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Journal d'agriculture traditionnelle

et de botanique appliquée

Influence des plantes adventices sur les plantes de culture :


quelques résultats
M. Mosango

Résumé
L'auteur tente de mettre en évidence certaines relations entre les mauvaises herbes et les plantes cultivées et la compétence
qui existe entre ces plantes pour l'absorption des matières nutritives.

Abstract
The author tries to bring to light the relationships between weeds and cultivated plants as well as the competition between them
in the absorption of food materials.

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Mosango M. Influence des plantes adventices sur les plantes de culture : quelques résultats. In: Journal d'agriculture
traditionnelle et de botanique appliquée, 30ᵉ année, bulletin n°1, Janvier-mars 1983. pp. 35-48;

doi : 10.3406/jatba.1983.3886

http://www.persee.fr/doc/jatba_0183-5173_1983_num_30_1_3886

Document généré le 30/03/2016


Joum. d'Agric. et de Bota. Appl. XXX, 1, 1983

INFLUENCES DES PLANTES


ADVENTICES SUR LES PLANTES DE CULTURE
QUELQUES RÉSULTATS

par M. MOSANGO (*)

Résumé. — L'auteur tente de mettre en évidence certaines relations entre les mauvaises herbes et
les plantes cultivées et la compétence qui existe entre ces plantes pour l'absorption des matières
nutritives.
Abstract. — The author tries to bring to light the relationships between weeds and cultivated plants
as well as the competition between them in the absorption of food materials.

INTRODUCTION

Les plantes adventices sont considérées comme des mauvaises herbes ou des
plantes nuisibles aux cultures car elles diminuent sensiblement le taux de rendement
agricole. Il s'agit des plantes annuelles ou vivaces qui poussent spontanément dans les
cultures et dont la multiplication est assurée par de nombreuses graines enfouies dans
le sol ou par des organes de rénovation souterrains (stolons, rhizomes...).
Le présent travail présente quelques résultats de notre étude sur les relations entre
les plantes adventices et les plantes cultivées. Les bisects dessinés à l'aide des tranchées
dans le sol, les mesures des phytomasses et des coefficients d'hydratation ont pu mettre
en évidence quelques influences de ces plantes sur les plantes cultivées.
Cette étude a eu lieu au cours des années 1978 et 1979.

1 . Territoire étudié

La Ville de Kisangani est située entièrement dans la zone bioclimatique de la forêt


dense ombrophile équatoriale. Les températures sont relativement élevées et constantes
(25° C en moyenne annuelle). Les précipitations sont généralement abondantes
(environ 1 800 mm en moyenne par an). L'humidité relative est aussi élevée et comprise entre
83% et 89%. Le sol est ferrallitique, formé d'argiles et de sables.

Faculté des Sciences, Université de Kisangani, B.P. 888, Kisangani, Zaire.


-36-

2. Matériel et méthodes

2.1. Bisects
L'établissement des bisects de différents biotopes se réalise en tenant compte à
la fois des parties aériennes et souterraines des plantes les plus caractéristiques. Pour
les parties aériennes, les éléments suivants ont été considérés : la hauteur, l'extension
latérale des plantes et leur interpénétration. Pour les parties souterraines, nous avons
considéré la profondeur et l'extension des parties souterraines obtenues à l'aide d'une
tranchée dans le sol. Ces différentes parties des espèces présentes sont mesurées à l'aide
d'un mètre ruban et rapportées sur un dessin fait à l'échelle.
Le bisect ainsi défini apporte certains renseignements sur les affinités ou les
incompatibilités entre les plantes.

2.2. Evaluation des phytomasses


Les expériences ont été faites dans quelques champs cultivés. La méthode utilisée
est fondée sur les principes suivants : détermination des dimensions du champ,
délimitation d'une partie aliquote, en l'occurence un carré de 1 m de côté, relevé de
toutes les espèces présentes, déracinement total de toutes les plantes, triage de
différentes espèces au laboratoire et établissement des biomasses de chacune d'elles, pesées
fraîches des parties aériennes et souterraines, séchage à l'étuve à 105 °C jusqu'à poids
constant et pesées à l'état sec. Les poids obtenus sont rapportés à l'unité de surface :
g/m2 et kg/ha.

