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ine

gaz
Phil
Woods

ma
Un géant
modeste
Le magazine du jazz N° 678 - novembre 2015
John
Coltrane
A Love
Supreme,
les inédits

Miles
Davis
Exclusif
On a vu le
biopic !

Jimi Hendrix
Un homme d’Experience
Les jam sessions légendaires
Ses disques de jazz favoris

DOM : 7 € - BEL/LUX : 7 € - D : 7.50 € - CH : 12 FS – CAN : 10.99 $CA – ESP/GR/ITA/PORT CONT : 7 € - MAR : 70 DH – TOM : 1790 XPF - TUN : 11 TND
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En ligne : Fnacspectacles.com, Ticketmaster.fr, Digitick.com, Francebillet.com,
à partir de novembre 2015
présente

Kellylee Géraldine Malou


Evans Laurent Beauvoir

à l’Alhambra
le 23 janvier 2016
Sortie le 6 novembre

Food
This is not a miracle
Thomas Strønen batterie, percussions,
moog, fender rhodes
Iain Ballamy saxophones
Christian Fennesz guitare
ECM 473 9039

Mette Henriette
Mette Henriette saxophone
Katrine Schiøtt violoncelle
Johan Lindvall piano
Mette Henriette Ensemble
ECM 473 5212

Thomas Strønen
Concerts Time Is A Blind Guide
Thomas Strønen batterie et percussions
Susanne Abbuehl « The Gift » Kit Downes piano
12/11 · Nevers · Festival Håkon Aase violon

Design Alain Frappier dm15


21/11 · Paris · Maison de la Radio Ole Morten Vågan basse
25/11 · Rennes · Les Champs Libres · avec Wolfert Brederode Lucy Railton violoncelle
Siv Øyunn Kjenstad percussions
Jack DeJohnette avec Matt Garrison et Ravi Coltrane Steinar Mossige percussions
05/11 · Amiens · Maison de la Culture ECM 475 4115
07/11 · Caen · Théâtre
09/11 · Nevers · Maison de la Culture
10/11 · Clermont-Ferrand · La Coopérative de Mai
13/11 · Tours · Théâtre l’Olympia
Dominique Pifarély
07/11 · Strasbourg · Jazzdoor · avec Louis Sclavis
Avec Louis Sclavis et Vincent Courtois
26-27/11 · Paris · Atelier du Plateau
28/11 · Annecy · Conservatoire
Enrico Rava Quartet avec Stefano di Battista
13/11 · Nevers · Maison de la Culture
11/12 · Bordeaux · Auditorium de Bordeaux
Enrico Rava avec Sangoma Everett
14/11 · La Gaude · Salle de la Coupole John Abercrombie
The First Quartet
John Abercrombie guitare, mandoline
Retrouvez l’actualité des sorties ECM sur www.club-u-jazz.com
Richie Beirach piano
George Mraz contrebasse
Peter Donald batterie
ECM 473 2437
édito Frédéric Goaty
directeur de la rédaction

Sommaire

L’Histoire, jour après jour


Comme le rappelle Bruno Blum dans la remarquable
compilation “Race Records - Black Rock Music Forbidden
On U.S. Radio 1942-1955” (Frémeaux & Associés), « Le rock
“noir” a coexisté discrètement avec les premiers succès du
rock blanc. Mais il existe une nette tendance à cantonner
le rock afro-américain au rang de “préhistoire” du rock, ce
qui signifie qu’il ne ferait pas partie du genre. (...) Deux Noirs À la une, Jimi hendrix
figurent tout de même parmi les inventeurs officiels du photographié par donald
Silverstein (merci à lisa Silverstein
rock : les incontournables géants Little Richard et Chuck et à la Galerie Stardust)
Berry. » Deux autres géants crossover (comme on dit
aujourd’hui) de la musique afro-américaine figurent en
Une des deux numéros de Jazz Magazine que nous vous
proposons ce mois-ci.
Jimi Hendrix d’abord, dont nous explorons l’héritage
musical à travers ses liens avec le jazz (lire p. 26) et le
blues (lire p. 22). Ce jeune vétéran du chitlin’ circuit
s’est brûlé les ailes en se rapprochant trop vite du
soleil, et son génie foudroyant a fasciné jusqu’à Miles
Davis lui-même dont, par ailleurs, nous avons vu le
très attendu biopic (lire p. 52). À la une, lionel hampton
photographié par Ph. Staval
Lionel Hampton ensuite, qui, en décembre 1954,
tandis que le n° 1 de Jazz Magazine faisait son apparition
dans les kiosques (le fac-similé qui vous est offert risque N° 678
SyLvAIN GRIPoIx

de devenir rapidement aussi collector que l’original !), novembre 2015


était une star internationale capable de faire chavirer
l’Olympia à la tête de sa phénoménale machine à swing 08 Hommage
Phil Woods
dont les riffs hypnotiques préfiguraient ceux du rock’n’roll.
14 Entretien
L’Histoire est donc toujours d’actualité. Pour preuve, de John Scofield
Fred Hersch (p. 64) à Michael Wollny (p. 38) en passant par
20 Dossier
John Scofield (p. 14) et Bernard Lubat (p. 40), elle n’en finit Jimi Hendrix
pas de s’écrire au quotidien.
38 Blindtest
Michael Wollny
36 Le Jour J
Le jour où
Charlie Parker entra
dans l’histoire
Jazz Magazine Jazzman N° 678 – NOVEMBRE 2015 © 2015 Jazz & Cie ce numéro comporte :
est édité par Jazz & Cie, Prix de vente au numéro : 6 € Imprimé en France. - un supplément de 32 pages
39 Le Guide
15, rue Duphot, 75001 Paris
Principaux associés
Jazz Magazine Jazzman est une
publication mensuelle Jazz & Cie
Imprimeries Léonce Déprez,
Z. I. Le Moulin, 62620 RUITZ.
« Jazz Magazine n°1 » dans Nouveautés,
Pierre Bastid, Laurent SAS au capital de 350 000 euros
les exemplaires destinés
à la diffusion kiosques France
rééditions,
Guillemain, Christophe Gouju,
Edouard Rencker, ML Sylvain
R. C. S. Paris B 802 298 588.
Représentant légal : Edouard Rencker
et dans les exemplaires téléchargement,
Administration Dépôt légal : 4e trimestre 2015
destinés aux abonnés France. livres, dvd
Fatima Drut Jasic Diffusion MLP - un cd « 1945 – l’année du
Tél. : 01 56 88 17 62 N° de commission paritaire : bebop » dans les exemplaires 48 Gros plan
destinés aux abonnés avec
1116 K 90618
N° ISSN : 2425-7869 option cd. John Coltrane,
l’édition suprême ?
lE PROchAiN 73 Le Live
Renseignements, réclamations, changement d’adresse NuMéRO dE Clubs, concerts, radio,
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et commande d’anciens numéros lE 27
NOVEMBRE
Tél. : 01 60 71 55 86 – Email : anne-claude.venet@lva.fr
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Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 5


signatures
la rédaction les pigistes les photographes

Ils en parlent
Directeur
de la publication
Edouard Rencker
Directeur
de la rédaction
Frédéric Goaty

NAThALIE hUREAU
(fredericgoaty
@jazzmagazine.com)
x/DR

Rédacteur
en chef Christian Franck
Franck Bergerot
(franckbergerot Rose Bergerot
@jazzmagazine.com)
Photographe Rédacteur en chef
Publicité,
partenariats, Cela peu paraître futile, mais j’ai beau avoir « Un papier sur Jimi Hendrix ? », s’exclame
événements eu la chance de photographier et d’entendre une amie journaliste. « Charlie Parker, ok. Mais
Tristan Bastid Jimi Hendrix, les seuls souvenirs précis qui Hendrix ! Tu connais ça ?! » Ma culture rock est
(01 56 88 16 69, m’en restent sont ma plongée dans la foule un gruyère grignoté après 1968. Il est vrai que je
tristan.bastid des spectateurs à l’Olympia et, quelques n’ai jamais prêté une grande attention à “Electric
@jazzmagazine.com)
années plus tard, l’annonce de son décès, Ladyland”, le chef-d’œuvre, peut-être trop pop
Directrice en plein enregistrement du groupe Canned à mon goût. Mais à la sortie du film Woodstock,
artistique Heat au légendaire studio d’Hérouville. l’apparition d’Hendrix m’a tétanisé et j’ai appris
Claude Gentiletti
Rétrospectivement, l’image a pris le dessus par cœur “Band Of Gypsys” sorti à peu près au
Responsable sur la musique… même moment. Le lien entre Jimi et Bird ? Miles.
diffusion kiosques Le lien entre les trois ? Une certaine conception
Maureen Richy-Dureteste de l’âme.
(01 60 71 55 12,
maureen.boisguerin@lva.fr)
Best man
Philippe Carles
Pervulgateur
inamovible
Frank Ténot
Chairman
emeritus
Daniel Filipacchi
x/DR

x/DR

Ils ont contribué


à ce numéro Jean-Louis Robert
Jacques Aboucaya, Ginibre Latxague
Pascal Anquetil, Noadya
Arnoux, Juliette Barnel, Rédacteur en chef de Pigiste
Philippe Bas-Rabérin, Jazz Magazine de 1962 à 1971
Bertrand Bouard, Quel plaisir de faire découvrir un musicien
Pierre de Chocqueuse, Jean-Louis Ginibre nous a quittés fin trop longtemps resté dans l’ombre !
Vincent Cotro, David Cristol, 2012, mais la façon dont il menait ses Accordéoniste bayonnais placé sur orbite
Guy Darol, Doc Sillon, Andy
Emler, Lionel Eskenazi, interviews ressemble, aujourd’hui encore, jazz via l’Onj de Claude Barthélémy, Didier
Julien Ferté, Ludovic Florin, à une leçon de journalisme musical. Ithursarry joue, improvise et multiplie les
Christophe Geudin, Jean- Pour preuve, l’entretien avec Phil Woods rencontres. Sauf qu’il lui aura fallu dix années
Louis Ginibre, Jonathan que nous rééditons dans ce numéro. pour sortir son premier CD. Ce travail porte
Glusman, Sylvain Gripoix,
Pauline Guedj, Jeff Humbert, Paru dans le n° 154, daté mai 68, déjà une griffe reconnaissable. Quant à Lubat,
Paul Jaillet, Robert Latxague, il reflète toute la complicité qui l’unissait enfant terrible du Sud-Ouest (lire p. 40)
Jean-Louis Lemarchand, aux grandes figures du jazz moderne. sort un disque en piano solo placé sous
Félix Marciano, François le signe du tout impro. Le vent du sud aide
Marinot, Philippe Méziat,
Jean-Baptiste Millot, Jean- à faire s’ouvrir les oreilles…
François Mondot, Hubert de
Nabustroc, Stéphane Ollivier,
Jacques Périn, Giuseppe
Pino, Éric Quenot, Thierry
Quénum, Christian Rose,
Pascal Rozat, François-René
Simon, Alfred Sordoillet,
La rédaction n’est pas responsable des textes, illustrations, photos et dessins publiés qui engagent la seule responsabilité de leurs auteurs. Les documents reçus
Katia Touré, Philippe Vincent, ne sont pas rendus et leur envoi implique l’accord de l’auteur pour leur libre publication. Les prix peuvent être soumis à de légères variations. Les indications
Jean-Pierre Vidal. de marque et les adresses qui figurent dans les pages rédactionnelles de ce numéro sont données à titre d’information. La reproduction des textes, photographies
et dessins publiés est interdite. Ils sont la propriété exclusive de Jazz Magazine qui se réserve tous droits de reproduction et de traduction dans le monde entier.

6 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


GRANDE MUSIQUE DE NUIT
Le « Musicien Européen de l’Année »
(Académie du Jazz 2015)
grave un envoûtant album de balades
nocturnes qui nous plongent dans les
profondeurs et mystères de la Nuit.
Disponible en CD et LP

Créativité sans limite

La chanteuse norvégienne et son Le guitariste Scott DuBois Iiro Rantala rend hommage en Ces enregistrements flamenco
groupe gravent un album qui est une figure importante de la solo à l’un de ses héros, qui historiques, réalisés en studio
emprunte au blues et au gospel ; jeune scène jazz new yorkaise. fêterait cette année ses 75 ans : à Berlin en 1965, documentent
la touche subtile d’electronica Le NY Times a salué son « sens John Lennon (1940-1980). l’une des toutes premières
et l’audace rythmique rendent de l’exploration, toujours mélo- Disponible en CD et LP captations européennes du
l’enregistrement captivant. dique » et ses « compositions genre au-delà des frontières
Disponible en CD et LP ambitieuses ». espagnoles.
Disponible en CD et LP

facebook.com/actmusic | www.actmusic.com
hommage
interview Jean-Louis Ginibre (Jazz Magazine n° 154, mai 1968)

Phil
Ce grand altiste
GIUSEPPE PINo

parkerien a rendu
son dernier souffle
le 29 septembre.
né Philip Wells Wood il y a 83 ans,
à Springfield, il s’était vite révélé
essentiellement et magistralement
“philwoodsien”.
Accueilli sans trop de réticences au sein de la jazzosphère européenne,
avec l’aide de Simone Ginibre, sa nouvelle manager, il avait réuni des
partenaires aussi talentueux que le contrebassiste Henri Texier, le pia-
niste George Gruntz, à qui devait succéder Gordon Beck, et le batteur
Daniel Humair pour constituer l’European Rhythm Machine et vivre
une nouvelle aventure. Mais c’est en 1968, ayant fui en France le
climat de violence et de racisme étatsunien, que Phil Woods s’était
d’abord confié, dans nos pages, à Jean-Louis Ginibre, alors rédac-
teur en chef et bientôt son ami.

Vous faites partie de la génération pour laquelle


Charlie Parker fut le point de départ...
Oui. Le premier disque de jazz que j’aie jamais entendu
P.W.
est Ko-ko. Je devais avoir 12 ou 13 ans. A Springfield
(Massachusetts), où je suis né, je connaissais un pianiste un
peu plus âgé que moi qui était au courant de tout ce qui se
passait. C’est lui qui m’a fait écouter Charlie Parker et Dizzy
Gillespie, Shaw Nuff, Salt Peanuts, etc. C’est pourquoi Charlie
Parker constitue la plus grande influence que j’aie ressentie. Je
n’avais pas l’intention de devenir musicien avant ça. Personne
dans ma famille ne l’était. Mon père jouait un peu de violon pour
s’amuser. Lorsque j’entendis Ko-ko et les autres disques de Parker,

8 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre


Jazz Magazine Novembre2015
2015
‘‘Avec le poète
Dylan Thomas,
je pense que
Charlie Parker

Woods
est l’artiste le
plus influent
du xxe siècle.”

je décidai de devenir musicien et de jouer du saxophone. quelques dollars, j’allais l’écouter. Bird était un gentleman,
Quand j’avais 15 ans, à Springfield, je participais à des jam- il disait toujours bonjour à tout le monde. Il était très amical.
sessions avec Joe Morello, Sal Salvador, Teddy Charles, Peu de temps avant sa mort, nous avons joué ensemble.
Chuck Andrus. Nous jouions tous les jours, le plus long- C’était chez Larry Rivers, le peintre [et saxophoniste,
temps possible. NDLR]. Moi, je travaillais en face, dans une boîte de strip-
tease. Je suis passé chez Rivers pour boire un verre. Bird
Vous avez pendant quelque temps étudié jouait du baryton. Je suis allé chercher mon alto et le lui ai
avec Lennie Tristano... prêté. Il joua dessus. Je n’ai jamais entendu mon alto son-
Oui, j’ai pris quelques leçons avec lui. Je devais ner comme ça ! Ensuite, j’ai repris mon alto et nous avons
P.W.
avoir 16 ans. Tristano avait une bonne réputation joué ensemble. En fait, Bird et moi n’avons jamais été des
de professeur et, lorsque j’ai su qu’il donnait des leçons, amis. Simplement des connaissances. Avec le poète Dylan
j’y suis allé avec un camarade de Springfield. Il nous fallait Thomas, je pense que Charlie Parker est l’artiste le plus
une journée entière pour nous y rendre. Nous faisions des influent du XXe siècle. Dans cinquante ans, il influencera
économies, nous prenions le bus, nous nous rendions chez encore des musiciens. Après Parker, j’ai entrepris un re-
Lennie et, s’il nous restait quelques dollars, nous allions tour en arrière et me suis intéressé à Johnny Hodges et
chez un disquaire pour acheter des disques de Charlie Par- Benny Carter. Quand on veut progresser, il faut retourner
ker. C’était une bonne journée musicale. Mais, très jeune, aux sources. Certains jeunes musiciens, aujourd’hui, se
je ne connaissais pour ainsi dire rien à l’harmonie ou aux retournent jusqu’à Coltrane et ne s’intéressent pas à ce
gammes et je n’ai jamais vraiment profité de ce que Tris- qui a précédé. Ils ont tort. L’histoire du jazz est courte. La
tano pouvait m’offrir. Je suis allé chez lui pendant deux Fait rare : Phil Woods connaître fait partie des bases nécessaires.
mois à raison d’une fois toutes les deux semaines. faisait bien sûr la Une du
Jazz Magazine dans lequel
figurait l’interview réalisée Lorsqu’on consulte votre discographie, on y
Bien qu’habitant le Massachusetts, vous par Jean-Louis Ginibre distingue deux périodes : celle pendant la-
n’avez jamais fait partie de ce que l’on ap- (le n° 154 de mai 1968), quelle vous avez été lié avec Prestige, celle pendant
mais un de ses portraits
pelle l’école de Boston, Herb Pomeroy, Jaki Byard, illustrait aussi la rituelle laquelle vous avez enregistré pour Epic...
Charlie Mariano... publicité Selmer, en Je suis resté trois ans chez Prestige, de 1954 à
quatrième de couverture. P.W.
Non. J’ai obtenu mon diplôme à 16 ans et, aus- 1957. La première fois que j’ai enregistré pour
P.W.
sitôt, je suis parti pour New York, à la Manhattan Prestige, c’était comme sideman de Jimmy Raney. Peu
School of Music, pendant un été, puis à la Juilliard School après, Ira Gitler, le directeur artistique, m’a offert un contrat.
pendant quatre ans. A l’époque, il y avait beaucoup de jazz Ce n’était pas spécialement un bon contrat mais, quand
à la Juilliard. Teo Macero y enseignait. on est jeune et qu’on vous demande d’enregistrer des
disques de jazz, on demande seulement : « Où dois-je
Revenons à Charlie Parker. Vous rappelez- signer ? » Et quand on a signé, on s’aperçoit que... Mais
vous la première fois que vous l’avez vu en je ne veux blâmer personne, même si l’on a profité de
chair et en os ? moi : ça fait partie du business. Mais on apprend vite. Ça
Oui, bien sûr. C’était dans la 52e Rue, au Three m’a pris trois ans. Je ne leur en veux pas aujourd’hui : ils
P.W.
Deuces je crois. Assis devant un Coca Cola, j’en m’ont donné ma première chance et m’ont permis d’avoir
ai pris plein les oreilles. J’étais un fan et quand j’avais des disques sur le marché. C’est important. Ils continuent

Novembre 2015Numéro
Novembre2015 Numéro678
678 Jazz
Jazz Magazine
Magazine 9
hommage Phil Woods

Phil Woods en famille avec


FREDERIC WARREN

sa femme Chan (l’ex-épouse


de Charlie Parker), son fils
Garth et sa fille Aimée.

de vendre mes disques et j’aimerais simplement qu’ils Aussitôt après, vous êtes parti en tournée
m’envoient un peu d’argent de temps en temps, ce avec le big band de Dizzy Gillespie...
qu’ils oublient de faire. Oui, en 1956 aussi. C’était la première tournée or-
P.W.
ganisée par le Département d’Etat. Quincy Jones
Au cours de votre passage chez Epic, organisa l’orchestre car Dizzy, à l’époque, était en Europe.
avez-vous subi des pressions de la part Il y avait Frank Rehak, Ernie Wilkins, Nelson Boyd, Melba
des directeurs artistiques... Liston, Marty Flax, Billy Mitchell, Charlie Persip. Nous avons
Des pressions sur le répertoire à enregistrer. Ils répété à New York puis nous sommes partis pour Rome où
P.W.
en choisissaient à peu près la moitié. Remar- Peu de temps après son Dizzy nous a rejoints. Ce fut ma première tournée hors des
quez, je les comprends. Epic avait investi de l’argent sur arrivée en France, Phil Woods Etats-Unis. Nous avons fait tout le Moyen-Orient, la Turquie,
moi et ils voulaient protéger leur investissement. formera l’European Rhythm etc. Même s’ils ne savaient pas toujours ce que nous fai-
Machine avec Daniel humair
à la batterie, henri Texier à la sions, les gens étaient très intéressés. Je crois qu’ils furent
Vers cette époque, vous faisiez équipe contrebasse, George Gruntz, sensibles au rythme et, dans les orchestres de Dizzy, il y en
avec l’altiste Gene Quill… puis Gordon Beck, au piano.
L’un des morceaux de “At a toujours ! Dizzy apporte un soin particulier au swing. Et
J’ai fait la connaissance de Gene au cours The Frankfurt Jazz Festival” puis Charlie Persip est un bon batteur de grand orchestre.
P.W. (Embryo, 1971) s’intitule
d’une jam session. Je lui ai demandé ce qu’il
Ode à Jean-Louis, clin d’œil
voulait jouer. Il m’a dit : « Donna Lee. » Ce qui veut tout amical à Jean-Louis Ginibre Votre seconde grande tournée en big band
dire quand on connaît le tempo ultra-rapide de ce mor- bien sûr. vous a mené en France...
ceau ! Bref, nous l’avons joué et nous sommes devenus Oui. Quincy avait assemblé un orchestre pour venir
P.W.
très amis. Nous étions les deux altistes les plus bruyants jouer l’opérette Free And Easy. Nous sommes res-
de la ville ! Lee Konitz m’a dit que jamais il ne jouerait tés en Europe dix mois, puis nous sommes repartis pour les
avec nous à cause du bruit que nous faisions ! Le Phil Etats-Unis. En arrivant à New York, les policiers du Bureau
And Quill Quintet était un bon groupe. Nous avons enre- des Stupéfiants nous ont tous fouillés pendant des heures.
gistré quelques disques qui, je pense, sont bons, mais Ils cherchaient de la drogue qui, selon leurs renseignements,
nous n’avons eu que très peu de possibilités de jouer devait arriver d’Europe. Lorsqu’ils apprirent qu’un orchestre
en public. Un peu au Half Note et au Village Vanguard... intégré arrivait, ils crurent tout naturellement que la drogue
était avec lui ! Sur le bateau suivant, ils découvrirent 200 000
Vous avez participé à la tournée des dollars d’héroïne, ce qu’ils cherchaient. Pour moi et ma fa-
Birdland Stars... mille, ce fut un drôle de « welcome home ». J’avais envie de
P.W.
Oui, début 1956. J’étais dans un orchestre reprendre le bateau pour l’Europe !
regroupant Conte Candoli, Kenny Dorham, Al
Cohn et la section rythmique de Sarah Vaughan. C’était Travailler avec Monk a dû aussi être une ex-
la première fois de ma vie que mon nom était sur un pro- périence curieuse...
gramme. Il y avait Count Basie, Sarah Vaughan, Lester Il a une façon merveilleuse de faire répéter un or-
P.W.
Young et Bud Powell. Je sortais de chez Juilliard et je chestre : il s’assied dans un coin ou danse, et si
me retrouvais dans le même bus que ces gens-là ! Je vous commettez une erreur, il fait tout recommencer depuis
ne savais pas où m’installer. Al Cohn est venu à mon le début ! Monk est un leader sans être un leader. Je l’adore.
aide et m’a fait asseoir à côté de lui. Devant nous, il y Si vous devez prendre un solo, il insiste pour que vous
avait Bud et Prez. Pendant 500 miles, ils n’échangèrent connaissiez bien la mélodie. Il n’aime pas que l’on improvise
pas un mot ! Cette tournée est un merveilleux souvenir. sur les accords sans tenir compte de la mélodie initiale.

10 Jazz MagazineNuméro
JazzMagazine Numéro
678
678
Novembre
Novembre
2015
2015
‘‘
Il y a des millions
d’Américains qui pensent
que les Noirs sont inférieurs.
Aussi longtemps qu’ils
éprouveront ce sentiment,
toutes les lois du monde
mède
musicale
n’y pourront rien changer.”
elsa boublil
vous avez dit classique ?
L’argent est-il
16 : 00 - 17 : 00
important ?
Pas vraiment. Il passe après ma famille. Je ne suis pas
P.W.
tellement ambitieux. Bien sûr, j’aimerais gagner beaucoup
d’argent si c’était possible de le faire sans concessions. Mais
cela semble impossible. J’en ferai peut-être un peu, car je suis
flexible, mais pas beaucoup. Je veux avant tout continuer d’être
un musicien de jazz.

Que pensez-vous de l’évolution


de l’Amérique ?
Il y a beaucoup de chômage et de misère, beaucoup de
P.W.
violence aussi. Et ça dure depuis si longtemps que je ne
vois pas la solution. Les Américains ont subi un gigantesque lavage
de cerveau. On leur a dit que l’Amérique était le plus grand, le plus
beau et le meilleur pays du monde. Le rêve aurait pu se réaliser mais,
depuis les assassinats de John Kennedy et de Martin Luther King...
Aux Etats-Unis, la vente des armes est libre, c’est une civilisation de
la violence. Et moi, ça me rend fou furieux. On construit des prisons
de plus en plus grandes qui ressemblent à des camps de concen-
tration. Ça sent l’Allemagne, celle décrite dans The Rise And Fall Of
The Third Reich [Le Troisième Reich, des origines à la chute: Une
histoire de l’Allemagne nazie, de William L. Shirer, 1960, NDLR]. Il y
a des millions d’Américains qui pensent que les Noirs sont inférieurs.
Aussi longtemps qu’ils éprouveront ce sentiment, toutes les lois du
monde n’y pourront rien changer. Il y a de nombreuses raisons qui
m’ont fait quitter l’Amérique. J’ai un beau-fils, Baird [NDLR : le fils de
Chan et Charlie Parker], qui est en partie noir. Et j’ai deux enfants et
une femme. Si je n’avais pas eu de famille peut-être serais-je resté.
Mais, pour nous, l’Amérique devenait comme un village menacé par
la peste. Il faut que mes enfants oublient cette violence, ces haines
raciales. C’est pourquoi je suis en Europe : j’espère pouvoir me fixer
en France, y jouer du jazz, y enseigner.
Tous les vendredis l’émission
La France ne vous effraie-t-elle pas ? Il y a, aux Etats- est consacrée au Jazz.
Unis, une violente campagne anti-française... Et retrouvez le premier vendredi
Et en France une violente campagne anti-américaine. Ça de chaque mois, la rédaction de
P.W.
ne me dérange pas. Il n’y a rien entre Charles [De Gaulle,
NDLR] et moi : nous ne nous sommes jamais disputés. •
Au MiCro : JeAn-LouiS GiniBre

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 11


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et David sylvian = 160 pages de bonheur. richesse iconographique et rédactionnelle.
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(1)
Les CD Collection sont des compilations thématiques réalisées par la rédaction. (2) Tarif kiosque. les rectifier et vous opposer à leur transmission éventuelle en nous écrivant.
entretien
texte Bertrand Bouard photos Philippe Lévy-Stab (Impulse)

14 Jazz MagazineNuméro
JazzMagazine Numéro
678
678
Novembre
Novembre
2015
2015
JOHN SCOFIELD

Le gardien
de la flamme
Au moment où sort “Past Present”, John Scofield
réaffirme sa détermination à toujours « aller de
l’avant » sans oublier le passé. Ses retrouvailles avec
Joe Lovano, ses séances légendaires avec Charles
mingus et Joe Henderson, son admiration pour Jim
Hall, la mort de son fils : entretien avec un guitariste
dont le talent n’a d’égal que la modestie. 

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 15


entretien John Scofield

D
Début août : John Scofield décroche son télé-
phone pour répondre à nos questions. Pause
rare dans un emploi du temps-marathon : rien
qu’au New Morning, le guitariste s’est pro-
duit quatre fois en dix mois – avec Überjam,
Martin Medeski & Wood, en duo avec le pia-
niste Jon Cleary et en trio avec Steve Swal-
low et Bill Stewart. Difficile de ne pas y voir
une façon de surmonter le drame de la mort
de son fils, en 2013, qui imprègne plusieurs
compositions de “Past Present”. Ce disque
marque le retour à un post-bop soigné et la
réactivation de son association avec le saxo-
phoniste Joe Lovano. « Le jazz, dit-il, sonne
mieux avec des musiciens qui ont beaucoup
x/DR

repères

1951 Naissance le
26 décembre
à Dayton (Ohio).
1962 Apprentissage
de la guitare.
très compliqués, ce sont juste des points de départ à l’improvisation, mais
ils racontent quelque chose. Ecrire vite aide à écrire de façon simple. J’écri-
vais des choses plus complexes à mes débuts. Je compose sur partition, à
l’ancienne, mais quand j’ai une idée, je la joue sur ma guitare, qui ne me quitte
jamais en tournée, et je l’enregistre, car les idées s’en vont si rapidement...

