titre I, p 5.
17) AUGOYAT, op cit, tome troisième, p 37.
18) FALLOU, dans son ouvrage, indique un bouton en cuivre particulier avec ballon surmontant une nacelle avec deux hommes portant chacun un
fanion (vers 1796).
19) Le musée d’histoire militaire de Fontainebleau possède une paire de pistolets d’aérostier.

- 92 -
SAPEUR

Capitaine (esr) GÉNÉRATION DE FORCES


Bernard
GIUDICELLI
ET EMPLOI DU GÉNIE :
LES SAPEURS DE LA CAMPAGNE D’ALGER
24 JUIN – 5 JUILLET 1830

Le Capitaine GIUDICELLI sert au 71e LES RAISONS DU CHOIX Si « le coup de l’éventail » date de 1827,
Régiment du Génie. c’est après deux ans de réflexion et
Conséquence du « coup de l’éventail », quelques péripéties que la décision est
Chef de projet Sénior, il collabore à la de raisons de politique intérieure et de prise. Début 1830, se tient le conseil des
réalisation de plusieurs applications considérations financières1, la cam- ministres chargé d’évaluer la faisabilité.
pour l’Armée de Terre et la Gendarmerie. pagne d’Alger est la première expédition Le général Valazé y participe. La résolu-
d’une telle envergure que l’armée fran- tion adoptée à l’unanimité est présentée
Il commande au 71e RG puis en opéra- çaise ait lancée. Plus que le nombre de au Roi :
tion extérieure avec le BATGEN 1. combattants, environ 37 000 hommes, il
• Débarquement sur la presqu’île de
convient de considérer le contexte géné-
Sidi-Ferruch.
Détaché au ministère de l’Intérieur de ral : le débarquement de vive force, l’em-
1997 à 2000, il est aujourd’hui adjoint au ploi combiné de forces terrestres et • Progression sur l’axe Sidi-Ferruch
conservateur du musée du génie. maritimes, la minutie de la préparation, Alger via « Chapelle et Fontaine » et
le déroulement de l’action. « Fort l’Empereur ».
• Attaque de la ville par la terre.
Il s’agit d’une première.
Comme Napoléon avant lui, Charles X
Les antécédents désire s’imposer en Afrique pour y limi-
ter la présence britannique. Ce qui lui
Sans remonter aux croisades, il y eut, fera répondre à l’ambassadeur anglais :
bien sûr, des précédents : celle de « Pour décider d’aller à Alger, je n’ai
Lafayette et celle de Bonaparte, l’une consulté que l’honneur de la France,
vers les Amériques et l’autre vers l’É- pour décider de ce que j’en ferai, je ne
gypte. Ces deux opérations ne sont pas consulterai que ses intérêts ».
les plus réussies de la marine française.
La flotte est malmenée sur la côte est À la même époque
des Amériques et coulée devant
Aboukir… Et encore, dans ces deux der- Cette année-là, Charles X règne, cahin
niers cas, pouvait-on compter sur une caha. Marc Seguin invente la chaudière
partie de la population, sinon acquise, tubulaire. En Angleterre, Georges IV
du moins bienveillante. Pour Alger, rien accède au trône, la première ligne de che-
de tel. Pire, cette action va se dérouler en min de fer est ouverte au public.
« Terra incognita ». La locomotive « Rocket » atteint les

1) En 1827, La France traîne une dette de 7.5 millions de francs or. Vieille de 20 ans, elle résulte d'une livraison
de blé réalisée au bénéfice de l'Empire. Le Dey d'Alger a payé les fournisseurs. Il en attend le remboursement.
Ceci explique sans doute cela…