2.3. Estimation du degré d'hydratation

Compte tenu du fait qu'il est très difficile de récupérer la totalité des parties
souterraines, il nous a semblé beaucoup plus intéressant de ne considérer que les
biomasses des parties aériennes pour le calcul des hydratations. La formule utilisée à
cet effet est la suivante :
,, , . Poids frais —— Poids sec
Hydratation = x 100.
Poids frais

3. Résultats et interprétation

Trois groupements végétaux ont été choisis pour l'exécution des bisects :
groupement à Bidens pilosa, groupement à Mariscus alternifolius et groupement à Imperata
cylindrica. Deux autres ont été choisis pour les mesures des phytomasses : le
groupement à Bidens pilosa et le groupement à Digitaria polybotrya.

3.1. Bisects

a) Groupement à Bidens pulosa (fig. 1 et annexe 1)


— Partie souterraine
La densité racinaire des plantes adventices est de loin supérieure à celle des
plantes cultivées. Elle est comprise entre les 20 premiers centimètres de profondeur. Le
37

Hiuttur

Groupement à Bidens pilosa


Relevé du 23-12-1978
Sous-région de Kisangani
Zone de la Makiso
Terrain situé sur le chemin
reliant Mangobo à l'hôpital général
Champ de manioc
Profonde

Echelle : 1/100 0 10 20 30

FlG.
-38-

chevelu radiculaire est très dense et constitué de nombreuses radicelles. Par conséquent,
la surface d'absorption des plantes adventices est très grande. Par contre, les parties
souterraines des plantes cultivées sont formées de racines non tubérisées et moins
ramifiées en radicelles.
Elles sont entièrement dominées par les racines des adventices. Leur surface
d'absorption est très petite.
— Parie aérienne
Les plantes adventices sont très abondantes et plurispécifiques. Elles dominent
également par leur hauteur dont le maximum est de 120 cm. Leur surface d'assimilation
chlorophyllienne est donc plus vaste que celle des plantes cultivées.

b) Groupement à Mariscus alternifolius (fig. 2 et annexe 1)


— Parties souterraines
La plus grande densité du chevelu radiculaire est localisée dans les 10 premiers
centimètres de profondeur. Les racines y sont plus ramifiées en radicelles. En
profondeur, elles sont peu nombreuses et éparses. L'absorption est plus active dans la zone la
plus superficielle renfermant beaucoup de radicelles. On y remarque aussi la présence
des organes vivaces ou rhizomes qui assurent la multiplication végétative de ces plantes.
Les racines des plantes cultivées (manioc) sont moins tubérisées et moins ramifiées.
Leur capacité d'absorption est très réduite.
— Parties aériennes
Les mauvaises herbes sont quantitativement plus nombreuses que les plantes
cultivées. Leur hauteur maximale atteint environ 135 cm. Elles sont réparties sur toute
la surface cultivée. Ainsi leur surface d'assimilation chlorophyllienne est plus grande
que celle des plantes de culture. En conséquence, les plantes cultivées manifestent un
développement très faible. Tel est le cas pour l'espèce cultivée Manihot esculenta.

c) Groupement à lmperata cylindrica (fig. 3 et annexe 1)


— Parties souterraines
Toutes les racines sont comprises dans les 30 premiers centimètres de profondeur.
Elles sont cependant moins ramifiées en radicelles. Les racines des plantes adventices
sont plus abondantes que celles des plantes cultivées. Le pouvoir d'absorption de ces
dernières est très réduit. C'est pourquoi il y a très peu de tubercules formés. On constate
en outre la présence des organes souterrains de rénovation (rhizomes) qui assurent la
multiplication végétative et la pérennité des espèces.
— Parties aériennes
Les adventices accusent une grande densité et une hauteur plus élevée (150 cm).
Elles sont réparties sur toute la surface cultivée. Leur croissance élevée défavorise celle
des plantes cultivées. Il en résulte un grand pouvoir d'assimilation chlorophyllienne de
la part des adventices qui profitent ainsi du maximum d'éclairement solaire.

