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AUTOUR DU LANGAGE SPÉCIALISÉ EN LANGUE ÉTRANGÈRE

" Converser avec autrui, par l'intermédiaire de mots, de regards, ou d'autres symboles, signifie avoir plus ou
moins de compréhension ou de communion avec lui, avoir des références communes et partager ses idées et
sentiments. Si on utilise le terme sympathie dans cette acception (…) on doit garder à l'esprit qu'il dénote le
partage de tout état mental qui peut être communiqué, et n'a pas la connotation spécifique de pitié ou autre
« émotion sensible » qu'il traduit de façon commune dans le langage courant. "
(C.H. Cooley, 1922 : p.136).

Sorina ȘERBĂNESCU
Docteur ès lettres, chargée de cours
Faculté d’Economie et de gestion des Affaires
Université de l’Ouest de Timișoara
in From Management Culture to Cultural Management,
Conference Proceedings (Selected Papers),
Șerbănescu Sorina, Chirimbu Sebastian (eds.),
Josh Jones Publisher EPub Bud, Santa Monica (USA), 2013,
ISBN 978-1-63041-3668, pp.323 – 341.

Abstract
Humanity travels to the infinite path of its evolution through its major qualities, the reflection
(in Pascal's sense) – from which the creation is originated - and the communication, an
interaction and exchange among its members.

Indeed, the human mind knows the universe and comprises, at the same time, itself by
appropriating the names of surrounding things, the connections between the name and the
defined thing, interactions between names and their intimacy with the things that are called
by words.

Language theory (as an instrument of communication) is based, like that of knowledge (an
operating instrument led by reflection), on three areas: conceptual, formal and social
imagination and all the phenomena of language are constituted in a structure of volumes,
which is infinite and simultaneously on all three coordinates. It is only the position, the view
of the analyst, which can highlight, preferably, one or other of these plans or one or other of
the interfered plans systems.

In his capacity as depositary and as transmitter of experience and knowledge, natural


language is constituted in a codified system of elements containing common structures to all
languages which allow the translation and communication between individuals who have
been trained in natural and specific socio-cultural environments.

Although the specialized language uses natural language, it is not enough for a common user
of natural language, unskilled, to decode the specialized language. Specialized languages are
semi-autonomous semiotic systems which are used in order to communicate in specialized
contexts.

The difficulty of speaking in a foreign specialized language and of translating specialized


texts from one language to another is even greater when the target language has drawn
words in the source language by repeating them as they were in their original language and
then adapting them phonetically, according to its own specificity.
Key words: specialized foreign language, communication, natural language,
interdisciplinarity, linguistic and communicative competence
L’humanité parcourt à l’infini chemin de son évolution grâce à ses qualités majeures, la
réflexion (dans le sens pascalien) - d’où découle la création -, et la communication,
l’interaction et les échanges entre ses membres. En effet, l´esprit humain connaît l´univers et
s´auto comprend en même temps, en s´appropriant les noms des choses environnantes, les
liaisons entre le nom et la chose définie, les interactions entre les noms, et leurs rapports
intimes avec les choses dénommées: “«Intelligere», «Inlire», «Lire» / .../ «Comprendre»,
saisir en même temps, réunir par la prise. Comme on dit que le feu prend, ou que le ciment
prend, ou qu´un lac se prend en hiver, ou qu´une idée prend dans le public, c´est ainsi que les
choses se comprennent et que nous les comprenons“. (CLAUDEL 1915: p. 133).

La théorie du langage (instrument de la communication) est basée, tout comme celle de la


connaissance (instrument opératoire dirigé par la réflexion), sur les trois axes: conceptuel -
formel, imaginaire et social, et tous les phénomènes de langage se constituent dans une
structure de volume, infinie et simultanée sur toutes les trois cordonnées. C'est seulement la
position, le point de vue de l'analyste, qui met en évidence, de préférence, l'un ou l'autre des
plans ou l'un ou l'autre des systèmes d'interférence de ces plans.

Les langages spécialisés en langue étrangère doivent, d’un côté, leur "simplicité" aux
langages scientifiques, ce qui permet la facilité de compréhension - si l’on en détient la clé du
code (maîtrise connotative du domaine scientifique respectif) -, d’autre côté, leur
"complexité" due à l’acquisition et à l’exercice de la langue étrangère en question, aussi bien
qu’au progrès scientifique des domaines concernés.