- 93 -
SAPEUR

25 km/heure. Beethoven obtient un Encore faut-il être bienveillant. Le calen-


immense succès avec la 9e symphonie. drier est serré. Le 8 février, le Roi
Les accords d'Orange sont discutés : approuve la décision du Conseil.
bientôt naîtra la Belgique et la France y Le 11 mai, les troupes commencent
perdra la Flandre, le Hénault et l'Artois. l'embarquement. Entre-temps, c'est
37 000 hommes qui sont dirigés vers
L'armée française compte environ Toulon. Les sapeurs viennent d'Espagne,
270 000 hommes. Cette armée, entière- de Flandre et de Lorraine. 110 navires de
ment refondue depuis 1816, connaît peu la Marine escorteront les 500 bateaux de
d'évolution des matériels. L'artillerie commerce. Les arsenaux inventent et
abandonne le système Gribeauval (1780) réalisent des barges de débarquement
pour le système Vallet. Le génie est orga- capables de transporter deux pièces d'ar-
nisé depuis la refonte en régiments. Ils tillerie. Ces pièces peuvent tirer pendant
sont 3, à deux bataillons chacun. Un leur transport. L'intendance n'est pas en
bataillon compte 8 compagnies : 2 com- reste. Elle rassemble et prépare deux
pagnies de mineurs, 6 compagnies de mois d'avitaillement embarqués à Toulon
sapeurs. On trouve 4 officiers et et deux mois à suivre avec la seconde
150 hommes par compagnie. Ajoutons à vague. Il est prévu pour chaque homme
cela les compagnies d'équipage du un approvisionnement de 5 unités
Pour le 1er RG, sont engagées la 1/m, les
Génie. Les conditions d'emploi sont d’alimentation et 6 unités de feux.
Cies 1/1, 1/2, 1/3, 2e RG : les Cies 1/3 et 1/4,
simples : 1 compagnie de sapeurs pour
3e RG : la 1/m, la Cie 1/4 plus 1/2 Cie du
une division, soit 8 sapeurs pour
LES PRÉPARATIFS train des équipages du génie.
600 fantassins. La poussière de « génie »
existe déjà.
Nous sommes le 31 janvier 1830… Chaque Cie est à 4 officiers, 150 hommes
Les conclusions du conseil des ministres et 2 chevaux. Au total, 63 officiers et
Comme de nos jours, le capitaine du
seront proposées au Roi Charles X la 1250 sapeurs.
génie est l’interlocuteur du général com-
semaine suivante. Pour des raisons de
mandant la division.
politique intérieure, le nom du général Les troupes du génie sont concentrées
en chef n'est pas arrêté. Mais on connaît en Arles, car elles viennent en majorité
LA RECONNAISSANCE. déjà le nom du général commandant le de Metz et d'Arras, et descendent
Génie2. Ce sera le Général Valazé. par voie fluviale. D’autres viendront
Début 1808, Napoléon veut rejoindre d’Espagne. Une partie va être détachée
l'Égypte afin de limiter, voire couper, la Un état-major et un bataillon vont parti- sur Saint-Rémy-de-Provence. Partout,
route anglaise des Indes. Le but étant de ciper aux opérations. Celui-ci est mis sur on aura pour but de constituer le mini-
rejoindre Le Caire par… Tunis et Tripoli, la pied par les 1er, 2e et 3e régiments du mum vital, savoir, rassembler les
Méditerranée appartenant à la marine génie. Ces dispositions sont conformes matières premières et réaliser tout ce
anglaise. L'idée n'est pas si mauvaise, aux règles habituelles. Mais l’effectif est qui peut l’être. Ainsi, 10 blockhaus
puisque 135 ans plus tard, Rommel et son conséquent. Jusqu’à ce jour, aucune démontables seront réalisés pendant
Afrika Corps suivront cet itinéraire. Le but division n’avait jamais bénéficié d’un cette période. Nos anciens maîtrisent le
de la reconnaissance est donc de repérer appui de cette ampleur. Kit bien avant IKEA. Ils auront dans leurs
un port capable d'abriter la flotte française bagages, entre-autres…
des éléments naturels d'une part, et des
actions de la marine anglaise d'autre part. 4200 palissades 6500 lances à hérissons 300 chevaux de frise (de 3m)
C’est le Commandant Boutin qui est 2500 fascines 2500 piquets pour gabions farcis 8 barrières
chargé de cette mission. Il la réalise au 3500 gabions carrés 37 500 piquets de gabions 10 blockhaus
printemps de la même année. Très vite, 16 chevalets de ponts 220 000 sacs à terre. 25000 outils de parc
500 outils de sapeurs.
l’objectif devient clair : « S’emparer
d’Alger ». Il convient de noter que la recon-
naissance ne se borne pas à la seule dési- 2 forges de campagne 10 tonnes de houille 1500 m3 de bois à scier.
gnation du lieu. Boutin oriente la stratégie, 4 sonnettes à bras. 2 tonnes de barres d’acier
les axes d'efforts, les moyens nécessaires. 12 établis de menuisiers 3 tonnes de barres de fer
Il fixe le lieu du débarquement, l'itinéraire,
les points d'appui à conquérir. Le choix Dans son mémoire, le Cdt Boutin stipule qu'il n'a trouvé que de maigres broussailles,
semble judicieux, les alliés y débarqueront une seule source (Chapelle et Fontaine) et signale que d'une façon générale, les
en novembre 1942. Il est donc naturel que ressources locales sont maigres, parfois inexistantes. Ceci explique les volumes
la résolution du Conseil des Ministres ci-dessus. 25 kilomètres séparent Sidi-Ferruch d'Alger. Boutin prévoit 5 jours de
reprenne point par point toutes les recom- marche d'approche. Ce délais ne laisse pas le temps aux sapeurs de construire sur
mandations de son mémoire, sauf une… place. Tout est donc assemblé et construit pendant la concentration en Provence.
l’époque de l’année. Puis tout est démonté, transporté vers Toulon et embarqué.

2) La présence à ce niveau de décision d'un « sapeur » est, hélas, trop rare. L'influence du Général Valazé sur la manœuvre « Génie », nature, volume des troupes, antici-
pation et conduite de la manœuvre sont indéniables. Pour mémoire, une division dispose d’un bataillon du génie. C'est donc un Commandant qui représente l'Arme
auprès d'un État-major de division, un capitaine pour la brigade…