3.2. Phytomasses
Les mesures ont été effectuées pour chaque espèce présente dans une surface de
1 m2. Les tableaux (1 et 2) en donnent les résultats. Chaque espèce est accompagnée de
-39-

Groupement à Mariscus altemifolius


Relevé du 11-1-1979
Kisangani pont de la Makiso
Champ de manioc
derrière l'aéroport militaire

FlG. 2.
-40-

Hauteur
cm
150.

140_

110.

80 .

60 _

Groupement à Imperata cvlindrica


30 _ Relevé du 9-2-1979
Kisangani (Zone de la Makiso)
40 _ localité Simisimi
Champ de manioc
cm Echelle : 1/100 ■■■EZZZIMH
Profondeur 0 10 20 30

Fie. 3.
-41 -

coefficients d'abondance-dominance et de sociabilité. Les plantes présentes ont été


réparties en espèces adventices, cultivées et diverses ou compagnes.
En vue d'estimer l'influence des mauvaises herbes sur les plantes cultivées, seules
les phvtomasses souterraines et aériennes des plantes adventices et cultivées ont été
prises en considération pour l'interprétation des résultats.

Tableau 1
Valeurs des phvtomasses. Groupement à Bidens pilosa.

Valeur au m2 (g) Valeur à l'ha (kg)


AD
ESPÈCES et BS BA BS BA
S
Pf Ps Pf Ps Pf Ps Pf Ps

Plantes adventices
Bidens pilosa L 3.3 45,3 19,0 269,6 71,1 453 190 2 696 711
Erigeron floribundus
(H.B. et K) Sch. Bip) 1.2 34,5 15,1 278,3 71,1 345 151 2 783 711
Paspalum orbiculare Forst 2.3 55,1 23,8 201,3 79,6 551 238 2013 796
Phvllcinthwi ni ru ri L + .1 0,2 0,1 0,2 0,1 2 1 2 1
Spermacoce lalifolia Aubl 1.2 2,8 1,3 124,5 6,2 28 13 1 245 62
Digitaria polvbotrva Srapf 2.3 4,3 3,2 94,4 51,0 43 32 944 510
Digitaria horizontalis Willd 1.2 1,6 1,0 16,1 8,4 16 10 161 84
Digitaria longifolia (Retz) Pers 2.3 18,9 13,5 98,6 51,4 189 135 986 514
Eragrostis ciliaris (L.) Link 1.3 1,1 0,7 7,0 3,7 11 7 70 37
Fimbristvlis hispidula (Vahl) Kurth + .1 1,6 1,0 3,2 1,8 16 10 32 18
Commelina diffusa Burm f + .1 3,1 0,6 22,0 3,2 31 6 220 32
Ipomoca involucrata P. Deauv + .1 0,3 0,1 1,7 0,8 3 1 17 8
Cvperus sphacelatus Rottb 1.2 47,9 22,8 17,9 8,1 479 228 179 81
Panicum brevifolium L + .1 0,2 0,1 0,2 0,1 2 1 2 1

Total 102,3 356,6 1 023 3 566


.
.

Plante cultivée
Manihot esculenta Grantz 27,4 12,7 294,4 91,6 274 127 2 944 916
Divers
Abrus canescensWe\w ex Back + .1 6,8 4,8 46,3 25,9 68 48 463 259
Mostuea angolana + .1 25,9 13,6 5.5 0,9 259 136 55

Total 100% 277,0 133,4 1 481,2 475,0 2 770 1 334 14812 4 750

Légende AD = Abondance-dominance. Pf = Poids frais.