J.S.
Quelle est l’origine de votre relation avec Joe Lovano ? Peter
Erskine assure vous l’avoir recommandé, alors que vous aviez
initialement songé à Wayne Shorter…
Oui, c’est exact. Mais j’avais rencontré Joe à l’université, bien avant l’enre-
gistrement de “Time On My Hands”. Quant à Wayne je le connaissais
depuis l’époque de Weather Report, avec lequel le groupe de Billy Cobham – dans
lequel je jouais – a partagé l’affiche de nombreuses fois. On voyageait ensemble,
on discutait, il se montrait très cordial avec moi. Wayne m’a demandé par la suite
d’ouvrir certains de ses concerts dans les années 1980... Et quand je jouais avec
1974 “Live At
joué ensemble. C’est aussi simple que ça... » Carnegie Hall” Miles, il lui arrivait d’être dans les parages. Je lui ai donc proposé de participer à un
avec Gerry Mulligan album, ce qu’il a accepté, mais quand je l’ai rappelé après avoir écrit la musique,
et Chet Baker.
D’où vous est venue l’envie d’un il m’a dit : « Ecoute, je ne vais pas pouvoir le faire maintenant, je suis désolé, mais
nouvel album avec Joe Lovano 1975-76 Joue redemande moi à un autre moment ». Il a finalement joué sur “Quiet” en 1996.
et Bill Stewart ? avec Billy Cobham.
J’avais le désir d’enregistrer un 1977 Premier disque Wayne Shorter a eu une certaine influence sur votre manière
J.S. en leader, enregistré
album de jazz, différent des précé- d’écrire, non ?
dents, orientés sur le groove et très élec- au Japon. Oh que oui ! Je suis un fanatique de son jeu, de ses compositions.
J.S.
triques. Or, Joe est mon saxophoniste préféré 1982-1985 Joue Il arrive parfois que j’écrive et que je me dise : « Attends un peu,
et ça ne pouvait qu’être formidable avec Bill ! avec Miles Davis. c’est un morceau de Wayne Shorter, là... » Wayne, Herbie Hancock, Miles
Cosigne la deuxième
Larry Grenadier constituait le complément et d’autres parmi cette génération ont embrassé tellement de choses. Ils ont
partie de “Decoy”
idéal. Je me suis bien rendu compte que tout (1984). apporté au post-bop les harmonies avancées, l’improvisation libre, des ap-
cela allait être présenté comme une réunion proches d’écriture nouvelles, et inventé des combinaisons géniales, très libres.
1990 Premier album
du quartette, mais je n’ai tout simplement pas
avec Joe Lovano,
pu trouver de meilleurs musiciens... “Time On My Hands” Voyez-vous aujourd’hui de jeunes musiciens susceptibles
(Blue Note). d’exercer un jour une influence comparable sur le jazz ?
Est-ce le type de morceaux que 2000 “Überjam”, Je ne sais pas si quelqu’un pourra à nouveau avoir ce genre d’in-
J.S.
vous écrivez qui dicte votre pro- opus jazz funk fluence. Dans la musique en général, certainement, mais le jazz existe
chain projet ou écrivez-vous avec un pro- qui sera suivi depuis si longtemps… Je ne dis pas qu’il est mort, je n’adhère pas du tout
jet spécifique en tête ? d’un second volet à ce genre de discours, mais Miles ou Wayne sont arrivés à un moment où
J’écris et j’arrange en fonction d’un en 2013. le champ de développement du jazz était immense. C’était comme si les
J.S.
projet. J’en ai toujours cinq sur le 2006 “Saudades” différents éléments qui changeaient dans la musique en général l’obligeaient
feu ! En fait, je devais publier un nouvel album (ECM) avec le Trio à grandir. Aujourd’hui, je ne vois pas de telles possibilités pour les jeunes
Beyond (Larry musiciens, ou bien peut-être avec la musique digitale. Je l’espère en tout cas.
avec Überjam, plus Cory Henry, de Snarky
Goldings, Jack
Puppy. Les répétitions étaient prometteuses DeJohnette) en
mais j’ai finalement opté pour celui-ci. hommage au Lifetime Certains jeunes musiciens vous impressionnent
de Tony Williams. quand même ?
Vous n’avez jamais cessé de J.S. Je suis très impressionné par le niveau de certains. J’ai joué avec le
composer. Vous n’êtes jamais à formidable trio du pianiste allemand Pablo Held par exemple : ils ont
court d’idées ? une vingtaine d’années et jouent de façon incroyable !
Je publie environ un album tous
J.S.
les dix-huit mois et je traverse tou- Vous-même avez joué très jeune avec des légendes comme
jours une période sans composer. Il y a aussi Chet Baker ou Charles Mingus. Racontez nous votre expé-
des jours où ce que j’essaie d’écrire est de rience aux côtés de ce dernier lors de l’enregistrement de “Three Or
la merde ! Il faut se donner du temps et, en Four Shades of Blues”, en 1977…
général, on finit par obtenir quelque chose. A l’époque, je jouais avec Billy Cobham, qui était chez Atlantic Re-
J.S.
Les morceaux que je compose ne sont pas cords, tout comme Mingus, dont producteur, Ilhan Mimaroglu, vou-

16 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


Joe Lovano et
John Scofield, les
inséparables ?

lait lui faire enregistrer un album dans le style


fusion, qui avait le vent en poupe à l’époque.
Mimaroglu m’avait entendu lors d’un concert
et m’a proposé le gig, mais nous étions trois
guitaristes lors de la session : Larry Coryell,
Philip Catherine et moi... J’étais un immense
fan de Mingus, et j’étais mort de trouille ! Il
y avait une trentaine de personnes dans le
studio, Mingus était dans un coin et travaillait
sur la musique avec Paul Jeffrey, le directeur
musical. Les partitions qu’ils nous ont don-

‘‘
nées étaient extrêmement compliquées à lire
! Une des parties de guitare était tellement
ardue qu’on se l’est répartie à trois : « Ok,
tu prends la page 1, moi la 2, toi la 3... » On
Pour “Past Present”, je n’ai tout
a enregistré le morceau de cette façon et, simplement pas pu trouver de meilleurs
à ma connaissance, personne ne l’a jamais musiciens que Joe Lovano,
remarqué ! [Rires.]
Bill Stewart et Larry Grenadier.”
Vous avez pu discuter avec
Mingus ?
Non, pas un mot. Mais le soir de
J.S.
l’enregistrement, je traînais dans un
club à New York, et le pianiste Sadik Hakim
(1), qui avait joué sur All The Things You quelques secondes prises mais Joe tenait à conserver les premières. C’était
Are avec Charlie Parker, est venu me voir : une leçon incroyable. Joe était très intelligent, parlait doucement, aimait dis-
« Man, Mingus t’a trouvé super, il trouve que cuter de tout, lisait toujours le journal. On m’a dit qu’il parlait japonais – il avait
tu es celui des guitaristes qui swinguait le une copine japonaise en tout cas. Il apparaissait tel un fantôme, parfois avec
plus. » C’est le seul retour que j’ai eu. Cet deux heures de retard, mais il était prêt. Son timbre, son sens du rythme, sa
été-là, on a joué avec un big band la mu- façon de combiner le blues avec le bebop, l’avant-garde… : c’était un géant,
sique de Mingus au Saratoga Festival et il comme Wayne, Herbie et Miles.
était là, dans une chaise roulante. Il est mort
peu de temps après. Vous arrive-t-il de réécouter des disques sur lesquels
vous avez joué ?
Quel souvenir gardez-vous de Non, car je n’aime pas m’entendre. Particulièrement la période où
J.S.
Joe Henderson, qui vous a invité je jouais de façon nerveuse. Et je n’ai pas de raison de revenir en
sur l’album “So Near, So Far”, ce très bel arrière, il faut aller de l’avant. Mais de temps à autre, un ami me fait écouter
hommage à Miles Davis, en 1992 ? un truc, ou je tombe dessus à la radio. La moitié du temps ça me plaît,
On avait joué ensemble avant ça, no- l’autre moitié, je me dis : « Oh merde ! J’aurais dû faire ça différemment ».
J.S.
tamment au festival d’Antibes avec Joe Pass disait un truc très simple et très juste : « Quand je joue bien, je
l’Orchestre National de Jazz, dans les années me sens bien ; quand je joue mal, je me sens mal. » Je crois qu’on ne peut
1980. J’étais dingue de Joe Henderson : jamais être totalement satisfait de soi. Aujourd’hui, j’ai plutôt tendance à
j’allais l’écouter en club, je transcrivais ses sortir content d’un concert, mais en même temps je suis toujours suspicieux
solos pour les reproduire à la guitare. On d’une telle impression...
répétait très scrupuleusement avant d’enre-
gistrer : il était au piano et analysait les mor- Parvenez-vous encore à vous surprendre ? Ou vous dites-vous
ceaux, c’étaient des standards mais il voulait souvent : « J’ai déjà joué ce plan des centaines de fois »...
examiner chaque détail de l’harmonie. Le jour Les deux. Je pense que les meilleurs moments surviennent quand
J.S.
suivant, quand on a commencé d’enregistrer, on se trouve dans une situation un peu nouvelle. Même si vous jouez
la première prise était incroyable : j’avais à probablement un plan que vous avez déjà joué ou que d’autres ont joué avant
peine fini de m’accorder qu’il avait pris vous, le groupe y répond d’une certaine façon, une conversation se créée.
vingt chorus sur So Near, So Far ! On a fait Pour se sentir bien dans son jeu, il faut pouvoir se surprendre.

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 17


entretien John Scofield

Jim Hall est mort l’année passée. Envisagez-vous de lui rendre


un hommage ?
J’y ai pensé et je veux le faire un jour, mais, en même temps, quand je
J.S.
joue, c’est déjà un hommage à Jim ! Quand je commençais à m’inté-
resser au jazz, vers 14 ans, il y avait un petit magasin de disques dans ma ville
dont la propriétaire était une dame charmante qui connaissait le jazz. Elle m’a
guidé vers mes premiers disques : Jim Hall, Wes Montgomery ou Pat Martino.
J’ai usé l’un des disques de Jim avec Art Farmer et Steve Swallow, il m’a
vraiment ému. Quand j’étais au lycée, je suis allé l’écouter dans un club, The
Guitar. Il se produisait avec un contrebassiste, il n’y avait pas grand monde.

‘‘
Il était mon modèle, il montrait à tout le monde la direction à suivre avec son
approche si différente des guitaristes de bebop traditionnel. Puis j’ai étudié à
la Berklee School où j’ai rencontré Steve Swallow, qui ne jouait plus alors que
Je compose sur partition, de la basse électrique, d’une façon où l’on percevait l’influence de Jim. Gary
à l’ancienne, mais quand Burton, qui m’a aussi beaucoup appris à la Berklee, connaissait Jim depuis
j’ai une idée, je la joue les sixties et m’a dit de l’appeler si je voulais prendre un cours avec lui. J’en
ai pris deux. C’était génial de s’asseoir à ses côtés, il était très sympa. Quand
sur ma guitare, qui ne me je jouais avec Gerry Mulligan, Jim est venu avec Paul Desmond nous écouter
quitte jamais en tournée.” dans un club et ils ont été installés à la première table, juste en face de nous.
Je pouvais à peine jouer, car les disques de Jim avec Paul Desmond sont pour
moi parmi les meilleurs albums de jazz de tous les temps. Une autre fois, Jim
est venu à un concert de Miles et, à la fin, il a dit une chose très drôle : « Ce
serait vraiment marrant de faire partie d’un groupe fusion bien bruyant comme
N’est-ce pas ce que vous recher- CD “Past Present” celui-ci ». Je me suis dit « Ça, c’est bizarre », car on ne pouvait pas trouver un
chez à travers la diversité de vos (Verve / Universal). guitariste plus doux : son batteur devait jouer avec des balais toute la soirée…
albums ? ConCerts Le 4
Oui, mais paradoxalement ça me novembre au reims Que lui avez-vous pris en particulier ?
J.S. Jazz Festival, le 5 à
rend dingue d’avoir autant de projets Ses voicings ?
différents ! J’aime rejouer avec mes anciens Paris (new Morning), Bien sûr ! Et aussi son jeu en legato pour faire chanter l’instrument,
le 14 au D’Jazz nevers J.S.
partenaires car c’est avec eux que je joue le Festival. sa façon de faire sonner les hammer on et les pull off (2)… Mon pre-
mieux ; il y a davantage de relâchement, une mier vocabulaire jazz venait de lui et j’espère ne plus l’utiliser car ce sont des
approche commune, un son d’ensemble. En clichés de son jeu. “Live At The Half Note” d’Art Farmer et “The Bridge” de
même temps, je veux faire en sorte que la Sonny Rollins sont pour moi les tables de la loi de la guitare jazz. Les albums
musique soit fraîche. C’est ce dont Miles, de Wes Montgomery aussi, mais ce dernier était tellement difficile à imiter, je
Wayne ou Herbie ont toujours parlé : l’impres- n’avais aucune idée de ce qu’il faisait – quoique parfois ce soit très dur aussi
sion d’aller dans une nouvelle direction. C’est de jouer comme Jim... J’aimais aussi Pat Martino, George Benson, B.B. King.
une sensation très forte à laquelle on devient Mais en matière de standards, rien ne vaut Jim Hall.
accro. Il faut trouver la bonne configuration à
même de faire jaillir cette étincelle. Quel genre d’hommage
pourriez-vous lui rendre ?
Parlez-nous de votre relation J’étais en studio l’an dernier avec Scott Colley et Bill Stewart pour
J.S.
avec Bill Stewart, l’un de vos plus enregistrer quelques morceaux, des standards, une sorte d’hom-
fidèles collaborateurs… mage à Jim. Mais je ne veux pas publier un disque de standards car lui l’a
C’est un phénomène. Il ne commet fait si bien, donc je ne sais pas si je le sortirai. On verra. Peut-être que je me
J.S.
jamais vraiment d’erreurs, à l’inverse prends trop la tête...
de moi qui essaie toujours des trucs. Bill Notes:
accorde beaucoup d’importance à la spon- 1. C’est lui qui s’invite Plusieurs titres de votre nouvel album ont été inspirés par
tanéité. Et quand je propose un nouveau mor- à la première séance votre fils. Vous souhaitez en parler ?
de Charlie Parker sous
ceau, il trouve d’emblée la bonne façon de Il n’y a pas grand-chose à dire. C’est terrible, mon fils est mort à
le nom d’Argonne J.S.
le faire sonner. Le batteur est le moteur d’un Thornton. Voir notre 26 ans d’un cancer. Il s’est passé un peu moins de deux ans entre
groupe de jazz. S’il n’est pas bon, la musique rubrique Le Jour J dans le moment où la maladie a été découverte et sa mort. Lui et sa femme ont
ce numéro.
en souffre, ce qui m’est arrivé avec d’autres vécu avec ma femme et moi, à la maison, et c’est alors que j’ai composé une
2. Lorsqu’un doigt de la
batteurs, avec lesquels il fallait beaucoup main gauche frappe la grande partie des morceaux de “Past Present”. Je ne m’assois jamais en me
répéter, essayer plusieurs approches avant corde en s’y posant ou disant « Tiens, je vais écrire à propos de ça », mais il se trouve que j’étais avec
de trouver la bonne. Ça n’arrive jamais avec la pince en s’en retirant lui quand j’écrivais ces morceaux... •
de façon à la faire
Bill qui comprend tout de suite ce que j’ai en sonner sans attaque de
tête, et la musique décolle immédiatement. médiator à main droite.

18 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


Natacha
MYRIAD ROAD
Atlas
SORTIE LE 23 OCTOBRE / 4758752
Natacha Atlas a été découverte par le grand public lors sa consécration
aux Victoires de la Musique en tant qu’interprète féminine en 2000.
Quinze ans plus tard elle croise la route du musicien, compositeur et
producteur Ibrahim Maalouf et signe un album de Jazz ou ses mélopées
orientales s’épanouissent sans retenue.
En concert le 24 novembre à Annecy

Lionel
GAÏA
Loueke
SORTIE LE 30 OCTOBRE / 4742380
Quatrième album sur Blue Note, enregistré dans les conditions du
live, face à un public réduit.
Afin d’exprimer de la manière la plus fidèle possible ce qu’il avait
en tête, le guitariste a de nouveau fait appel au bassiste Massimo
Biolcati et au batteur Ferenc Nemeth. La construction des onze
chansons de l’album met en évidence les talents de compositeur
du guitariste. Quant à l’interprétation qu’en donne le trio, elle est
tout bonnement extraordinaire.
En concert le 15 octobre à Marseille
le 22 octobre à Clermont-Ferrand ( Jazz en tête)

Gregory Porter
LIQUID SPIRIT (SPECIAL EDITION)
SORTIE LE 6 NOVEMBRE / 476108
Une ultime édition pour célébrer l’album de jazz à succès de Gregory Porter.
Un standard inédit When I Wish Upon A Star ainsi que 2 titres remixés par
Claptone et Rainer & Grimm.
En concert le 30 novembre à l’Olympia, Paris.

ÉGALEMENT DISPONIBLES

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BARILLA.DESIGN
dossier

Jimi Hendrix

Le jazz,
le blues
et lui
On n’en finira donc jamais avec sommaire
Hendrix. Quarante-cinq ans après 22 Un blues peuplé
sa disparition, l’héritage de ce de rêves
Par Philippe
guitariste et auteur-compositeur bas-rabérin

hors-normes reste une source 26 To rock


or not to jazz ?
d’inspiration. Philippe Bas-Rabérin, Par Yazid manou

Yazid Manou et Franck Bergerot 28 Jimi et Miles


faces à faces
se sont interrogés sur l’apport de (et dos à dos)
Par Franck bergerot
ce créateur qui a brouillé les pistes
entre le rock, le jazz et le blues
comme nul autre avant lui.

20 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


ChRISTIAN RoSE

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 21


dossier Jimi Hendrix
texte Philippe Bas-Rabérin

Un blues peuplé de rêves


Bluesman authentique ou pop star malgré lui ?
Apôtre de la note bleue ou rêveur aux racines
imaginaires ? L’héritage musical de Jimi Hendrix
est aussi complexe que fascinant.

P
our Roland Kirk, l’un de ceux qui jammèrent à ses côtés,
Hendrix était « un bluesman et non la pop star qu’on
[voulait] faire de lui ». Mais les bluesmen interrogés à son
propos voyaient souvent mal où se dirigeait ce frère fugi-
tif. (On était loin de la conversion tardive d’un Buddy Guy
au volume sonore de Hendrix, dont il fut d’abord un des
modèles.) Dans le rock, ce Noir du Nord-Ouest américain révélé en
Angleterre impressionnait d’autant plus que sa technique instrumen-
tale exceptionnelle, son inspiration onirique et ses bravades d’Eros
de scène lui avaient fait supplanter en un tournemain tous les guitar
heroes du moment, de Mike Bloomfield à Jeff Beck. Cela n’entamait
pas l’opinion d’un jazzman représentant la première génération de
guitaristes électriques, Tiny Grimes, aux yeux duquel le laboratoire
de distorsion hendrixien travaillait « pour les gosses ».

Malgré l’eau qui a coulé depuis et quelques mises au point utiles (1),
les ambiguïtés musicales et culturelles s’attacheront durablement à
Hendrix. Ses rapports avec le blues, le jazz, la soul ou le rock en sont
marqués, comme son rôle dans l’histoire de la guitare ou la nature de
son impact sur les musiques populaires.
S’agissant du blues, l’équivoque vient d’abord de ce que Hendrix ap-
paraît au moment où se clôt l’ère “historique” du genre, alors délaissé
par une majorité d’Afro-Américains, et du fait qu’il est à la fois étranger
à l’esprit de revival, réceptif à plusieurs avatars du rock blanc (d’Eddie
Cochran à Dylan, voire aux Who) et porteur d’un bagage personnel
explosif dans le contexte des années 1960. Mais avant de bondir
dans le son-et-lumière pop, le “black Elvis” qu’on verra dans le leader
provocant d’un trio anglo-américain et biracial a subi un apprentis-
sage draconien – celui du chitlin circuit où le guitariste a accompagné
certaines des figures les plus intraitables du R&B quand le blues et sa
progéniture n’avaient pas encore accédé au village global.
Les attaches de Hendrix avec le blues étaient réelles et sans doute
vitales : il y trouvait une discipline, un terrain pratiqué de longue date
et, de plus en plus, un tremplin vers ce qui devait autant que possible
ne ressembler à rien de connu. Il lui a réservé une place limitée mais
toujours significative dans ses principaux enregistrements (l’exclusion
de Red House de l’édition américaine de son premier lp le rendit
furieux). Le guitariste pouvait y dépasser bien des maîtres et le chan-
teur, timide au départ et peut-être encore à l’arrivée, y prenait plus
qu’ailleurs le temps de créer un climat où l’énergie le disputait à une
pente dépressive.

22 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


En matière de guitare, le blues à la Hendrix découle
des styles de la lignée Delta/Chicago (Muddy Waters,

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Hubert Sumlin), de B.B. King et de quelques “ruraux des
abords urbains” comme Lightnin’ Hopkins, mais il y a
lieu d’insister aussi sur l’intérêt durable du musicien pour
les trouvailles sonores de Guitar Slim (1926-1959), arti-
san d’effets d’amplification et de saturation qui occupe repères
de ce fait une place à part dans les années 1950. On ne
peut sous-estimer non plus l’influence de rockers noirs 1942 Naissance,
et blancs (Chuck Berry, Buddy Holly, Cochran), ni même le 27 novembre
à Seattle.
celle du “British blues” tel que l’ont illustré Eric Clapton
ou Peter Green. Sa sûreté rythmique et son sens de 1955 Il joue du
l’ellipse relèvent autant de ce qu’il a pu apprendre en ukulélé, puis passe à
la guitare électrique.
accompagnant un Curtis Mayfield que des styles tran-
chants de Gatemouth Brown et d’Albert Collins, ces 1959 Il reste ving-
champions du timing texan dont le maître électricien fut six mois chez les
Parachutistes, où il
d’abord T-Bone Walker. fait la connaissance
Sur le plan vocal, on est en présence d’un tempérament du bassiste Billy Cox.
introverti à proportion de l’assurance dont fait preuve
1963-64 Tournées
l’instrumentiste. Hendrix a retardé ses débuts de chan- dans le chitlin’
teur parce qu’il ne se sentait pas à la hauteur d’Otis circuit. Installation
Rush ou de Buddy Guy, et il n’a franchi le pas qu’avec à New York.
force encouragements de son entourage britannique, 1966 Arrivée à
lequel a aussi favorisé son travail de parolier. Il a choisi Londres le samedi
en définitive de “laisser fuir les mots” en cultivant un 24 septembre. Le
phrasé adapté au blues autant qu’à d’étranges et belles 18 octobre, première
partie de Johnny
ballades (The Wind Cries Mary) souvent riches en notes Hallyday à l’Olympia
bleues.
1967 Premier album

‘‘
le 12 mai, “Are You
Experienced”. Juin :
retour triomphal
aux Etats-Unis, au
festival de Monterey.
1968 Après
“Axis, Bold As
Dans l’évolution Love”, troisième
du blues, ce talent album studio
de l’Experience,
polymorphe entérine “Electric Ladyland”.

la fin d’un monde.” 1969 En mars, jam


au Ronnie Scott
(Londres) avec
Roland Kirk. En
L’histoire de Hendrix, mort à 27 ans, est néanmoins août, il fait sensation
à Woodstock, où,
celle d’un musicien aux racines en grande partie ima-
au petit matin, il
ginaires, nourri de rêves juvéniles magnifiés par sa maî- interprète l’hymne
trise et son invention de guitariste. L’expression adulte américain à la
de Muddy Waters, B.B. King ou John Lee Hooker, le guitare.
lyrisme contenu d’Otis Rush, la retenue facétieuse qu’il 1970 Il est à l’affiche
aimait chez Slim Harpo n’ont pas d’équivalent qui lui soit du festival de l’Île
propre. Parce qu’il est mort jeune, certes, et parce que de Wight. Il meurt le
le blues a été révélé hors de ses bastions obligés à cet 18 septembre. Il est
enterré le 1er octobre.
enfant de Seattle, éveillé par les disques de son père Il avait 27 ans.
ChRISTIAN RoSE

mais « déjà déraciné » lorsque l’Anglais Chas Chan-


dler le découvrit à New York et décida de le conduire
à Londres.

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 23


dossier Jimi Hendrix

‘‘
Cet explorateur
des sons aurait
voulu imaginer des
œuvres d’inspiration
mythologique
et planétaire.”
PhILIPPE GRAS / FASTIMAGE

Don’t let your imagination take you by surprise / A The Sun donnait peut-être un avant-goût dès son pre-
queen I’ll be someday, visualize / My head in the cloud, mier album, n’a pas connu de suite concrète. On peut
my feet on the pavement / Don’t get too stoned, please la voir dans ses entrecroisements de lignes mélodiques,
remember you’re a man (extrait de Earth Blues). son recours aux nouveaux moyens électroniques et sa
passion pour un travail de studio qu’il distinguait avec
On a pu dire que Hendrix avait épargné au blues une discernement de la scène.
sorte de fossilisation. Il me semble plutôt qu’il a facilité
un changement de nature des formes de musique dif- Les contacts de Hendrix avec John McLaughlin, Larry
fusées sous ce vocable dès lors qu’elles ne correspon- Coryell, Dave Holland, Larry Young, voire Miles Davis
daient plus à une communauté précise et absorbaient [lire l’entretien avec Yazid Manou et l’article de Franck
ce que voulaient y mettre des musiciens et des publics Bergerot, NDLR], ont suggéré une orientation possible
infiniment plus composites. Cette mutation s’est surtout vers telle ou telle forme de jazz. Mais à part quelques
faite par le biais du rock, ce dont témoigne plus d’un jam sessions sans but défini, les spéculations à ce sujet
enregistrement de chanteurs-guitaristes comme Luther manquent de consistance. Le travail de Gil Evans sur le
Allison, Robert Cray ou Joe Louis Walker, pour ne rien répertoire du guitariste est fidèle aux visions de l’arran-
dire d’un Stevie Ray Vaughan. geur mais ne saurait jeter de lumière sur la voie qu’aurait
L’influence de Hendrix s’est vérifiée dans les déborde- empruntée Hendrix, ni même sur la physionomie que
ments du heavy metal. Elle est sensible, de façon plus celui-ci aurait donnée à leur collaboration.
ou moins nette, chez des instrumentistes d’horizons Le musicien de Seattle est surtout parvenu à rappro-
divers. Dans l’évolution du blues, ce talent polymorphe cher les musiques populaires blanches et noires de son
entérine la fin d’un monde. Si les paroles simples et temps avec pour atout fondamental son traitement per-
La magnifique photo de Jimi Hendrix classiques de Red House témoignaient du souci de ne sonnel de la matière-blues, en soumettant l’ensemble à
prise par Donald silverstein qui illustre
notre Une figurait dans l’exposition pas rompre avec les sources afro-américaines, celles un sens du show qui lui a assuré une descendance du
Jimi Hendrix Can You see Me ? de Voodoo Chile s’envolent dans le cosmos avec une côté de quelques rois, ou plutôt princes, de la scène.
qui s’est tenue à La Galerie stardust liberté qui est une forme d’abandon : Durant l’exposition Hendrix in Britain organisée à
du 10 juin au 31 juillet dernier
(19, rue notre Dame de nazareth, Londres en 2010 au Handel House Museum de Brook
75003 Paris, galeriestardust@gmail. Say, my arrows are made of desire from far away as Street (où le chanteur occupa un appartement au-
com, tél. 06 30 72 86 16). Jupiter’s sulphur mines jourd’hui intégré au musée), on pouvait se demander,
(Way down by the Methane Sea) devant le sérieux des visiteurs auscultant une guitare ou
Note : I have a hummingbird and it hums so loud, you think un autre document hendrixien près des salles dévolues
1. Voir Hendrix, Setting you were losing your mind. à Haendel, quel Messie hantait les lieux. •
The Record Straight
de John McDermott
En 1967, cet explorateur des sons qui jouait du feed-
et Eddie Kramer (Warner
Books, New York, 1992). back avec des parois d’amplificateurs aurait voulu
NB : Ce texte est une passer six mois dans une école de musique pour ima-
version révisée de celui giner ensuite des œuvres d’inspiration mythologique et
paru dans le n° 507
de Jazz Magazine en planétaire, « avec des textures musicales extrêmes et
septembre 2000. opposées ». Cette aspiration, dont Third Stone From

24 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


EAGLE VISION IS A DIVISION OF EAGLE ROCK ENTERTAINMENT LIMITED. Eagle Rock Entertainment is a Universal Music Group company. www.eagle-rock.com www.zappa.com

Les concerts légendaires de 1973 au Roxy de Los Angeles


sont disponibles en DVD et Blu-ray pour la toute première fois !
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Dès le 30 octobre.
dossier Jimi Hendrix
rencontre Yazid Manou

To rock or not to jazz ?


Le jazz faisait-il partie des influences de
Jimi Hendrix ? A-t-il travaillé avec des cuivres 
et vraiment failli jammer avec Miles Davis
et Tony Williams ? réponses de Yazid Manou,
grand spécialiste de la question hendrixienne.

Quelle était la place du jazz dans le parcours musical


de Jimi Hendrix ?
Ce n’est pas évident. A part l’intérêt que lui portèrent tout de
Y.M.
suite Miles Davis et Gil Evans, la reconnaissance de sa mu-
sique par les jazzmen a été tardive. Le son de Jimi ne correspondait
pas à leurs critères, même s’il jouait avec un batteur comme Mitch
Mitchell, qui venait de chez Georgie Fame. Et son jeu était plus tourné
vers le blues. Il était aussi frustré de ne pas pouvoir lire une partition :
un jour, Miles Davis l’appela pour lui demander ce qu’il pensait des
partitions qu’il venait de lui envoyer. Hendrix, un peu gêné, lui avait
répondu qu’il ne savait pas les lire. Ça ne l’a pourtant pas empêché
d’effectuer de petites incursions dans le jazz : pendant les séances
d’“Electric Ladyland” au Record Plant de New York, lorsqu’il travaille
sur le morceau Rainy Day, Dream Away, Mitch Mitchell est absent,
il y a Buddy Miles à la batterie, Larry Faucette aux congas et Mike
Finnigan à l’orgue, à qui il dit : « Je vais faire Kenny Burrell, toi tu vas
faire Jimmy Smith. »

A-t-il rencontré beaucoup de jazzmen au cours de sa


brève carrière ?
Il a jammé avec, entre autres, Larry Coryell, qui raconte
Y.M.
que Jimi Hendrix était toujours à la basse quand ils jouaient
ensemble. Il y a eu aussi une fameuse jam en 1969 avec John McLau-
ghlin et Dave Holland [voir encadré]. Dès la fin de 1967, Hendrix avait
craqué sur Roland Kirk. C’est peut-être sa faculté de pouvoir jouer de
trois saxophones en même temps qui avait fasciné Hendrix, qui lui,
en studio, superposait ses parties de guitare. Ils se sont rencontrés,
ils ont jammé, mais malheureusement nous n’avons encore jamais
pu entendre ces bandes.

Quels sont les titres les plus proches du jazz dans la


discographie de Jimi Hendrix ?
SABRINA MARIEZ

On ne pense pas forcément au jazz quand on écoute Jimi


Y.M.
Hendrix, mais certains morceaux comportent quand même
quelques accents, dont Up From The Skies dans “Axis : Bold As
yazid Manou, face à face
Love” et Rainy Day, Dream Away sur “Electric Ladyland”. [Frédéric avec son 33-tours favori de Jimi
Goaty se permet d’ajouter Third Stone From The Sun, extrait de hendrix, “Electric Ladyland”.