- 94 -
SAPEUR

Les préparatifs sont minutieux. En 16 Juin : les premiers pains chauds entrave largement la manœuvre. Les
raison des aléas de la météo, tout ce qui sortent des fours. La tranchée de protec- canons sont tirés à bras des plages aux
peut être loti est empaqueté dans un tion est profonde de 1.60 m. Elle pos- postes de tirs. Quant aux approvisionne-
double emballage. Le but est de rendre sède un talus de 2 m environ. Elle fait, ments vers la ligne de front, ils ne peu-
les colis étanches et flottants. Les déployée, 1000 mètres de long, court vent être réalisés.
caisses sont donc recouvertes de toile à de part et d’autre de la presqu’île. Des
voile goudronnée. Point d'inscription.
pontons armés d’artillerie sont échoués 18 Juin : les travaux continuent, mais
Des codes couleurs sont encollés sur le
à chaque extrémité. Des ouvrages sont les combats commencent. Les sapeurs
goudron. Les sapeurs commencent l’em-
établis sur les maigres hauteurs domi- font le coup de feu. Harcelés et défiés, ils
barquement le 11 mai. Il s’achève le 18
mais c’est le 25 que la flotte quittera nant l’entrée de la presqu’île de Sidi- sont surpris par ces cavaliers qui char-
Toulon. Une relâche à Majorque et fina- Ferruch. Les crevasses et talwegs sont, gent, debout sur leur monture, mépri-
lement, le 13 juin au soir, les plages de de même, battus par les feux. Si l’ou- sent la mort, tirent en galopant, puis
Sidi-Ferruch sont en vue. vrage est considéré apte à la défense, il virevoltent, rechargent leur arme, et
n’est pas encore achevé. Les sapeurs reviennent, toujours au galop. Mais les
entament un nouveau chantier : aména- sapeurs possèdent des fusils de rem-
LE DÉBARQUEMENT ger les accès. Ils ont devant eux un mau- part, et ils savent s’en servir… Un joli
vais chemin muletier. Ils vont en faire coup est acclamé par les fantassins…
14 juin : Le débarquement commence une route, large de 6 mètres, entière-
dès 2 heures du matin; à 6 h 30, le général ment carrossable, s’affranchissant ici 19 juin : Les combats sérieux se dérou-
de Bourmont met pied à terre. des rochers, là du sable… Les mineurs, lent sur le plateau de Staouli. Les
A 13 h 00, le général Valazé délimite quant à eux, continuent de creuser les sapeurs arasent, taillent et dessinent
l’emplacement de la ligne bastionnée. puits. Les fours enterrés sont insuffi- cette route qui permettra l’approvision-
Il ne s'agit pas d'une simple tranchée. sants, mais les fours métalliques de l’in- nement en continue des unités. Mais
Il faut réaliser des bastions, des avant- tendance arrivent enfin. Les mineurs cela ne suffit pas. Il faut établir un camp
postes, des points de passages. Relier vont les assembler. intermédiaire sur le plateau. En pleine
l'ensemble pour en faire un tout homo-
bataille, les sapeurs s’échinent, creu-
gène. En outre, il ne s'agit pas que de 17 juin : une violente tempête suspend
sent, aménagent, bastionnent encore…
défense, la ligne doit aussi soustraire les les opérations de débarquement, mais
Les convois sont parfois la cible des
installations aux vues de l'ennemi. de débarquement seulement. Car les
cavaliers. Des casemates sont établies
À 17 h 00, les outils sont distribués, opérations de ravitaillement, elles, conti-
sur l’itinéraire, les blockhaus dressés.
les sapeurs du génie renforcés de nuent. En effet, en prévision de ces diffi-
Les mineurs ne sont pas en reste. Sous
1 500 sapeurs d’infanterie se mettent à cultés, tous les colis (environ 80 000)
les ordres du lieutenant Lamoricière, ils
l’ouvrage, aux ordres des commandants sont insubmersibles, étanches et diffé-
ont creusé 20 puits, construit 12 fours à
Chambaud et Vaillant. La protection renciés par des codes couleurs. Ils sont
pains en fer, et réalisé 8 autres, en
du chantier est assurée par les donc passés par-dessus bord. Il suffit
brique.
bataillons. Cette nuit-là, et les suivantes, d’attendre qu’ils rejoignent le littoral,
les régiments se mettent en carré de puis de les déposer auprès du drapeau
Les jours suivants, pendant que les
défense. Le premier rang est couché, le correspondant que les mineurs ont
combattants s’observent, le génie
second assis, le troisième debout… Les dressé sur le bord de la plage. Bien que
continue l’ouvrage.
mineurs creusent3 le premier puits. Ils les 4 000 chevaux ainsi que les
trouvent l’eau à 5 m de profondeur. 1 000 têtes de bétails, ne puissent être
débarqués, les parcs et les abreuvoirs 23 juin : la presque île de Sidi-Ferruch
15 juin : les sapeurs continuent la ligne. sont aménagés. Les échoppes aussi. La est totalement fortifiée. La ligne de
Mais ils entament aussi la réalisation première cantine est établie. Les com- défense est désormais équipée de ses
du camp et l’aménagement de la plage. merçants sont prêts à offrir leurs ser- gabions et fascines. Le 25, le camp
Les allées secondaires sont ouvertes, vices. Notons, pour la forme, qu'ils sont du plateau de Staouli est achevé.
réparties de part et d’autre de deux axes installés au centre du camp et que les Désormais, la route arrive presque jus-
principaux. Ceux-ci font six mètres de tentes sont établies tout autour. Une qu’au fort de l’Empereur. Un pont de
large. Les premiers bâtiments réalisés toile de tente4 pour quinze, un fourneau chevalets est lancé. L’ancienne voie
sont les dépôts de l’intendance et l’hôpital. pour huit. Heureusement, les bidons, romaine, trop étroite, ne permet pas
Celui-ci contient 1 000 lits. Le long de eux, sont individuels. l'acheminement des 250 tonnes journa-
la plage, des drapeaux de différentes lières d'approvisionnement. Elle est
couleurs sont installés. Les mineurs se Mais la tempête a un effet secondaire doublée. Maintenant, 7 points d’appui
répartissent deux tâches : creuser les non négligeable. Les chevaux5 ne peu- jalonnent cet axe qu’empruntent chaque
puits et construire des fours. vent toujours pas être débarqués, ce qui jour les convois des trains d’équipage.

3) Ils étayent le puits avec les planches des caisses de munitions, récupérées et reconditionnées.
4) Elles sont montées sur charpente de bois. Petit détail qui donne une idée de l'ouvrage, si on prend le temps de calculer le ratio…
5) 4500 chevaux sont embarqués à Toulon. 500 sont destinés à la cavalerie, les 4000 restant sont pour l'Artillerie, les trains d'équipages et l'État-Major. Leur débarquement
commencera seulement à partir du 23 juin.