:

S = Sociabilité.
BS = Biomasse souterraine. Ps = Poids sec.
BA = Biomasse aérienne.
-42-

a) Groupement végétal à Bidens piîosa (tableau 1)


— Phytomasses souterraines
La phytomasse souterraine totale des plantes adventices et cultivées est égale à
1 150 kg/ha en poids sec, dont 1 023 kg/ha pour les mauvaises herbes et 127 kg/ha pour
les plantes cultivées (Manihot esculenta Grantz). Ainsi, les mauvaises herbes accumulent
plus de matières de réserve nutritive que les plantes cultivées.
— Phytomasses aériennes
La phytomasse totale des parties aériennes est évaluée à 4 482 kg/ha en poids sec.
Les plantes adventices représentent 3 566 kg/ha de matière sèche et les plantes cultivées
916 kg/ha. On constate donc que les adventices accusent un développement plus grand
que celui des plantes de cultures.
— Rapports des biomasses
Le rapport des biomasses totales aériennes et souterraines des espèces adventices
et cultivées est de l'ordre de 3,9. Il est de 3,5 pour les mauvaises herbes et 7,2 pour les
plantes cultivées. Ce dernier rapport montre que les parties aériennes sont de loin plus
développées que les parties souterraines. Or en réalité, dans une situation normale, ce
n'est pas le cas. Il s'agit donc d'un développement anormal des plantes cultivées dû à
la présence des plantes adventices qui absorbent beaucoup plus de matières
fertilisantes.
— Hydratation aérienne
L'hydratation aérienne totale est égale à 67,9 %. Elle est de 68,5 % pour les plantes
adventices et de 68,9 % pour les plantes cultivées.

b) Groupement végétal à Digita polybotrya (tableau 2)


— Phytomasses souterraines
La phytomasse totale des appareils souterrains des espèces présentes, exprimée
en poids sec, s'élève à 775 kg/ha. Elle est ainsi répartie : 725 kg/ha pour les mauvaises
herbes et 50 kg/ha pour les plantes cultivées. Il apparaît donc que la phytomasse
souterraine des espèces adventices est plus élevée que celles des plantes cultivées. Cela
est dû à leur densité élevée.
— Phytomasses aériennes
La phytomasse totale des appareils aériens est évaluée à 3 568 kg/ha de la matière
sèche. Elle est de 3 433 kg/ha pour les plantes adventices et de 135 kg/ha pour les
espèces cultivées. Cette différence est due à l'abondance de mauvaises herbes sur le
terrain. Il en résulte un faible développement des plantes de culture.
— Rapport des phytomasses
Le rapport des biomasses totales aériennes souterraines est égal à 4,5. Le rapport
biomasse aérienne sur biomasse souterraine est de 4,7 pour les mauvaises herbes et de
2,7 pour les plantes cultivées (Zea mays). Ces dernières ont un rapport très faible (2,7).
Ceci traduit bien le développement anormal accusé par les plantes cultivées,
particulièrement celui des parties aériennes. En effet, le champ dont il est question ici était
complètement envahi par les mauvaises herbes à tel point que les cultures de maïs
étaient dans un état très précaire.
-43 -

Tableau 2
Valeurs des phytomasses. Groupement à Digitaria polybotrya Stapf.

Valeur au m2 (g) Valeur à I'ha (kg)