26 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


ChRISTIAN RoSE

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 27


dossier Jimi Hendrix

‘‘
Il était tellement
flamboyant visuellement
et soniquement que
son écriture passe
parfois à l’arrière-plan.”
posée. Aussi s’était-il réfugié avec femme et enfants
dans sa ferme d’Ecosse… Plus tard, on a su que ce
fameux Brown n’avait jamais transmis le télégramme
à McCartney… Je pense que si Jimi Hendrix avait eu
quelque chose à dire à Paul McCartney, il ne lui aurait
pas envoyé un télégramme, il aurait simplement décro-
ché son téléphone. Le producteur Alan Douglas, qui
était très proche du monde du jazz, avait sans doute
envie de faire un coup en essayant de rapprocher
SABRINA MARIEZ

tout ce beau monde. Ç’aurait été très compliqué de


toute façon car, en octobre 1969, deux mois à peine
après Woodstock, Hendrix était une superstar. Et Paul
McCartney et Miles Davis étaient encore à un niveau
“Are You experienced”, et que Jaco Pastorius citait sou- La nuit des supérieur à ce moment-là. De plus, Hendrix était sous
vent sur scène, NDLR.] Il y a aussi South Saturn Delta, guitar heroes contrat chez Reprise, McCartney chez Apple et Miles
peut-être la seule fois où Hendrix a enregistré avec chez Columbia, ce qui aurait rendu les choses encore
En mars 1969, un
un ensemble de cuivres. J’aime beaucoup Jam Back plus compliquées… Finalement, j’ai mis ce télégramme
supergroupe composé
At The House, écrit par Mitch Mitchell, qu’il a joué à de hendrix, Mclaughlin, sous le nez d’Alan Douglas : il ne s’en souvenait plus.
Woodstock, et Tax Free, notamment la version de Miami Buddy Miles et dave
1968 dont certaines parties ressemblent à du free jazz. holland se retrouve au Pour un néophyte, comment décririez-
Avant de disparaître, Hendrix aurait peut-être pu tendre studio Record Plant de vous les quatre albums officiels parus de
New York pour une jam
vers cette forme de jazz qui n’est pas vraiment du jazz informelle d’une durée, son vivant ?
à proprement parler. Mais ça, on ne le saura jamais… dit-on, de six heures. Ça n’est pas très compliqué car il n’y en a
Y.M.
Témoin de la scène, le justement que quatre, trois albums studio et
Miles Davis était fasciné par Jimi Hendrix regretté producteur Alan un live. Rien à voir avec Zappa ! [Rires.] “Are You Expe-
douglas se souvenait
et un projet commun a même été évoqué rienced”, le premier album du Jimi Hendrix Experience
en 2005 : « Jimi et John
en 1969. Dans quelles circonstances s’étaient-ils ont essayé de jouer sorti en mai 1967, c’est du rock brut, spontané, avec
rapprochés ? ensemble et ça n’a pas des morceaux taillés pour la scène : I Don’t Live Today,
Le lien se fait en 1969 grâce à la relation nouée marché. ils étaient tous Foxy Lady, Purple Haze... Un premier jet brutal et, pour
Y.M. deux trop généreux, ils
avec Betty Davis, l’épouse de Miles, et Stella le critique Nick Kent, un des plus grands premiers al-
se respectaient trop,
Douglas, alors épouse du producteur Alan Douglas, qui aussi bien humainement bums de rock de tous les temps. Cinq mois plus tard
possédait une boutique de vêtements à New York et que musicalement. arrive “Axis : Bold As Love”. C’est le plus accessible et
en confectionnait pour Hendrix. Mais il n’existe aucune Personne n’a cherché quand on l’écoute à la suite d’“Are You Experienced”,
preuve concrète de la rencontre de Miles Davis avec à provoquer l’autre on a l’impression qu’il n’a pas été enregistré par le
et du coup, rien ne
Jimi Hendrix. Quand on lit la biographie de Miles écrite même musicien. Hendrix est plus posé, il tente quelques
s’est passé. Aucune
par Quincy Troupe, on imagine qu’ils passaient du magie. Tout le monde expérimentations avec l’ingénieur du son Eddie Kramer.
temps ensemble. J’aurais tendance à penser, comme garde l’image d’un Il y a un peu plus de délires psychédéliques, mais aussi
d’autres, qu’ils ne se sont jamais vus. Jimi exubérant sur des morceaux plus doux comme Little Wing ou Up
scène, mais quand From The Skies. Evidemment, le summum est “Electric
il jammait avec un
À la même époque, un télégramme indique autre musicien, il était Ladyland”, où Hendrix a pris le contrôle total du studio.
un mystérieux projet de jam session impli- capable de s’effacer Un des premiers double-albums du rock, totalement
quant Miles Davis, Tony Williams et Paul McCart- complètement… ». expérimental, son chef-d’œuvre.
ney. Pouvez-vous nous en dire plus ?
En 2005, sur les sites Internet du Hard Rock
Y.M.
Café, j’ai découvert l’existence d’un télé-
gramme du 21 octobre 1969 envoyé à Paul McCart-
ney et signé Jimi Hendrix, Miles Davis et Tony Williams:
« Nous enregistrons un LP ensemble cette semaine à À gauche, “Electric
New York. Est-ce que ça te dirait de venir jouer de la church”, le dvd du
basse ? Appelle Alan Douglas ». Sept ans plus tard, en concert donné par
hendrix le 4 juillet 1970
2012, en fouinant à nouveau sur le web, j’apprends que à l’Atlanta Pop Festival,
ce télégramme se trouve à Prague et qu’il existe une conclu en apothéose par
réponse : un nommé Peter Brown l’avait reçu au bureau un double feu d’artifice
d’Apple Records le 22 octobre et y avait répondu en de sons et de lumières.
À droite, la version cd,
toute simplicité : « Paul McCartney est en vacances. » également publiée
De fait, c’était le moment où les médias le harcelaient par Experience hendrix /
au sujet d’une rumeur bien connue sur sa mort sup- Sony Music.

28 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


dANS lA diScOThèQuE dE JiMi
Quels sont les albums live indispensables Dans les années 1990, la collection de vinyles ayant appartenu à Jimi Hendrix
de Jimi Hendrix ? a été rachetée par l’experience Music Project de Seattle. Soit une centaine de
pièces, parmi lesquelles quelques disques de jazz. Que voici :
Celui du Festival de Monterey 1967, un des
Y.M.
meilleurs concerts de sa carrière. S’il y a une
claque à prendre, c’est bien celle-là, même s’il était
monté sur scène complètement défoncé à l’acide. C’est
son premier concert aux Etats-Unis, il est tout frais, il
fait beau… Pour découvrir une autre facette du musi-
cien, il y a “Band Of Gypsys” et son trio cent pour cent
black avec Buddy Miles à la batterie et Billy Cox à la
basse. C’est son album live le plus funky, le plus groovy,
qui n’a pas grand-chose à voir avec ses trois premiers
disques studio. On peut ajouter à cette liste le concert 2
de Berkeley 70, ceux du Winterland 68, où Hendrix est
en méga-forme et, même si le groupe n’était peut-être
pas à son meilleur niveau, le concert de Woodstock.

Qui sont pour vous les musiciens jazz


qui perpétuent le mieux l’héritage de Jimi
Hendrix ?
A part les sosies ou des musiciens comme
Y.M.
Stevie Ray Vaughan qui peuvent exister dans
1 3
le rock, je ne vois pas de jazzmen qui personnifient le
jeu de Jimi Hendrix. Par contre, beaucoup de jazzmen
ont été fortement influencés par lui. Miles Davis avait
complètement craqué et a rapidement demandé à ses
guitaristes de jouer à sa manière : à John McLaughlin, à
John Scofield, ou à Mike Stern, ce qui est évident quand
on écoute “We Want Miles”. Nguyên Lê lui a rendu un
superbe hommage dans “Purple - Celebrating Jimi Hen-
drix”, et le reste de la liste est long, avec des gens aussi
divers qu’Hiram Bullock, Jonas Hellborg, Melvin Gibbs, 4 5 6
Bill Frisell, Eric Johnson, Jamaladeen Tacuma, Robben
Ford, Phil Upchurch, Sonny Sharrock… Aujourd’hui, les
jazzmen n’ont plus peur de considérer Hendrix comme
un des leurs. Des magazines de jazz le mettent même
en couverture ! Il avait la réputation d’être allé au plus
profond de son instrument, comme d’autres ont pu faire
exploser les frontières du saxophone, de la batterie ou
du piano. La compréhension et l’admiration de sa mu-
sique sont aujourd’hui totales, et la meilleure façon de
la célébrer, c’est de reprendre ses morceaux. 7

Au-delà de la flamboyance de son jeu de


guitare, ne néglige-t-on pas ses qualités
d’auteur-compositeur ?
Il était tellement flamboyant visuellement et
Y.M.
soniquement que son écriture passe parfois à
l’arrière-plan. Il était dans son monde, et son univers n’est
pas toujours facile à déchiffrer. Et puis, difficilement com-
pris en France, ses textes étaient très beaux, aussi très
8
imprégnés par le travail de Bob Dylan dont il avait repris,
entre autres, All Along The Watchtower. J’espère qu’un 1 Jimmy Smith & 3 Roland Kirk 5 Jaki Byard : 7 The Free Spirits :
Wes Montgomery : Quartet : “Rip, “Sunshine “out of Sight
jour on parlera moins de sa façon de jouer, des sacrifices
“The Dynamic Duo” Rig And Panic” of My Soul” And Sound”
de ses guitares, et que l’on étudiera ses textes. C’est
2 Jaki Byard : 4 Wes 6 Acker Bilk : 8 Charles
peut-être une des dernières facettes de la musique de “Freedom Montgomery : “Lansdowne Lloyd Quartet :
Jimi Hendrix qui reste à explorer. • Au MiCro : CHriSToPHe GeuDin Together” “A Day In The Life” Folio” “Journey Within”

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 29


dossier Jimi Hendrix
texte Franck Bergerot

texte

Miles et Jimi faces à faces


(et dos à dos)
Miles Davis a aimé le jeu de guitare, les
lignes de basse, les costumes et les visions
de Jimi Hendrix, mais a soigneusement
évité de le croiser. La non-rencontre la plus
fructueuse de l’histoire du jazz électrique ?

F
in 1967, Miles Davis a des envies de guitare sans trop
savoir ce qu’il veut. Muddy Waters ? Jimmy Nolen, le
guitariste de James Brown ? En attendant, deux musi-
ciens de studio, Joe Beck et Bucky Pizzarelli, font de la
figuration sur Circle In The Round et Fun. Puis, en janvier
1968, le trompettiste demande à George Benson un riff
à la Wes Montgomery dans Paraphernalia… En mai, Miles oublie la
guitare mais électrifie la basse et le piano pour explorer dans Stuff le
groove de la version originale de I Heard It Through The Grapevine,
que la chanteuse Motown Gladys Knight vient de hisser au Top 40.
Entre-temps, Betty Mabry est entrée dans la vie de Miles. Agée de
23 ans, auteur d’un tube des Chambers Brothers, mannequin pour
Jet et Ebony, elle le traîne dans les milieux branchés, lui fait adopter
la coupe afro, l’emmène chez Colette et Stella, où s’habillent Carlos
Santana, Johnny Winter et Jimi Hendrix, dont elle lui fait connaître la
musique, et celle de Sly & The Family Stone. 
Le 24 septembre, à quelques jours du mariage de Betty et Miles, alors
qu’elle apparaît à la porte du studio, Chick Corea et Dave Holland
lancent les premières notes de The Wind Cries Mary d’Hendrix, dont
Gil Evans a fait l’introduction de Mademoiselle Mabry.
Un an plus tard, les deux tourtereaux ont déjà divorcé. Miles repro-
chait à Betty ses incartades avec… Jimi Hendrix.

Une affaire de son


Miles a-t-il jamais écouté l’album “Are You Experienced” d’où est tiré
la citation de The Wind Cries Mary ? Chris Murphy, ancien roadie de
Miles et auteur de Miles To Go, An Intimate Memoir of Life on the
Road with Miles davis 1973-1983, raconte qu’il a donné quelques
cours de guitare à son boss, en commençant par lui apprendre The
Wind Cries Mary. Mais il a vite renoncé devant l’impatience du trom-
pettiste... Chris Murphy s’étonne aussi que Miles, en 1972, ne sem-
blait pas connaître “Electric Ladyland”. Miles n’écoutait visiblement
pas d’albums, mais plutôt des cassettes sur son autoradio – des cas-
settes souvent volées à ses musiciens, notamment celles d’Hendrix...
Lorsqu’au printemps 1969 il inscrit au répertoire de ses concerts
Miles Runs The Voodoo Down, qui ne trouvera sa forme définitive
qu’en août sur “Bitches Brew”, sous un titre “hendrixien” attribué sans

30 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


‘‘ Comme Jimi, Miles était plus qu’un musicien :
un visionnaire. Timides l’un comme l’autre,
ils mettaient en scène la douceur et la fureur.”

son avis, la ligne de basse rappelle celle qui apparaîtra


au milieu de Power of Soul, joué par le Band Of Gypsys
Evil”, saturation et ring modulator sur le Fender Rhodes
de Chick Corea, orgue bas de gamme entre les mains
d’Hendrix au cours de la nuit du nouvel an 1970. A de Keith Jarrett – dont la relation au clavier n’est pas
qui revient l’initiative de cet emprunt anticipé ? Dave sans évoquer celle de Jimi Hendrix à sa guitare –, sans
Holland aurait-il appris, voire conçu ce riff lors de la compter les percussions “vaudou” d’Airto Moreira. Par
légendaire jam session du 25 mars 1969, au Record la suite, au sein des orchestres de 1972 et 1974, Pete
Plant Studio, avec Jimi, John McLaughlin, Larry Young Cosey, de façon plus fantasmatique, et Eddy Gaumont,
et Buddy Miles ? de façon plus littérale, revisiteront l’héritage de Hendrix
Miles Davis cherche-t-il consciemment à se rapprocher – que Cosey se vantait d’avoir influencé.
de Jimi Hendrix ? Parmi les consignes et les noms qu’il
donne à ses musiciens, le guitariste est moins cité que Rendez-vous manqués
celui de James Brown et, surtout, de Sly Stone. À ses Comme Jimi, Miles était plus qu’un musicien : un
batteurs, Jack DeJohnette, Leon “Ndugu” Chancler visionnaire. Timides l’un comme l’autre, ils mettaient
et Al Foster, c’est Buddy Miles qu’il fait écouter. Il l’a en scène la douceur et la fureur qui les habitaient.
entendu pour la première fois sur un disque d’Electric Comme Jimi, Miles jouait un blues d’après le blues,
Flag, qu’il a confisqué en 1968 à Leonard Feather lors qui faisait dire au trompettiste dans les années 1970 :
d’un blindfold test pour Down Beat ! Le 7 avril 1970, « Les Blancs veulent jouer le blues. Qu’ils le gardent.
Miles Davis invite Buddy Miles à la séance qui donnera Passons à autre chose. »
l’essentiel de l’album “A Tribute To Jack Johnson”. Il Miles et Hendrix devaient-ils se rencontrer ? Pas plus
ne viendra pas. C’est Billy Cobham qui s’installera à la que Miles et Ahmad Jamal ou que Miles et Prince.
batterie et au beau milieu de Right Off, John McLaughlin Aussi, le jour où Betty Davis invita Hendrix à une récep-
et Michael Henderson reprennent le riff de Sing A Simple tion qu’elle organisa chez Miles, ce dernier s’arrangea
Song de Sly Stone, tout comme l’avait fait Hendrix dans pour rester en studio, et se contenta de demander,
We Gotta Live Together au Fillmore. par téléphone, l’avis d’Hendrix sur quelques partitions
D’autres riffs du Band Of Gypsys et de l’Experience laissées à son intention – il était pourtant notoire qu’il
hanteront désormais la musique de Miles jusqu’en ne lisait pas la musique...
1975 : les lignes de basse de Who Knows et de Fire, le Alan Douglas tenta de les réunir en studio. Un télé-
SAM FEINSILBER

refrain chanté de Power Of Soul... Scott Ross, sonori- gramme envoyé à Paul McCartney s’étant perdu [lire
sateur du groupe de Miles de la fin 1970 l’interview de Yazid Manou, NDLR], c’est Jack Bruce
au printemps 1971, raconte que pendant qui fut pressenti pour faire tandem avec Tony Williams.
les voyages en bus, tout le monde – à part Mais le jour de la séance, l’agent de Miles réclama une
Keith Jarrett – écoutait “Band Of Gypsys”... avance de 50 000 dollars, qui incita Williams à en faire
autant ! Tout fut annulé.
Quête électrique À son tour, Gil Evans envisagea d’enregistrer avec
Quant au style de guitare qu’il recherche, Hendrix. Un studio était retenu pour novembre, et un
Miles pense le trouver auprès de John dessin de Mati Klarwein (qui avait illustré celle de “Bit-
McLaughlin, dont le phrasé staccato est ches Brew” de Miles, entre autres) était prêt pour la
pourtant aux antipodes de celui d’Hendrix. pochette. Miles devait être de la partie.
Mais tout est dans le son et l’imaginaire Mais le 18 septembre 1970, Jimi Hendrix quittait ce
et, sur ces terrains, Hendrix a ouvert des monde.
voies nouvelles où McLaughlin, comme Miles, qui évitait les enterrements, se rendit à celui de
beaucoup d’autres, s’est en partie aven- Jimi avec Betty Davis et Jackie Battle, l’une de ses
turé au sein du Lifetime de Tony Williams nouvelles conquêtes. Il y fit la connaissance de James
(“Emergency”, 1969) et sur son propre Finney, l’assistant d’Hendrix, un coiffeur qui tenait un
album “Devotion”, enregistré en février salon à Manhattan. Miles l’engagea à son tour pour
1970 avec... Buddy Miles à la batterie. s’occuper de sa garde-robe, de sa coiffure et de son
À partir de “Bitches Brew”, Miles (et dans alimentation. Lors du tournage de Dingo, en 1990,
son ombre Teo Macero) accorde une place c’est encore lui qui était le maquilleur de Miles... •
croissante aux sonorités électriques dont A éCoUter Miles Davis : “Bitches Brew” (1969), “A tribute to
Hendrix a libéré l’usage : echoplex dans Jack Johnson” (1970), “Live/evil” (1971), “Agharta” et “Pangaea”
l’intro de trompette de Bitches Brew et (1975), tous sur Columbia / Legacy. Jimi Hendrix experience :
“Are You experienced” (1967, experience Hendrix). Band of
dans la partie de guitare de Sonny Shar- Gypsys : “Band of Gypsys” (1970, experience Hendrix).
ChRISTIAN RoSE

rock sur Yesternow (“A Tribute To Jack


Johnson”), effets de console sur Right Off,
wha-wha sur la trompette à partir de “Live-

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 31


blindtest
aux platines Lionel Eskenazi photos Jean-Baptiste Millot

MICHAEL WOLLNY

“J’ai réalisé un
rêve en jouant avec
Joachim Kühn !”
C’est la veille d’un concert en hommage à John Taylor que michael
Wollny a bien voulu se prêter au jeu du blindtest. Il nous a dévoilé
ses passions et les musiciens qui ont compté pour lui, tandis que vient
de paraître son nouveau disque en trio, “nachtfahrten”.

repères FRANZ SCHUBERT nous a influencés lorsque nous avons créé le trio [em]. Joachim Kühn est
Premier Mouvement (Allegro giusto) de mon héros, j’ai d’ailleurs écrit mon diplôme de thèse de fin d’études sur son
1978 Naissance le la Sonate opus 143, D784 travail d’improvisateur. En jouant avec lui, j’ai réalisé un rêve, et j’étais très
25 mai à Schweinfurt “Piano Sonatas D 784 & D 850 par Alfred impressionné lors de notre première rencontre, mais il a été très cool et m’a
en Bavière.
Brendel” (Philips, 1987) tout de suite mis à l’aise. Ce n’était pas évident de jouer en duo avec lui,
1997 Il entre au C’est une sonate de Schubert, ça mais nous avons très vite su trouvé nos espaces de jeu. Pour mon album
conservatoire de M.W.
ne fait aucun doute. J’ai beaucoup “Hexentanz”, j’ai voulu travailler avec l’ingénieur du son Walter Quintus parce
Wurtzbourg (en
Bavière). étudié et analysé la musique de Schubert et que j’avais en mémoire le travail qu’il avait fait avec Joachim Kühn.
j’ai même eu l’occasion de la jouer, mais je
2000 Rencontre n’ai jamais joué cette sonate. Schubert est ALBERT MANGELSDORFF QUARTET
et joue avec le
saxophoniste Heinz un compositeur important dans la musique Blues Booth (enregistrement live de 1970)
Sauer allemande car il a une fragilité que n’ont pas “Heinz Sauer : The Journey” (Act, 2008)
Bach, Mozart ou Beethoven. Il y a comme C’est le quartette d’Albert Mangelsdorff avec Heinz Sauer. On recon-
2004 Signe chez M.W.
Act et enregistre en une fêlure chez lui, une petite chose particu- nait bien le jeu expressionniste, fragile, et profond de Heinz et son
février son premier lière dans sa façon de composer qui est sa goût pour le blues. J’ai rencontré Heinz Sauer il y a quinze ans à Francfort où
album au sein du propre marque de fabrique et qui donne le j’ai remplacé son pianiste habituel : Bob Degen, puis il m’a intégré dans son
trio [em] avec Eva ton, et détermine l’atmosphère très spéciale sextette pour un projet autour de la musique de Charles Mingus. J’ai continué
Kruse (b) et Eric
Schaefer (dm). En de sa musique qui est l’expression même à jouer avec lui dans diverses formations pour arriver tout simplement au duo
octobre, premier du côté sombre du romantisme allemand. qui nous procure beaucoup de plaisir. Notre musique est assez minimaliste,
album en duo Dans mon premier album en piano solo avec beaucoup d’espace et de silence. Heinz va bientôt avoir 83 ans et notre
avec Heinz Sauer (“Hexentanz”), j’ai voulu rendre hommage à duo est toujours en activité. Depuis que l’on joue ensemble, sa sonorité de
(“Melancholia”). ce romantisme noir de Schubert à travers saxophone a peu changé, mais il est toujours en pleine forme et en pleine
2006 Premier album quatre Schubertiade que j’ai composées. possession de ses moyens.
solo, “Hexentanz”. Vous n’avez jamais eu envie d’intégrer un saxophoniste ou un
2008 Duo live avec KÜHN, HUMAIR, JENNY-CLARK autre musicien à votre trio ?
Joachim Kühn, “Live Sensitive Details J’ai essayé bien sûr, mais je trouve que ça ne fonctionne pas bien.
at Schloss Elmau”. M.W.
“Easy To Read” (Owl, 1986) J’affectionne particulièrement la formule triangulaire du trio et j’ai
Joachim Kühn, avec Daniel Humair et du mal à en sortir. Ce n’est pas évident d’intégrer une quatrième voix, mais
M.W.
Jean-François Jenny-Clark. C’est un je dois dire qu’une fois nous avons invité Vincent Peirani à venir jouer de
trio qui a beaucoup compté pour moi et qui l’accordéon avec nous et ça a très bien fonctionné !

32 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


‘‘
C’est certainement un groupe allemand
de krautrock : Neu ou Can ?Je considère les
années 1970 comme la meilleure décennie
aussi bien pour la musique que pour le cinéma.”

En enregistrant et en tournant avec Vincent Peirani, vous avez aussi E.S.T.


eu l’occasion de jouer avec Emile Parisien et Michel Portal… The Chapel
Emile Parisien est un musicien impressionnant, il a une sonorité unique au “From Gagarin’s Point of View” (Act, 1999)
M.W.
saxophone soprano et il est devenu incontournable dans le jazz européen, J’ai l’impression que c’est Esbjörn Svensson  ?
M.W.
il joue actuellement en quintette avec Joachim Kühn… Quant à Michel Portal, c’est Je ne connais pas ce morceau. Ça doit être
non seulement une légende vivante, mais c’est aussi la personne la plus drôle que les débuts de E.S.T. ? C’est une très belle mélodie,
je connaisse, j’adore sa phrase : « Les femmes et l’argent me rendent fou !” j’aime bien ce côté pop song. Quand j’ai commencé à
jouer en trio, mon professeur de piano m’a fait décou-
CAN vrir E.S.T. en m’offrant l’album “Good Morning Susie
Aumgn Soho”. Esbjörn a un son unique au piano et il a trouvé
“Tago Mago” (United Artists, 1971) une façon très particulière et immédiatement identifiable
Ça sonne comme un groupe des années 1970, j’aime bien la sonorité sale de faire sonner son trio. Nous venons d’écouter une
M.W.
du delay assez typique de cette époque. C’est certainement un groupe ballade, mais j’aime bien aussi le côté transe de cer-
allemand de krautrock : Neu ou Can ? Je considère les années 1970 comme la tains titres avec un aspect rythmique qui peut parfois
meilleure décennie aussi bien pour la musique que pour le cinéma. Il y avait beau- se rapprocher de la musique électro. J’ai vu le groupe
coup d’inventivité et d’expérimentation à cette époque, les musiciens de Can étaient sur scène, ils déployaient une sacrée énergie, c’était
d’anciens élèves de Stockhausen et ça s’entend ! Ils étaient également d’excellents phénoménal ! Et puis Esbjörn était un type bien, il nous
improvisateurs et ne reproduisaient jamais leurs disques à l’identique en concert. soutenait et appréciait notre musique, il était très proche
Je ne connais pas celui-ci, mais j’ai “Monster Movie” et “Ege Bamyasi” ainsi qu’un de Siggi Loch, le patron d’Act, et sa disparition a été très
triple DVD extraordinaire (“Can DVD”, publié chez Spoon Records), c’est un groupe douloureuse pour tout le monde. Avec Heinz Sauer, lors
que j’aime beaucoup. A la même époque, au tout début des années 1970, il y avait de nos concerts, nous jouons souvent en rappel une
aussi les premiers albums de Kraftwerk qui sont très intéressants et très différents de composition d’Esbjörn : Believe Beleft Below. C’est une
ce qu’ils ont pu faire par la suite. Ils proposaient une musique pop-rock beaucoup mélodie très simple qui pour moi évoque la mort et je
moins électronique, avec flûte, clavier et batterie. trouve qu’elle a la dimension d’un hymne religieux, c’est
une façon de lui rendre hommage.

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 33


blindtest Michael Wollny

‘‘
John Taylor
m’a permis de
libérer mon jeu
et d’échapper à
l’académisme du
conservatoire.”

repères ERIC SCHAEFER & DEMONTAGE profil du professeur académique et n’aimait pas
Jimmy Jump les discours et les explications. Il affectionnait
2012 Rencontre “Cut + Past Poetry” (Schoener Hören Music, 2005) la liberté d’expression et nous poussait vers
Vincent Peirani
New Morning (Paris) Je connais ce morceau, mais je n’arrive pas à me rappeler ce que ça. Il nous apprenait aussi à faire exprès des
M.W.
lors du concert c’est ! Ah, mais c’est Eric Schaefer ! Il me semble que c’est avec erreurs, par exemple, au cours d’un morceau,
des vingt ans d’Act, Demontage où jouait également le saxophoniste Daniel Erdmann. Ça doit à un moment précis, il nous disait de ne pas
puis rejoint son bien faire dix ans que je ne l’avais pas réécouté. Eric, je l’ai rencontré en respecter la métrique afin de créer une am-
trio en compagnie 2003, c’est Eva Kruse qui me l’a présenté, ils ont fait leurs études musicales biance particulière. J’ai joué souvent avec lui
du contrebassiste
Michel Benita. ensemble. J’ai tout de suite senti que c’était le batteur avec qui j’avais envie en duo, pendant des heures, parfois complè-
Novembre : de jouer, ça dure maintenant depuis douze ans et j’avoue qu’il m’est difficile tement free ! Il m’a permis de libérer mon jeu et
enregistre “Thrill de concevoir de jouer en trio sans lui ! Et puis Eric est aussi un remarquable d’échapper à l’académisme du conservatoire.
Box” de Vincent compositeur, il a étudié la composition avec Maria Schneider et je dois ad- J’étais très touché, l’an dernier, que l’Académie
Peirani.
mettre qu’il avait beaucoup d’avance sur moi dans ce domaine. Il écrit des du jazz nous décerne ex aequo le prix du meil-
2013 Tim Lefebvre compositions ouvertes qui peuvent se transformer au fil des répétitions et des leur jazzman européen. Quand j’ai commencé
(elb) remplace concerts et cette démarche m’a beaucoup influencé dans ma propre écriture. ma carrière, John m’a toujours encouragé,
Eva Kruse.
Débuts du Michael Sur votre précédent album, vous avez remplacé Eva Kruse par et m’a même félicité le jour de mon premier
Wollny Trio avec le bassiste américain Tim Lefebvre, puis sur “Nachtfahrten”, concert en piano solo. J’ai été très affecté par
“Weltentraum” il y a encore un changement de bassiste... sa disparition. Quelques jours avant sa mort, je
2014 L’Académie Oui, c’est exact, on s’entend très bien avec Tim Lefebvre, mais il est l’avais eu au téléphone, et il était enthousiaste
M.W.
du Jazz lui décerne extrêmement pris, car il joue notamment dans le groupe de blues- à l’idée que l’on joue ensemble à Londres. Les
le prix du meilleur rock Tedeschi-Trucks Band. Nous avons donc maintenant deux bassistes organisateurs du concert ont voulu maintenir la
jazzman européen possibles, avec l’arrivée de Christian Weber qui est un remarquable musicien. date, et nous avons été ainsi plusieurs pianistes
ex-aequo avec
John Taylor. Ce qui est amusant, c’est qu’ils sont tous deux très différents, Tim a un à venir lui rendre hommage au Queen Elisabeth
groove fantastique et Christian distille des sons incroyables, c’est un grand Hall, le 9 septembre dernier. •
expérimentateur et un excellent improvisateur. CD “nachtfahrten” (Act / Harmonia Mundi).
ConCerts Le 8 novembre à strasbourg (Jazzdor, Cité
JOHN TAYLOR de Musique et de la Danse, solo, duo et trio en première
Glebe Ascending partie du emile Parisien/Joachim Kühn Quintet).
“Insight” (Sketch, 2003) net michaelwollny.com.
C’est John Taylor bien sûr, il n’y a que lui pour jouer comme ça. Il
M.W.
m’a enseigné le piano pendant trois ans en Allemagne à l’époque
où je faisais partie du Young German Jazz Orchestra. Il n’avait pas du tout le

34 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


Les disques Frémeaux & Associés 2015
que Jazz Mag à plus (ou moins) chroniqués !
Les albums 2015 sélectionnés par Augustin Bondoux et Patrick Frémeaux

Les « Live in Paris » de Gilles Pétard et Michel Brillié

Les coffrets références

Les nouveautés Quintessence d‘Alain Gerber

Les intégrales chronologiques de Daniel Nevers, Jean Buzelin et Alain Tercinet

Le jazz manouche par Patrick Frémeaux

America, America

Catalogue 2015-2017
76 pages couleurs
Tiré à 50 000 ex.
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CD à commander chez votre disquaire (Dist. : Socadisc), chez votre libraire (Dist. : Frémeaux) ou en vente par correspondance.
texte Franck Bergerot
À ce
moment-
là dans
monde

le jour

j
26
novembre
1945

Le jour où
Charlie Parker entra
dans l’histoire
Charlie Parker et Miles Davis (avec
Tommy Potter et Max Roach) en 1947
au Three Deuces, où avait commencé
leur collaboration à l’automne 1945.

en ce jour jazz, le studio de la radio Wor « Où est Bud ? », s’exclame Teddy Reig, venu récupérer Bird à son hôtel.
ressemblait à la scène d’un théâtre de boulevard. « Chez sa mère, à Philadelphie », lui répond Bird, qui ajoute « Voici mon
pianiste » en désignant… Dizzy Gillespie ! C’est pourtant bien Bud Powell
Teddy reig, producteur de Savoy records, qui est prévu pour cette séance de trois heures calée en ce jour de relâche
passait son temps à rattraper les musiciens du nouveau quintette de Parker, alors à l’affiche du Minton’s de Harlem. Par
qui disparaissaient les uns après les autres… chance, Miles Davis (trompette), Curly Russell (contrebasse) et Max Roach
« mais où est Charlie ?! » (batterie) sont déjà au studio, tandis qu’Herman Lubinsky, le patron de Savoy
Records, patiente en cabine. Lorsque tout le monde est enfin prêt, Dizzy