- 95 -
SAPEUR

Ils sont constitués d’un ensemble case- défenses de l’ennemi et que la brèche 4 juillet : l’ennemi voyant la vitesse de
mate-blockhaus, de fossés et de talus, sera ouverte avant 24 heures de sorte réalisation des travaux, comprend que
renforcés de palissades. que nous serons maîtres du fort le 5
la fin est inéluctable, préfère évacuer
juillet au soir ».
le fort de l'Empereur et fait sauter la pou-
2 juillet : les travaux de sape commen- Il n'empêche. Les sapeurs vont bastionner drière.
cent devant le fort de l'Empereur. Le les maisons qui longent la route, les créne-
général Bourmont n’hésite pas à écrire ler. Puis ils établiront la base d'assaut. Un
au Duc d’Orléans : « Je crois qu’après 2 troisième camp est réalisé. Puis les pre- 5 juillet 1830, Le Dey Hussein signe la
heures de feu, nous aurons passé les mières parallèles sont ouvertes… reddition, Alger tombe.

- 96 -
SAPEUR

Monsieur LES INGÉNIEURS


Alain
FOUGERAY
DANS LES TROUPES ÉMIGRÉES

Parmi les très nombreuses études qu’il chargent le colonel François Eugène
reste à mener pour reconstituer l’histoire Lenglé de Moriencourt (1731-1795),
complexe du Génie militaire, celle de ancien sous-brigadier à Bergues, de
l’attitude des ingénieurs du roi face à la cette mission. Le chevalier Antoine Jean
Alain Fougeray est attaché au ministère Révolution française serait très certai- Louis du Portal, capitaine au corps, lui
de la Culture et de la Communication, nement l’une des plus intéressantes. est adjoint.
mis à disposition de l’ESAG en qualité En effet, la formation des ingénieurs à
de responsable du Centre de Documen- l’école de Mézières les destinait à une Deux détachements d'ingénieurs sont
tation et de Recherches. carrière toute tracée et entièrement formés. Le premier rejoint le quartier
dévouée aux idéaux de la monarchie. général de l'armée anglaise ; le second,
Il a précédemment été adjoint du direc- l'armée hollandaise. En décembre, le
teur régional des affaires culturelles de Comme ce fut le cas pour les cadres des colonel de Moriencourt rassemble à
Bretagne (1975-1986), puis chargé de autres armes de l’armée royale, les ingé- Ostende, une « brigade d'ingénieurs »,
mission auprès du préfet de la région nieurs, ont dû, en cette fin du XVIII e composée, outre de Moriencourt, du
Bretagne avant de rejoindre le bureau siècle se pétrir des idées nouvelles, major du Portal, de 4 capitaines,
des études et recherches de l’IHEDN. particulièrement après la guerre 3 capitaines en second et 4 lieutenants.
d’Indépendance Américaine à laquelle Ces « conseillers techniques » seront,
De 1995 à 2003, il était chargé de la
nombre d’entre eux ont participé. Les soit répartis dans les différents états-
communication à la direction des
bibliothèques personnelles de ces offi- majors de l'armée anglaise aux Pays-
Archives de France.
ciers ont sans doute compté bon Bas, soit attachés à l'expédition destinée
nombre d’ouvrages « subversifs » qui à débarquer sur les côtes de Bretagne.
ont préparé les esprits à accueillir très
favorablement la Révolution de 1789. La
carrière d’un Lebègue du Portail, futur
ministre de la guerre d’octobre 1790 à
décembre 1791, en témoigne.

Toutefois, beaucoup d’ingénieurs n’ont


pas embrassé les idées de la Révolution
et ont choisi d’émigrer et de mettre leur
savoir au service de la Monarchie en
s’engageant, surtout à partir de 1793,
dans les corps levés par les princes émi-
grés ou par les puissances coalisées.

On distingue quatre formations de


troupes émigrées :
1 - le service de la Grande-Bretagne et
des Pays-Bas,
2 - l’armée de Condé (service russe),
3 - l’armée des Princes,
4 - l’armée de Bourbon.

LE SERVICE DE LA GRANDE-BRETAGNE
ET DES PAYS-BAS (1793-1802)
Septembre 1793 : le Gouvernement bri-
tannique demande officieusement aux
Princes français, de désigner des offi-
ciers de l'ancien corps royal du Génie,
qui pourraient servir à l'état-major du
duc d'York ou participer à des expédi- Service de la Grande-Bretagne
tions sur les côtes de France. Les Princes Ingénieur en frac - 1792

1) Ils feront tous les deux, par la suite, partie de l’état-major de Puisaye.