AD
ESPÈCES et BS BA BS BA
S
Pf Ps Pf Ps Pf Ps Pf Ps

Plantes adventices
Digitaria polxbotrxa Stap 4.5 61,4 39,2 628,8 194,8 614 392 6 288 1 948
Spermacoce latifolia Aubl 1.2 1,1 0,6 19,2 4,4 11 6 192 44
Mariscus altemifolius Vahl 1.2 2,3 1,4 11,1 4,3 23 14 111 43
Cvperus sphacelatus Rottb 1.2 0,5 0,3 3,9 1,7 5 3 39 17
Mariscus flabelliformis Kunth + .2 1,3 0,8 4,2 1,7 13 8 42 17
Paspalum orbiculare Forst 2.3 37,3 20,2 319,4 95,7 373 202 3 194 957
Phyllanthus niruri L + 1. 0,2 0,1 1,0 0,5 2 1 10 5
Cleome ciliata Schumach. et Thonn. + 1. 0,7 0,3 6,3 1,9 7 3 63 19
Eriosema laurentii De Wild + 1. 0,2 0,1 1,4 0,6 2 1 14 6
Commelina diffusa Burm f 1.2 6,6 2,1 33,9 5,9 66 21 339 59
Panicum maximum Jacq + .2 11,3 6,8 68,7 30,6 113 68 687 306
Vigna vexillata (L.) Benth + .1 0,6 0,3 0,7 0,3 6 3 7 3
Asrstadai gangetica (L.) T. Anders .. + 1. 0,6 0,3 4,4 0,9 6 3 44 9

Total 72,5 343,3 725 3 433

Plante cultivée
Zea mays L 10,2 5,0 46,5 13,5 102 50 465 135

Total 100% 134,3 77,5 1 149,5 356,8 1 343 775 11 495 3 568

Légende AD = Abondance-dominance. Pf = Poids frais.


:

S = Sociabilité.
BS = Biomasse souterraine. Ps = Poids sec.
BA = Biomasse aérienne.

— Hydratation aérienne
L'hydratation totale aérienne est équivalente à 68,9 %. Les coefficients
d'hydratation des plantes adventices et cultivées sont respectivement de 68,8 % et de 70,9 %. Cette
valeur est plus élevée pour les plantes cultivées. Toutefois, la différence n'est pas très
significative.
-44-

Discussion et conclusion

Les plantes adventices sont celles qui croissent accidentellement dans un milieu
sans y avoir été semées. Ce terme « adventice » s'applique donc aux plantes des milieux
rudéraux et cultivés. Dans les cultures sarclées elles sont dites ségétales, tandis que dans
les cultures non sarclées des moissons ou céréalières elles sont appelées messicoles.
Notre étude des bisects a porté essentiellement sur les adventices des cultures sarclées
notamment le manioc.
A Kisangani, le manioc est souvent cultivé en association avec d'autres plantes
vivrières comme le maïs, la patate douce, la tomate, etc. Ce sont des cultures
temporaires effectuées sur des terrains brûlés après défrichement. La culture se fait par
bouturage. La récolte du manioc s'effectue en dernier lieu avant la mise en jachère du
terrain. Le champ est souvent entretenu par sarclage chaque fois qu'il y a des plantes
adventices considérées comme des mauvaises herbes.
La mise en culture d'un terrain entraîne toujours l'apparition d'une nouvelle
végétation dite culturelle. Celle-ci est constituée de différents groupements de plantes
adventices dont la dispersion est favorisée par leur forme biologique (thérophytes en
général), leur cycle de végétation très court et leur adaptation à la dissémination : fruits
accrochants et adhésifs (Mullenders, 1954). D'autres encore se propagent en plus par
leurs organes de rénovation souterrains (rhizomes ou stolons).
L'intérêt agronomique de l'étude de ces plantes est évident. Les sols tropicaux,
après défrichement, sont exposés à une rapide érosion et à la perte des matières
organiques (Vandenput, 1981). Outre leurs effets bénéfiques, en indiquant l'état et
l'évolution du sol, le niveau de fertilité, les modifications du régime hydrique et
climatique et en jouant un rôle important sur la couverture et la fixation des sols
dénudés (Mullenders, 1954 et Marche-Marchard, 1965), ces plantes présentent
cependant des effets néfastes sur les espèces cultivées (Chateau, 1957).
Nos bisects ont été exécutés sur des sols différents : le premier dans un sol à
dominance sablonneuse recouvert d'une légère couche d'humus et de débris végétaux,
le deuxième dans un sol à dominante argileuse, assez compact, à nappe phréatique très
peu profonde et le troisième dans un sol sablonneux profond. Ces différents types de
substrats expliquent la présence des groupments observés et les différentes adaptations
écologiques des espèces. Dans le premier bisect, les enracinements sont relativement
assez profonds. Les racines tendent à se développer verticalement dans le sol. Le
maximum du chevelu racinaire est compris dans les 20 premiers centimètres de
profondeur. Dans le deuxième bisect par contre, les enracinements sont surtout
superficiels, leur développement se fait plus ou moins latéralement. Le maximum du
chevelu racinaire est localisé dans les 10 à 25 premiers centimètres de profondeur. Ceci
est dû à l'état du sol, un sol argileux et assez compact. Dans le troisième bisect, les
enracinements sont profonds. Les racines ont tendance à se développer en profondeur
car le sol est à dominante sablonneuse. Le maximum du chevelu radiculaire est situé
dans les 20 à 30 cm de profondeur.
L'évolution de ces groupements d'adventices, si elle n'est pas interrompue ni
perturbée par des sarclages, aboutira, en cas d'abandon des cultures, à la formation de
la jachère qui, à son tour, évoluera vers des formations secondaires.
La densité des enracinements et des tiges aériennes de plantes adventices dans
l'espace cultivé a pour conséquence une forte compétition des matières nutritives et de
-45-