Pour une meilleure illustration du phénomène communicationnel en langue étrangère


spécialisée, nous allons passer brièvement en revue quelques repères de la théorie du langage,
avec insistance sur sa fonction dénominative, de codification et de communication.

Les modèles généraux constituent l’héritage intellectuel et psychique de l’humanité et ils


organisent et gèrent tous les domaines de la connaissance. Si la faculté de parler n’est pas
innée pour chaque individu (il y a aussi des personnes qui naissent avec des carences ou des
déficiences du parler), la capacité d’apprendre le langage est commune à tous les êtres
humains.
L´idée d´un langage commun à l´humanité entière était déjà présente dans l´Ancien
Testament. L´exemple classique est celui de la Tour de Babel où “tout le monde se servait
d´une même langue et des mêmes mots” (Genèse, XI, 1). Les hommes avaient péché par
arrogance, ils avaient jeté un défi à la divinité par leur tour trop haute, ils en ont été punis et
leur langage a été éclaté, devenant ainsi une source d´incompréhension, voire une absence de
communication.

Dans sa qualité de dépositaire et de transmetteur d’expérience et de connaissance, le langage


naturel se constitue dans un système codifié d’éléments, contenant notamment des structures
communes à toutes les langues, ce qui permet la traduction et la communication entre les
individus qui ont été formés dans des milieux naturels et socio-culturels spécifiques.

Adam Schaff analyse le langage comme instrument communicationnel et conclut qu'une


pensée conceptuelle ne serait pas possible sans un système défini de signes et sans un corpus
de règles sémantiques et syntaxiques. Pourtant, la faculté de parler n'est pas innée à un
individu, comme c’est le cas de la faculté d'apprendre à parler. En tant que dépositaire et
transmetteur d'expérience, le langage se constitue dans une sorte de “pratique condensée qui
pénètre dans notre connaissance”. (SCHAFF 1974 : 230). Le langage possède, donc, des
éléments communs à toutes les langues, ce qui permet la traduction et la communication entre
des individus qui ont été formés dans des environnements naturels et sociaux spécifiques.
Schaff appelle ces éléments “des universelles linguistiques”. (SCHAFF 1974 : 231).
Cependant, les langues n'ont pas un caractère immuable, elles sont, au contraire, dynamiques.

Cette idée, celle de l’existence de certaines structures sémantiques "constantes" - Greimas les
appellent même des "constantes de sens" - est aussi soutenue par Patrick Charaudeau qui
insiste, pourtant, sur le fait que le signe linguistique n’existe que dans le cadre du discours,
ayant une qualité référentielle double: la capacité de désigner, celle grâce à laquelle le signe
exprime "/…/ une certaine portion du monde physique, y inclut celle qui s’appelle, d’une
manière conventionnelle, mot abstrait", et la fonctionnalité qui est "la valeur d’utilisation du
signe". On aboutit ainsi à une connaissance “méta culturelle des signes” liée à la pratique
sociale. (CHARAUDEAU 1994 : 26).

Le mot est comparé par Ferdinand de Saussure à "une sphère de Magdeburg". Il est formé de
signifiants (forme) et de signifiés (contenu) entre lesquels il y a un rapport de motivation: la
quantité, l´ordre dans une succession, etc. Pierce, affirme, au contraire, qu’entre ces deux
structures il n’y a pas de relation motivationnelle, notamment dans le cas des symboles
mathématiques, chimiques... . Mais la motivation peut apparaître dans le cas du processus de
symbolisation, c’est-à-dire alors que sa signification habituelle est redoublée d’une
information d’un autre type que celle purement référentielle, dénotative.