- 97 -
SAPEUR

En attendant un emploi, les officiers du Puisaye signée des capitaines Pioger de Le 9, le colonel de Moriencourt est
Génie, venant d'Ostende, sont placés en Saint-Perreux et Suasse de Kervegan1, nommé aide-maréchal général des logis
garnison dans l'île de Wight et à lui demande d'intervenir « pour l'organi- de l'armée.
Southampton. Le 9 mai 1794, un acte du sation totale de la brigade des officiers
Parlement britannique leur donne une du Génie commandée par M. de Lenglé… La presqu'île sera reprise par les troupes
existence officielle et fixe la solde jour- Cette expédition est d'autant plus néces- de Hoche le 21 juillet et 5 officiers
nalière : 10 shillings pour le colonel, saire que le traitement provisoire qu'ils du Génie sont faits prisonniers. Ils
8 pour le major, 6 pour le capitaine, reçoivent est trop peu considérable pour seront fusillés. Ce sont : le colonel
5 pour le capitaine en second et 3 pour le qu'ils puissent faire aucun préparatif de Moriencourt, le major du Portal, les
lieutenant. pour la campagne ; d'ailleurs, cette bri- capitaines Joseph Pascal du Cheyron de
gade étant alors payée par l'Ordonnance Beaumont et Testas de Folmont, le lieu-
En avril 1794, plusieurs officiers avaient (direction anglaise de l'artillerie et du tenant Le Mouton de Néhon.
rejoint, aux Pays-Bas, le détachement matériel), M. de Puisaye en disposera
laissé à l'armée du duc d'York. Les offi- plus facilement » (2 juin 1795). La bri- Les officiers du Génie font également
ciers du Génie s’étaient, en effet, particu- gade est organisée et les brevets datés partie de l'expédition du comte d'Artois
lièrement distingués au cours de la cam- du 1er avril 1795. Elle comprend : Lenglé et du général Doyle à l'île d'Yeu. Le
pagne de 1793-1794 : le baron de de Moriencourt (lieutenant-colonel), du 5 octobre, trois chevaux équipés sont
Moncriff au siège de Dunkerque ; Portal (major), 5 capitaines, 5 capitaines fournis chaque jour, alternativement,
le chevalier de Saint-Paul et M. de lieutenants, 6 lieutenants. En juin, « la aux ingénieurs « auxquels ils seront
Lenecquesaing de La Prée, à Menin et à brigade des officiers du Génie devant nécessaires pour le service ». En
Nieuport ; M. du Frasnois, tué à la sortie être munie de tous les instruments novembre, lorsque la brigade des
de Menin ; M. de Fulaines-Bergères à nécessaires à leur métier et dont l'achat Ingénieurs rentre en Angleterre, elle est
Ostende, etc. exigera une somme assez considérable, mise en garnison à Southampton et
MM. de Suasse et de Pioger auront réorganisée le 1er décembre suivant sous
En 1795, le projet d’une descente en recours au besoin à leurs camarades. le commandement du chevalier Claude
Bretagne se précise et le ministère Quant aux fonds que M. le comte de Joseph d'Ivory nommé lieutenant-
anglais régularise la situation des offi- Puisaye a eu la bonté d'offrir à ses offi- colonel ; Louis François Augustin de
ciers du Génie. Une note au comte de ciers pour le reste de leur armement et Pioger est major ; on compte de plus
de leur équipement, et pour l'équipe- 5 capitaines et 5 capitaines-lieutenants.
ment de leurs domestiques, ils propor-
tionneront leur dépense à ce qu'il vou- Sous les ordres du lieutenant-colonel
dra bien leur accorder ». d’Ivory, les ingénieurs s’embarquent à
Falmouth le 15 décembre 1796 pour
rejoindre au Portugal l'armée auxiliaire
La brigade du Génie est embarquée
anglaise du général Charles Stuart. Dans
dans l'île de Wight le 12 juin 1795 à bord
un rapport, d'Ivory signale que, dès leur
du Middleton. Le 25, le convoi est en
arrivée, les officiers du Génie sont
baie de Quiberon et le débarquement
employés « à reconnaître le pays jus-
débute le 29. Le 30, le capitaine d'Ivory
qu'aux frontières d’Espagne, et à lever la
(1745-1821) dresse le plan de la pres-
carte des rives du Tage et des contrées
qu'île et du fort Penthièvre. Le fort est
adjacentes, à mettre les places les plus
pris le 3 juillet et le capitaine Testas de
exposées en état de défense. Le général
Folmont (1748-1795) en est nommé
Stewart (sic) forma un petit corps d'ar-
major. Le colonel de Moriencourt et les
mée pour une expédition sur l'île de
officiers, remettent le fort en état de
Minorque et attaquer Mahon et le fort
défense. Sur les indications du major du
Saint-Philippe ; un détachement du
Portal, l'enceinte palissadée est transfor-
corps fut employé à cette expédition qui
mée en redoute et, en avant, il fait établir
eut tout le succès désiré. Quelques
une demi-lune et deux redans. Toutefois,
temps après, un autre corps d'armée
Lenglé et du Portal n’ont pas mis la cita-
envoyé d'Angleterre, commandé par le
delle à l'abri d'une surprise en coupant
général Abercromby, se rassembla à
la falaise par un fossé.
Lisbonne pour une expédition en
Égypte ; nous fournîmes un détache-
Au combat des lignes de Sainte-Barbe2, ment du corps. A peine fut-il parti que le
le 8 juillet, le colonel de Moriencourt ministre de l'Ordonnance demanda des
sert comme volontaire à l'artillerie de officiers du corps pour envoyer à Saint-
Rotalier, ainsi que le lieutenant de Villazy Domingue, en me confiant que les offi-
Corps des pionniers français qui y est tué, et le capitaine-lieutenant de ciers que je désignerais seraient chargés
Pionnier - 1795 Missy qui est blessé. d'opérations importantes »

2) En face, dans le camp républicain, se trouve un officier du génie du nom de Rouget de Lisle qui, dans un mémoire laisse entendre qu’il a dirigé la construction de
redoutes pour empêcher les émigrés de s’avancer à l’intérieur des terres.
3) Mort au Cap de Bonne Espérance en 1795.
4) Mort aux Antilles en 1797.

- 98 -
SAPEUR

En effet plusieurs officiers sont envoyés


aux Antilles : le capitaine-lieutenant
comte de La Chaussée ; le lieutenant
chevalier de La Houssaye, passé en qua-
lité d’ingénieur dans « La Tour's Royal
Foreigners » ; le capitaine de Préval,
passé dans « Löwenstein » ; le capitaine
chevalier Augustin Marie du Fougeray3,
et le major Pioger de Saint-Perreux4.