36 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


chEF-d’œuVRE EN NOiRS ET
PARAdiSiAQuE BlANcS
Tourné à Nice pendant Le 1er novembre, le
l’occupation et sorti à la premier numéro du
Libération, Les Enfants du magazine noir Ebony
paradis, écrit par le poète mettait à la Une un
Jacques Prévert et réalisé par reportage sur des
Marcel Carné, est une vaste vacances offertes à de
fresque de 195 minutes
sur le milieu artistique parisien
jeunes Noirs dans la
campagne du vermont.
NuREMBERG BluES
Le 20 novembre s’ouvre le procès des dirigeants

PhoToS : x/DR
du xIxe siècle. nazis à Nuremberg.

introduit au piano le premier des quatre originaux commandés à Bird, dans les bacs techniques ineptes. »
Billie’s Bounce, un blues composé le matin même et dédié à Billie Mil- Billie’s Bounce et Now’s En 1956, dans les liner
ler, la secrétaire du manager Billy Shaw. Encore fragile, très influencé The Time parurent notes de la première
par son ami et mentor Freddie Webster, Miles grave ses premiers solos respectivement sur édition en LP 30cm
enregistrés. Le plus convaincant ? Celui de la troisième prise, hélas les faces A et B du “The Charlie Parker
78-tours Savoy 573 en Story” (ci-dessous),
écartée à cause de sifflements affectant le saxophone de Bird qui,
février 1946, et Ko-Ko John Mehegan
pour humidifier le tampon fautif, verse de l’eau dans son instrument, discrètement en face B qualifiera le solo de
inondant le sol du studio ! Puis il s’échauffe sur les harmonies de Che- de How High the Moon Miles Davis sur Now’s
rokee. « Take it, take it », crie Lubinsky à l’ingénieur du son. Résultat : de Don Byas deux mois The Time de « lugubre,
Warmin’ Up A Riff, brûlante improvisation d’alto. Puis Bird refait deux plus tard. Thriving From sans idées ni swing ».
© WILLIAM P. GoTTLIEB / LIBRARy oF CoNGRESS

prises de Billie’s Bounce, dont la master take (la prise retenue pour A Riff servit de face B
publication). Les musiciens enchaînent sur un autre blues, Now’s The à Warmin’ Up A Riff en
Time. Trois prises dans la boîte. « Où est passé Dizzy ?! » s’enquiert 1949. Les différentes
Teddy Reig en découvrant qu’un visiteur, Argonne Thornton (futur Sadik prises alternatives
Hakim), s’est s’installé au piano pour l’enregistrement d’Anthropology, (alternate takes) et
démarquage d’I Got Rhythm qui porte alors le titre Thriving From A Riff. même les faux départs
virent le jour au fil
Hélas, l’alto de Bird siffle toujours et, soudain, Reig s’étrangle : « Mais
des années, jusqu’au
où est Bird ?! » Il a filé chez son réparateur ! coffret historique de
cinq LP “The Complete
À son retour, un représentant du syndicat Savoy Studio Sessions” En France
des musiciens a fait son apparition dans le publié par Arista en En mai 1949, dans
studio. Argonne Thornton, qui n’a pas la 1978 et dont les liner l’éphémère Jazz News,
carte, doit laisser le piano à Dizzy, tandis notes dévoilèrent Boris vian écrit : « L’un
que Bird teste son alto réparé sur la grille les dessous de cette des “moments” du
d’Embraceable You, et scelle une improvi- séance. bop, c’est le chorus
sation splendide qui sera publiée tardive-
de Miles Davis dans
Now’s The Time. » Il
ment sous le titre de Meandering. Et Miles ? Aux Etats-unis énumère les qualités de
Introuvable ! S’est-il endormi dans un coin ? Le chroniqueur Miles qui s’y trouvent
S’est-il enfui, effrayé par la difficulté de l’in- anonyme de Billie’s concentrées : « une
troduction que Parker a écrite pour lui sur le Bounce et Now’s relaxation absolument
morceau suivant ? Quoi qu’il en soit, c’est The Time dans le parfaite, […] ça se
Dizzy qui s’attaque à cette diabolique partie
numéro de Down promène comme dans
Beat du 22 avril un sentier fleuri au
de trompette. Mais lorsque Herman Lubinsky
1946 y reconnaît “le mois de mai. […] Un
entend le thème de Cherokee, il interrompt mauvais goût et les
l’orchestre : « C’est quoi ce morceau ? – phrasé ahurissant,
excès” professés par sinueux, coupé de
Euh… Ko-Ko » répond Teddy Reig à l’impro- Dizzy : « Seul, Charlie repos, qui ne vous
viste. Diz et Bird reprennent l’intro, évitent le Parker les sauve surprennent que
thème pour épargner à Lubinsky de payer de la catastrophe pour vous détendre
des droits d’auteur, puis Bird aligne deux quoiqu’il ne soit pas (physiquement) et vous
chorus monumentaux pendant lesquels au meilleur de sa excite du même coup
Thornton, revenu au clavier (!), cède à nouveau sa place à Gillespie, forme, avec une anche (intellectuellement).
jusqu’au solo de Max Roach, imaginé dit-on afin de laisser le temps défectueuse et des […] Une sonorité de
couacs inexcusables. dominicain : un gars
à Diz de récupérer sa trompette à temps pour la coda (!). Vous n’avez
Le trompettiste, un qui reste dans le siècle
pas tout compris ? Rassurez-vous : les meilleurs discographes se
jeune égaré dans cette mais qui regarde ça
chamaillent depuis des lustres pour savoir qui joue quand ! D’autant galère, joue à la Dizzy
plus que, sur les premières éditions 78-tours, le pseudonyme Hen
avec sérénité. […]
qu’il l’idolâtre, comme Enfin, un sens de la
Gates servit à dissimuler Thornton au syndicat et Dizzy, alors sous tous ces gosses qui structure rythmique
contrat chez Guild. Telle fut la première séance de Charlie Parker qui imitent ses fautes plutôt sensationnel. »
ébranla l’histoire du jazz. • et ses acrobaties

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 37


Don Cheadle, alias miles
Davis dans le film qu’il
a porté à bout de bras,
miles Ahead, incarne
le trompettiste à deux
époques de sa vie : dans
les années 1950/1960
(comme sur cette photo),
puis dans les années 1970
(lire en p. 52 le compte
rendu de Pauline Guedj).

le guide

xx
nouveautés rééditions téléchargement livres dvd

Et Vogue Pages 58-59


le coffret
Deux ans après “Jazz On
Vogue”, le voluptueux coffret
choc Jen Shyu & Jade Tongue
Sounds And Cries Of The World
Vol Pour Sidney (Aller)
Vol Pour Sidney (Aller)
“Jazz From America On Disques magazine
Vogue” vient de paraître, qui Michael Wollny Trio Nachtfahrten
contient 41 albums réunis en Tony Bennett & Bill Charlap The
20 cd reflétant l’époque où le Silver Lining : The Songs Of Jerome Kern
label avait passé des accords
Théo Ceccaldi Petite Moutarde
avec des nombreuses firmes Page 43
phonographiques américaines Terri Lyne Carrington The Mosaic
(Blue Note, Dial, Fantasy, Project – Love And Soul
Nous sommes Pacific Jazz…). Livret copieux, Pages 70-71
Pierre de Bethmann
du soleil pochettes originales reproduites
avec grand soin. On en reparle Page 54-55 Trio Essais / Volume 1
Saluons la réédition en très vite ! Andy Emler Megaoctet Obsession 3 Willem Breuker Kollektief
double 33-tours de “Sunrise Angoulême 18 mai 1980
In Different Dimensions” Barry Altschul’s 3 Dom Factor
Tales Of The Unforeseen Arturo O’Farrill & The Afro-Latin
(Hat Art, 1981) du Sun Ra Jazz Orchestra Cuba
Arkestra, dans un emballage Géraldine Laurent At Work The Conversations Continues
reproduisant l’édition originale Joe McPhee / Paal Nilssen Candy
Daniel Erdmann / Samuel Rohrer
des années 1980 : deux Ten Songs About Real Utopia
33-tours qualité audiophile, Erroll Garner The Complete Concert
quatre cartes postales dans Mette Henriette Mette Henriette By The Sea
une pochette en carton,
plus trois morceaux inédits
jamais édités en cd.
En vente exclusivement
sur hathut.com.

“River Silver” les abréviations utilisées dans le Guide


disque d’or ? acc accordéon
afl flûte alto
cello violoncelle
cl clarinette
fl flûte
g guitare
ss saxophone soprano
ssn saxophone sopranino
C’est à Lugano, en Italie, que Michel arr arrangements
as saxophone alto
cla claviers, synthétiseurs
cnt cornet
htb hautbois
hca harmonica
tb trombone
tp trompette
Benita (b) et son groupe Ethics ont b contrebasse comp composition hp harpe ts saxophone ténor
enregistré leur premier disque ECM, bars saxophone baryton cor cor mar marimba tu tuba
bcl clarinette basse dir direction org orgue vib vibraphone
“River Silver”, avec Matthieu Michel bjo banjo dm batterie p piano vln violon
(bu), Eivind Aarset (elg), Mieko bs saxophone basse elb basse électrique perc percussions voc chant
bsn basson elg guitare électrique plt platines vtb trombone à pistons
Miyazaki (koto) et Philippe Garcia (dm). Sous la direction, bien sûr, de btb trombone basse elp piano électrique prod production
Manfred Eicher. Sortie fin janvier. bu bugle elec effets électroniques prog programmation

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 39


le guide sur la platine
le disque qui fait débat

Bernard Lubat
Improvisions
SyLvAIN GRIPoIx

le batteur, multi-instrumentiste, improète et


détrousseur culturel publie son deuxième cd en
piano solo, enregistré dans son fief d’uzeste.
Si les titres ont, comme souvent chez lui, tout
L’avis de l’air de pieds de nez – Question de la poser, En

Andy Emler tendre long temps, S’ôter l’obstacle…, Bernard


lubat risque cependant d’être profondément
“chocqué” par l’avis de nos quatre pigistes.
CHOC Quant à Andy Emler, il lui adresse une petite
lettre de collègue à collègue...
Hello Bernard, Tu me
surprendras toujours,
quel que soit l’instrument
que tu touches, Ce qu’en pensent nos pigistes
et tu nous offres là un
remarquable voyage.
Pascal Philippe Ludovic
Ici ton talent se met au Anquetil Carles Florin
service de la composition
CHOC CHOC CHOC
instantanée, et donc de ton
univers d’improvisateur. Y Ceci n’est pas un disque Dix-sept ans de réflexion D’accord avec
foisonnent la multitude d’idées de piano solo. Pas plus que et diversions après son Pascal Anquetil : c’est
qui te viennent à la seconde et ça n’est pas un album de “Conversatoire”, Lubat un grand disque. Mais
qui, contrairement à ce qu’on jazz. Ceci est une œuvre invente un autre titre-valise j’ai l’impression que ce
pourrait imaginer, donnent picturale de 34 minutes qu’on ne quittera pas des n’est pas celui d’un “vieux
“improvisionnée” sur un oreilles pendant le voyage, briscard de l’impro” – ce qui
une musique qui respire et vit.
instrument à percussions sa conception astucieuse sous sa plume, je le sais, n’a
Quand la technique se met au qui s’appelle le piano en six alvéoles et la densité rien de péjoratif dans le cas
service de la musique, quel par un poète du clavier du contenu évitant tout de Lubat. Il s’agit davantage
que soit le chemin emprunté, imprévisible, naïf et savant. “excédent de bagage”. de celui d’un artisan-
les surprises sont au rendez- Dans cet album vif, court mais Février 1968, seul Français musicien qui ici essarte son
vous, mais les détours imprévus dense,  Bernard Lubat projette interviewé au sommaire d’un art (d’où la durée du cd).
et bifurcations impromptues une musique éminemment Jazzmag “Spécial Vibraphone”, Certains regretteront peut-être
sont assumés avec brio. visuelle, colorée, mieux, il explicitait son admiration qu’il paraisse se prendre au
Toutes ces influences digérées coloriée à la manière d’un Paul pour Cecil Taylor : « cette sérieux, loin de ce qui serait
des musiques passées, les Klee ou d’un Mark Rothko. musique très riche (…) une très ses “habitudes”. Ceux-là
clins d’œil au jazz ou à tel “Cancre de la récitation, nul grande technique, sa façon de n’auront pas saisi que Lubat
thème qui nous interpelle, en conservation”, mais brillant jouer du piano fantastique ». tient la musique pour une
les “grooveries”  inattendues en conversation, le Gascon Depuis, l’Uzestois a affiné- chose sérieuse quel que soit le
magnifique prouve ici qu’il a lubatisé cet art d’improviser, caractère adopté. Quoi qu’il en
(pas assez à mon goût) font aussi –  et c’est tant mieux – de danser, sculpter, d’un soit, il démontre une nouvelle
le bonheur de mes sens. Il y beaucoup de mémoire. Sous bout à l’autre du formidable fois qu’il est de la trempe
a dans cette œuvre un savant ses doigts aiguisés par toute clavier de percussions qui, des Cecil Taylor, Keith Jarrett
dosage entre jeu, dynamiques, une vie de jazz instantané, plus intimement que les (celui des parties les plus
sonorités, contrastes et au fil des ses ivres et libres lames d’un vibraphone, audacieuses du “Carnegie Hall
respirations car oui, j’y reviens, improvisations affleure, toujours permet au musicien de faire Concert”) et autres Joachim
en dépit de cette profusion, ça avec pertinence, tout un flux corps avec son outil, d’où Kühn. Et que, outre certes sa
respire, et crois en un mec qui de réminiscences. Ainsi, par l’impressionnante lisibilité connaissance des classiques,
aime l’air. exemple, dans la première de traits, phrases, rythmes, il défriche de nouvelles voies
plage Question de la poser, jeux de timbres qu’obtient à l’exemple des compositeurs
Andy emler présentera le nouveau programme
“obsession 3” de son Megaoctet les 13 et Lubat glisse en douce d’une en des colliers entremêlés contemporains tels Philippe
14 novembre aux Lilas (Le Triton) et joue en duo estampe de Debussy à un de collisions notre toujours Manoury ou Samuel Sighicelli.
avec Thomas de Pourquery le 4 à Guérande, sacré printemps du père Igor aussi époustouflant « soixante Un album destiné à devenir un
le 17 à Changé, le 22 décembre à Paris (Petit
Journal Montparnasse). pour finir par un tour de valse disant ». Rarement le terme classique parce qu’il gomme
avec Ravel. Et le tout avec la CHOC avait aussi littéralement les frontières du champ
maestria d’un vieux briscard collé. • jazzistique et de la musique de
de l’impro qui a su garder son tradition écrite. J’adore ! •
âme d’enfant. •

40 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


playlist 10 morceaux qui tournent
sur les platines de la rédaction

Improvisions Eric Le Lann Life on mars


1 CD Cristal / harmonia Mundi
Avec Paul lay au piano, Sylvain Romano et le batteur qui monte,
donald Kontomanou, l’immense trompettiste nous prouve qu’il y a
Bernard Lubat (piano). uzeste, bien de la vie sur Mars. Si Bowie écoute ça, il va adorer, comme nous.
hiver et printemps 2014-2015. Où ça ? “Life on Mars” (Moods recordings, sortie le 13/11)

Brad Mehldau Smells Like Teen Spirit


le lann est sur Mars, mais si Kurt cobain revenait sur Terre,
il en aurait le souffle coupé : un pianiste de jazz, un vrai,
un tatoué, qui joue en solo l’hymne du grunge ! Allez savoir,

xDR
peut-être verserait-il une larme…
Où ça ? “10 Years Solo Live” (nonesuch, sortie le 13/11)

Count Basie The Kid From red bank


l’année d’“Atomic Basie”, l’enfant de Red Bank joue à l’Olympia devant les micros d’Europe 1, et
rarement avaient-ils “touché” de si près le cœur battant de la machine Basie, entre piano, guitare,
contrebasse et pied de grosse caisse. Plus les grognements de plaisir du chef et de ses hommes !
Où ça ? “Live in Paris, 1957-1962” (Frémeaux / Socadisc)

Olivier Louvel Sonic blue


Vous aimez les power trios façon Wayne Krantz ou Oz Noy ? Avec Gilles cocquard (elb) et Nicolas
Robert Viccaro (dm), ce guitariste à la riche palette sonique nous en fait voir de toutes les couleurs.
Latxague Où ça ? “Tangerine Sparkle” (Gemini records / La Baleine, sortie le 13/11)

CHOC John Taylor And Think Again


Dans Improvisions Lubat fait Extrait du tout premier disque de ce regretté pianiste anglais, “Pause,
du Lubat. Ni plus ni moins. And Think Again”, bijou post-bop (on songe à “Maiden Voyage”
Il pousse l’escarpolette d’herbie hancock) d’un coffret dont on vous parlera dans le prochain
de l’improvisation à sa Jazz Magazine...
guise, défrichant à pleines Où ça ? “Turtle records - Pioneering British Jazz 1970-1971” (rPM)
mains dans le clavier les
espaces où l’amène son Kenny Wheeler – John Taylor
vagabondage. A Flower Is A Lovesome Thing
Total joueur, il livre sa musique Après le John Taylor des débuts, celui de la fin. Pas tout à fait, on est en 2005, mais c’est
dans un double geste de lâcher quasiment le bout de la route pour le tandem de sa vie avec Kenny Wheeler. la continuité est
prise et d’attaque, volubile et parfaite entre leurs partitions et ce thème de Billy Strayhorn qui leur va comme un gant.
malin. En matière de rythmes Où ça ? “on The Way To Two” (CamJazz / Harmonia Mundi)
(batteur de métier, il n’a rien
à prouver dans ce domaine) Shauli Einav Quartet Tao main
autant que d’harmonies, il ne il faudra attendre encore un peu pour acquérir le quatrième disque de ce saxophoniste qui semble
craint pas grand monde. Ce pleinement s’épanouir aux côtés de Gautier Garrigue, Florent Nisse et Paul lay. comme sur le
qui a le don d’en énerver plus nouveau disque de Géraldine laurent (choc dans ces pages), ce dernier crève l’écran.
d’un. En pur provocateur, il en Où ça ? “Beam Me up” (Berthold records à paraîre le 24 janvier 2016)
tire jouissance, construisant
et déconstruisant seul, un Mark Guiliana Jazz Quartet 1980
piano entre les oreilles. « Tout Mark Guiliana n’est pas seulement un expert ès-polyrythmies
le monde parle d’impro. Sauf futuristes : c’est aussi un leader, et son Jazz Quartet fait
qu’en la matière beaucoup font souffler un air frais sur la tradition acoustique. Avec Shai
semblant. » Lui, qui souvent Maestro au piano.
théorise, ici se jette à l’eau. Où ça ? “Family First - The Alternate Takes” (markguiliana.com)
Il évoque Martial Solal, Cecil
Taylor, Ahmad Jamal mais Lionel Loueke Sleepless night
aussi Ligetti et Berio. Il tutoie Mark Guiliana une nuit fièvreuse de polyrythmies fauves enracinées dans
xDR

Maurice Vander, René Urtreger, l’Ouest africain où lionel loueke renoue avec ses copains de la
Eddy Louiss et sans doute Berklee, Massimo Biolcati (b) et Ferenc Nemeth (dm) avec
Thelonious Monk pour l’art du qui il avait fait ses débuts sur Blue Note.
silence. Lubat faiseur ? C’est Où ça ? “Gaia” (Blue note / universal)
comme ça qu’on l’aime. •
Act Unforeseeable
Ben Wendel ne fait pas l’unanimité dans notre équipe. il est bien possible que ce trio brut de
décoffrage avec harish Raghavan (b) et Nate Wood (dm) réconcilie les uns avec le saxophoniste
de Kneebody, quitte à défriser les autres (qui ne bouderont pas nécessairement leur sort).
Où ça ? “ii” (autoproduction / CD Baby)

Novembre 2015 Numéro


Novembre 2015 Numéro 678
678 Jazz
Jazz Magazine
Magazine 41
le guide

FOcuS

onze heures onze musique à un modèle, du point de du trompettiste, dont il supervisa


ce collectif parisien gravite autour vue de l’artiste comme de celui plusieurs rééditions d’albums, le
d’un noyau dur à géométrie variable. de l’auditeur. Puisque c’est ici saxophoniste et compositeur Bob
Sergio Leone qui inspire les solos Belden, disparu en mai dernier,
deux nouveaux cd en témoignent. de Bruno Angelini à partir d’Il était a voué le projet Animation à
une fois la Révolution et Le Bon, la l’exploration des riches pistes
Avec “Silent Form” [✪✪✪✪], le trompettiste brute et le truand, il faut chercher créatives esquissées par Davis
olivier Laisney signe le quatrième album les clés d’écoute au-delà de la dans les seventies, jusqu’à
de Slugged – Adrien Sanchez (ts), Stephan musique de Morricone, dans le proposer une relecture de
The Amazing caracci (vb), Joachim Govin (b), Thibault souffle historique, la caractérisation “Bitches Brew” avec “Agemo”,
Keystone Big Band Pierrard (dm) – et creuse un sillon toujours des personnages ou la matière paru en 2011. Sur le présent
Le Carnaval jazz des animaux plus fécond. S’il revendique l’influence de sonore inépuisable des films eux- album, chaque membre du groupe
1 CD Nome / L’Autre Distribution Steve coleman et dave holland, je me suis mêmes. on comprend mieux alors apporte sa pierre à l’échafaudage
déjà plu à évoquer à son le projet du pianiste de « partir de cosmique. Bill Laswell mallée le
Nouveauté. Ce jeune (et déjà) la musique et de la transformer, temps à sa guise, via quelque
grand orchestre a conquis un
propos Booker little et Bobby
hutcherson, persistant, peut- la combiner, l’interpréter au gré sortilège hérité des chamanes
public large, en disque et sur de [son] ressenti des différentes qu’il fréquente aux quatre coins
scène, avec Pierre et le Loup… être pas si sottement que
parties des films évoqués. » Alors du globe. Kurt Elling endosse
et le jazz. Deux ans plus tard, il ça, à les distinguer ainsi sur que la musique apparaît de façon quant à lui le rôle de narrateur,
approfondit son travail d’adaptation des terrains désormais très discontinue et toujours ciblée énonçant sans affèterie des
de la musique classique, passant rebattus. les compositions dans les films, on est frappé par fragments de texte au contenu
de Prokofiev à Saint-Saëns et son de laisney (ainsi que celle prêtée par un continuum inextricable où spéculatif. Etrangement, le leader
fameux Carnaval des animaux Stéphane Payen et celles cosignées par viennent s’entrecroiser les (leit) se montre très discret, presque
(1886). La fantaisie animalière, Thibault Pierrard) sont, par leurs dédales et motivs, pas nets et ciselés, mais absent de sa propre session ; ses
où chacun des personnages recoins, d’un charme mystérieux et d’une dans une sorte de flou où nos interventions relèvent davantage
(lion, tortue, éléphant, kangourou, élégance mélodique que ne démentent aucun souvenirs semblent les convoquer. de la transmission holographique
hémione et toute la basse-cour) des solistes, pas même les deux invités de Réharmonisations flottantes, que de la véritable incarnation.
est incarné par un instrument passage, l’altiste Elie dalibert et le guitariste longues phases étales, trémolos Comme s’il s’était déjà envolé,
distinct, bénéficie d’un traitement emphatiques ou dégradés avec prémonition, vers d’autres
Nelson Veras, très à son avantage. laisney
libre et encyclopédique. Toutes chromatiques sont quelques sphères. • DAViD CriSToL
les couleurs du jazz se retrouvent est à son tour, avec Magic Malik (fl), l’invité
d’“Audiometry”, disque que signe Alexandre outils de ce « travail de mémoire » Bob Belden (sax, fl), Pete Clagett
dans cette suite bâtie sur un psychologique et musicale, (tp), roberto Verastegui (cla), Bill
récit raconté avec vivacité par herer (p, elp). Son trio – Olivier Laswell (elb), Matt Young (dm),
qui restituent la temporalité si
Edouard Baer (évoquant par degabriele (elb, b), Thibaut ouvragée des films, eux-mêmes kurt elling (voc). orange Studios,
instant le ton de Gérard Philipe). Brandalise (dm) – a désormais new Jersey, automne 2014.
truffés de flashbacks (tels les
Une (ré)création appelée à plaire absorbé deux autres invités douloureux souvenirs irlandais
aux jeunes auditeurs et à les réguliers depuis quelques de John dans Giu La Testa). on
familiariser, dans l’allégresse, avec temps, Stéphane Payen (as) en oublie presque les références
le jazz (bonne idée de cadeau pour et Julien Pontvianne (ts, cl). strictement pianistiques qui
les anniversaires !). Quant aux une évidence où se rejoignent le goût des ont façonné la sensibilité et le
amateurs avertis, ils auront aussi pratiques polymétriques de l’un (d’où pièces beau toucher de Bruno Angelini,
plaisir à entendre dans cet exercice titrées Metric numérotées de 1 à 6) et la parfaitement rendus par la
de style quelques-uns des brillants captation de Gérard de Haro. •
propension de l’autre à arrêter le temps pour
talents de la jeune génération des VinCenT CoTro
explorer l’épaisseur harmonique du son. un
jazzmen de l’Hexagone. • JeAn-
disque sombre qu’enchante littéralement Bruno Angelini (p, Fender rhodes, Louis Armstrong
LouiS LeMArCHAnD
l’intervention conjointe de laisney et Malik
perc). Pernes-les-Fontaines, Studio Live in Paris, 24 avril 1962
Vincent Labarre, Thierry Seneau, La Buissonne, 14 novembre 2014.
Félicien Bouchot (tp, bu), David enhco sur Audiometry. • FrAnCk BerGeroT 1 CD Frémeaux & Associés / Socadisc
(tp, bu, comp, arr), Bastien Ballaz (tb, ✪✪✪✪
comp, arr), Loïc Bachevillier, Aloïs onze Heure onze / http://onzeheuresonze.com
Benoit (tb), Sylvain Thomas (btb, tu), inédit. Si l’on veut, car, de concert
Ghyslain regard (fl, piccolo), kenny en concert et depuis des années,
Jeanney (as, ss), Pierre Desassis Louis Armstrong chantait et jouait
(as, cl), Jon Boutellier (ts, comp,
arr), eric Prost (ts), Jean-Philippe
Scali (bars,bcl), Thibaut François (g),
NEWS le même répertoire. Ça n’en
est pas moins croustillant à se
Frédéric nardin (p, cla, comp, arr), mettre sous la dent surtout pour
Patrick Maradan (b, elb), romain Produit par Peter Erskine et moi qui ait toujours négligé cet
Sarron (dm), inor Sotolongo (perc).
Conte de Taï-Marc Le Thanh récité par Tony Zawinul, le fils de Joe, Animation Armstrong-là. En 1962, j’étais
en âge d’utiliser l’électrophone-
edouard Baer. Paris, Studio Ferber, du “The Legendary Live Tapes : 1978- Machine Language
16 au 19 février 2015. 1981” de Weather Report sortira valise Supertone de mes parents
1 CD Rare Noise Records / rarenoiserecords.com et j’avais surement déjà dans
au Japon le 25 novembre • hubert
de Bonustrac nous a fait parvenir Nouveauté. “Les androïdes l’oreille les faces du hot Five
Bruno Angelini cette petite annonce : « Cherche mach. à écrire mécan. rêvent-ils de moutons des années 1920 réunies par
Leone Alone électriques?” Telle est la question Boris vian sur 25 cm dans la
pour liaison durable avec chroniqueur réputé. Etat
que se pose cet album, à l’instar collection Jazz pour tous. Il m’a
1 CD Illusions Music / illusionsmusic.fr neuf garanti ? Clavier cyrillique s’abstenir. » Ecrire à de l’écrivain de science-fiction fallu ensuite des années pour
✪✪✪✪ la rédaction, qui transmettra • le bassiste Jeff Berlin Philip K. Dick voici un demi- faire le lien entre cet Armstrong-là
Nouveauté. Ce vient de lancer une campagne de souscription sur siècle. Ces préoccupations et celui d’après-guerre. Je reste
disque pose mieux pledgemusic.com pour son prochain disque dystopiques fusionnent ici avec d’ailleurs convaincu que l’on
que d’autres la en hommage à Jack Bruce, “Songs For A Wailer”. les tableaux électro-exotiques ne peut entendre l’un et l’autre
question des Ginger Baker, dennis chambers (dm) et Allan nés de la cuisse de Miles Davis de la même façon, et que les
relations de la holdsworth (elg), entre autres, doivent y participer • entre 1969 et 1975. Spécialiste priorités ne sont pas les mêmes.