Octave Mannoni insiste sur l’autocréation du langage pendant l’acte communicationnel. Il


enlève la barrière nette instaurée par Ferdinand de Saussure entre le signifié et le signifiant et
affirme que le langage naturel s’articule pendant les "conversations usuelles de la vie".
Mannoni observe qu’en dépit de la "polysémie universelle" et de l’échange permanent entre
les signifies et les signifiants, les interlocuteurs réussissent pendant l’acte communicationnel à
éviter, pourtant, l’équivoque au niveau des signifiés. Le linguiste français accorde, pourtant,
trop d’autonomie aux phénomènes langagiers, idée continuée par Tzvetan Todorov qui
affirme, lui aussi, l’importance d’une constante référentielle située au niveau du langage
naturel et laquelle se manifeste pendant l’acte communicationnel.

Les sémanticiens et les théoriciens de la communication arrivent ainsi, chacun par des voies
spécifiques à son domaine de recherche, à la conclusion que le développement des langages
naturels dépend d’une constante, "la communicabilité" qui naît pendant les échanges sociaux,
mais aussi de certains sens codifiés qui se produisent pendant l’utilisation dans le cadre d’un
groupe plus restreint (peuple, groupe ethnique, communauté scientifique, artistique…).

Le philosophe Merleau-Ponty observe que les mots qui forment les langage naturel ont un
attribut "coextensif" et lance l’idée, reprise ensuite par d’autres théoriciens de la
communication, celle du développement du langage naturel par l’apport de chaque être
pensant qui est re-créateur de sens, ce qui mène à la conclusion que le langage dépend d'une
constante, la communicabilité, qui se développe pendant les échanges sociaux.

Quant au langage écrit, celui-ci rajoute le signe iconique, la lettre, à la "constante de


sens/l’universelle linguistique" et à l’interaction signifiant-signifié. Le critique littéraire
roumain Crişu Dascălu observe un comportement cohérent du texte (langage naturel exprimé
par écrit) qui est déterminé par certains facteurs de natures différentes. Il s’agit de certaines
"causes" situées au-delà des circonstances concrètes dans lesquelles se produit la
communication textuelle, indifféremment du texte; autrement dit nous avons affaire à
"l’altérite du texte", à des sens nouveaux que le texte auto-engendre au cours de la lecture.
Les langages naturels n’ont pas de caractère immuable, qu’ils sont, au contraire, vifs et
dynamiques mais ils naissent, se développent, évoluent ou meurent, et ils présentent un niveau
dénotatif (les références et leurs significations usuelles) et un niveau connotatif (les
significations métaphoriques et symboliques, aussi bien que les "présuppositions" et/ou
"implicatures non conversationnelles" - décelées et analysées par les sémioticiens et les
théoriciens de la pragmatique -, et/ou ou "l’altérité du texte" reconnue par les théoriciens
littéraires). En effet, on dit, en général, que les aspects nonvériconditionnels du sens ne
tiennent pas du domaine de la sémantique mais de la pragmatique. La frontière entre les deux
disciplines reste, néanmoins, très sensible et difficile à établir. On peut ainsi identifier, à côté
du sens vériconditionnel d’une phrase, un sens implicite, avec tous ses sous-entendus aussi
bien qu’avec toutes les présuppositions (que Ducrot appelle "l’implicite du sens littéral"),
comte tenu du fait que les présuppositions sont déclenchées par l’interaction des structures
linguistiques et non pas par l’utilisation dans les contextes, alors que les implicatures sont
liées aux règles qui gèrent les communications (conversationnelles) ("les maximes
conversationnelles" selon Grice).

En conclusion, pour qu’un discours soit compris par le destinataire il faut que celui-ci
connaisse les codes explicites aussi bien qu’implicites utilisés par l’émetteur dans son
message.
"Une langue donnée est donc constituée par un ensemble diversifié de sous-codes que le
locuteur emploie en fonction de ses modalités dialectales et qu'il sélectionne en fonction
de ses besoins d'expression et selon les caractéristiques de chaque situation de
communication. Cependant, au-delà de cette diversité foisonnante, toute langue possède
un ensemble d'unités et de règles que tous ses locuteurs connaissent. Cet ensemble de
règles, d'unités et de restrictions qui font partie des connaissances de la majorité des
locuteurs d'une langue constitue ce qu'on appelle la langue commune ou générale
"(CABRÉ 1998 : 115 in CALBERG-CHALLOT, M. 2007 -2008, p.74 ).