M. d'Ivory dit qu'il lui fut demandé des


officiers de sa brigade pour l'Inde.

Lors de la paix générale (Traité d’Amiens,


1802), le Gouvernement portugais pro-
posa aux officiers du Génie français de
rester à son service, mais ils refusèrent
presque tous et, ramenés en Angleterre,
furent licenciés en juillet 1802.

LE CORPS DES PIONNIERS FRANÇAIS


Hors des ingénieurs du génie, on relève
l’existence d’une compagnie de sapeurs
à la solde anglaise, appelée « French
Corps of Pioneers ». Cette compagnie est
levée aux Pays-Bas en fin 1794 et atta-
chée à l’état-major du duc d’York. Elle est
commandée par le capitaine de Selliard.
MM. De Breuil et de Berny sont lieutenants
et l’abbé Humblet en est l’aumônier.

La compagnie sera licenciée le 16 janvier


1796.

L’ARMÉE DE CONDÉ.
Armée de Condé - Ingénieurs - 1794
La « division de Condé » (Worms,
novembre 1791) compte 7 officiers de mandant la place ; 2 autres officiers de Le 6 janvier 1793, les effectifs comptent
l'ancien corps royal du Génie (5 capi- l'arme, le capitaine de Bouligney (1749- 17 ingénieurs (dont 3 absents) ; un état
taines, 2 lieutenants) commandé par le 1846) et le lieutenant de Kayr de du 22 février, daté de Villingen, donne
capitaine Pecauld du Larderet (1747- Blumenstein (1759-1854), sont envoyés l'effectif suivant : lieutenant-colonel,
1808). En janvier et février 1792 ils ne près du prince de Hohenlohe-Kirchberg 7 capitaines, 4 lieutenants en premier,
sont plus que 4, pour remonter à 7 pour lui faire part des promesses de 6 lieutenants en second, un sous-lieute-
en avril. livrer la ville aux troupes émigrées. Par nant, mais, le 10 mars, l'effectif est
suite de l’inertie autrichienne, l’affaire tombé à 14.
En mars 1792, l’arrivée en émigration du échoue (5 août 1792).
lieutenant-colonel Bidet de Juzancourt En avril 1793, le corps de Condé reçoit
(1737-1814), sous-brigadier du Génie à Au 1er septembre, la brigade du corps une formation autrichienne : les officiers
Belle-Isle, puis à Brest, permet au prince royal du Génie comporte : lieutenant- du Génie sont alors placés sous les
de Condé d'organiser une brigade d'in- colonel commandant, 8 capitaines, ordres de M. de Manson, maréchal de
génieurs placée sous les ordres du colo- 4 lieutenants en 1er, 7 lieutenants en 2d, camp commandant l'artillerie, malgré
nel de Moriencourt (29 juin). un sous-lieutenant, un élève, soit 22 officiers. l'intervention du commissaire autrichien
Le 6 novembre, l'effectif est de 23 (un qui veut les répartir dans l'infanterie
Dès le mois d’août, une marche est déci- capitaine de plus). Les lieutenants de noble. L'Empereur admet 25 ingénieurs
dée sur Landau. Par l’entremise du lieu- Malbois (1761-1836) et du Boys (1763- à sa solde, sont payés comme les chas-
tenant du Génie Sarret de Grozon (1762- 1844), sont chargés de la reconnaissance seurs nobles et jouissant d'une ration
1842), Condé prend contact avec le des cantonnements de Villingen pour le d'officier monté. Pendant la campagne
maréchal de camp de Martignac, com- corps de Condé (décembre 1792). d'Alsace, ils sont utilisés auprès des

5) colonel, lieutenant-colonel, major, capitaine, 4 lieutenants.


6) Il refuse d’entrer au service de la Russie et profitera de l’amnistie de 1802 pour rentrer en France.

- 99 -
SAPEUR

Le 3 février 1796, un état des officiers du des jeunes gens, et leur procurer par la
Génie, « rattachés à l'état-major général suite l'avancement qui a lieu dans les
de l'armée », donne un effectif de 17 autres corps. Elle est la même que celle
(dont 2 absents) avec 14 chevaux ; le 28, fixée par les ordonnances du Roi, c'est
l'effectif est remonté à 25 officiers dont celle sous laquelle sont réunis leurs
2 détachés. Lors de la campagne, le camarades actuellement au service de
24 octobre, à Steinenstadt, le lieutenant l'Angleterre. Ils se flattent donc que Son
Dumoulin (né en 1770) a la tête fracassée Altesse Sérénissime voudra bien agréer
par un obus : sa cervelle rejaillit sur le et demander au chargé de pouvoirs de Sa
prince de Condé et sur les officiers qui Majesté britannique leur formation en
l’entourent. une brigade composée de 8 officiers5 et
du commandant en chef hors de ligne ».
Le 5 janvier 1797, le colonel de
Juzancourt est promu maréchal de camp Au licenciement du 1er mai 1801, l'effectif
avec rang du 10 août 1796. Au 5 mars, le des ingénieurs ne comprend plus que M.
corps compte 3 officiers supérieurs et de Juzancourt, général commandant, le
22 ingénieurs. En octobre, 11 d’entre eux vicomte de Sartiges, lieutenant-colonel,
partiront pour la Pologne. Le corps de François Anne Rapine de Saxy6, major,
Condé passe alors au service de la 3 capitaines et 4 lieutenants.
Russie. Les lieutenants Léry et de
Kerlero démissionnent le 29 janvier.
L’ARMÉE DES PRINCES
Le 7 octobre 1799, les ingénieurs partici-
pent à la défense de Constance, où se L’armée des Princes est plus connue
signale le lieutenant-colonel vicomte sous le nom d’armée de Coblence, lieu
François de Sartiges (1743-1819), en privilégié de résidence des émigrés de la
coupant le pont de Petersdorf. première heure.