42 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


Quel bonheur cependant que
d’entendre Louis projeter sa FOcuS
musique sous les cintres et vers
le balcon de l’olympia (la prise de

Jazz & soul


son d’Europe 1 nous fait entendre
cet espace et cette projection),
que ce soit pour jouer, chanter ou
interpeler le public. Car si tout nous
est ici livré, intermèdes compris,
on ne s’en plaindra pas, tant Louis Eric Bibb & lizz Wright, Terri lyne carrington et Kellylee Evans
est également showman. Cerise J.J. Milteau swinguent naturellement entre jazz et soul. Elles viennent
sur le gâteau, le délicieux When I Lead Belly’s Gold chacune de publier leur nouvel album. impressions.
Grow Too Old To Dream d’oscar 1 CD Dixiefrog / harmonia Mundi
hammerstein accordé à Billy Kyle J’ai toujours aimé ce voile pudique qui enveloppe
(l’idole de Bud Powell), d’ailleurs Nouveauté. Lead Belly, barde la voix diaphane de Lizz Wright, et comme
enthousiasmant tout au long du sans peur au répertoire sans cette fois le grand producteur larry Klein est
concert. • FrAnCk BerGeroT bornes, prisonnier gracié par
derrière les manettes (l’ex-mari de la géniale
Louis Armstrong (tp, voc), Trummy des gouverneurs du Sud mais
assez fier pour dépeindre Joni Mitchell a notamment supervisé le dernier
Young (tb, voc), Joe Darensbourg
(cl), Billy kyle (p), Bill Cronk (b), ensuite la discrimination raciale Melody Gardot), elle est mieux que jamais mise
Danny Barcelona (dm), Jewel pratiquée à Washington, a été en valeur. Son duo avec l’incontournable Gregory
Brown (voc sur 1 titre). Paris, Porter rappelle – toutes proportions gardées ! –
olympia, 24 avril 1962. l’un des modernisateurs du folk
américain avec Woody Guthrie ceux de Roberta Flack et de donny hathaway. Sa
et leur disciple commun, le version de River Man ne nous fera pas oublier
New-yorkais Pete Seeger. Le l’originale (Nick drake mes amis, Nick drake), ni celle d’Andy Bey. Mais
legs artistique de Lead Belly a “Freedom & Surrender” (1) trouve in fine un juste équilibre entre reprises
suscité toutes sortes d’emprunts, (bien) choisies et quelques chansons originales, frissonnantes d’émotion
mais il est des hommages plus (Here And Now, où sa voix se mêle sensuellement au son d’un Fender
sincères que d’autres, comme Rhodes lunaire) ou volontiers funky-gospellisantes (Freedom, un petit
celui que rendent Eric Bibb classique instantané).
et Jean-Jacques Milteau à
l’étonnant songster louisianais.
Kenny Barron Le chanteur-guitariste américain
On retrouve lizz Wright au casting de “The
At The Piano et l’harmoniciste français savent Mosaic Project - Love And Soul” [choc] de la
que ses grands thèmes gardent batteure (et chanteuse) Terri Lyne carrington,
1 CD Elemental Records / harmonia Mundi
leur pertinence et le montrent ainsi que Natalie cole (la fille de), lalah hathaway
✪✪✪✪ (l’autre fille de), chaka Khan (très inspirée),
avec force et sobriété dans Grey
Réédition. Dix ans plus tard, Kenny Goose – l’oie qui survit à toutes Nancy Wilson (rassurez-moi, vous connaissez
Barron allait atteindre l’Everest les épreuves, comme Lead Belly son disque avec cannonball Adderley ?), Oleta
de la renommée avec Stan Getz lui-même -, le très poétique Adams (découverte par le duo pop Tears For
dans “People Time”. En ce début Midnight Special ou l’énergique Fears), Valerie Simpson (grande figure de Motown
d’année 81, le pianiste était déjà Rock Island Line. hormis les dans les années 1960/70), Paula cole, ledisi et
au zénith de l’expression quand il passages où son phrasé tourne Jaguar Wright. ce concept album au féminin
enregistre pour le producteur Don au growl, Bibb chante avec plus servi par d’excellentes sidewomen (Patrice Rushen, Geri Allen, Meshell
Schlitten et le label xanadu ce de douceur que Lead Belly, ténor
premier album en solo. Dès l’entrée Ndegeocello, ingrid Jensen, linda Oh...) oscille également entre reprises
fervent qui s’aventurait dans un
en matière, Barron (38 ans alors) (Come Sunday, When I Found You...) et chansons originales, les meilleures
registre de baryton, mais il adopte
salue une de ses idoles, Bud Powell son esprit tonique et y introduit
jamais écrites par “Tlc” (prononcez “Tihelci”). Mais la production est
avec Bud-Like, sur un tempo à une élégance toute personnelle nettement plus stylée que celle de “Freedom & Surrender”, et la variété
donner le tournis. Rêveur dans The que l’on retrouve dans son jeu des approches donne à cette mosaïque de voix des airs de fresque “en
Star Crossed Lovers (Strayhorn- de guitare(s). Milteau, lui, joue chanté”. On savait Tlc grande batteuse, la voilà définitivement sacrée
Ellington), respectueux dans d’une impressionnante palette super productrice.
deux titres de Monk (Misterioso, de nuances selon le climat,
Rhythm-A-Ning), poétique dans le rythme et le thème (çà et Kellylee Evans aurait tout à fait eu sa place dans
Body And Soul, dansant sur là, son harmonica fait penser le Projet Mosaïque de Tlc. Mais elle a bien raison
Calypso et lumineux dans une à l’accordéon cajun auquel d’affirmer son style dans “come on” [✪✪✪✪]. là
autre de ses compositions, le s’était initié Lead Belly). Le encore, outre une profondeur de chant toujours
sommet de l’album, Enchanted fameux Bourgeois Blues, où un plus affirmée, ce qui fait la différence est encore
Flower. Le pianiste de Philadelphie excellent solo de Milteau rappelle
se montre sélectif à souhait, lui
une fois la mise en son, signée Eric legnini, le
fugacement Sonny Terry, est l’un claviériste le plus soulful du plat pays qui est le
qui nous avait confié écouter des meilleurs moments du disque
toutes les musiques sauf la sien. il cosigne également avec la chanteuse les
avec le rapide et léger Chauffeur
country. Et il en donne une ultime Blues, écrit par Bibb. •
dix chansons du disque. Pétillant d’idées, riche
démonstration dans un bonus de PHiLiPPe BAS-rABérin
en tubes FM potentiels (Come On, I Do, Hands
cette réédition, un bon vieux blues eric Bibb (voc, g, bjo), J.J. Milteau
Up, Know His Worth...), entre soul vintage et R&B nouveau siècle, “come
des familles, Wazuri Blues. Un (hca), Gilles Michel (b), Larry On” aurait très bien pu paraître sur Motown sans que personne ne s’en
récital superbement enregistré et Crockett (dm, perc), Big Daddy offusque. Et on se dit que sur scène la Miss en fera certainement miroiter
fortement recommandé. • JeAn- Wilson, Michael robinson (voc)
+ Glen Scott (dm, b, wurlitzer), les plus beaux atours. Recommandé. • JuLieTTe BArneL
LouiS LeMArCHAnD Michael Jerome Brown (g, mdl).
kenny Barron (p). new York, rCA Paris, 11 titres en public au Sunset (1) Concord Records / Universal). (2) Concord Records / Socadisc. (3) Decca Records /
Studio C, 13 février 1981. et 5 en studio, printemps 2015. Universal.

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 43


le guide
GROS PlAN

Didier ithursarry

JEAN-BAPTISTE MILLoT
Blue Buddha olivier Bogé
Blue Buddha expanded Places depuis une quinzaine d’années, cet accordéoniste basque a pris
1 CD Tzadik / orkhestra 1 CD Naïve / Naïve lentement mais sûrement ses aises dans le paysage musical
✪✪✪✪ Nouveauté. Après deux disques hexagonal. Son nouveau cd vient de paraître.
Nouveauté. Comme cela en leader, où les pianistes furent
respectivement Tony Paeleman et didier ithursarry, Bayonnais génération de son aveu, “Kantus” [lire la chronique
arrive parfois, c’est le musicien
Tigran hamasyan, le saxophoniste 1970, est monté à Paris voici vingt ans. p. 50] est son « premier disque abouti
le moins connu qui est ici le
olivier Bogé franchit le pas et dans le parcours de l’accordéoniste, en tant que leader ». Enregistré en
leader : saxophoniste ténor aux
retrouve le piano (qui lui valut le jazz n’est venu que dans un second quartette, formule classique s’il en
solides racines ayleriennes, Louie un diplôme au conservatoire).
Belogenis n’est toutefois pas le temps. il avouerait même, au passage, est mais qui, avec l’apport d’un autre
Grâce au re-recording, il assure un léger complexe pour n’avoir « ni soliste – le saxophoniste Jean charles
premier venu, puisqu’il a collaboré aussi les parties de saxophone
avec, notamment, des figures fréquenté d’école, ni appris les codes Richard – donne à sa musique « plus
et de guitare et signe l’intégralité de relief, une richesse de timbres et un
d’avant-garde comme Sunny des morceaux. Précisons enfin et les standards du genre ». En le
Murray ou Borah Bergman. Sur qu’il est accompagné par les choisissant pour son Onj version 2000, champ élargi pour l’improvisation ». les
la suggestion de son ami John brillants et inventifs Nicolas claude Barthélémy est devenu son thèmes sonnent comme des chansons.
Zorn, il a réuni pour cette séance Moreaux, contrebassiste, et Karl premier mentor. d’abord passionné Y résonnent « son monde naturel »,
un all-star singulier et éclectique Jannuska, batteur. Dès le premier par les mélodies et les rythmes made celui de la musique de ses origines
(qu’on devine éphémère…), (et meilleur) titre, Red Petals in Brazil – hermeto Pascoal, Milton basques, « façonnée par la transmission
constitué de la trompette affûtée Disorder, on reconnaît le style de Nascimento – il va chercher ses orale et métamorphosée par mes
de Dave Douglas, de la basse Bogé, qui propose, à travers de premiers émois jazz du côté de Pat premiers boulots d’accordéoniste,
subaquatique de Bill Laswell longs instrumentaux répétitifs,
Metheny, Bill Evans, John coltrane et quand j’accompagnais Clarika ou
et de la batterie puissante et un univers de chanson pop sans François Béranger ». À venir, pour celui
paroles, où priment la mélodie et Sylvain luc (un “pays”). la pratique des
insaisissable de Tyshawn Sorey.
musiques improvisées, « ce fabuleux qui n’aime rien tant que « multiplier
Entièrement improvisée par les un lyrisme à fleur de peau. Malgré les expériences » et « côtoyer de
quatre musiciens, la musique se une incontestable sincérité et un terrain de jeu », l’ont fait sortir de son
nouveaux musiciens » : un disque avec
révèle remarquablement maîtrisée jeu collectif attrayant, dominé carcan. Entrer dans cet univers lui a
le chanteur basque Kristof hiriart, une
et équilibrée : autour du point par la palette foisonnante et permis de croiser les routes de Jean-
colorée de Jannuska, la structure
création au sein de danzas, l’orchestre
d’ancrage défini par la basse Marie Machado, christophe Monniot,
avare de chorus, l’atmosphère, de Jean-Marie Machado, l’écriture
électrique, dont la sonorité ample Alban darche et Ramon lopez. Rien ne
le tempo des différents titres d’un concerto pour accordéon pour
confère de l’espace et de la lui paraît acquis pour autant : « Je peux l’Orchestre Symphonique de Bretagne,
se ressemblent tant que l’ennui désormais choisir avec qui je joue. Mais
profondeur de champ, saxophone en collaboration avec le compositeur
finit par s’imposer. Soit la Bo
et trompette entrelacent leurs
d’un film imaginaire qui reste à
la difficulté pour un musicien de jazz Guillaume St James. • roBerT LATxAGue
lignes sans s’interdire la inventer pour nous captiver, ou un français, avant même d’être reconnu,
consonance, stimulés par le c’est d’être entendu ! On m’appelle CD “Kantuz” (Lagun Arte Productions /
charmant répertoire de chansons L’Autre Distribution).
drumming foisonnant et pertinent auquel il manquerait des paroles aujourd’hui pour ma personnalité,
de Sorey. Tranchant avec le reste et un(e) bon(ne) interprète. • ma musicalité. » Sous-entendu : ConCert Duo avec Jean-Luc “oboman”
de l’album, deux plages en duo LioneL eSkenAzi. pas seulement parce qu’il joue de Fillon le 20 novembre à Brest (espace
ténor-batterie renouent avec une olivier Bogé (p, sax, g, elp), nicolas l’accordéon… Sa référence ? Marcel roz-Valan). Jean-Marie Machado avec Danzas
intensité plus proche du free, Moreaux (b), karl Jannuska (dm) le 3 novembre à niort (Moulin du roc)
+ Manon Ponsot (cello), Guillaume
Azzola, « pour son swing, son punch, sa et en duo le 4 décembre au Perreux-sur-Marne
dans la tradition de l’“Inserstellar
Bégni (cor). Poitiers, Studio des constante musicalité. » (Centre des Bords de Marne)
Space” de John Coltrane et Bruères, et Paris, Swome, juillet et
Rashied Ali. Une référence qui septembre 2014.
n’est pas gratuite, puisque
Louie Belogensis a précisément
enregistré en 1997 un duo avec
ce même Rashied Ali  (“Rings NEWS
of Saturn”, Knitting Factory) ! •
PASCAL rozAT
henri Texier (b) a enregistré son nouveau disque avec Armel dupas, (p), François corneloup
Louie Belogenis (ts), Dave Douglas
(tp), Bill Laswell (elb), Tyshawn (bs), Sébastien Texier (as, cl), louis Moutin (dm) et Nguyên lê (elg, elb). Sortie du cd fin
Sorey (dm). 27 février 2015. janvier sur Label Bleu, précédée d’un concert le 9 novembre au New Morning (Paris) •
la parution de “children of The Light” du trio Pérez / Patitucci / Blade (récompensé
Ron carter And The d’un choc dans notre précédent numéro) a été décalée d’un mois : il n’est donc pas sorti
WDR Big Band le 18 septembre mais le 19 octobre... • L’excellent label Music Box Records (musicbox-
My Personnal Songbook records.com) continue d’enrichir son vaste catalogue de BO rares et inédites en cd, dont
1 CD/DvD In+out Records / orkhêstra celles composées par claude Bolling. L’année sainte (1976) et Le mille-pattes fait des
Nouveauté. Ron Carter n’est claquettes (1977), réunies sur un seul disque, et Try This For One Size (1989, avec dee dee
pas spécialement connu comme Bridgewater) viennent de paraître •
un fort en thèmes à la manière

44 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


jazz mag92x252:Mise en page 1 02/10/15 16:11 Page1

d’un Shorter ou d’un Golson. ne compose pas, mais qu’elle


Seule sa Little Waltz, écrite en choisit avec discernement.
1960, semble s’être imposée Depuis quelques années, elle

473 841-5
comme un standard du jazz s’en remet aux histoires très
moderne. Le producteur Lucas imagées que lui concoctent
Schmid a demandé à ce maître ses producteurs John hahn et
des élégances fondamentales oliver Wood. Ces compositions
de choisir dans ses cartons dix constituent le meilleur de
compositions de sa plume afin l’album avec l’immanquable – et
que l’arrangeur Rich DeRosa attendue – reprise de son père,
puisse les habiller dans l’écrin ici Devil’s Hand. Rassemblés dans
fin et rutilant d’un big band, à la première moitié du disque,
savoir le grand orchestre de la ces pièces marquées au coin
radio de Cologne WDR dans d’un blues contemporain qui
lequel s’illustrent d’excellents emprunte parfois au rock groovy,
solistes comme John Marshall mais aussi à la soul sudiste ou
(tp), Johan hörlen (as), Paul à la country, témoignent d’une
heller (ts), Ludwig Nuss (tb) et flamme intacte. De nombreux

Déjà disponible
le pianiste Frank Chastenier. Soit guitaristes ont été sollicités et ils
de la bien belle ouvrage, et en marquent de leur sensibilité une
bonus un DvD, avec sept titres au douzaine de nuances de bleu.
menu, film en forme de making Même si la seconde partie se
of tourné lors de l’ultime séance. perd dans quelques reprises plus Le grand retour du John Scofield Quartet avec Bill Stewart (batterie),
Jazz de luxe, swing et volupté, la convenues, empruntées à ZZ Top, Larry Grenadier (contrebasse) et Joe Lovano (saxophone ténor)
musique dessinée ici avec goût Creedence Clearwater ou Albert

473 590-8
et délicatesse par DeRosa reste King, il se termine en beauté avec
pour être honnête trop polie, trop une composition de Jessie Mae
prévisible pour susciter la surprise. hemphill qui exsude une moiteur
Néanmoins, en célébrant dans toute sudiste. • JACQueS Périn
Sheila’s Song le “flamenco mood”, Shemekia Copeland (voc), oliver
l’arrangeur américain évite avec Wood (g), Lex Price (b), Jano rix
habilité le piège de l’espagnolade (dm, kb); invités : Billy Gibbons
(g), Alvin Youngblood Hart (voc,
et du pastiche gilevansien de g), robert randolph (steel g) +
“Sketches of Spain”. Mention additional musicians. nashville.
bien ! • PASCAL AnQueTiL
ron Carter (b), Frank Chastenier
(p), Paul Shigihara (g), Hans Dekker
(dm) + WrD Big Band dirigé par
rich Derosa (arr). Cologne, WDr

Disponible en CD et digital
Studio, du 1er au 4 juillet 2014.

Laurent coulondre
Trio Attention nouveau talent ! Le pianiste de la Nouvelle Orléans
Schizophrenia découvert aux côtés de Roy Hargrove ou Christian Scott présente
1 CD Soundsurveyor / L’Autre Distribution un premier album impressionnant de maîtrise et de sensibilité

Shemekia RéVélATiON !
Concerts impulse!
copeland A 26 ans, Laurent Coulondre a
outskirts of Love déjà tout gagné. Elu “Génération Sarah McKenzie
Spedidam”, nommé “Talent Duc des Lombards (Paris), 8-10 octobre
1 CD Alligator / Socadisc Adami”, vainqueur de nombreux
Nouveauté. Lorsque les obama concours nationaux, il avance à Sullivan Fortner
invitèrent le blues à la Maison- grands pas et a déjà participé Jazz en Tête (Clermont-Ferrand), 23 octobre
Blanche en 2012, ils ne purent en tant que sideman à plus Jazz Sur Son 31 (Toulouse), 24 octobre
faire moins que de convier d’une dizaine d’albums. Il faut Duc des Lombards (Paris), 26-27 octobre
Buddy Guy et B.B. King associés dire qu’il ajoute à son talent de
à une brochette de musiciens pianiste celui d’organiste, ce qui Snarky Puppy
plus jeunes dont Shemekia explique sans doute le titre de La Cigale (Paris), 8 novembre
Copeland, seule Afro-Américaine cet album où il s’exprime avec Indra Rios-Moore
du lot. Choix judicieux : la fille de autant d’aisance sur les deux
Divan du monde (Paris), 9 novembre
Johnny Copeland s’est imposée claviers. Dans les deux cas il fait
dès son premier album par preuve d’un sens rythmique et
un tempérament bien trempé,
combinant aplomb et émotion.
harmonique propre aux meilleurs www.impulse-label.com
et d’une inventivité qui lui fait
Dix-sept ans et sept albums plus aimer les métriques impaires, Rejoignez @impulselabel
tard, à 35 ans, elle fait toujours les ruptures de rythmes et The impulse!
preuve du même engagement l’exploration de la totalité de son Renaissance
au service d’un matériel qu’elle instrument. Mais au-delà de ses

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 45


le guide

MON
diSQuE
A MOi
de virtuosité et musicalité, c’est magazine
thématique, que sur ceux disque sans faiblesses, on note
son sens du groove qui frappe improvisationnel et structurel. En une version particulièrement
d’emblée, particulièrement à tant que guitariste, on est tenté de réussie de Georgia On My Mind. •
l’orgue hammond où son attaque Chaque mois, un membre de la rédaction placer Scott DuBois entre Jakob PHiLiPPe BAS-rABérin
de la note fait mouche à chaque choisit dans sa discothèque un grand Bro (cf. JM n° 671), Bill Frisell et Teddy edwards (ts), Conte Candoli
fois. Tout cela ne serait possible Kurt Rosenwinkel. Comme eux, un tp), Dolo Coker (p), ray Brown (b),
classique, un trésor oublié ou un disque Frank Butler (dm), Jerry Steinholz
sans une grande complicité avec artiste tenté par l’absolu. •
ses deux excellents partenaires,
injustement méconnu. (perc). Los Angeles, 25 mars 1974. 
LuDoViC FLorin
et c’est à un véritable orchestre Gebhard ullman (ts, bcl), Scott
tricéphale que nous avons affaire
ici. Ce concept de double trio John DuBois (elg), Thomas Morgan (b),
kresten osgood (dm). Copenhague,
The Village, 29 janvier 2015.
Liberty Ellman
Abercrombie
orgue et piano permet en outre radiate
une palette sonore élargie où vient 1 CD Pi Recordings / orkhêstra
aussi se nicher une utilisation
parcimonieuse de l’électricité,
ajoutant d’autres couleurs à
currents Events ✪✪✪✪
Nouveauté.
l’ensemble sans dénaturer le EcM - 1985 « Chaque
propos musical acoustique. Déjà musicien [que
un grand disque ! • c’est au légendaire j’ai pu influencer]
PHiLiPPe VinCenT Rainbow Studio a ainsi décliné
Laurent Coulondre (p, org), d’Oslo que fut à partir de sa
rémi Bouyssière (b, elb), Martin
Wangermée (dm). Vannes, Moods
enregistré, en Teddy Edwards personnalité des éléments de
septembre 1985, Feelin’s vocabulaire qui me sont propres
Studios, décembre 2014. pour en faire des outils de langage
cet album du 1 CD Elemental / harmonia Mundi
guitariste John qui, aujourd’hui, ne sont plus
Nouveauté. Célébré par pour certains que lointainement
Abercrombie
ses pairs, Teddy Edwards reliés à ma musique. » Ce que
pour le label (1924-2003) n’a pas connu Steve Coleman déclarait à Jazz
EcM, auquel la renommée qu’appelait sa Magazine en septembre dernier
il avait déjà offert quelques classiques stature musicale, faute (dit-on) s’applique assez bien à l’œuvre
inoxydables – “Timeless”, en 1974, avec d’avoir volontiers quitté des yeux du guitariste Liberty Ellman, car si
Jan hammer et Jack deJohnette, ou encore la Californie où s’était épanoui la pièce inaugurale laisse deviner
le premier 33-tours de Gateway, en 1975, ce saxophoniste, compositeur l’influence directe de l’altiste, le
Scott DuBois avec dave holland et deJohnette. Je pense et arrangeur né au Mississippi. reste de cet album révèle une
Winter Light à 33-tours/minute parce que “current on peut donc se réjouir de la pensée originale qui a su tirer ses
Event” fut d’abord publié en vinyle. Et c’est réédition assortie d’un livret de propres conclusions de la voie
1 CD ACT / harmonia Mundi
toujours avec émotion qu’on se souvient 16 pages, dans la série xanadu ouverte par le père du Mbase.
✪✪✪✪ Master Edition d’Elemental Music, Comme Ellman est depuis quinze
de l’exceptionnelle qualité des pressages
Nouveauté. Mi-figuralisme EcM, que l’on ne nous “survendait” pas à d’un de ses meilleurs albums, ans un membre-clé du Zooid de
(relatif), mi-impressionnisme, entre coups de stickers menteurs (“180 Gr”, “high gravé en 1974 pour Muse avec Threadgill, on comprend qu’il n’ait
modal ouvert et soubresauts free, une formation très homogène par égrainé ses productions en leader
Quality”, gna gna gna...). Rien de tel pour qu’avec parcimonie et “Radiate”
“Winter Light” invite l’auditeur à l’âge et les repères fondamentaux
goûter au jazz raffiné de Monsieur John, (blues et bebop), alors n’est que son quatrième album.
la contemplation d’une journée
d’hiver, des premières lueurs dont le trio a marqué son époque – Marc qu’Edwards n’avait pas enregistré Depuis “ophiuchus Butterfly”
du jour sur la toundra jusqu’au Johnson à la contrebasse, Peter Erskine en leader depuis sept ans. (2006), la partie de basse de son
crépuscule qui mène à la nuit à la batterie : ça calme n’est-ce pas ? la Comme en 1967 chez Prestige, groupe est assurée par le tubiste
glacée. La situation mondiale étant guitar synthetizer était alors l’arme fatale le producteur Don Schlitten était et tromboniste Jose Davila, qui
peu encline au ravissement béat, des guitaristes épris de sonorités nouvelles. l’artisan de ce rendez-vous avec donne cette couleur si particulière,
la musique ici proposée ne verse Pat Metheny en avait fait son miel. Monsieur notamment Conte Candoli et Ray à la fois urbaine (la batterie de
pas dans la neutralité expressive. John faisait également très bon usage de Brown. Révélé dès 1947 par des Damion Reid) et organique, via
Une mélancolie résignée domine, ce son à la fois cristallin et flûté qui donnait joutes de souffleurs comme “The les souffleurs. Chaque pièce
peut-être celle d’un monde en train aux thèmes de Clint et d’Hippityville encore Duel” (face à Dexter Gordon), propose une approche musicale
de ronger ses beautés les plus plus de relief. (À la fin de Clint, Peter Erskine Edwards passe aussi pour un distincte, tantôt fondée sur la
précieuses, les moments adonnés siffle la mélodie du Bon, la brute et le précurseur des styles de Rollins création d’une mélodie étrange
au free sonnant moins comme et de Coltrane, mais“Feelin’s” (mais mémorisable), tantôt sur un
truand, vous devinez pourquoi, et ça aussi
des mouvements de rébellion met plutôt en valeur ses qualités travail contrapuntique mélodique
on adore.) Quant au nouvel arrangement de et rythmique. Il peut aussi creuser
que comme des actes de dépit sonores, l’architecture de ses soli
(Ullman proche de Shepp et de Ralph’s Piano Waltz, dont la VO figure dans et la solidité de ses racines. Dans la relation homme/machine,
Dave Liebman). Mais qu’est-ce “Timeless”, c’est un pur moment de grâce – le blues gospelisant Eleven Twenty interroger les interactions de la
que je raconte ? En réalité, je ne mazette, cette intro toute en réminiscences Three, l’un des quatre morceaux programmation informatique et
sais si telles sont effectivement flamenco, quelle élégance ! « Glacé » qu’il signe ici, le ténor entame de sa transposition live (Enigmatic
les intentions extramusicales de Monsieur John ? Faut-il être sourd... • un prêche ponctué de phrases Runner) ou approfondir différentes
Scott DuBois. Au lieu de cela, DoC SiLLon étirées en appui sur l’afterbeat de équivalences de tempo aux effets
peut-être s’agit-il tout simplement Frank Butler, puis se lance dans grisants (Rhinocerisms). Chaque
d’un regard amoureux porté sur un solo aux tons changeants, fois avec ce caractère fin et intense
les vastes espaces désolés du fougueux et nuancé à la fois, propre à Ellman. • LuDoViC FLorin
Grand Nord ? Quoi qu’il en soit, relayé par un Candoli en parfait Jonathan Finlayson (tp), Steve
mon imagination a fonctionné à accord avec lui. Ritta Ditta Blues, Lehman (as), Jose Davila (tu,
tb), Liberty ellman (elg), Stephan
plein grâce au travail hautement dû à Brown, est l’occasion d’une Crump (b), Damion reid (dm).
évocateur, tant sur le plan de la autre intervention d’Edwards Brooklyn, Systems Two Studios,
sonorité d’ensemble, du matériau superbement menée. Au fil d’un 3-4 novembre 2014.

46 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


FOcuS LABEL BLEU
rogue Art
ce label RogueArt au look invariable épuré comme
Nouvelles parutions

KRAKAUER
du Gallimard ne tape pas que dans l’œil. la preuve en THE BIG PICTURE
deux nouveautés à faire free-sonner les oreilles. David Krakauer, le virtuose de la clarinette
jazz klezmer, revisite en musique et dans
J’écoute mes cd à chroniquer surtout en voiture. Je peux ainsi un nouveau spectacle les grands classiques
porter toute mon attention sur la musique et conduire décontracté. du cinéma.
M’arrêtant l’autre soir devant un ami guitariste, CONCERT > À LA CIGALE LE 21
je baisse la vitre pour le saluer et voilà qu’il
NOVEMBRE À 20H30 DANS LE CADRE DU
prophétise : « Ah, c’est du free, tu vas avoir un
FESTIVAL JAZZ’N KLEZMER
accident ! » Eh oui, c’est du free, et même de
l’excellent. Mon malheureux ami était tombé sur
un moment furiosystique tel que Sabir Mateen (ts,
cl) en délivre au sein de declared Enemy, une des DAS KAPITAL
formations de Matthew Shipp avec William Parker KIND OF RED
(b) et Gerald cleaver (dm). le pianiste connaît les Le nouveau projet envoûtant du trio
livres de Jean Genet et salue, avec “our Lady of the Flowers”, son d’Edward Perraud avec Hasse Poulsen à la
premier roman paru en 1943. Toutes sortes de combinaisons – du guitare et Daniel Erdmann au saxophone.
solo au quartette – se répartissent les neufs compositions de cet
album multidirectionnel, où des moments de pure ballade auraient SORTIE > 13 NOVEMBRE 2015
stupéfait mon ami. ce qui m’a, moi, stupéfait, c’est CONCERT > AU STUDIO DE L’ERMITAGE
le jeu de Sabir Mateen à la clarinette. le double LE 8 DÉCEMBRE
album “Entropy/Enthalpy” réunit à sa manière tout
ce qu’on aime dans le jazz : une façon d’être et de
faire. Entrelacs de cordes (harrison Bankhead et
Benjamin Duboc) et de percussion (hamid Drake et en 2016…
et Ramon Lopez) auxquels s’invitent (plutôt que
s’ajoutent) sur le second cd, tour à tour, Jean-luc
cappozzo (tp), lionel Garcin (as) et William Parker. DJELIMADY TOUNKARA
le groupe, formé pour une tournée en février 2014 s’intitule The DJELY BLUES
Turbine ! On ne peut pas mieux trouver ! • FrAnçoiS-rené SiMon Le grand guitariste malien se livre dans un
rogueArt / www.rogueart.com album intimiste et profond.
SORTIE > 4 MARS 2015
CONCERT > TOURNÉE MONDIALE
PRINTEMPS 2016

dERNiER chORuS
HENRI TEXIER
le saxophoniste, mais aussi
bassiste Wilton Felder est mort le 27
SKY DANCERS 6
septembre. il avait 75 ans. A la fin des SORTIE > 5 FÉVRIER 2016
années 1950, encore lycéen, ce natif de HenriTexier
Sky dancerS CONCERT >AVANT-PREMIÈRE
houston, Texas, fut avec le tromboniste LE 9 NOVEMBRE 2015
Wayne henderson, le pianiste Joe AU NEW MORNING
Sample et le batteur Stix hooper l’un
NGuyênLê
ArmelDupas
LouisMoutin
SébastienTexier

des fondateurs des Jazz crusaders,


FrançoisCorneloup

combo hard-bop rebaptisé The


crusaders au moment de leur virage
jazz-soul, à l’orée des années 1970. RED STAR
Au ténor, mais aussi, plus rarement, ORCHESTRA
FEATURING THOMAS
CONCEPTION LINKS CRÉATION GRAPHIQUE (WWW.LINKS-WEB.FR)

au soprano et à l’alto, ce saxophoniste


au phrasé tout en rondeurs était à la
fois un digne héritier de ses confrères DE POURQUERY
hard-boppeurs (de Junior cook à BROADWAYS
dexter Gordon en passant par clifford
Jordan) et des souffleurs vedettes
SORTIE > 4 MARS 2016
ChRISTIAN RoSE

de l’orchestre de Ray charles, ce qui


le rapprochait, en moins suave, d’un
Grover Washington, Jr. Sa sonorité
restera pour toujours associée au son unique des crusaders. il a aussi enregistré
avec Jimmy Smith, Joni Mitchell et Shuggie Otis. Et pour se rappeler ses talents
de compositeur, on réécoutera That’s How I Feel et Three Children (“crusaders i”,
1972), Ain’ Gon’ Change A Thang (“The 2nd crusade”, 193), Lilies On The Nile
(“Southern comfort”, 1974) ou Creole (“Chain Reaction”, 1975). • FG

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 47


le guide

GROS PlAN

John Coltrane
L’édition suprême ?
Pour le cinquantenaire de “A love Supreme”, impulse édite
une “Super deluxe Edition” en édition limitée d’un intérêt… limité.
les collectionneurs seront ravis. Mais le mieux n’est-il pas
de s’en tenir à ce qu’avait voulu et choisi John coltrane ?
Et un, et deux, et trois non pas des top charts. il fut nominé pour
zéro comme ce fut le cas lors deux “Grammy Awards” (Meilleure
d’une finale de coupe du monde Petite Formation – devancé par
de football mais comme le nombre Ramsey lewis –, et Meilleure
d’éditions de “A love Supreme”. composition Originale – devancé
la première, la seule voulue par par lalo Schifrin) ; les lecteurs de
John coltrane, fut d’abord éditée Down Beat l’élurent “disque de
en 1965 en vinyle sous double l’année” et coltrane “Saxophoniste
pochette cartonnée ouvrante, de l’année” et “Jazzman de
comme c’était la règle du label l’année”. la musique n’était
impulse. A l’intérieur, les seules pourtant pas à l’époque forcément
liner notes que coltrane ait jamais des plus accessibles.
rédigées pour ses albums : d’une
part une adresse à l’auditeur, En 1995, Yasuhiro Fujiyoka
d’autre part le poème-prière A confirme dans sa discographie
Love Supreme, le tout encadrant de John coltrane deux
un portrait signé Victor Kalin, enregistrements de
d’après une de ses propres Acknowledgement avec Archie
photos de John au saxophone, Shepp et le contrebassiste
prise au festival de Newport en Art Davis (en plus de Jimmy
1961. Selon Elvin Jones, « ces Garrison). On connaissait leur
liner notes auraient mérité le prix existence grâce aux liner notes du
Nobel… ». En couverture, recto leader : « Je voudrais remercier
comme verso, une photo “pleine également Archie Shepp et Art
page” de coltrane (une de ses Davis : ils ont enregistré un
préférées) prise par Bob Thiele en morceau qui malheureusement
1962 lors de l’enregistrement ne peut paraître aujourd’hui.
avec duke Ellington : le musicien […] J’espère que dans un futur était trop bonne, dans la tête trente-deux pages, aussi riche en
y a l’air grave, préoccupé, attentif proche nous pourrons approfondir des managers de la branche documents – photos, manuscrits,
peut-être à une conversation le travail amorcé ici. » Fujiyoka américaine d’impulse, de les avec un brouillon du poème
(dans le coin en bas à gauche, une mentionne aussi plusieurs prises révéler l’année du cinquantenaire éponyme et un autoportrait (?) de
ombre blanche : sur l’original non de Resolution. il fallut attendre de la sortie de l’album original. coltrane – qu’en informations avec
retouché et non recadré, on peut 2002 et la parution du double une “Super Deluxe Edition” vient un texte de l’incontournable Ashley
identifier Jimmy Garrison grâce à cd “A love Supreme - deluxe donc de sortir, constituant un non Kahn.
son pull-over). ultime singularité : Edition” pour les entendre enfin. événement discographique qu’il Reste tout à fait inédite une autre
la tranche est en noir et blanc, Elle comprenait, outre la version faut bien dénoncer. car dans ce version live de “A love Supreme”
comme le reste, alors que l’orange originale, la version “live” triple cd qui comprend vingt-deux attestée à la fois par les musiciens
est la couleur identitaire du label. enregistrée à Antibes en juillet plages, neuf sont inédites mais cecil Payne et Zane Massey.
Voilà pour le packaging. 1965 (déjà publiée illégalement deux seulement valent l’écoute : A-t-elle été enregistrée ? Va-t-il
contenu musical : les quatre en cd et en 33-tours en 1987), les deux versions d’Acknowledgement falloir attendre 2065 pour la voir
mouvements de cette suite (deux deux prises d’Acknowledgement et avec Archie Shepp et Art davis, publiée ? • FrAnçoiS-rené SiMon
par face), Acknowledgement, deux prises de Resolution. Malgré les saxophonistes assurant à
CD “A Love supreme - super Deluxe
Resolution, Pursuance, Psalm. date le prestige d’Archie Shepp acquis tour de rôle un background quasi edition” (3 CD Impulse / Universal).
de l’enregistrement : 9 décembre depuis lors, malgré l’intérêt du dansant ! Manière peut-être de
1964. (On ne peut pas considérer doublement des contrebasses, faire passer l’enthousiasme, au
le passage du vinyle au cd comme on ne s’est guère extasié sur ces sens étymologique du terme.
une nouvelle édition, même si enregistrements. Shepp y est assez convaincant
on put écouter l’intégralité de dans son discours déchiqueté et
la composition sans avoir à En 2008, la publication de la brut, en contraste avec celui de
retourner la galette, mais certains monumentale discographie The coltrane, linéaire.
se plaignirent que le son n’était John Coltrane Reference révèle Sinon, entre doublages vocaux,
plus tout à fait le même). Sorti fin sept prises de Resolution par faux départs, versions mono ou
février 1965, aussi rapidement le quartette, une autre prise de non mixées, le reste est plutôt
que le voulait son auteur, “A love Persuance/Psalm le 9 décembre, anecdotique. c’est sans doute
Supreme” connut un succès neuf prises d’Acknowledgement parce qu’ils en étaient conscients
inédit pour un album de jazz, et trois doublages de Psalm le 10. que les producteurs ont concentré
concurrençant même les habitués le tout inédit, bien sûr. l’occasion leurs efforts sur le livret de

48 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


GROS PlAN

Genest ainsi que le pianiste yvan


Robillard sont des compositeurs
accomplis. Difficile de rester

Jean-
insensible à l’amplitude intimiste
et aérienne de la plupart des
thèmes, qui caractérise le premier

Pierre
album de ce duo. Sans compter
la délicatesse des mélodies
couplée à une expression
Joe Farrell

Como
savamment dépouillée. Totems,
Skate Board Park troisième titre, témoigne d’une
1 CD xanadu / hamonia Mundi habileté, d’une finesse et d’un
swing magnifiquement inspirés.