En ce qui concerne les langages de spécialité, son appellation-même suscite des


interprétations différentes: langue spécialisée, langue de spécialité, langage scientifique,
langage technique, vocabulaire spécialisé, vocabulaire scientifique et technique, jargon des
métiers etc. Cette variété de dénominations s’explique par la complexité du phénomène. Nous
constatons pourtant, que la tendance d’appauvrir le sens du terme est due à l’ignorance de
cette composante essentielle qu’est la communication.
Certains théoriciens et linguistes considèrent qu’on ne peut pas parler d’une "langue de
spécialité" en soi car il s’agit, en fait, seulement de l’usage "d’une terminologie, d’une
syntaxe et d’une organisation discursive", censées rendre la communication, dans notre cas
dans le domaine des affaires, claire et précise, dépourvue de toute possibilité d’ambigüité.1

C’est que, dans les langages scientifiques, les mots et les expressions, voire "les termes
scientifiques", sont créés arbitrairement, souvent à force d’analogies dues à l’imagination de
leurs inventeurs), à partir des mots pris dans le langage courant des langues naturelles (par
exemple le mot "mouse" en anglais, devenu "souris" en français ; autre exemple: "assiette de
l'impôt" qui correspond à "tax base" en anglais).

Les termes de spécialités sont, une fois créés et diffusés, monosémiques et, par conséquent,
ils sont compréhensibles, d’habitude, pour les personnes spécialisées dans le domaine
scientifique respectif. Par exemple, seul un spécialiste dans le droit du commerce et des
assurances saura ce que c’est qu’un "avenant" = "terme utilisé particulièrement dans le
langage du droit des assurances pour désigner une convention écrite qui est l'accessoire du
contrat principal dont l'effet est de modifier les conditions ou les modalités des engagements
qui figurent sur la convention initiale. On peut trouver l'usage de ce mot dans d'autres
contrats. Ainsi la convention annexe dans laquelle les parties modifient le prix initial, la
durée ou l'objet de la location peut- être dénommée «avenant au bail»". (http://www.dictionnaire-
juridique.com/definition/avenant.php; consulté le 19.09.2013.)

Nous avons retenu l’appellation de " langage spécialisé" (ou "langage de spécialité") en lui
préférant ceux de "langue de spécialité" ou "langue spécialisée" pour éviter toute séparation
entre la "langue commune", voire langue standard (ou langue naturelle) et le langage
appartenant à un certain domaine scientifique, artistique, etc.

Il faut, également, tenir compte de l’évolution scientifique et technologique dans les domaines
concernés, ce qui oblige les locuteurs des langages spécialisées à une permanente mise à jour
de leurs connaissances dans le domaine respectif. Seule cette réactualisation leur permet de
pouvoir maîtriser le code linguistique et réaliser, selon les circonstances, le codage ou
décodage d’un discours (parlé ou écrit) en langage spécialisé.

1
http://www.initerm.net/post/2007/10/24/Un-point-de-vue-sur-les-langues-de-specialite; consulté le 20.09.2013.
Nous allons citer quelques définitions formulées par certains théoriciens pour le "langage
spécialisé" (notre appellation):

"Expression générique pour designer les langues utilisées dans des situations de
communication (orales ou écrites) qui impliquent la transmission d’une information
relevant d’un champ d’expérience particulier." (GALISSON et COSTE 1976 : 511).

"La notion de langue spécialisée est [plus] pragmatique : c’est une langue naturelle
considérée en tant que vecteur de connaissances spécialisées." (LERAT 1995 : 20).
/…/ "Une langue spécialisée ne se réduit pas à une terminologie : elle utilise des
dénominations spécialisées (les termes), y compris des symboles non linguistiques,
dans des énoncés mobilisant les ressources ordinaires d'une langue donnée. On peut
donc la définir comme l'usage d'une langue naturelle pour rendre compte
techniquement de connaissances spécialisées." (LERAT 1995 : 21).

"On appelle langue de spécialité un sous-système linguistique tel qu’il rassemble les
spécificités linguistiques d’un domaine particulier. En fait, la terminologie, à l'origine
de ce concept, se satisfait très généralement de relever les notions et les termes
considérés comme propres à ce domaine. Sous cet angle, il y a donc abus à parler de
langue de spécialité, et vocabulaire spécialisé convient mieux." (DUBOIS et al. 2001 :
40).