Un rapport du général-major de Le 28 février 1792, une liste des officiers


Juzancourt, en date du 20 octobre 1800, du Génie du cantonnement de Coblence,
Armée de Condé
donne sur le corps les précisions fait état de : un capitaine en premier,
Ingénieur en capote - 1795
suivantes : « Les officiers du corps du 5 capitaines en second, 9 lieutenants en
Génie, depuis l'existence du corps de premier, 2 lieutenants en second. On y
troupes pour la mise en place des cam- compte en plus, le vicomte Benoît
S.A.S., n'y ont encore joui d'aucune for-
pements, l'élévation des redoutes et d’Argent de Deux-Fontaines (1741-1793),
mation qui, fixant leur nombre et celui
ouvrages de campagne, la confection officier retiré du Génie, lieutenant-colo-
des grades de chaque espèce, leur ait
d'abris, etc. Le lieutenant Masson de nel d'infanterie, « commandant provisoi-
donné la perspective d'un avancement
Fulaines (1760-après 1795) est détaché rement et uniquement par le choix de
quelconque, tel qu'il existe dans tous les
aux travaux de blocus de Landau. ses camarades » et Jean-Pierre de Fages
autres corps. L'espoir du rétablissement
D’autres inégnieurs participent au siège (1768-1827), lieutenant en premier, qui
prochain de la Monarchie, les motifs
du Fort-Louis, le 25 octobre. À Berstheim, est « agrégé, pour la campagne, à côté
d'honneur et de désintéressement qui
les officiers du Génie sont « à côté des de Monsieur son père, dans la compa-
les animent, leur ont fait supporter
artilleurs nobles, armés de fusils et pour- gnie écossaise des Gardes du corps du
patiemment jusqu'ici une exception
vus de pelles et de pioches, prêts à être, Roi, mais peut se rendre à son service,
aussi peu méritée. Mais, voyant les
selon le besoin, des combattants ou des
choses se prolonger, sans qu'il soit pos- s'il est nécessaire ».
terrassiers ».
sible de prévoir quelle en sera l'issue,
humiliés de voir leurs chefs et anciens Le 9 avril, le commandement des 4 brigades
Le 16 août 1794, M. de Juzancourt est
officiers, après 40 et même 50 ans de du corps est donné au comte Louis
nommé colonel : c'est un excellent offi-
service, à peine traités comme le Joseph de Robien (1734-1801), major du
cier, un bon ingénieur et il s'est distin-
moindre officier des états-majors géné- Génie, le lieutenant Colin de la Brunerie
gué pendant la guerre de Sept Ans, à
raux dont le service n'est ni plus actif, ni faisant fonctions d'aide-major. L’effectif
l'attaque de Dorsten sur la Lippe. Au
plus méritant que le leur, ils croient ne est d’un capitaine en premier, 5 capitaines
cours des campagnes suivantes, les offi-
devoir pas différer de solliciter la restitu- en second, 6 lieutenants en premier
ciers du Génie, qui restent toujours sen-
tion du droit dont ils avaient toujours (dont M. de Fages), 2 lieutenants en
siblement au même effectif (25, le
joui, d'exister à l'armée sous la forme de second, et M. de Deux-Fontaines, servant
24 décembre 1795 après une augmenta-
brigades. comme volontaire.
tion de 15 officiers accordée par le
ministère anglais), rendent les mêmes
Cette forme est la seule qui, les plaçant et En avril, le vicomte de Damoiseau, capi-
services aux troupes et font également
les faisant traiter suivant leurs grades et taine en second, et quelques autres ingé-
l'office d'aides de camp.
ancienneté, puisse exciter l'émulation nieurs (6 en tout) sont chargés de recon-

7) Paroisse de Jambes, faubourg de Namur.

- 100 -
SAPEUR

règlement de 1786 : chapeau de feutre


noir, gansé de noir, à cocarde blanche,
ganse et bouton dorés, plumet blanc ;
habit bleu de roi à longues basques ; col-
let, revers et parements de velours noir,
souvent passepoilés de rouge ; dou-
blure, veste et culotte rouge écarlate ;
boutons dorés à cuirasse et pot en tête ;
épaulettes et dragonne dorées du grade ;
épée à garde dorée, portée à un ceintu-
ron de cuir blanc à plaque de cuivre
dorée. Bottes à l'anglaise de cuir noir à
revers fauves. Redingote et manteau
bleu de Roi.