Au fil des voix


Réédition. Dans la discographie

JEAN-BAPTISTE MILLoT
on tressaute face à la texture
de son auteur, “Skate Board
harmonique et rythmique du
Park” est niché entre les albums
morceau Le saut de l’ange, mise
“Night Dancing”, galette hédoniste
en valeur par des arpèges d’une
surproduite (dont la pochette
justesse étonnamment volubile.
donne une bonne idée du
L’originalité du titre Dombolo
contenu), et “Sonic Text”, tardive Ancien membre du groupe Sixun, le pianiste Jean-Pierre
(Ndombolo, écrit-on en réalité)
session hardbop avec un Freddie
hubbard virevoltant. Rien de
fait sourire : une danseuse, como continue son aventure en solo avec “Express Europa”,
particulièrement mémorable ici,
“a dombolo sexy”, qui ferait fi son dixième album. ce nouvel opus fait la part belle à un
mais une petite séance vite et
des regards outrés provoqués instrument qui le fascine : la voix.
par le déhanché ensorcelé que
bien ficelée, avec un Farrell plus
suscitent un terrible hard-bop
à l’aise sur ses compositions ou Vingt ans que Jean-Pierre como et à une voix particulière, lui donne
et les susurrements de Genest.
celle fournie par son pianiste et
Il y a aussi le blues organique attendait l’étincelle qui lui plus de force. » En témoignent
ex-employeur au sein de Return to permettrait de donner une suite à Raccontami, You Are All, Mio Canto
et organiste de Spiritual ou
Forever que sur des versions sans l’aventure “Express Paris Roma”. ou Turn And Turn, chansons jazz
l’approche bakerienne de
éclat de Speak Low et You Go To Chandra. Toutefois, quelques un désir qui flottait dans l’air. vocal flirtant avec une pop exquise.
My Head. L’album mérite l’écoute déceptions s’invitent. L’ennui dans l’air du temps qui passe, Quid du morceau Mandela Forever
pour les prises de parole toujours d’abord, avec des morceaux sans propice à de nouvelles aspirations, qui marque une admirable rupture
intéressantes de Chick Corea aux grande profondeur comme A à de nouveaux coups de cœur. dans la structure conceptuelle
pianos acoustique et électrique, Long Lone Way (un comble pour il attendait la flamme qui avait du disque ? À entendre cet
et celles d’un saxophoniste le titre éponyme de l’opus) ou For
soucieux de donner le meilleur
animé, dès 1995, sa nouvelle instrumental, on se croirait en plein
My Love. on regrette aussi cette famille musicale composée du carnaval à la Nouvelle-Orléans…
de lui-même dans le contexte reprise un peu fade de My Funny
resserré d’un quartette traditionnel. saxophoniste Stefano di Battista « J’ai composé ce morceau à
Valentine. Mais ce ne sont que – qu’il surnomme « la tornade » –, l’annonce de la mort de Mandela.
Côté rythmique, Bob Magnusson peccadilles parmi un patchwork
s’attache à faire ronronner sa du batteur Stéphane huchard ou Mais je n’y voyais pas quelque
de saveurs. • kATiA Touré
contrebasse tandis que le tenant encore du guitariste louis Winsberg. chose de triste. Malgré tout ce qui
nicolas Genest (tp, bug, voc), Yvan
du jazz West Coast Lawrence robillard (p, org, elp). rochefort, « J’ai voulu retrouver l’émulation l’a vécu, cet homme puissant et au
Marable veille essentiellement à studio Alhambra Colbert, novembre qui nous avait animés et la faire regard pur adorait danser. Aussi, j’ai
ne pas empiéter sur le chemin des 2013. revivre sous une nouvelle forme. » choisi le registre de la joie pour lui
solistes. Cette réédition soignée Aussi, toujours accompagné de rendre ce petit hommage. »
propose un livret de seize pages cette même famille, Jean-Pierre
comprenant un entretien avec como s’est attaché à mêler chanson Jean-Pierre como ne compte pas
Farrell daté de l’époque de cet et improvisation jazz sur “Express s’arrêter là. En ébullition constante,
enregistrement, un essai critique Europa”, en pariant sur la mise en il avoue avoir de nombreux
et des documents d’archives. •
scène de deux voix. projets en tête. « Ma passion est
DAViD CriSToL
celle de hugh coltman d’abord, toujours aussi vive », assure-t-il.
Joe Farrell (ts), Chick Corea (p,
elp), Bob Magnusson (b), Larance dandy anglais au timbre chaud Sans oublier le chant, qui semble
et rauque, dixit como. « Hugh désormais essentiel dans sa
Marable (dm). Los Angeles,
Spectrum Studio, 29 janvier 1979. Girls In Airport a une véritable personnalité. Il musique. Mais on ne sait jamais
Fables s’approprie les mots et apporte un avec Jean-Pierre como… il suffirait
1 CD Edition Records / harmonia Mundi côté poétique qui donne la chair de n’importe quelle rencontre
Nouveauté. voici sans doute de poule », analyse le pianiste qui hasardeuse, inédite et salvatrice.
un album de sons d’hiver. n’hésite pas à le comparer à Peter c’est ainsi qu’il fonctionne. le
L’étrangement nommé “Girls in Gabriel, chanteur de Genesis. celle pianiste guette les moindres
Airport” est un des nombreux de Walter Ricci ensuite. ce crooner surprises de son parcours. ces
collectifs nordiques natifs de la napolitain et pianiste de 26 ans « surprises capables de muer un bref
fertile communauté musicale à la voix d’ange », dixit como. « instant en une absolue pérennité,
de Copenhague. Mené par Aussi loin que je m’en souvienne, où la logorrhée est mise de côté au
Nicolas Genest les vents respectifs de Martin j’ai toujours travaillé sur la voix, profit de la retenue et de la poésie.
Yvan Robillard Stender et Lars Greve, le
composé en chantant, ajoute-t-il. « Plus le temps passe, plus j’élimine
A Long Lone Way quintette développe ses mélodies
éthérées sur d’aériennes et Ce n’est pas que j’attache plus les notes qui ne sont pas utiles. » •
1 CD Cristal Records / harmonia Mundi nuageuses nappes sonores de d’importance à la mélodie qu’aux kATiA Touré

Nouveauté. Il n’y a pas à dire. Le divers claviers et synthétiseurs. formules rythmiques mais je trouve CD “express europa” (L’âme sœur /
trompettiste et bugliste Nicolas Musique ambiante électro- que coupler la mélodie à des mots Absilone/socadisc)

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 49


le guide

FOcuS

acoustique, bande-son imaginaire Cœurs de “fonction basse” qui structure tout valeur la délicatesse de ses

crooners
et cinématique de paysages l’album, des compositions aux ornementations. on aimerait,
polaires, qui évoquent ciel et terre, improvisations dont les parties de parfois, que le phrasé dérape un
ce quatrième album du groupe contrebasse semblent naître des peu, que quelques dissonances
s’écoule mélancoliquement et arrangements. C’est par ce biais résonnent ici et là, mais
fond comme glace de banquise ils sont tous deux guitaristes et – et par la faconde de Tony Tixier heksleman fait toujours le choix
au fil de ses courtes trente- ancrée sur cette basse – que
huit minutes. “Fables” suggère
crooners et viennent de sortir l’on entrera dans la conception
d’une élégance contrôlée, un peu
leur nouveau disque. Mais qui de trop peut-être. • BerTrAnD BouArD
parfois les expériences de Brian du lyrisme “benvangelderien”
Eno et Jon hassell, mais s’en Torsten Goods ou John Pizzarelli un rien janséniste aux oreilles
Gilad Hekselman (elg), Joe
Martin (b), Marcus Gilmore (dm),
distingue finalement par l’estampe est le plus séduisant ? de qui a grandi aux clameurs Jeff Balard (dm sur deux titres).
émotionnelle de ces alliages, par des big bands swing et des Brooklyn, 10 et 11 mai 2014.
ces petites passerelles sonores ténors coltraniens. Un cas sur
A tout youngster tout honneur : Torsten lequel deux prises d’Expression
qui naissent et s’estompent,
flirtant entre tristesse et sérénité. Goods est de vingt ans le cadet de John nous offrent un beau sujet de
on a failli ne pas y embarquer, Pizzarelli. Ça s’entend. un rien frimeur méditation. • FrAnCk BerGeroT
notre attention étant déroutée par sur le manche, un peu vert vocalement. Ben van Gelder (as), Tony Tixier
si peu d’accroches. Et pourtant, le choix du répertoire (p), Joachim Tixier (p), Joachim
est plutôt finaud, qui Govin (b), Gautier Garrigue (dm).
au fur et mesure d’écoutes, Videlles, studio des egreffins, 20 et
les griffures organiques et oscille entre version 21 octobre 2015.
plaintives du duo de saxes, les jazz(yfi)ées de scies FM
sonorités brutes des percussions
et tambours tribaux dévoilent
des années 1980 (Kyrie
de Mr. Mister, groupe
Didier Ithursarry
lentement leurs charmes. • dont Miles davis Quartet
JeAn-Pierre ViDAL adorait l’autre tube en kantuz
Martin Stender, Lars Greve (sax), or massif, Broken Wings), de pépites 1 CD LagunArte Productions / L’Autre Distribution
Mathias Holm (cla), Mads Forby
(dm), Victor Dybbroe (perc). d’Oscar Brown, Jr. (Work Song, Brother, ✪✪✪✪
Copenhague, Studio r, mars 2015. Where Are You) et d’airs traditionnels Nouveauté. Il affirme sa terre
(Nobody Knows The Trouble I’ve natale, le pays basque, Didier
Seen), prétextes à des élans digitaux Gilad hekselman Ithursarry. L’accordéoniste a
paradoxalement pas si soulful que ça Homes choisi un air traditionnel, Kantuz,
– n’est pas George Benson ou Eric Gale 1 CD Jazz village / harmonia Mundi pour intituler son nouvel album.
qui veut. Bref, “Thank You Baby !” (1), Nouveauté. voici un peu plus Un mot qui signifie l’instant
s’il n’est pas sans charme, manque de de dix ans que le guitariste présent où l’on chante. Toute
la profondeur nécessaire pour séduire israélien Gilad hekselman, jeune la personnalité d’Ithursarry est
durablement. trentenaire, a posé son flightcase résumée : il donne la primauté
Au contraire de “Midnight Mccartney” à New york, ainsi que les bases aux émotions, jouant sur les notes
Joachim Govin [✪✪✪✪]. Vingt ans après son “Meet d’une carrière internationale sensibles de son instrument, loin
elements The Beatles”, et dans la foulée d’un qui grandit inexorablement. Le de toute exploitation tonitruante.
1 CD Fresh Sound New Talent / Socadisc disque (“Kisses On The Bottom”) et toucher et la limpidité du son Familier des petites formations
de quelques concerts prestigieux évoque Pat Martino, l’univers – en duo avec Kristof hiriart (voix,
Nouveauté. Si l’on fréquente un harmonique et une certaine percussions) ou Jean-Luc Fillon
peu la scène parisienne, on aura avec Sir Paul himself, dont il est l’un
des guitaristes attitrés (quand l’ex- densité de notes Pat Metheny, (hautbois, cor anglais), – il se
croisé le frais trentenaire Joachim dont on trouvera ici une jolie
Beatle chante ailleurs que dans des présente ici avec son quartette où
Govin. Le goût de la tradition, version du Last Train Home.
stades de foot), John Pizzarelli a eu la il croise le fer en toute amitié avec
de l’enracinement new-yorkais, Inspiré par la notion de tendresse
bonne idée... d’écouter la bonne idée Jean-Charles Richard, bénéficiant
une conscience certaine des 10 et une géographie de l’amour,
commandements du bassiste de Mccartney, qui lui a soufflé celle d’une complicité rythmique
“homes” fait la part belle aux juste et alerte (Matyas Szandai
qui lui vaut la confiance de ses d’un disque entièrement dédié à ses climats contemplatifs, au fil
collègues sur une multitude de et Joe Quitzke). Signataire de la
chansons (un peu) desquels heksleman, guitariste
terrains… notamment ceux quasi-totalité des compositions,
moins connues, de Silly fin, aimant jouer au fond du
où cette conscience est telle temps, excelle. C’est là la beauté Ithursarry fait entendre sa
Love Songs à Let ’Em In voix délicate sur Elle et nous
qu’elle autorise le flirt de la en passant par Coming de l’œuvre, sur un Verona nimbé
contrebasse et de l’apesanteur. de romantisme par exemple. enflamme sur un morceau aux
Up (ici en duo avec accents brésiliens, Choro. A noter
Aussi Govin endosse-t-il les C’est aussi sa limite : on frôle
Michael Mcdonald) et Habanera pour François Béranger,
rôles de piéton de l’air avec l’impression de surplace sur
l’autorité et la profondeur (son et Maybe I’m Amazed. belle séquence souvenir jouée en
un très long Cosmic Patience,
timbre) de quelqu’un rompu aux (Pizzarelli n’enregistrera visiblement inspiré par le travail solo intégral en forme de coup
fondements de la walking bass. donc pas cette fois sur les textures de Bill Frisell de chapeau au chanteur engagé
Après s’être fait connaître avec la 48 832e version de Yesterday.) Soli mais sans la même radicalité (1937-2003) qu’il accompagna,
Tony Tixier (et Logan Richardson), inspirés et jamais démonstratifs, harmonique, qui débouche ainsi qu’un titre de cet artiste,
le quintette Slugged d’olivier maîtrise vocale, harmonies vocales à sur un Eyes To See assis sur Grand-mère. Il a du cœur, Didier
Laisney ou le Gil Evans Paris la Four Freshmen mâtinées de donald un tempo à nouveau très lent. Ithursarry, et cela s’entend. •
Workshop de Laurent Cugny, il Fagen : la classe américaine au service Parisian Thoroughfare offre JeAn-LouiS LeMArCHAnD
présente son premier disque. du génie anglais. • FréDériC GoATY une rupture bop bienvenue, Didier ithursarry (acc, comp, voc),
Il repose sur une complicité qui voit le guitariste enfiler les Jean-Charles richard (ss), Joe
durable avec Tony Tixier et (1) ACT Music / harmonia Mundi. (2) Concord Records chorus comme de fines perles Quitzke (dm), Matyas Szandai (b,
Gauthier Garrigue, une rencontre / Socadisc. en conservant la tête froide, comp). rocheservière (Vendée),
avec le saxophoniste néerlando- avant un Samba Em Preludio studios Corner box, juillet 2014.
new-yorkais et ce rapport à la (Baden Powell) qui met en

50 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


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Les CD Collection sont des compilations thématiques réalisées par la rédaction. (2) Tarif kiosque. (3) Le cachet de la poste faisant foi. accéder aux informations vous concernant, les rectifier et vous opposer à leur transmission éventuelle en nous écrivant.
le guide
ciNéMA

Miles
le maître des claviers ka Jacques-
Ahead
Un jour
Marie Basses sont en train de
mettre le feu au grand final du
Festival Ilo’Jazz en compagnie

mon film
de Steve Coleman, parrain de
l’événement accompagné de The
Five Elements. L’assemblée est

viendra
bouche bée. Qu’est-ce que c’est
que ça ? Pourtant, ça n’aurait pas
Kirk Knuffke étonné les fouineurs chevronnés
Little Cross du label heavenly Sweetness
1 CD SteepleChase / Musea (Franck Descollonges) et de la
plateforme Digger’s Digest (Julien
Nouveauté. Natif du Colorado mais Achard). En effet, tous deux
établi à New york depuis 2003, publient une compilation “Kouté
ce cornettiste a déjà enregistré Jazz” (en français, “écoutez – ou
une quinzaine de CD dont six écouter – du jazz”) qui fait la
pour le label indépendant danois part belle aux morceaux de jazz
SteepleChase. Il a démarré dans la les plus rares enregistrés dans
Grosse Pomme au sein du Nublu les Antilles Françaises au cours
orchestra de Butch Morris et des seventies. Mais rares pour
comme membre d’une fanfare qui qui ? Sûrement pas pour les
accompagnait les funérailles dans aficionados de Camille Sopran’n
le quartier chinois. Il a aussi été le hildevert, dont le Sopran’n aux
partenaire du batteur Matt Wilson Antilles fait office d’ouverture de
et de la guitariste Mary halvorson. l’opus, d’Erik Cosaque (Kominike),
Pour réaliser cet album, il a encore des Maxel’s (on y retrouve le
fait appel aux meilleurs : Jamie Saft membre fondateur, le guitariste
et son orgue roublard, hamid Drake Max Labor, avec Mama Says)
SoNy PICTURES CLASSICS

et ses tambours malins. Ce nouvel ou des détenteurs de l’album


ouvrage s’inspire des cantiques, “Jeudi à l’Arawak” de Guadeloupe
des spirituals et du climat suscité Reflexion (Samba Arawak). Sans
par la disparition d’êtres chers – oublier les vikings, – groupe Don Cheadle, façon miles Davis 1978 dans Miles Ahead.
ici point de musique “religieuse” mythique de la Guadeloupe dont
mais une sacrée musique un peu Camille Sopran’n et Francky
hypnotique qui swingue diablement.
Accompagné par l’orgue félin de
vincent furent membres, ou
encore le saxophoniste Marcel-
Miles Ahead, le biopic de Don Cheadle consacré à la vie de
Jamie Saft et le drumming tout en Louis Joseph, dit Ti Marcel. • Miles Davis, faisait le 11 octobre la clôture du new York Film
couleur d’hamid Drake, le leader
délivre des interventions claires,
kATiA Touré
Festival. une première projection très attendue pour un film
Détails dans le livret.
brûlantes et majestueuses. Son libre et audacieux. Jazz Magazine y était.
jeu fluide, légèrement stridulé, est
influencé par les regrettés Lester cela faisait presque dix ans qu’un Audacieux parce que Miles Ahead
Bowie et Kenny Wheeler. Au menu
de cet album, on trouve aussi
film sur Miles davis trottait dans n’a rien d’un biopic traditionnel.
quelques chaleureuses relectures, la tête de l’acteur don cheadle. Au lieu d’opter pour un récit
notamment de Farmer Alfalfa Flashback. En 2006, à l’issue de la chronologique ou d’insister sur
d’henry Grimes et d’Elephant Boat cérémonie qui avait inscrit Miles un épisode de la vie de l’artiste, le
de Kenny Wollesen. Il n’oublie pas davis au Rock And Roll Hall Of film se construit autour de deux
non plus de saluer la mémoire de Fame, Vince Wilburn, neveu du
monuments du jazz libertaire : Fred David Krakauer trompettiste, avait annoncé sans
fils narratifs. une première trame,
parfois un peu caricaturale, faite de
Anderson et Don Cherry. Fascinant ! The Big Picture
consulter cheadle qu’un projet de flashbacks, montre Miles version
• PAuL JAiLLeT 1 CD Label Bleu / L’Autre Distribution.
film était en cours et que l’acteur 1950-1960. On le voit jouer avec
kirk knuffe (cnt), Jamie Saft Nouveauté. Exploration
(org, synt), Hamid Drake (dm). y aurait le rôle titre. Propulsé dans Gil Evans, son second quintette,
Décembre 2014. identitaire à travers la mémoire l’aventure à son insu, cheadle finira ets surtouts vivre une histoire
cinématographique, c’est par la transformer en une entreprise mouvementée avec son épouse
l’ambitieux projet de David
personnelle. Travaillant avec la d’alors, Frances Taylor. cheadle y
Kouté Jazz Krakauer prenant sa source
dans la réinterprétation de famille de Miles, s’acoquinant avec interprète Miles avec révérence, en
(A Collection of rare Jazz célèbres thèmes issu de grands herbie hancock, son conseiller, fan sobre et admiratif.
From The French West indies) classiques du septième art. l’acteur fera de Miles Ahead son un deuxième fil narratif nous
1 CD heavenly Sweetness / heavenly-sweetness.com Admirateur entre autres de John premier film en tant que réalisateur propulse en 1978. Miles vit reclus
✪✪✪✪ Williams, Mel Brooks ou Randy et optera pour une production dans sa maison de New York, où
Newman, le clarinettiste revisite indépendante fondée sur le il est harcelé par un journaliste,
Réédition. Le 12 de manière singulière ces fameux financement participatif. Résultat joué par Ewan McGregor [vu dans
décembre 2014, intermèdes cinétiques à la
c’est la folie sur la piquante sauce de ses audaces
d’une aventure originale, Miles Trainspotter et Star Wars, entre
scène de la Place musicales, nourries de jazz et de Ahead est un film intelligent, parfois autres, NDLR]. le film balance
de la victoire à groove sur toile de fond klezmer. foutraque, mais profondément entre réalité et fiction, dessinant
Pointe-à-Pitre (Guadeloupe). Le “The Big Picture” réunit un noyau audacieux. un Miles davis héros d’un polar
saxophoniste Camille Sopran’n et de musiciens en belle symbiose blaxploitation, dans lequel, courses

52 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


poursuites à l’appui, il part à la surtout par le son. le film est nappé
recherche d’une bande volée par par la musique de Miles davis, dans
des producteurs véreux. dans cette toutes ses époques et toutes ses
deuxième trame, le jeu de cheadle tendances. la band-son, en nous
change. il n’est plus seulement plaçant dans la tête du héros, nous
Miles : il joue Miles davis qui fait confronte à ce que cheadle imagine
l’acteur dans un film. être son regard sur le monde, un
regard profondément déterminé par
ce dispositif, qui depuis la ses productions musicales passées
projection déroute une partie de la et à venir.
critique américaine, permet à Miles
Ahead de ne pas sombrer dans le Pour ce travail, don cheadle, lui-
principal défaut des biopics : mal même saxophoniste, a demandé à
montrer ce qu’un documentaire Robert Glasper de composer des
aurait pu parfaitement faire. Avec musiques supplémentaires et de
Miles Ahead, on est au cœur d’un réadapter certains morceaux de
projet cinématographique qui, via Miles davis pour l’écran. « L’enjeu,
des allers-retours entre fiction et explique cheadle, était aussi de
réalité, essaie de s’approcher au montrer la modernité de la musique
plus près des marques de fabrique de Miles, son actualité ». la scène
de la figure qu’il traite : sa liberté, ultime du film, tout en héritage, est à
son sens de la remise en question ce titre explosive. On ne vous en dit
permanente et son humour. le tour pas trop, mais attendez vous à voir
de force de Miles Ahead réside aussi du beau monde ! • PAuLine GueDJ
dans son traitement de la musique. Miles Ahead, de avec Don Cheadle, sortie
là aussi, le film ne croule pas française en 2016.
sous les restitutions de concerts,
de séances d’enregistrement, où
l’interprétation de cheadle ne sera
jamais aussi passionnante que la
vision documentaire du vrai Miles
davis au travail. Si la musique est
présente dans Miles Ahead, c’est

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 53


les ch cs choc
magazine

Andy Emler Barry Altschul’s Géraldine Daniel Erdmann


Megaoctet 3 Dom Factor Laurent Samuel Rohrer
obsession 3 Tales of The unforeseen At Work Ten Songs About
1 CD La Buissonne / harmonia Mundi 1 CD TUM Records oy / orkhêstra 1 CD Gazebo / L’Autre Distribution real utopia
NOuVEAuTé. ce second cd du groupe NOuVEAuTé. A la tête de son nouveau 1 CD Arjuna Music / La Baleine
NOuVEAuTé. le mégaoctet conjugue
comme de coutume sophistication 3 dom Factor confirme de manière quartette, Géraldine laurent s’affirme NOuVEAuTé. Pour sortir un disque
formelle, humour déjanté et énergie éclatante le retour en tant que leader comme la seule saxophoniste à jouer d’une durée inférieure à quarante
explosive. du légendaire batteur Barry Altschul. superbement de l’alto... comme si minutes, il faut être sacrément sûr
c’était un ténor ! de soi ! Avec deux cd derrière lui en
on sait Andy Emler friand de contraintes : Ce trio équilatéral intergénérationnel
a toujours fière allure. Il réunit autour moins d’un lustre, ce quartette peut
là où “E Total” était entièrement centré Entre Rollins, pour la mise en place
du maître artisan le robuste bassiste s’autoriser à l’être.
autour de la tonique de mi, “obsession rythmique et Getz pour le son et le
3” ne comporte que des morceaux à tous terrains Joe Fonda et l’énergique phrasé, son cœur balance. Mais si ça
saxophoniste caméléon Jon Irabagon. Autre source d’assurance, qu’on ne
trois temps… Ce qui, de prime abord, balance, c’est que ça chante et que ça
La cohésion entre ces trois redoutables saurait confondre avec la forfanterie, la
ne se remarque pas forcément ! C’est swingue. Et c’est le cas dans “At Work”
bretteurs habitués des joutes libertaires maturité musicale des quatre compères.
que pour cette forte tête formée à (réalisé sous la houlette de Laurent de
s’est encore renforcée notamment grâce où que leur inspiration les mène, ils
l’exigeante école des classes d’écriture Wilde), son album le plus accompli, le
à une tournée dans le nord-ouest des savent où ils vont et pourquoi. Qu’on
du Conservatoire, la composition est un plus personnel, avec son lot de reprises
Etats-Unis. Ils sont donc fin prêts pour se ne s’attende donc pas à trouver ici
jeu à plusieurs niveaux de lecture, où (trois dont Goodbye Porkpie Hat ) et de
lancer dans l’exploration sans partitions autre chose que de la profondeur, de
tout ne se donne pas immédiatement surprises. Six compositions originales
de nouveaux territoires et nous narrer l’épaisseur sonore, des capacités utilisées
à entendre. Le morceau Tribalurban, marquées par son goût des mesures
six fabuleuses “histoires de l’imprévu”. avec le minimum de grandiloquence pour
dont les deux versions occupent un bon composées et des rythmes impairs, des
As The Tale Begins est une superbe le maximum d’effet. Un effet évidemment
tiers de l’album, illustre parfaitement valses lentes ou rapides, des ostinatos
improvisation de plus de vingt-six minutes durable (alimenté à l’énergie naturelle des
cette esthétique baroque et jouissive. et autres figures répétitives, des motifs
au cours de laquelle ils font preuve d’une doigts, du souffle, du bois, des cordes et
En ouverture, une brève exposition en qui vont et qui reviennent comme des
imagination sans limite. Stimulé par ses des peaux) et qui fuit le clinquant. Les
quatre minutes, débutant par couches ritournelles, avec comme seul propos
valeureux aînés, Irabagon fait étalage petites mélodies répétitives et denses
successives : accords hypnotiques l’impro, grâce au soutien intelligent de
de sa monstrueuse technique. Suit une du ténor de Daniel Erdmann, les riffs
égrenés par la section de saxophones, riff yoni Zelnik et Donald Kontomanou, et
relecture chaleureuse du thème de “vintage” de la guitare de Frank Möbus,
de tuba syncopé repris par la rythmique à la présence lumineuse au piano de
Monk Ask Me Now. L’histoire continue le minimalisme précis de la batterie
au grand complet, le tout bientôt survolé Paul Lay, aux interventions toujours
avec un Joe Fonda ciseleur-propulseur de Samuel Rohrer et l’ampleur ou les
par un vertigineux contrepoint, exposé fraîches et stimulantes. L’album atteint
qui entraîne ses compagnons vers stridences lyriques du violoncelle de
à l’unisson par le marimba et la main le zénith de son urgence lyrique avec
des sommets inviolés. Elle se poursuit vincent Courtois se combinent et se
droite du piano… À la fin de l’album, une la ballade de Jobim Chora Coração.
avec une version ludique de Miracles recombinent sous nos oreilles pour former
seconde version reprendra les mêmes Cette version touche au sublime et nous
d’Annette Peacock et un solo de batterie des objets sonores d’une densité telle
éléments pour les étirer aux dimensions fait mieux comprendre cette phrase de
et percussions fort passionnant. Le qu’on ne se lasse pas d’écouter ces petits
d’une suite rhapsodique et concertante Wayne Shorter : « Celui qui n’a pas de
chapitre final sert d’écrin à la flûte bijoux travaillés avec un art consommé,
de seize minutes, variant les climats et son ne jouera jamais bien une ballade ».
mutine et au ténor abrasif d’Irabagon qui est tout sauf du perfectionnisme
laissant de larges espaces aux différents Dans le jeu effervescent de Laurent, ce
soutenu efficacement par ses stupéfiants laborieux. Utopie réelle ? L’évidence nous
solistes. Et ainsi de suite. De l’ambiance qui fascine, c’est que l’harmonie et la
partenaires. Ces trois merveilleux dispense de nous appesantir sur le sujet
méditative de Balallade 2 au groove mélodie semblent fondre sous le feu du
funambules cultivent avec bonheur l’art et – entre autres – de mentionner que
haletant de La Mégaruse, Emler et sa rythme pour mieux couler dans le creuset
du trio libre. • PAuL JAiLLeT l’improvisation a pleinement sa part dans
troupe nous entraînent dans un voyage du son. Un son d’alto sans vibrato, tout cet ouvrage d’artisans (au sens noble)
aux multiples rebondissements, où le Jon irabagon (ts, ss, sopranino, fl), à la fois plein et charnu, tenu et souple,
Joe Fonda (b), Barry Altschul (dm, perc). ouverts. Quand on a devant soi des
souci de la forme n’étouffe jamais la énergique et rêveur, fragile et assuré,
new York, Sear Sound Studio, créations si proches de ce dont on rêve,
spontanéité et où le sens du collectif va 11 et 12 février 2014. moelleux et moiré avec cette apparence on s’en imprègne, on les chérit et on
toujours de pair avec l’expression des ondée, sensuellement chatoyante. Ce en parle autour de soi avec une ferveur
individualités. • PASCAL rozAT qui est magnifique dans cette musique, pleine d’assurance... sous peine d’aller
Laurent Blondiau (tp), François Thuillier c’est qu’on y entend en même temps le
(tu), Philippe Sellam, Guillaume orti brûler un jour en enfer. • THierrY QuénuM
passé, le présent et l’avenir du jazz. vif et Daniel erdmann (ts), Frank Möbus (elg),
(as), Laurent Dehors (ts), Andy emler
(p, comp, dir), Claude Tchamitchian (b), intempestif. • PASCAL AnQueTiL Vincent Courtois (cello), Samuel rohrer
éric échampard (dm), François Verly Géraldine Laurent (as), Paul Lay (p), Yoni (perc). Pernes-les-Fontaines,
(perc). Pernes-les-Fontaines, Studio La zelnik (b), Donald kontomanou (dm). Studio La Buissonne, 12 et 13 juin,
Buissonne, 16 et 17 décembre 2014. Villetaneuse, studio Midi Live, mars 2015. 15 et 16 septembre 2014.

