Fiche : André FONTAINE, Histoire de la guerre froide, Points Histoire

I/ L'éveil des géants

La rivalité américano-soviétique n'éclate qu'au lendemain de la seconde Guerre mondiale,
mais elle prend racine dès 1917, tournant de la guerre précédente, avec l'entrée en guerre des Etats-
Unis et la révolution russe. Jusqu'alors, l'Europe en pleine expansion coloniale et industrielle, est
le centre du monde. Pendant ce temps, la Russie et les Etats-Unis achèvent la constitution de leurs
empires continentaux, le tsar cédant sans inquiétude l'Alaska à ces derniers. Le premier rival russe
est le Royaume-Uni, considéré par les bolcheviques comme la nation la plus capitaliste et
impérialiste, qui a de plus quadruplé la superficie de ses territoires entre 1860 et 1900. La Grande-
Bretagne institue très tôt une règle qui se démentit qu'une seule fois, en 1956 lors de la crise de
Suez: les dirigeants britanniques de font « rien qui pût froisser les Etats-Unis », quand bien même
ils cherchent à s'étendre eux aussi, et annexent les Philippines, le président McKinley déclarant
vouloir aller plus loin, vers la Chine, projet nécessairement à l'encontre des volontés de la Russie
pour qui la Mandchoudrie et la Corée sont des protectorats depuis 1898. Celle-ci promet de s'en
aller devant le mécontentement japonais, mais pose de telles conditions que de vives tensions
s'ensuivent, puis une guerre perdue par la Russie en 1904 qui aggrave un climat politique et social
déjà lourd à l'origine de la révolution de 1905, prélude de celle de 1917.
La déclaration de guerre de Nicolas II aux Empires centraux n'est pas tant pour assurer la
victoire du Droit et de la Liberté, mais pour assurer ses avantages territoriaux sur la mer
Méditerranée, avantages que tous les gouvernants de Russie cherchent à obtenir ou à conserver. La
Russie commence à affirmer hégémonie et messianisme, qui serviront de tremplin au marxisme.
En 1905 éclate une révolution bourgeoise, mais le tsar se maintient et punit les sociaux-démocrate.
L'agitation sociale est grandissante, les Bolcheviques enregistrent une série de succès et
s'organisent. Un bureau russe dirigé par Staline, est chargé de centraliser l'action révolutionnaire,
un journal sans cesse censuré diffuse leurs idées, et six députés bolcheviques sont élus à la Douma.
Le congrès de l'Internationale déclare vouloir éradiquer le tsarisme pour le bien de l'Europe, puis
lutte contre la guerre, même si l'union sacrée réunit les partisans de tous les camps. Lénine s'exile,
failli abandonner la politique mais le développement d'une agitation contre la guerre le rassure. La
chute du tsarisme en 1917 le prend de court, mais il explique rapidement pourquoi elle était
scientifiquement inévitable, et inviter le prolétariat à passer à la prochaine étape qu'est la
révolution. Il rentre en Russie avec la bénédiction des autorités allemandes. En Russie coexistent
alors deux pouvoirs: le gouvernement provisoire dominé par les éléments bourgeois, et celui des
Soviets. Lénine discrédite le premier, favorable à la guerre, et fait campagne pour attribuer tout le
pouvoir aux Soviets. L'insurrection armée est reconnue comme inévitable par le comité central du
POSDR, en octobre 1917.

II/ De la guerre impérialiste à la guerre civile

Lénine croit que la révolution dans laquelle il s'engage va se répandre en Europe
notamment en Allemagne, et c'est pour cela qu'une fois au pouvoir l'une des premières résolutions
est de publier un décret pour la paix. Les nations européennes peinent à croire au succès durable
d'homme qui refusaient les piliers traditionnels de la société: morale, religion et propriété. Lénine
propose la paix à l'Allemagne, qui se réjouit de ne plus avoir de front à l'Est: c'est la paix de Brest-
Litovsk, très favorable aux Allemands, l'armée russe étant réduite à une peau de chagrin, privée de
chefs et désertée. Les pays sous le joug russe réclament leur indépendance, comme la Finlande qui
l'obtint après un conflit sanglant. La Russie refuse de perdre la riche Ukraine, indispensable pour
l'agriculture, pourtant autodéclarée et reconnue par les autres nations autonome après la chute du
tsar. Les Soviets s'y développent, et la Russie impose à l'Ukraine le passage de ses troupes qui
donnent le pouvoir aux Soviets, Staline invitant à réviser le principe d'autodétermination des
peuples lors du Congrès suivant.
Berlin demande à la Russie des concessions territoriales parmi lesquelles l'évacuation de
l'Ukraine, quand les bolcheviques prônent une paix sans annexion ni indemnité, et même
réclament le recul de l'armée allemande. Confiant en une révolution européenne, Lénine presse
Trosky, commissaire du peuple aux Affaires étrangères, d'accepter les conditions allemandes. Les
Soviets decident de soutenir financièrement les mouvements révolutionnaire dans les autres pays.
Dans le même temps, la Russie est attaquée par l'Autriche et la Turquie, donc se voit obligée de
signer la paix avec l'Allemagne, non sans difficultés: les nouvelles conditions étaient plus dures,
avec la cession de terres aux Turques et une énorme indemnité aux empires centraux. Le traité de