Corps des Pionniers Français

Chapeau en feutre noir retroussé sur le


côté gauche à cocarde, ganse et plumet
blanc, avec une tresse cramoisi et blanc
autour de la coiffe. Habit de coupe autri-
chienne écarlate, collet droit échancré,
parements ronds, retroussis, pattes
d’épaules et culotte bleu outremer ; pas-
sepoils, boutonnières du collet (laissant
Armée des Princes - Ingénieur - 1794 apparaître au centre le fond bleu),
piques de la culotte et galons latéraux de
naissances militaires sur la frontière. En culotte blancs. Les boutons sont en
L’ARMÉE DE BOURBON.
mai, il y a 38 officiers du Génie émigrés métal blanc. Cravate noire liserée de
et, le 29 juin, 46. Le commandement À la date du 10 septembre 1792, au camp blanc. Guêtres noires. Équipement de
général est passé au colonel Lenglé de d'Huy, 14 officiers du corps royal du cuir blanc. Giberne noire. Sabre-briquet
Moriencourt, ancien sous-brigadier à Génie (4 capitaines, 4 lieutenants en pre- à garde de cuivre, fourreau de cuir noir
Bergues, qui a sous ses ordres le lieute- mier, 2 lieutenants en second, un élève garni de cuivre. Fusil garni de cuivre, à
nant-colonel de Juzancourt, le major de sous-lieutenant, un officier à la suite et
bretelle de cuir fauve.
Robien, 15 capitaines et 30 lieutenants. un volontaire), choisis parmi les anciens
officiers des places de la frontière du
Les officiers ont le même uniforme mais
L'ordre de bataille du 30 juin 1792 fait Nord, sont affectés au camp d’Huy et
les passepoils, boutons et insignes de
apparaître que les ingénieurs, placés sous logés au faubourg de Slate. Ils sont com-
mandés par le comte de Robien, ancien grade sont en argent. Ils ont également
le commandement du colonel Lenglé de
Moriencourt, sont rattachés à l'artillerie. Le major de l'arme. Ils sont arrivés courant une écharpe cramoisi passée sur l’habit.
corps passe la revue du Roi de Prusse à août à la division de Bourbon. Ils portent le tricorne à cocarde noire,
Trêves le 11 août. Le 24 août, il compte 26 ganse et bouton argent et plumet blanc.
officiers répartis en 2 brigades, servant Ce détachement se trouve ensuite à
dans l'armée du Centre, les autres ayant Marche-en-Famenne, puis à Geronsart.
Le 1 e r octobre, il est à Velaine 7 . Le Armée de Condé. Armée des Princes.
été répartis entre les armées de Condé et
de Bourbon. Lors du siège de Thionville, ils 6 novembre, on le trouve à Fleurus puis Armée de Bourbon.
sont présents au quartier général des on perd sa trace.
Princes, mais on ignore tout de leur rôle De 1791 à 1794, les officiers du Génie
dans l'attaque de la place. portent l'uniforme affecté à leur corps en
UNIFORMES
1786 : chapeau de feutre noir gansé de
Le capitaine d'infanterie de Valdonne même, à cocarde blanche, ganse dorée,
aurait été « attaché à la brigade des offi- Service de la Grande-Bretagne et
bouton de même avec corset d'armes et
ciers du Génie français émigrés, par des Pays-Bas.
pot-en-tête, houppe rouge à centre noir.
ordre du roi de Prusse du 18 août », et
On ne possède aucun renseignement Cravate blanche. Habit bleu de roi dou-
aurait coopéré aux prises de Longwy et
sur l'uniforme porté par les officiers du blé de rouge, les retroussis ornés de
de Verdun.
Génie au service de l'Angleterre. fleurs de lys d'or, les poches en travers
Tous les officiers du Génie sont réunis à liserées de rouge avec 3 boutons. Collet
Saint-Séverin près de Liège et licenciés Comme au corps de Condé, ils conservè- droit, parements en botte à 3 boutons et
le 24 novembre 1792. rent très probablement l’uniforme du revers tout de velours noir passepoilé

- 101 -
SAPEUR

d'écarlate. Épaulettes et attentes dorées et bouton doré, plumet blanc. Habit gris BIBLIOGRAPHIE
sur fond rouge ; en service, hausse-col de fer, collet de velours noir avec fleurs
de lys et broderie dorées ; parements de Service historique de la défense : Xe 102.
de cuivre doré avec corset d'armes et
pot-en-tête de même métal. Veste et velours noir, boutonnières de modèle
BITTARD DES PORTES (René), Histoire
culotte rouge écarlate, boutons dorés à spécial sur l'habit ; cuirasses brodées en de l'armée de Condé pendant la
la veste. Bottes noires à revers fauve ou or (sans doute aux retroussis de l'habit) ; Révolution française (1791-1801),
bas blancs avec souliers à boucles de veste rouge, culotte de peau jaune ; pan- d'après les archives de l'État, les
cuivre doré. Ceinturon de cuir blanc à talon et bottes. Ceinturon de cuir noir, mémoires d'émigration et des docu-
plaque de cuivre doré avec corset épée à garde et dragonne dorée. ments inédits. Paris, E. Dentu, 1896, in-
8°, VII-397 p.
d'armes et pot-en-tête ; épée à garde
Lors du passage au service de la Russie,
dorée, dragonne dorée suivant le grade. BITTARD DES PORTES (René), Les émi-
les officiers du Génie prennent l’uni-
Brassard blanc liseré de noir à 3 fleurs grés à cocarde noire. Paris, Emile-Paul,
forme du Génie russe, c'est-à-dire celui
de lys noires. Manteau de drap bleu de 1908, VI-637 p.
de l'artillerie (règlement du 24 décembre
roi avec rotonde bordée de galon d'or.
1798).
BLANCHARD (Anne), Dictionnaire des
Équipage de cheval en drap bleu de roi ingénieurs militaires, 1691-1791.
bordé d'or. En 1800, lors de l'adoption du nouvel
Montpellier, 1981.
uniforme, les officiers du Génie auraient
En 1794, les officiers du Génie semblent « repris le frac bleu avec les distinctions GROUVEL (vicomte Robert), Les Corps
avoir pris l'uniforme suivant : chapeau de velours noir, le chapeau et la cocarde de Troupes de l’émigration. Paris, La
de feutre noir à cocarde blanche, ganse blanche ». Sabretache, 3 volumes.

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