54 Jazz Magazine Numéro


Jazz Magazine Numéro678
678Novembre
Novembre2015
2015
intakt RecoRds
choc
magazine

SCHWEIZER – BENNINK
WELCOME BACK
Irène Schweizer: Piano
Han Bennink: Drums
Intakt CD 254

TOM RAINEY TRIO FEAT.


MARY HALVORSON AND
INGRID LAUBROCK
HOTEL GRIEF
Tom Rainey: Drums
Ingrid Laubrock: Saxophones
Mary Halvorson: Guitar
Intakt CD 256

Mette henriette
Mette Henriette
2 CD ECM / Universal
NOuVEAuTé. Mette henriette, ou plus précisément Mette
henriette Martedatter Rølvåg, vous connaissiez ? Moi non LUCIANO BIONDINI
plus. Voici donc une vraie révélation, doublée, émotion SENZA FINE
oblige, d’un choc.
Luciano Biondini: Accordion solo
D’emblée, le beau portrait noir et blanc de la demoiselle interpelle. Intakt CD 255
Le regard est perçant, le saxophone ficelé dans le dos. Cette jeune
Norvégienne native de Trondheim a l’air d’avoir du caractère.
(Ce n’est hélas pas si souvent qu’une photo illustre une pochette
ECM, et celle-ci donne instantanément envie d’en savoir plus.)
Deux disques ?! Est-ce bien raisonnable ? oui, parce qu’ils
sont aussi addictifs l’un que l’autre. Dans le premier, Mette
henriette, Katrine Schiøtt et Johan Lindvall esquissent comme
du bout des lèvres et des doigts quinze vignettes frissonnantes CHICO FREEMAN
de sons. « Pleine lune d’automne / Des vapeurs rampent / À HEIRI KÄNZIG
la surface de l’eau » : tel un haïku d’hattori Ransetsu, chacune
d’entre elles stimule l’imagination et provoque une émotion d’une THE ARRIVAL
exquise douceur, intense et fugace à la fois. Dans le second, dix Chico Freeman: Tenor Saxophone
musiciens les rejoignent pour interpréter une sinfonietta en vingt Heiri Känzig: Double Bass
mouvements d’un raffinement extrême, qui laissent à chaque
Intakt CD 251
instrumentiste l’occasion de donner de la voix, entre cris (Wildheart)
et chuchotements (But We Did). A la fin (dans Wind On Rocks et
Bare Blacker Rum notamment), tout ce beau monde nous donne
l’impression de danser sur des sables mouvants. Mette henriette,
qui n’a jamais étudié la composition, a rapidement « trouvé très
naturel d’essayer de donner forme aux paysages sonores » qu’elle
avait en tête. Ainsi, on ne se lasse pas d’explorer les paysages
sonores habités par cette saxophoniste de la ligne claire et, bien ULRICH GUMPERT QUARTETT
plus vite que prévu, “Mette henriette” a fini par rejoindre d’autres A NEW ONE
chefs-d’œuvre tangentiels qui nous hantent depuis des lustres : le
Jürg Wickihalder: Saxophones
seul et unique album solo de Mark hollis, “vernal Equinox” de Jon
hassell, “Strjon” d’Arfe henriksen ou “Died In The Wool” de David Ulrich Gumpert: Piano
Sylvian... • FréDériC GoATY Jan Roder: Bass
Mette Henriette (ts), Henrik nørstebø (tb), eivind Lønning (tp), Sara Michael Griener: Drums
Övinge, karin Hellqvist, odd Hannisdal (vln), Bendik Bjørnstad Foss Intakt CD 257
(alto), katrine Schiøtt, ingvild nesdal Sandnes (cello), Andreas
rokseth (bandonéon), Johan Lindvall (p), Per zanussi (b), Per oddvar
Johansen (dm, scie). oslo, rainbow Studio, mai/août 2014. Intakt Records: www.intaktrec.ch · intakt@intaktrec.ch · Distribution:
Orkhêstra International · Shop for Digital Music: intaktrec.bandcamp.com

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 55


le guide
GROS PlAN

Frédéric
avec le concept, dont notamment Borey
Un secret
Adam Rogers aux guitares teintées
de funk et Jim Black au drumming
sans faille. Ils re-visionnent ces
classiques, arrangés suivant le

bien gardé
principe de l’exposé thème/solo,
faisant la part belle au lyrisme et à
la fougue de Krakauer. Certes, ce
calque (trop) similaire engendre sur
la durée une pointe de lassitude.
Mais la présence déterminante de
la violoniste Jenny Scheinman nous
permet de reprendre notre souffle,
comme dans l’émouvant People
extrait de Funny Girl, son phrasé
aéré venant élégamment se glisser
en contrepoint de la clarinette.
C’est certainement sur scène
que le projet trouve son ampleur,
JEAN -BAPTISTE MILLoT

accompagné de la projection
de films originaux créés par les
graphistes new-yorkais Light of
The Day, sons et images alors
connectées. • JeAn-Pierre ViDAL
David krakauer (cl), Jenny
Scheinman (vln), rob Burger (p, Apprécié par la critique et adoubé par ses confrères, ce saxophoniste reste
cla), Adam rogers (elg), Greg Cohen toujours, à 52 ans, l’un des secrets les mieux gardés du jazz français.
(b), Jim Black (dm).
new York, MSr studio, 2015.
comme on aimerait que cet excellent qu’après avoir obtenu son cA de saxophone
saxophoniste à la verve lyrique connaisse enfin classique que Fred s’est enfin autorisé à se
 

la renommée qu’il mérite. il a pourtant ses lancer dans l’aventure de l’improvisation pour
fans ! comme le grand ténor Jerry Bergonzi décrocher dix ans plus tard son cA de jazz.
qui ne tarit pas d’éloges à son égard et
salue son « son jeu inspiré, rêveur, méditatif, Aujourd’hui, outre le trio avec Zool Fleischer
parfois mélancolique mais toujours soulful ». et denis leloup (qui peine malheureusement
Mélancolique ? « Quand on se veut jazzman, à trouver des concerts), le sax originaire de
confesse Fredéric, on ne peut pas et on ne Belfort a trois groupes sur le feu : “unitrio”,
Léandre / doit pas cacher ce que l’on est et ce que l’on cofondé il y a plus de dix ans avec damien
Delbecq / houle a vécu. Il ne faut jamais tricher avec ça, son Argentieri (orgue hammond) et Alain Tissot
(batterie), le quartette sans piano “lucky dog”
14, rue Paul Fort, Paris corps, sa sensibilité, son histoire. » ce qui
frappe d’emblée chez Borey, c’est la beauté avec le trompettiste Yoann loustalot et surtout
1 CD Leo Records / orkhêstra
du son. de son ténor s’échappe toujours avec son nouveau quintette composé de Michael
Nouveauté. Musique Felberbaum (g), leonardo Montana (p), Yoni
élégance et souplesse une sonorité épaisse
“contemporaine” par excellence, Zelnik (b) et Fréderic Pasqua (dm). c’est avec
l’improvisation libre est une et pleine, chaude et moelleuse, légèrement
mouillée, toujours admirablement timbrée. ces brillants complices qu’il sort ce mois-ci
création mondiale permanente. Un un nouvel album pour le label de Jordi Pujol,
lieu, un moment, une rencontre Pour expliquer ce son, il est bon de préciser
producteur catalan qui lui est fidèle depuis
de musiciens vouée à l’éphémère, que Fred joue sur un Selmer Balanced Action
2007 avec déjà cinq albums parus sur Fresh
sauf quand on l’enregistre pour de 1940 et utilise, comme Getz, les anches Rico
ceux qui n’ont pas pu en être. Ici, Sound New Talent. l’opus s’appelle “Wink”,
les plus fortes (4h). « Cela vient de ma longue
le titre indique le lieu comme pour clin d’œil admiratif à ces grands compositeurs,
éducation classique où l’on apprend à muscler
souligner cet espace-temps propre ces forts en thèmes que sont Porter, Gershwin
le facial et travailler le masque. Du coup, et les autres. « Arranger un standard est
à l’improvisé. À cette adresse j’ai appris à aimer la résistance, à maîtriser
(erronée sur la pochette, car il pour moi une forme de composition, à partir
l’anche dure sur le bec et lutter contre mon du moment où la mélodie que l’on décide de
s’agit du 19 et non du 14), hélène
Aziza accueille depuis plusieurs instrument pour mieux me persuader que c’est déranger est habitée émotionnellement. Tout
années des rencontres d’artistes, moi qui à la fin vais gagner. » en préservant la courbe mélodique, j’ai voulu
sur le modèle des salons privés bousculer harmoniquement ou reconfigurer
d’antan. Ce 24 novembre 2013, Frédéric Borey est sans l’ombre d’un doute un sr le plan rythmique chaque standard pour
c’est même la première rencontre enfant du jazz. Mais tardif. « Ma découverte lui offrir un nouveau visage. » On attend avec
entre ces trois-là, qui ont pourtant de cette musique date seulement de mes impatience d’entendre le résultat d’une telle
été réunis maintes fois deux à trente ans. Grâce d’abord à l’écoute de opération esthétique de déstandardisation. •
deux (on pense au duo de longue Dexter Gordon, puis de Joe Henderson et PASCAL AnQueTiL
haleine entre la contrebassiste et Stan Getz, mes vraies racines en jazz. » cette
le clarinettiste). Que nous réserve CD “Wink” (Fresh sound new talent / socadisc).
révélation ne s’est faite qu’à la suite d’un
la trace sonore – en deux longues
pièces et cinq plus brèves – de ce intense et intensif apprentissage classique ConCert Avec Wink le 9 novembre à Paris (Péniche
au conservatoire de Belfort avec Bernard Le Marcounet). Duo avec olinka Mitroshina le 20 novembre
concentré d’inédit et d’instantané ? et le 11 décembre à Mulhouse (Hotel du Parc)
Des propositions parfois hésitantes Jeannenot comme professeur, puis à ceux
de l’un vers l’autre (#1) ; des de Nancy, Paris et Besançon. ce n’est donc

56 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


phases de repli alternant avec l’interdépendance dont chacun
d’autres où chacun déborde s’accommode pour exprimer sa
délibérément de “son” territoire : propre personnalité. Le trompettiste Nouveau portrait de référence
polyphonisation-vocalisation de la évolue dans ce climat avec l’aisance dʼune durée de 4 heures qui raconte la vie,
contrebasse, piano préparé devenu qu’on lui connaît (Well You Needn’t).
ensemble de percussions, jeu à Son swing, la suavité de sa sonorité la musique et la carrière de Frank Sinatra.
deux clarinettes ; de superbes confèrent un charme supplémentaire Edité dans le cadre des célébrations
moments de contemplation sonore à un ensemble qui a tout pour
(#2 vers 2 :00) ou d’ivresse séduire. • JACQueS ABouCAYA des 100 ans de sa naissance.
rythmique hypnotique (#4) ; Benoît Thevenot (p), François Gallix
l’exploration patiente des interstices (b), nicolas Serret (dm),
du son et du rythme, sans céder eric Le Lann (tp). Studio Jazzanas,
15 et 16 février 2015.
jamais au bruitisme ni à la volonté
d’impressionner. L’enregistrement
dénature peut-être la fugacité
de l’improvisation totale, mais
quand elle est jouée à ce niveau il
rend aussi justice à sa dimension
composée, qu’une écoute unique,
enrichie mais distraite par la
performance vivante, permet
rarement de goûter. • VinCenT CoTro
Joëlle Léandre (b), Benoît Delbecq christian
(p), François Houle (cl), Paris, 9 rue
Paul Fort, 24 noveembre 2013.
McBride Trio
out Here
1 CD Mack Avenue / harmonia Mundi
Nouveauté. Le trio que forment
Christian McBride, le jeune pianiste
Christian Sands et le batteur
Ulysses owens, Jr., remarqué
auprès de Kurt Elling, ne prétend
pas proposer le moindre concept
révolutionnaire, ni dans le leadership
La version de luxe contient le documentaire « All Or Nothing
Magnetic orchestra traditionnellement dévolu au piano,
At All » en 2 DVD, le concert des « adieux » de 1971
now ! mais abandonné depuis des lustres,
ni dans la circulation des idées en DVD et en CD, le DVD de lʼinterview de Walter Cronkite
1 CD Autoproduction / magnetic-orchestra.com
au sein du groupe. De Nicholas sur CBS en 1965, 2 livrets dont la reproduction de lʼarticle
Nouveauté. Salué à plusieurs Payton à Pat Metheny en passant du magazine LIFE en 1971 et 6 reproductions photo.
reprises par Franck Bergerot dans par James Brown, la liste des
ces colonnes (nos numéros 653 collaborations de McBride montre
et 655), et à juste titre, revoici le assez son éclectisme. Ici, le swing
Magnetic orchestra. on n’aura garde est au rendez-vous, d’une façon pour
de le confondre avec le Magnetic ainsi dire naturelle que le disque
Big Band de Ludovic de Preissac ne dément à aucun moment. Si le
et Gilles Réa, une formation à qui contrebassiste assume le rôle de
l’on doit deux excellents albums régulateur, remarquable de surcroît
chez Black & Blue, en 1999 et en tant que soliste, singulièrement à
2004 [NDLR : et avec le Magnetic l’archet (I’ve Dreamed) ou dans de
Ensemble d’Antonin Leymarie, belles interventions pizzicato (Ham
Thomas de Pourquery et quelques Hocks And Cabbage, blues introduit
autres]. Rien de semblable, sinon une par Christian Sands, Hallelujah
même énergie propre à galvaniser un Time, à la coloration churchy), ses
auditoire. voilà qui, déjà, justifierait partenaires lui fournissent une
une commune appellation. Ici, le Disponible en double DVD, double Blu-ray
réplique des plus pertinentes. Sands
personnel est certes plus réduit – un tire brillamment son épingle du et en coffret luxe 3 DVD + CD
trio “classique”, piano-bass-batterie, jeu, entre autres sur Easy Walker dès le 20 novembre 2015
auquel Eric Le Lann apporte, sur de son mentor Billy Taylor, dont il
plusieurs plages, un concours fait ressortir toute la profondeur.
des mieux venus. Aux côtés de Le répertoire, varié, fait voisiner
morceaux connus, le répertoire des standards éprouvés et deux
fait sa place à des compositions compositions signées McBride.
originales, dont le méditatif Hummm L’album se clôt sur un classique du
Now où se font jour la sensibilité rhythm’n’blues, Who’s Making Love,
du pianiste et son art tout monkien hommage à Johnny Taylor. Comme www.eagle-rock.com | www.franksinatra.com
d’utiliser les silences. Les autres un retour aux premières amours. •
pièces ressortissent d’un bop JACQueS ABouCAYA
allègre, comme Stellar et ses Christian McBride (b), Christian
réminiscences à peine suggérées Sands (p), ulysses owens, Jr. (dm).
de Stella By Starlight. Un climat de new York, The Village Vanguard,
liberté. Une indépendance dans 12-14 décembre 2014.

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 57


les ch cs choc
magazine

Jen Shyu & Vol Pour Sidney Michael Tony Bennett


Jade Tongue (Aller) Wollny Trio & Bill charlap
Sounds And Vol Pour Sidney (Aller) nachtfahrten The Silver Lining : The
Cries of The World 1 CD Nato / l’Autre Distribution 1 CD ACT / harmonia Mundi Songs of Jerome kern
1 CD Pi Records / orkhêstra RéédiTiON. Bien peu de producteurs NOuVEAuTé. Mon enthousiasme pour 1 CD Columbia / Sony Music
NOuVEAuTé. Pour ceux qui ne sont capables de réunir autour le récent “Weltentraum live” se NOuVEAuTé. Quarante ans après son
connaîtraient de Jen Shuy que d’une passion commune autant de prolonge avec ce nouvel opus studio. duo avec Bill Evans, Tony Bennett
la vocaliste officiant au sein de musiciens a priori issus de sphères prouve que l’on peut, élever l’art de
différentes formations de Steve musicales que seule la Brigade du Le répertoire reste varié dans ses la romance à sa quintessence.
coleman, voici une excellente Swing aimerait rendre étanches. sources, mais dominé ici par les
occasion d’élargir le spectre, en originaux. La grande force vient de la « I’m really a jazz interpreter of the
attendant que la chanteuse et son Jean Rochard, lui, est perméable aux construction d’ensemble à partir de American Songbook », affirme le chanteur,
groupe Jade Tongue viennent enfin idées et aux styles. Quand il “produit” un formats courts, et de la puissance de et de préciser : « Jazz keeps me on my
se produire sous nos latitudes. disque – quel drôle de verbe quand on renouvellement de l’expression, dans une toes » (« C’est le jazz qui ravive à mon
y pense –, il aime raconter une histoire, parfaite unité de ton. Tout commence âge mon désir de chanter »). C’est vrai, le
Et le moins que l’on puisse dire est puis une histoire dans l’histoire, puis dans la demi-teinte : le thème de jazz est toujours son carburant essentiel
qu’il y a ici matière à découverte. on une autre, et encore une autre. histoire Questions In A World Of Blue (tirée de la et incarne sa philosophie d’interprète :
connaît le timbre et la tessiture de Miss (on y revient) de convier toujours plus série culte Twin Peaks) est simplement ne jamais chanter une chanson deux
Shyu – et ceux qui les ont entendus ont d’amis et de compagnons de route, qu’il énoncé, ralenti et harmonisé en choral fois de la même façon. Accompagné par
en général été plus que favorablement n’aime rien tant que conforter dans leur dénudé. Le minimalisme règne encore l’excellent Bill Charlap ou en trio avec
impressionnés. Mais ceux qui l’ont crue (souvent immense) savoir-jouer ou mettre dans l’inquiétant Nachtmahr aux larges Peter et Kenny Washington, Bennett nous
limitée à une forme atypique – et, disons en danger – musicalement bien sûr, ce résonances, d’allure inachevée, tandis offre une leçon de musique sur quelques
le, un peu “barrée” (rien de péjoratif ici) – qui, dans ce merveilleux concept album que Der Wanderer illumine une trame immarcescibles succès de Jerome Kern.
de vocalise onomatopéique entendront dédié à l’une des voix majeures du jazz, harmonique déconcertante de simplicité. Sens de la forme, souplesse du swing,
ici une chanteuse de paroles (toutes lui avait permis de graver d’inoubliables Avec Motette n°1, la montée en mise en place, justesse, maîtrise des
d’elle) qui donne vie aux mots en ayant moments de musique. Ainsi, baignés par puissance s’organise, la tension monte. nuances et de l’intonation, contrôle
recours à des techniques de chant les lumières du génie solaire de Bechet, La ballade de Guillaume de Machaut De des dynamiques, tout est là, en toute
glanées au quatre coins de la planète Michel Doneda se sublime en duo avec desconfort précède un solo schumannien décontraction, sans emphase, avec
sans jamais chercher l’esbroufe ou le Elvin Jones ; Lee Konitz, au saxophone qui convainc par l’équilibre des voix et la toujours cette intelligence aiguë des
pittoresque. C’est que Jen Shyu s’est soprano, illumine notre journée avec conduite de la mélodie, toujours dans la paroles. « Avec l’expérience, j’ai appris ce
entourée d’un quartette strictement jazz As-tu le cafard ? ; Urszula Dudziak, concision (Metzengerstein). Au clair de la qu’il faut élaguer dans une chanson et ce
mais capable d’une amplitude stylistique habitée, joue au chat et à la souris avec lune porte bien son nom par sa lumière qu’il faut au contraire préserver. » Dans
impressionnante. Elle évolue en son Tony hymas, qui troque par ailleurs diffuse les trois notes s’y cherchant l’exercice du chant, Roland Barthes aimait
sein tant comme une instrumentiste son piano minéral pour des synthés comme en rêve pour ne se trouver opposer l’articulation à la prononciation,
(qui d’ailleurs intervient aussi sur cotonneux avec ses Lonely Bears, qui qu’au terme d’un intense crescendo. art plus subtil par quoi la musique vient
différents cordophones et percussions nous feraient presque pleurer avec leur Plus étrange encore, Nachtfahrten vient se lover dans chaque méandre de la
asiatiques) que comme une conteuse. interprétation de Si tu vois ma mère. Etc., clore cette série d’instantanés en offrant mélodie. Dès qu’il chante, Bennett est
Que l’on comprenne ou non la langue etc. Comme “Tenga Niña” de Jacques un paysage saisissant, rythmé par le un maître de la prononciation. Chaque
qu’elle prononce, on reste ainsi sous le Thollot il y a quelques mois (autre grand martèlement lourd et obsédant des syllabe est sertie dans le sens général
charme d’une voix qui module des mots classique du catalogue Nato), “vol Pour caisses. Toucher, cohésion, prise de son, de la phrase avec un naturel totalement
aux sonorités quasi magiques, épaulée Sidney” est réédité en digipack avec un finesse des dosages et des articulations relâché. Sans fard ni afféterie, Tony
par quatre musiciens en osmose totale joli livret (n’oubliez pas de lire le texte permettent au propos de Wollny chante à voix nue, blanche et voilée,
avec cette (osons le cliché !) “grande de Lol Coxhill, fort intelligemment traduit d’atteindre ici, au-delà de toute question admirablement timbrée, peu embrumée
prêtresse” du souffle coloré, fluide et en français) et, bien sûr, sa pochette de maîtrise formelle et technique, une par les ravages de l’âge et qui flotte avec
charnu. Celui-là même qui, paraît-il, originale qui pastiche avec tout l’amour et consistance inimitable. Difficile de résister la légèreté d’une fumée de cigarette. Pour
donna naissance à la vie, laquelle est – le respect qu’il faut pour l’art de Georges à une telle force suggestive, à cette preuve, Yesterdays, chanson à laquelle
c’est bien connu – la forme suprême de Remi. Un disque à écouter au moins exploration souvent fiévreuse, quelquefois il donne à chaque mot tout le poids du
l’improvisation. • THierrY QuénuM 714 fois. • noADYA Arnoux plus sereine, de tous les replis des vécu, à chaque phrase toute la densité
Jen Shyu (voc + divers instruments Avec Lol Coxhill / Pat Thomas, British mondes intérieurs du pianiste, qui d’une existence pleine, vive et épanouie.
détaillés sur la pochette), Ambrose Summer Time ends, elvin Jones / Michel deviennent les nôtres. • VinCenT CoTro
Doneda, Taj Mahal, The Lonely Bears, • PASCAL AnQueTiL
Akinmusire (tp), Mat Maneri (vln alto), Michael Wollny (p), Christian Weber
Steve Beresford, Charlie Watts, Pepsi, Lee Tony Bennett (voc), Bill Charlap +
Thomas Morgan (b), Dan Weiss (dm). (b), eric Schafer (dm). Ludwigsburg
konitz et urszula Dudziak. renee rosnes (p), Peter Washington (b),
Brooklyn, nY, 27 août 2014. (Allemagne), Bauer Studios, kenny Washington (dm). 2015.
18-21 août 2015.

58 Jazz Magazine Numéro


Jazz Magazine Numéro678
678Novembre
Novembre2015
2015
nos artistes en concert

GUILLAUME
PERRET
16 novembre

© E. Holba
KELLYLEE
EVANS
8 décembre
Théo ceccaldi
Petite Moutarde
© DR

1 CD oNJazz Records / L’Autre Distribution


NOuVEAuTé. Pour son premier album sous son nom,
ce violoniste nous plonge dans l’univers dadaïste de
l’avant-garde française des années 1920 avec huit pièces
composées pour accompagner la projection du film muet
Entr’acte de René clair et Francis Picabia.