"La linguistique descriptive […] condamne les désignations de «langue» technique et


scientifique qui sont également impropres. Il convient plutôt de parler de
«vocabulaires», s'agissant d'emplois particuliers du français et de ses variétés qui font
appel, pour la prononciation, la morphologie et la syntaxe, au fonds de la langue
commune, caractère à partir duquel notre analyse établit des rapports fonctionnels
mais non hiérarchisés." (QUEMADA 1978 : 1153 in CALBERG-CHALLOT, M.
2007 -2008 : 85).

"Au sens propre il n'existe pas de langue du droit en soi mais seulement, à l'intérieur
de la langue française, un vocabulaire du droit, et sans doute quelques tours
syntaxiques spécifiques". (MOUNIN 1979 : 13 in CALBERG-CHALLOT, M. 2007 -
2008 : 75).
Un langage spécialisé se définit, donc, par rapport à la langue commune, naturelle, avec
laquelle il est dans une relation indissoluble, car le premier découle de la deuxième ("toute
langue de spécialité est une simple variante de la langue générale.") (CABRÉ 1998 : 119).

C’est que le langage de spécialité est moins général et, donc, spécifique à une communauté
plus restreinte, formée de personnes qui ont des connaissances spécialisées dans des domaines
précis. La différence entre la langue commune et le langage de spécialité est due plutôt au
niveau et la fréquence de l’usage, au rapport – en général immotivé – entre le signifiant et le
signifié, et l’absence de symbolisation : “ /…/ les langues de spécialité sont des codes de type
linguistique, différenciés de la langue commune, constitués de règles et d’unités spécifiques".
(CABRÉ 1998 : 118-121).

Il faut également se méfier de l’appauvrissement du concept en considérant le langage de


spécialité comme un simple vocabulaire restreint, confiné à un seul domaine, en le
décontextualisant, en lui enlevant ses valences communicationnelles. Car un langage de
spécialité peut utiliser des moyens extra-linguistiques tels les images, les sons, les gestes et
même l’habillement (par exemple dans un contexte d’affaires), le parfum/l’arôme, etc.). Il
serait, donc, inapproprié de définir les langages de spécialité selon des critères uniquement
linguistiques, leur côté pragmatique étant fondamental. (CABRÉ 1998 : 119).

Pourtant, si le langage spécialisé utilise la langue naturelle, cela ne suffit pas pour qu’un
utilisateur commun de la langue naturelle, non spécialisée, puisse décoder le langage de
spécialité. Les langages de spécialité représentent des systèmes sémiotiques semi-autonomes,
utilisés pour communiquer dans des contextes spécialisés. (CABRÉ 1998 : 119).

En effet, le locuteur du langage spécialisé doit être familiarisé avec les codes spécifiques pour
le domaine d’activité dans le cadre duquel ou au sujet duquel il veut réaliser une information
ou, même plus, une communication, sinon la compréhension des langages spécialisés lui
restera inaccessible. De même, si un utilisateur peut aborder un certain langage spécialisé cela
ne lui assurera pas l’accès à tous les langages spécialisés dans une langue commune
(naturelle). Par exemple, un utilisateur du langage spécialisé de la chimie organique ne pourra
pas, implicitement, manier également le langage spécialisé en mathématiques ou en droit
commercial. Pourtant, tous les locuteurs d’un langage spécialisé s’expriment dans une même
langue, celle naturelle. C’est pourquoi ils pourront s’entendre tous dans le cadre d’une
conversation usuelle, et participer à des échanges quotidiens non spécialisés.
Mais les barrières entre les langages spécialisés commencent à s’effondre dans un rythme de
plus en plus alerte. A l’époque actuelle, grâce à l’explosion informationnelle et, par cela
même, à la vulgarisation (voire la large diffusion dans un langage moins spécialisé plus
explicatif et, donc, plus accessible à des publics non avertis), la compréhension des langages
spécialisés devient possible à un nombre croissant de locuteurs qui parlent une langue
commune.