lumière avec les plantes cultivées. La surface d'absorption au niveau des racines est plus
grande que celle des plantes cultivées.
Par ailleurs, leur pouvoir d'assimilation chlorophyllienne est très élevé en raison
de leur grande occupation de l'espace. C'est pourquoi, dans les trois bisects, les plantes
cultivées accusent un développement moindre et anormal. Au niveau des racines, très
peu de tubercules ont été formés.
Par conséquent, le rendement de manioc est faible. Selon Kiadi (1975), les
mauvaises herbes utilisent pour leur compte une part importante des fertilisants
destinés aux cultures.
Les différentes mesures des phytomasses ont été effectuées dans des cultures mal
entretenues, complètement envahies par les plantes adventices ayant atteint leur
optimum de croissance. Les résultats obtenus montrent que les phytomasses tant
aériennes que souterraines de ces espèces sont supérieures à celles des plantes cultivées
(tableau 1 et 2). Dans le premier cas par exemple, les plantes adventices ont une
phytomasse souterraine totale de 1 023 kg/ha et une phytomasse aérienne totale de

Tableau 3
Phytomasses totales et Hydratation.
Groupements à Bidens pilosa (Gl) et à Digitaria Polybotrya (G2).

Phytomasses Hydratatior
Rapport
(kg/ha) (%)
Groupement Catégories des plantes
PsS PsA R HA

Plantes adventices 1 023 3 566 3,5 68,5

Gl Plantes cultivées 127 916 7,2 68,9

Total 115 4 482 3,9 67,9

Plantes adventices 725 3 433 4,7 68,8

G2 Plantes cultivées 50 135 2,7 70,9

Total 775 3 568 4,5 68,9

Légende : PsS = Poids sec souterrain.


PsA = Poids sec aérien.
HA = Hydratation aérienne.
-46-

3 566 kg/ha. Par contre, les plantes cultivées ont une phytomasse souterraine totale de
127 kg/ha et une phytomasse aérienne totale de 916 kg/ha. Cela montre que les plantes
adventices accumulent plus de matières nutritives que les plantes cultivées. Leur
développement est donc beaucoup plus favorisé et normal par rapport à celui des
plantes cultivées. Les coefficients d'hydratation calculés traduisent bien la compétition
entre les adventices et les plantes cultivées car les valeurs obtenues n'accusent pas de
grandes différences. Dans le premier cas par exemple, l'hydratation aérienne des
adventices est de 68,5 % et celle des plantes cultivées de 68,9 % (tableau 3).
Dans ce travail notre objectif était de mettre en évidence quelques influences des
plantes adventices sur les plantes cultivées à l'aide des bisects et de l'estimation des
phytomasses tant aériennes que souterraines. Par ailleurs, les coefficients d'hydratation
ont été calculés à partir des poids frais et des poids secs.
A la lumière des résultats obtenus, nous pouvons conclure que les adventices de
culture constituent un grand obstacle au plein développement des plantes cultivées.
Elles méritent réellement d'être traitées comme de « mauvaises herbes » (Guil-
laumet, 1967) en raison de leurs effets nuisibles. Leur pouvoir d'absorption est très élevé
grâce à une forte densité de racines dans le sol et leur pouvoir d'assimilation
chlorophyllienne est aussi très élevé, favorisé par l'abondance des appareils végétatifs aériens dans
la surface cultivée. Pour Chateau (1957), les mauvaises herbes peuvent être considérées
comme l'un des principaux facteurs de perturbation, entraînant des pertes sérieuses et
une grande réduction de production. Ainsi les cultures doivent être bien entretenues
afin d'éviter un mauvais rendement des espèces cultivées.