Si l’on considère que la "langue générale" désigne la langue naturelle dans son intégralité,
comprenant la "langue commune" et les "langues de spécialité " (DUBOIS et al. 2001 :
440), les langages spécialisés seraient des "des sous-ensembles, fondamentalement
pragmatiques, de la langue dans son sens global." (CABRÉ 1998 : 119) et "/…/ sont en
relation d’inclusion par rapport à la langue générale et en relation d’intersection avec la
langue commune." (CABRÉ 1998 : 126). Dans ce cas, il faut mettre à jour une autre
caractéristique du langage spécialisé, qui tient de l’interdisciplinarité, du fait que certains
termes, appartenant initialement à un langage spécialisé, spécifique pour un domaine
scientifique, artistique, etc., peuvent être adoptés et utilisés dans d’autres domaines,
également spécialisés.

Par exemple, le mot "anamnèse" employé initialement dans le domaine médical qui est utilisé
également en psychologie, sociologie, etc. : "ensemble des renseignements fournis au médecin
par le malade ou par son entourage sur l'histoire d'une maladie ou les circonstances qui l'ont
précédée." (http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/anamn%C3%A8se/3248; consulté le 20.09.2103.)

Il faut également remarquer que tant la langue commune que les langages de spécialité se
caractérisent par une perméabilité et une mobilité qui permettent le transfert de termes entre
les différents domaines d’activité mais aussi entre ceux-ci et la langue commune. D’habitude,
les termes spécialisés subissent une modification de signification lorsqu’ils sont utilisés dans
la langue commune. L’on assiste, dans ce cas, à un "étirement de sens" (MEYER et
MACKINTISH 2000 : 199) suite auquel les termes deviennent plus généraux.

Par exemple le mot "conclusion" qui, en langué commune, standard, signifie le résumé, la
synthèse présentés à la fin d’un texte (parlé ou écrit), dans la correspondance d’affaires il
représente la synthèse du texte plus la formule de clôture de la lettre (par exemple : Dans
l’attente de votre décision, que nous espérons positive, nous vous prions d’agréer, Madame,
Monsieur, l’expression de notre respectueuse considération.)

Les choses se compliquent encore dans le cas des langages spécialisés en langue étrangère
où les locuteurs doivent avoir, par surcroît, des compétences linguistiques dans la langue
étrangère concernée, correspondant à un niveau situé entre A2+ ou B1 (selon le CECRL : le
Cadre européen commun de référence pour les langues) au minimum, pour pouvoir
communiquer dans un contexte professionnel.

A l’époque actuelle, le phénomène de globalisation influe sur la préservation de la "pureté"


des langues par les emprunts massifs de termes tels quels de l’anglais américain.

Par exemple, le terme "cloud computing" (lequel est généralement utilisé tel quel dans toutes
les langues), étant largement préféré aux termes autochtones, adaptés dans différentes langues
sur son modèle : "comunicare în cercuri" (en roumain) ou "infonuagique" (en français).

La difficulté de s’exprimer en langue étrangère spécialisée et de traduire des textes spécialisés


d’une langue en autre est encore plus grande, quand la langue cible a puisé des termes dans la
langue source en les reprenant tels qu’ils étaient dans leur langue d’origine mais en les
adaptant phonétiquement selon sa propre spécificité. C’est le cas de nombreux termes du
français spécialisé (par exemple, du français économique) qui ont été repris par le roumain
avec une sonorité et une graphie à la roumaine. Dans ce cas il y a une véritable difficulté dans
leur utilisation par des personnes qui ne connaissent pas leur sens scientifique, vu que le mot
n’existe pas dans la langue commune (le roumain).
Par exemple : "assiette d’impôt" (en français) = "asietă de impunere" (en roumain)
"somme forfaitaire"(en français) = "sumă forfetară"(en roumain)

CONCLUSION

Les emplois à observer pendant les transactions d’affaires, même s’ils semblent, parfois, avoir
une expression sophistiquée, doivent être accompagnés, en dehors de la connaissance du
langage spécialisé des affaires dans la langue de l’interlocuteur, de la fine psycho-sociologie
de l’interaction communicationnelle qui y joue un rôle essentiel. En effet, la "psychologie
négociationnelle" de Commons est orientée vers la compréhension des "processus mentaux"
qui conduisent à la formation d'anticipations, ce qui est relié au concept de "futurité"
("futurity") (BIDDLE 1990b : pp.3-4). Ce phénomène anticipatif, qui prend en compte le fait
que les transactions sont orientées vers le futur, a, en effet, un côté psychologique. Un aspect
de la "psychologie négociationnelle" traite, donc, des anticipations que forme l'individu à
propos du comportement des autres individus participant à la négociation. Il s'agit, en
particulier, d'identifier les "hypothèses habituelles" auxquelles répond l'action des individus et
des groupes. Dans le cadre des transactions, les individus se mettent à la place des autres, et il
s'agit, alors, de comprendre leurs "motivations", leurs "philosophies sociales" (COMMONS
1934 : p.683), pour trouver le mot juste et anticiper leurs attentes.

Mais Adam Smith avait bien compris qu’une impartialité parfaite pendant la communication,
ainsi que la transparence des arguments de la négociation, n’est qu’utopique (SMITH 1966 :
p.224). Il faut tenir compte du fait que les choses et les événements ont une signification
toujours dans le contexte d'une interaction (il n'existe pas de "monde pur" indépendant du
contexte), et que les significations changent constamment pendant les processus interprétatifs
qui sont permanents et toujours renouvelables.

Ceci dit, il convient d’avoir certaines directions à suivre pendant l’argumentation


négociatrice, tout en tenant compte des implicatures (présuppositions) inhérentes à la
communication.

Lors des négociations, pour obtenir un effet positif qui conduise à la conclusion d’une affaire
avantageuse, il faut respecter le principe des trois "Oui". Celui-ci qui exige qu’on obtienne
trois fois l’acquiescement de la part du partenaire pour être sûr d’une issue victorieuse de la
transaction et pour avoir une continuité dans les affaires avec un certain client. Dans ces
conditions il faut savoir, par exemple, comment gérer les propos de négation au cours de
l’argumentation, et faire de telle manière que chaque négation devienne une assertion, qu’elle
reçoive une tournure affirmative.

Les atouts majeurs dont dispose un locuteur du langage d’affaires en langue étrangère,
pendant un tête-à-tête avec son partenaire de négociation, ressortent avec plus de prégnance si
l’on compare, par exemple, une traduction faite par un être humain à une traduction
automatisée.

La traduction réalisée par une personne est fondée sur la compréhension des langages naturels
(le cas échéant le français) du langage spécialisé et des codes non-lexicaux utilisés pendant la
communication (gestes, mimique, vêtements, etc.), alors que la traduction automatisée est
basée sur la simple mémorisation de certaines structures basiques grammaticales et d’un
lexique exhaustif (standard aussi bien que spécialisé, par domaines tels l’économie, le droit,
etc.).
Exemples : texte en roumain :
"Locatorul prezintă și garantează, că, până la această dată, conținutul extrasului din
Registrul Fondului Funciar menționat mai sus, cu nr. [●], din [●] este adevărat și corect,
și că statutul legal al Proprietății nu s-a schimbat în niciun fel între data emiterii și data
semnării Acordului."
- Traduction humaine de la langue source - l’anglais - en français:
"Le Bailleur présente et se porte garant que le contenu de l’extrait du Registre Foncier
mentionné ci-dessus, no. [●], du [●] est, jusqu’à cette date, vrai et correct, et que le
statut légal de la Propriété n’a changé de quelle que sorte que ce fût entre la date de
l’émission et la date de la signature de l’Accord."
- Traduction de la langue source - l’anglais - en français, réalisée par le logiciel de traduction
automatisée de Google:
"Le bailleur représente et des garanties ces le contenu de l'extrait mentionné ci-dessus
du nr d'enregistrement de terre. [●] a daté [●] ont lieu, en date de cette date vraie et
corrigent, et cela le statut juridique de la propriété n'a pas changé quelqu'entre la date de
l'établissement et la date de la signature de l'accord."

Bibliographie

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Sitographie
http://www.initerm.net/post/2007/10/24/Un-point-de-vue-sur-les-langues-de-specialite; consulté le 20.09.2013.
http://www.trader-finance.fr/lexique-finance/definition-lettre-F/Fourchette-de-cotation.html; ; consulté le
20.09.2013.

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