Annexe 1
Légende des 3 bisects (espèces présentes)

Bisect 1 (A) Spermacoce latifolia


(B) Paspalum orbiculare
(C) Fimbristylis hispidula
(D) Mariscus alternifolius
(E) Digitaria polybotrya
(F) Bidens pilosa
(G) Manihot esculenta
(H) Phyllanthus niruri
(I) Cyperus spacelatus
(J) Panicum brevifolium
Bisect 2 (A) Mariscus alternifolius
(B) Kyllinga erect a
(C) Manihot esculenta
(D) Phyllanthus niruri
(E) Erigeron floribundus
(F) Ageratum conyzoides
(G) Digitaria polybotrya
(H) Fimbristylis hispidula
-47-

Bisect 3 (A) Spermacoce latifolia


(B) Imperata cylindrica
(C) Paspalum orbiculare
(D) Manihot esculenta
(E) Mariscus flabelliformis
(F) Digitaha polybotrya
(G) Cyperus sphacelatus
(H) Pueraria javanica
(I) Sida acuta

Localisation et description des stations

Relevé I : Zone de Mangobo, route menant vers le plateau médical. Culture de manioc
mal entretenue, d'environ 1 an. Groupement adventice à Bidens pilosa sur sol
à dominance sablonneuse recouverte d'une légère couche d'humus et de
débris végétaux.
Relevé 2 : Zone de la Makiso, derrière l'aéroport du plateau médical. Culture de
manioc et patate douce non sarclée d'environ 7 mois sur sol argilo-sableux,
à nappe phréatique très peu profonde, végétation adventice dominée par
Mariscus altemifolius.
Relevé 3 : Zone de la Makiso, localité Simi-Simi, culture de manioc sur sol sablonneux,
profond, graveleux, de plus d'un an. Végétation adventice dominée par
Imperata cylindrica.

Remerciements

Nos très sincères remerciements s'adressent à Mme et M. Lejoly, pour leur


sollicitude et pour leurs conseils fructueux.

BIBLIOGRAPHIE

Bernard E., 1945. — Le climat écologique de la cuvette centrale congolaise, Publ. INEAC,
coll. in 4°, Bruxelles : 240 p.
Chateau R., 1957. — La flore adventice des rizières. Bulletin de l'agriculture et de
l'élevage du Congo Belge. Bruxelles, 20 p.
Duvigneaud P. et Kestemont P., 1947. — La synthèse écologique, population,
communautés, Ecosystèmes, Biosphère, Noosphère. Doin, Paris, 296 p.
Godron M. et ai, 1968. — Code pour le relevé méthodique de la végétation et du milieu.
Principes et transcription sur cartes perforées. CNRS, Paris, 292 p.
Gounot M., 1969. — Méthode quantitative de la végétation. Masson et Cie, Paris, 314 p.
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d'Ivoire). ORSTOM, Paris, 248 p.
Kiadi 1975. — Techniques culturales et soins culturaux, in CEPSE, Numéro spécial,
Lubumbashi, 147-160.
-48-

Lejoly J. et Lisowski S., 1978. — Plantes vasculaires des Sous-Régions de Kisangani et


de la Tshopo (Haut-Zaïre). Document polycopié, Faculté des Sciences, UNAZA,
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