A en croire l’intitulé de l’album et des différents morceaux, il faut


que ça pique ! Epices, condiments, piments et fruits acides sont
de la partie pour suggérer une musique de chambre fougueuse TEREZ
MONTCALM
et subtile, dense et contrastée, où la recherche formelle est au
service d’un discours musical cohérent, empreint de poésie.
L’imagination est au pouvoir dans ce quartette magique et
soudé, où violon, saxophone, contrebasse et batterie se fondent
harmonieusement dans une matière vivante qui surprend et 15 décembre
séduit à tout instant. Chaque instrumentiste révèle une richesse
de timbres impressionnante, que ce soit Théo Ceccaldi, magistral
dans Petit Citron Vert, Florian Stache, inventif dans Petit Poivre
© DR

de Sichuan, Ivan Gélugne, dans l’intro de contrebasse de Petit


Chipotle, ou Alexandra Grimal, avec sa sonorité si sensuelle
au ténor (Petit Raifort) ou son jeu délirant au sopranino (Petit
Wasabi). L’album est deux fois plus long qu’Entr’acte et peut fort
bien s’écouter sans l’apport du film – qui est systématiquement
projeté en concert. Ceccaldi ne cherche pas à écrire une Bo qui
colle systématiquement à l’image (Erik Satie l’avait fait avant lui
pour accompagner le film). Son but est de suggérer des climats et
une ambiance, en totale empathie avec les délires scénaristiques
de Picabia et la recherche formelle avant-gardiste de René Clair. SARAH
Mc KENZIE
Jamais sa plume n’avait été ainsi mise en valeur. • LioneL eSkenAzi
Théo Ceccaldi (vln, alto, comp), Alexandra Grimal (ts, ss, sopranino,
voc), ivan Gélugne (b), Florian Satche (dm). Malakoff, Studio Sextan,
janvier 2015.
4 février
© P. Levy-

N°licence 2-1053740

LOCATIONS POINTS DE VENTE HABITUELS

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 59


le guide

John McLaughlin Roscoe Mitchell


Black Light Quartet
1 CD Abstract Logix / La Baleine Celebrating Fred Anderson
✪✪✪✪
1 CD Nessa / orkhêstra
Nouveauté. « Le concept original
de cet enregistrement ressemble ✪✪✪✪
à ce que je faisais il y a quelques Nouveauté. Le co-fondateur
années, appelé Industrial Zen, de l’Art Ensemble of Chicago
dans lequel je travaillais avec des est à l’honneur alors que se
“dessins sonores”, qui sont soit fêtent les 50 ans de l’AACM.
des paysages sonores ou des
En mars, au Constellation de
éléments rythmiques qui ont la
capacité d’évoquer des sentiments Chicago, il rendait hommage au
et des visions imaginaires. » o.k. puissant mais discret ténor Fred
John. Donc, histoire de vérifier si le Anderson (disparu en 2010),
concept de “zen industriel” faisait
bien son petit effet hallucinogène,
partenaire de Joseph Jarman
dès les tout premiers concerts de
GROS PlAN
j’ai fermé les yeux en écoutant l’Association. Dans l’investigation

Jean-Marc
ce disque au casque. Immersion sans relâche de toutes les
totale. Et ce qui a d’emblée
catégories de l’extrême sonore
réveillé mes M.o.R. [Mouvements
qui s’entend ou plutôt s’écoute

Padovani
Oculaires Rapides, NDLR], c’est la
présence de la vie. A 73 ans, John ici, le silence tient toute sa place,
McLaughlin rêve toujours d’aller ce dès l’entame de Song For
un peu plus vite que la musique. Fred Anderson. La libération

L’émotion Motian
Ses soli fiévreux en témoignent. de l’énergie (le déluge sonore
JEAN -BAPTISTE MILLoT

Plus que jamais, il fuit les tentations d’Hey Fred) et l’interrogation


revivalistes. Malgré tout, des étoiles des fondamentaux de l’acte
filantes surgissent sur l’écran noir
musical – qu’est ce que jouer
de nos paupières baissées. Elles
charrient des souvenirs d’albums ensemble, que sont le rythme,
étrangement mésestimés. En vrac : le son, l’intensité... – trouvent
“Electric Dreams” (1978), “Belo leur expression privilégiée dans Avec son nouveau disque en hommage au grand batteur
horizonte” (1981), “Mahavishnu” l’improvisation collective et les Paul Motian, ce saxophoniste revient au devant de la scène.
(l’album du comeback de 1984), confrontations, réactions ou
“Indutrial Zen” (2006)... “Black superpositions qu’elle occasionne. depuis son apparition au tournant des et compositeur, tout en trouvant
Light” est un disque fluide et Mais le programme s’appuie années 1980, Jean-Marc Padovani n’a incontestablement sa voix (son
élégant où la chaleur organique jamais dévié de son cap esthétique, accent !) dans ce métissage assumé,
aussi sur des compositions dont
fait bon ménage avec les sonorités
synthétiques. John McLaughlin le touchant hommage d’Anderson idéologique et imaginaire, résolument n’a pour autant jamais cessé de se
a depuis longtemps inventé son à sa femme (Bernice). A partir orienté au Sud. Saxophoniste revendiquer de l’histoire du jazz et de
propre langage : il le parle (il le joue) d’une autre de ses pièces (Ladies flamboyant à la sonorité rauque et ses grands créateurs – on se souvient
avec la détermination d’un jeune In Love), Mitchell délivre au accidentée, marqué par le lyrisme de son bel album “Out, A Tribute To
homme. Et c’est somme toute soprano une impressionnante brut d’Albert Ayler autant que par le Eric dolphy”, ainsi que de sa mise en
impressionnant. • FréDériC GoATY leçon d’invention sonore – “baroquisme latino” de Gato Barbieri, musique du “Mingus, cuernavaca” du
John McLaughlin (elg, g, g synth), distorsion, trituration, coloration, Jean-Marc Padovani a su tracer son poète Enzo cormann.
Gary Husband (cla, dm), etienne
M’Bappé (elb), ranjit Barot (dm, vocalisation. Il faut aussi saluer chemin singulier sur des territoires
voc). Londres, eastcote Studios, la performance parfois sidérante syncrétiques alors peu défrichés. En consacrant aujourd’hui la totalité
Monaco, Mediastarz, mars 2015. déclinant en orchestres hybrides d’un disque à l’univers du batteur et
de la violoncelliste Tomeka
Reid (The Velvet Lounge) et sa (le Minotaure Jazz Orchestra, le compositeur américain Paul Motian,
capacité à renouveler ses modes quartet chants du Monde avec Jean-Marc Padovani rend hommage
d’interaction avec ses partenaires. claude Barthélémy) et autres projets à une autre figure iconique de son
Et bien écouter jusqu’au bout transculturels ambitieux (“Tres horas panthéon personnel : « Les gens de
(Cermak Road) : ça swingue de Sol”, “Jazz Angkor”, “liqaa”) une ma génération ont découvert Paul
terrible ! • VinCenT CoTro conception de la musique ouverte aux Motian au sein du Liberation Music
roscoe Mitchell (saxes), Tomeka discours régionaux (le vaste champ Orchestra puis du fameux quartette
reid (cello), Junius Paul (b), de l‘Occitanie) comme aux diverses de Keith Jarrett avec Dewey Redman.
Vincent Davis (dm). Chicago, traditions venues du monde entier Mais le grand choc, ç’a été quand
Constellation, 27 mars 2015. (flamenco, musiques d’Afrique du Nord je l’ai vu sur scène en 1981 à la tête
ou du cambodge…), le saxophoniste de son quintette avec Joe Lovano et

60 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


conSeRVaToIRe national SUPÉrieur
de MUSiQue et de DaNSe De paRIS
Bruno mantovani, directeur

certificat
Jim Pepper aux saxophones, Bill
Frisell à la guitare et Ed Schuller
à la contrebasse. J’ai découvert

d'aptitude  
une musique à la fois très libre
et habilement structurée, mais
surtout fondée sur des thèmes
d’une telle évidence mélodique,

de Jazz
d’une telle “naïveté” qu’on les
aurait dit inspirés de musiques Mostly other
traditionnelles. J’y ai perçu un People Do
lien direct avec mes tentatives
de l’époque, de métisser le jazz
The Killing
Mauch Chunk une formation accueillie par le
avec la musique occitane. Motian
est devenu une vraie référence 1 CD hot Cup / hotcuprecords.com département de pédagogie depuis
pour moi et, en 1997, j’ai fini Nouveauté. Ceux qui pensaient la rentrée 2012/2013
par l’inviter, en compagnie de que le départ du trompettiste Peter
Jean-François Jenny-Clarke, à se Evans et l’arrivée d’un pianiste à Interviennent notamment
joindre au duo que nous formions sa place inciteraient MoPDtK à dans cette formation
alors avec Jean-Marie Machado calmer sa tendance à la frénésie
avaient tort. Il y a chez ce quartette Pierre de Bethmann, Carine Bonnefoy, guillaume de Chassy,
au piano pour enregistrer le un syndrome que je qualifierais Riccardo Del fra, Andy emler, frédéric favarel, Daniel Humair,
disque “Takiya ! Tokaya !”. » de “priapisme musical” : une françois Jeanneau, Vincent Lê Quang, Benjamin moussay, Bojan Z …
incapacité à “débander” qui finit Hervé Sellin, coordination
c’est donc fort d’une admiration par lasser. Sur les sept morceaux
sans réserve, enrichie de cette composés par le bassiste-leader
expérience musicale partagée, Moppa Elliott, on chercherait en formation ouverte
que Padovani a entrepris cette vain une ballade ou un tempo sur coNcours d’admiSSion
relecture intime de quelques medium. Jon Irabagon – qui aux candidats titulaires d’un DfS du Conservatoire de Paris
uns de ses thèmes : « Pour bien se limite à l’alto – fait de ce obtenu depuis moins de 5 ans dans la discipline Jazz
comprendre la musique de Motian, saxophone un usage proche de —
l’hystérie, ce que lui permet une oU aux élèves ayant validé la première année de 2e cycle
jusqu’à son jeu de batterie, il
virtuosité époustouflante mais supérieur au Conservatoire de Paris dans la discipline Jazz.
faut toujours se souvenir que
qu’on aimerait voir contenue
la mélodie est motrice. Dans ce par des choix esthétiques moins
disque, j’ai choisi des morceaux exhibitionnistes. Quant au nouveau formation ouverte
renvoyant dans leurs formes venu, c’est un véritable pianiste- sur coNcours d’admiSSion
souvent très simples aux modes à-tout-faire, aussi à l’aise dans le et d’aDmiSSiBilité
de la musique traditionnelle en classique que dans la bossa, dans aux candidats ne réunissant pas au moins
essayant de mette en évidence le jazz trad que dans le free. Bref l’une des conditions ci-dessus.
ce que sa musique doit à ses un “monstre” dont on ne sait trop
racines arméniennes.” Pour où se situent l’ancrage, les goûts, InscriPtions
la sensibilité propres. Le choc de du 2 novembre au 10 décembre 2015
donner pleinement corps à cette
la découverte des quatre “tueurs” sur internet : www.conservatoiredeparis.fr
intuition, Padovani a intégré le —
doudouk de didier Malherbe initiaux de MoPDtK une fois amorti,
DateS deS épreuves d’aDmiSSiBilité
le sourire que suscitait leur sens
à l’instrumentation d’un du 7 mars au 3 avril 2016
du second degré une fois effacé,
quintette composé, avec Paul on pouvait attendre une amorce
Brousseau, claude Tchamitchian de maturation à l’occasion du DateS deS épreuves d’aDmiSSion
et Ramon lopez, de musiciens changement actuel. or on entend Le 21 avril 2016
naturellement portés vers toujours s’ébattre un quarteron de épreuve écrite de commentaire d’écoute et analyse. (3h)
l’expérimentation et l’ouverture post-ados ravis de montrer leurs épreuve écrite de commentaire de texte. (4h)
à l’altérité. une façon pour le biscoteaux à la cantonade. Il existe —
des aires de jeu pour ça, non ? Du 5 au 30 septembre 2016
saxophoniste, à travers l’univers
• THierrY QuénuM un entretien avec le jury comprenant un test
de Motian, de continuer d’enrichir d’observation sur la base de la prestation musicale
son propre monde, « fondé sur la Jon irabagon (as), ron Stabinsky d’un groupe d’élèves et des questions portant sur la
(p), Moppa elliott (b), kevin Shea
rencontre plus que sur la fusion ». (dm). new York, Yonkers, culture musicale et générale du candidat, sur ses
• STéPHAne oLLiVier 23 mai 2015. motivations et ses conceptions de la pédagogie.
CD “Motian in Motion” (naïve / naïve).
ConCerts Quintette Motian in Motion le Jean-Marc
7 novembre au D’Jazz nevers Festival, du
20 au 22 à Paris (Chapelle des Lombards).
Padovani Quintet
Motian in Motion
sextette Bab Cantilenes le 3 à Paris
(Institut des cultures d’Islam) 1 CD Naïve / Naïve RenSeignements département
“Canciones” avec Paloma Pradal le 24 à Nouveauté. tél. 01.40.40.45.81 de pédagogie
Boulogne (Carré Bellefeuille) Accaparé depuis pedago@cnsmdp.fr
des années par
des musiques
pour la danse
et le théâtre,
Pédagogie CA 2016-17 jazz_pub_mep_formats variés_1410.indd 1 13/10/15 17:02

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 61


le guide

hORS
PiSTE
Jean-Marc Padovani réapparait magazine
éprouver la sensation d’éternité. somnolents ou les soirées en

xDR
régulièrement sur la scène du Les musiques qui ont fait la demi-teinte, ce disque est pour
jazz, nous rappelant avec ce réputation de films tels que Les vous. Car si déjà Jean-François

Joni Mitchell
quintette qu’il eut à la fin des Aventuriers ou La Scoumoune Blanco et Matthieu Jérôme
années 90 tout un projet avec infusent doucement dans son forment à eux seuls une paire
Paul Motian, dont le disque
“Takiya ! Tokaya !” paru alors sur par Fred hersch cœur. Elles lui servent à ce
moment de trampoline pour
vitaminée, leur association avec
l’éclatante batterie de Philippe
le label hopi fut l’aboutissement. l’évasion. Elles sont bien plus Gleizes et, selon les morceaux,
Pour rendre hommage au grand Les jazzmen n’écoutent pas que du jazz ! Ce que cela : une nostalgie déjà, le violoncelle tendu et engagé de
batteur américain d’origine mois-ci, le pianiste Fred Hersch nous présente celle de l’enfance et de ses étés vincent Courtois, la contrebasse
arménienne, le saxophoniste l’album “Blue” de la chanteuse Joni Mitchell. lumineux. Devenu leader du battante de Jean-Philippe Morel,
français a eu l’idée d’incorporer Sacre du Tympan, Pallem est l’alto virevoltant de Thomas de
à son quintette un instrument à invité en 2008 au festival Jazz Pourquery, le vibraphone étoilé de
anche double (comme le hautbois) à la villette où il célèbre l’une David Neerman, les voix célestes
typique de cette région du monde « J’ai grandi avec les de ses figures aimées. Il pouvait d’Élise Caron et Tea hjelmeland,
à cheval sur la Turquie, la Géorgie aussi bien, tant il les chérit, le cornet à la fois cuivré et
folk songs, et Joni
et l’Iran. Et qui mieux que Didier rendre hommage à Francis Lai acoustique de Médéric Collignon
Mitchell s’inscrit aussi ou Michel Magne mais il choisit et la guitare ouverte de Maxime
Malherbe, véritable musicien
du monde, pouvait jouer ici du dans cette tradition, François de Roubaix, comme pour Delpierre font merveille en leur
doudouk, comme il le fit dans tout en lui ouvrant de repartir en enfance. Attaché à ce compagnie. on se régale et on
son hadouk Trio. Pas étonnant nouvelles perspectives. compositeur tragiquement disparu se régénère, on s’emballe et on
alors que ce disque ait des À l’époque de la sortie il y a quarante ans, Pallem vient se déballe, on se pince et on se
parfums d’orient, d’autant que le de “Blue”, j’étais de sculpter un monument qui ne libère. Le tout avec des plages
leader est depuis longtemps un Joni Mitchell encore au lycée. Je s’effritera pas. Ce spécialiste des de repos, presque de méditation.
défenseur des mélanges culturels “Blue” ne m’étais pas encore orchestrations impeccablement Autant dire une excellente
reprise, 1971 réalisation au service de l’âme, en
et des musiques du sud. Au milieu mis au jazz, mais cuivrées fait cette fois étinceler les
d’un casting impeccable, on j’étais déjà capable claviers synthétiques des années effet, comme totalité organique
retrouvera le gros son de ténor et d’improviser au piano, et j’avais plutôt une 1970 et 80 en donnant voix, supposée des corps. •
le lyrisme coltranien de Padovani bonne oreille. Quand j’ai entendu cet album notamment, à Barbara Carlotti, PHiLiPPe MéziAT
(Arabesque) mais aussi la Alice Lewis et Juliette Paquereau. Jean-François Blanco
pour la première fois, j’ai tout de suite été (programmation, samples,
contrebasse magique de Claude La traversée du monde sensible
frappé par les harmonies, qui ne ressemblaient de de Roubaix est vraiment scratches), Matthieu Jérôme (p,
Tchamitchian qui nous offre un
solo d’anthologie sur It Is. Loin
à rien de ce que j’avais pu entendre dans la réussie. on emprunte des
synthés) et, au fil des morceaux,
Philippe Gleizes (dm), Vincent
d’un hard bop que l’on revisite musique populaire. Je me mettais au piano, vicinales, celles de l’improvisation Courtois (cello), Jean-Philippe
chaque jour, un album dans et j’essayais de rejouer ces accords que je inventive, et l’on revit, avec des Morel (b), Thomas de Pourquery
ne comprenais pas. Plus tard, j’ai appris que airs aussi somptueux que Les (as), David neerman (vib), David
le courant des musiques sans Aknin (dm), élise Caron (voc),
frontières d’aujourd’hui. • Joni Mitchell avait souffert de poliomyélite Amis ou Boulevard du Rhum, ces Médéric Collignon (cnt, voc),
PHiLiPPe VinCenT dans sa jeunesse, et que c’est la faiblesse émotions de soleil et de fête que Tea Hjelmeland (voc), Maxime
Jean-Marc Padovani (ts, arr), de sa main gauche qui l’avait amenée à prodiguait le poète sonore de Delpierre (g). Paris, Studio
Chapi Chapo et qu’immortalise Lifestyle Sounds, 2014.
Didier Malherbe (doudouk), développer de nouvelles manières d’accorder
Paul Brousseau (p), Claude aujourd’hui l’’ensorcelante
Tchamitchian (b), ramon Lopez sa guitare. Pour moi, ç’a été une révélation.
(dm). Villetaneuse, studio Midilive, d’une certaine manière, ce sont ces accords mémoire du Sacre du Tympan. •
GuY DAroL
du 8 au 10 décembre 2014. inhabituels qui m’ont conduit au jazz : si vous
Fred Pallem (dir, elb, elg, g, cla,
comparez à Maiden Voyage d’herbie hancock, sifflet), rémi Sciuto (as, fl, cl, bcl,
harmoniquement, ça n’est pas si différent ! ocarina, cla, hp), Arnaud roulin
Je trouve qu’il y a aussi un côté jazz dans son (cla), Vincent Taurelle (p, elp, cla),
Vinz Taeger (dm, perc) + Daniel
chant, son phrasé, cette manière si personnelle zimmermann (tb, tu), Fabrice
d’interpréter avec naturel des rythmes et des Martinez (tp), Barbara Carlotti
mélodies complexes. la production de “Blue” (voc), Alexandre Chatelard (voc),
Alice Lewis (voc), Philippe katerine charlie Parker
est minimale : de la guitare acoustique, un peu (voc), Juliette Paquereau (voc). intégrale Charlie Parker 10,
de piano… c’est un album intemporel, dont Pantin, Studios Harry Son, février 1951-1952
les chansons ont été reprises par un nombre 2015 ; Paris, Cabaret Sauvage, 10
Fred Pallem & Le incalculable d’artistes, moi y compris, qui ai
septembre 2008. 3 CD Frémeaux & Associés / Socadisc

Sacre du Tympan enregistré My Old Man ou River. dans l’art de ✪✪✪✪


Présentent François de mettre des mots en musique, Joni Mitchell est Réédition. Si Bergerot nous
roubaix certainement la plus grande. » • apprend par ailleurs dans ces
1 CD Train Fantôme / L’Autre Distribution Au MiCro : PACAL rozAT pages qu’en 1949 Charlie
Parker avait tout dit, force est
✪✪✪✪ Dernier album de Fred Hersch : “solo”, Palmetto (2015), de reconnaître ici qu’il continua
Nouveauté. Sur la route des [CHOC] Jazz Magazine à nous raconter des histoires
vacances, entre houilles et d’autant plus merveilleuses
Trouville, Fred Pallem regarde qu’il s’y révèle en pleine forme.
le paysage en écoutant deux Panorama circus Certes, il ne semble plus avoir
cassettes Barclay que diffuse son Painter of Soul de quintette régulier, même si
père. Les thèmes de François celui de la merveilleuse séance
1 CD Life Style / L’Autre Distribution
de Roubaix accompagnent des Clef/verve du 8 août 1951
films que l’enfant, âgé de 8 ans, ✪✪✪✪ nous en donne l’illusion : Red
n’a pas vus. Il n’a pas besoin de Nouveauté. Si vous avez les Rodney (tp), John Lewis (p),
connaître le cinéma de Robert réveils délicats, les matinées Ray Brown (b), Kenny Clarke
Enrico et de José Giovanni pour assoupies, les après-midi (dm) pour les fameux Blues For

62 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


Alice, Si Si, Swedish Schnapps, jamais le fameux live au village
Back Home Blues et la revanche vanguard de 1979, tant pour
d’un nouveau Lover Man sur la l’inspiration que pour la qualité JAZZ
tristement célèbre version de
1946. Auparavant, on le croise
d’enregistrement. La présente
édition pèche ainsi par une qualité Au ciNé
au Birdland en mars 1951, d’écoute qui limite fortement le
olympien avec un Dizzy et un plaisir de l’auditeur. Quant au magazine
Bud qui ne le sont pas moins, jeu, il est conforme à ce que
plus Tommy Potter et Roy haynes l’on peut imaginer : un Pepper
(l’autre grand complice-batteur déchaîné, sonorité puissante, aigu
de Bird après Max Roach). À acide, registre grave surchargé,
quelques jours d’intervalle au fulgurances free quelque peu
même endroit, on retrouve les caricaturales, mais porté par
mêmes (sauf Billy Taylor à la une rythmique de haute tenue.
place de Bud) pour une captation Au-delà de la simple écoute –
de moindre qualité sonore (mais peu agréable – deux sensations
boude-t-on une énième version essentielles subsistent : celles
d’Embraceable You par Bird et d’un déploiement d’énergie
Diz ?). En avril 1951, Bird tape dont la constance impressionne,
généreusement le bœuf avec et celle d’un phrasé et d’une
Wardell Gray dans un club du qualité de placement rythmique
Massachusetts. Puis grand étonnamment intacts chez un
moment, Charlie Parker se produit Art Pepper pourtant marqué par
le 22 juillet au Municipal Arena les épreuves personnelles et
de Kansas City en guest star du l’inévitable manque de travail
big band de Woody herman… ça instrumental. Bref, un document
barde ! Rare : en août 1951, intéressant. • eriC QuenoT
Bird est dans le studio privé de Art Pepper (as), Milcho Leviev (p),
Lennie Tristano avec Kenny Clarke George Mraz (b), Al Foster (dm).
pour deux standards en trio. new York, club “Fat Tuesday’s”,

Le Shérif est en prison


15 avril 1981.
viennent ensuite les faces Clef
en grand orchestre dirigées par
Joe Lippman, la séance latine du
23 janvier 1952 (La Cucaracha,
etc.) et un Hot House télévisé Le jazz à l’écran n’est pas toujours là où on l’attend.
avec Dizzy que vous feriez aussi
bien de (re)voir sur youTube.
exemple : quand Count Basie surgit du désert dans
N’empêche que, vu les raretés ici Le Shérif est en prison de Mel Brooks.
rassemblées, l’état du catalogue
verve chez Universal et l’érudition Gros plan sur la sacoche, l’apparition furtive du big
du livret, ce volume vaut vraiment Romain Pilon Trio siglée Gucci. la caméra band de count Basie avait
le détour. • ALFreD SorDoiLLeT + Ben Wendel & recule. Sur son cheval, Bart, provoqué en son temps (Le
Détails dans le livret.
Walter Smith III le shérif (cleavon little), a shérif est en prison est sorti
The Magic eye fière allure. la musique de en 1974) l’hilarité d’un autre
1 CD Jazz & People / harmonia Mundi. fond, celle d’un big band leader de big band historique,
Nouveauté. L’écoute du troisième qui interprète April In Paris, charles Mingus, qui était allé
album en leader de Romain Pilon, swingue sévère. Au bout voir le troisième long-métrage
ainsi que la lecture du casting de quelques secondes, ô de Mel Brooks en compagnie
(deux invités de marque au surprise, l’orchestre de count de Ben Sidran. Mingus venait
saxophone ténor en la personne Basie apparait à l’écran ! de passer quelques jours
de Ben Wendel et Walter Smith chez le pianiste-chanteur, et
Bart s’approche du pianiste
Art Pepper III) fixent les choses : le guitariste,
à casquette, échange des celui-ci s’était dit que ce film
Live At Fat Tuesday’s après de fructueux séjours pourrait le divertir. Quand
aux Etats-Unis et un retour en sourires complices avec lui,
1 CD Elemental Music / Distrijazz France très actif, ne peut plus tape dans ses mains puis Basie apparut à l’écran,
Nouveauté. Les fans du Art décemment être considéré repart tranquillement vers la Sidran s’enfonça dans son
Pepper “dernière période” sont comme un “jeune talent”, mais bel ville qui attend son nouveau siège, craignant une réaction
probablement parmi les amateurs et bien comme un compositeur marshall, et dont les habitants négative de Mingus. il n’en fut
de jazz les mieux nourris : il ne et guitariste mûr, qui plus est de
ne savent pas encore qu’il est rien, bien au contraire, et son
s’écoule en effet pas une année stature mondiale : compositions rire franc et massif résonne
sans que des enregistrements de très “new-yorkaises” dont la noir...
sans doute encore dans la
concerts réellement inédits soient complexité rythmique n’entache
salle de cinéma... •
exhumés puis édités, la plupart en rien la grande fluidité et la dans cette parodie
FréDériC GoATY
du temps sous l’égide de Laurie lisibilité, jeu moderne, au meilleur politiquement incorrecte et
Pepper, son épouse. Ici, un live sens du terme, avec ce soupçon on ne peut plus décalée de
d’avril 1981, soit un peu plus d’un de Scofield pour la décontraction DVD le Shérif est en prison
western où les cow-boys
an avant la disparition d’un des tonique, et de Abercrombie (Warner home Video).
saxophonistes les plus poignants pour la délicatesse du phrasé. pètent et les chevaux se
et talentueux de l’histoire du jazz. L’équilibre du trio est évidemment prennent des bourre-pifs
Soyons clairs : rien n’égalera parfait. Les invités susnommés, (des bourre-museaux ?),

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 63


le guide

de constituer une limite, cette


fidélité à un répertoire familier
lui permet au contraire de se
réinventer sans cesse : « Quand
j’ai gravé pour la première fois
The Song is You, je le jouais
encore sur un tempo rapide,
comme c’est l’usage parmi les
jazzmen. Plus tard, je me suis
intéressé aux paroles de la
chanson, et cela m’a inspiré une
interprétation toute différente,
où les magnifiques harmonies
de l’original ressortent bien
davantage. »

Beauté du son, ampleur


des dynamiques, richesse
polyphonique : qu’il reprenne
Jobim ou Joni Mitchell, Monk
ou Juan Tizol, Fred hersch
transfigure tout ce qu’il touche,
dans un geste qui exige
GROS PlAN une disponibilité totale de
l’improvisateur. « Je continue de
jouer Bach tous les jours, mais

Fred Hersch
la plus grande partie de mon
entraînement consiste désormais
à mettre un chronomètre – par
exemple pour 30 minutes –

L’âge de la plénitude
et à improviser ensuite sur
un morceau pendant tout le
MARK NISKANEN

temps imparti, en poussant la


chose aussi loin que possible.
C’est comme une séance de
méditation, mais au piano ! »
En pleine maturité artistique à tout juste 60 ans, ce pianiste révéré par ses pairs de cette concentration sur
accède enfin à une plus large reconnaissance, avec pour carte de visite un nouvel album l’instant présent nait sans doute
solo qui pourrait bien être celui de la consécration. la fraîcheur intacte de son
jeu, promesse de lendemains
qui chantent… le cap de la
Tout arrive à qui sait attendre : pleine possession de ses moyens spontanéité du live. « En fait, j’ai soixantaine n’en est pas moins
bien que les connaisseurs depuis qu’il s’est remis d’un coma d’abord enregistré en studio, mais pour lui l’occasion d’un premier
s’accordent de longue date à prolongé en 2008. En France, c’est je n’étais pas satisfait du résultat : bilan, à travers l’écriture d’une
le considérer comme l’un des à l’invitation de Brad Mehldau – un j’étais seul, sans producteur pour autobiographie : « Le titre
plus grands pianistes de jazz ancien élève et ami – qu’il était m’aider, je n’arrêtais pas de me en sera Good Things happen
vivants, Fred hersch aura dû venu se produire le printemps reprendre, de juger mon propre Slowly [« les bonnes choses
patienter jusqu’à son soixantième dernier à la Phiharmonie 2, pour jeu… Par la suite, j’ai réécouté prennent du temps »], ce qui fait
anniversaire, le mois dernier, un mémorable concert en trio les bandes d’un concert que non seulement référence à ma
pour faire la une du magazine achevé par une standing ovation. j’avais donné dans une ancienne carrière, mais plus largement
Down Beat. Et les festivités ne « Des amis m’ont dit que ce genre église lors du festival de Windham à mon parcours de vie, mon
se sont pas arrêtées là : d’abord de choses n’arrivaient jamais l’année dernière, et j’ai réalisé homosexualité, ma séropositivité,
la création mondiale de Rooms à Paris ! », sourit le principal que c’était là que je m’exprimais les problèmes de santé que j’ai
Of Light, ambitieuse composition intéressé, qui – hormis quelques au sommet de mes possibilités réussi à surmonter… Il s’agit de
pour cinq chanteurs et orchestre dates en clubs – faisait là sa actuelles. » c’est donc ce récital raconter comment j’ai tracé mon
de chambre, puis une semaine en première apparition dans une salle qui se voit aujourd’hui publié, sans chemin pour devenir moi-même,
trio au Village Vanguard, et enfin de concert hexagonale. montage ni retouche. Au menu ? musicalement et humainement. »
un récital solo au New England uniquement des standards et des Encore un peu de patience :
conservatory, où il fit ses classes Pour qui voudrait le découvrir, compositions personnelles que parution annoncée en 2017 ! •
avant d’y enseigner lui-même rien de tel que de se plonger dans le pianiste avait déjà enregistrés PASCAL rozAT
durant un quart de siècle. Bref, une son dernier album, sobrement par le passé, dont deux – The CD “solo” (Palmetto / Codaex [CHoC]
célébration en fanfare, comme si le intitulé “Solo”. un enregistrement Song Is You de Jerome Kern et In Jazz Magazine)
monde du jazz prenait subitement sans préméditation aucune, où Walked Bud de Thelonious Monk
conscience du talent hors norme son génie pianistique trouve sa – figuraient même dès 1994 sur
de ce maître discret et intègre, en plus pure expression dans la son tout premier album solo ! loin

64 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


personnalités montantes du l’évidence à rapprocher les deux
saxophone ténor, se délectent : solistes. Soit une musique qui ne lES iMPORTS GiBERT JOSEPh
phrasé imaginatif, discours comporte peut-être aucune zone
riche, Wendel et Smith partagent d’ombre, ni aucun mystère, mais
avec Pilon certain refus du dont l’élégance emporte l’auditeur.
conformisme et du spectaculaire, • eriC QuenoT
mais donnent souvent eric Seva (bs, ss), Daniel
l’impression de vouloir remplir zimmerman (tb), Bruno Schorp (b),
le moindre espace disponible, Matthieu Chazarenc (dm). Maison
contrairement à un Romain Pilon Alfort, studio Yellow Sub, John Taylor
15, 16 et 17 janvier 2015. 2081
dont le discours sait constamment
aller à l’essentiel. • eriC QuenoT 1 CD CamJazz / harmonia Mundi
romain Pilon (g), Yoni zelnik (b), ✪✪✪✪
Fred Pasqua (dm) + Ben Wendel, Jazz Magazine aime le rayon jazz de
Walter Smith iii (ts). Videlles Nouveauté. C’est évidemment
(essonne), studio des egreffins, 18 le cœur serré qu’on découvre la
Gibert Joseph. Retrouvez les disques
décembre 2014 et 14 février 2015. photo de famille qui figure sur la coups de cœur de la rédaction, en vente
pochette du présent CD, image du lundi au samedi de 10 à 20 h,
qui prend valeur de souvenir et 26 boulevard Saint-Michel, 75005 Paris,
réunit le père, les deux fils qu’il ou sur gibertjoseph.com.
Sidony Box a eus avec Norma Winstone, et
le joueur de tuba oren Marshall. « Son timbre, son sens du rythme, sa façon de
+ Gianluca Petrella Depuis, le pianiste anglais nous combiner le blues avec le bebop, l’avant-garde…
1 CD Naïve / Naïve a quittés. on écoute encore avec Joe Henderson était un géant. » c’est John
ravissement la belle introduction
✪✪✪✪ Scofield qui le dit (lire p. 15). Joe henderson,
de piano à ce programme
Nouveauté. Lors des premières justement, honore de sa présence “Soft Focus”
Eric Seva écoutes, on a été frappé par la
entièrement de sa plume très
experte, les textes étant adaptés (Timeless / import Japon), le seul disque en
nomade Sonore manière picturale avec laquelle ce leader de l’ex-bassiste du Mahavishnu Orchestra,
par Alex Taylor d’une nouvelle de
1 CD Gaya Music Production / Socadisc groupe traite la pâte sonore. Les Kurt vonnegut, Harrison Bergeron, Rick Laird. En deux titres seulement (Outer
✪✪✪✪ arrière-plans sont aussi travaillés qui nous fait voyager dans un Surge, nouvelle version du génial Inner Urge de
que les premiers. Chaque détail monde ou l’indifférenciation 1964, et Tranquility, également de sa plume), il
Nouveauté. Eric Seva est un
compte. Par exemple, ces petits généralisée serait un progrès imprime sa marque via la sonorité unique de son
saxophoniste somme toute discret
scratches électroniques derrière et où les différences entre les saxophone suave et mordant. Avec Tom Grant au
sur la scène jazz stricto sensu. La
la mélodie enjôleuse, presque hommes seraient pourchassées. Fender Rhodes et Ron Steen à la batterie – “Soft
faute peut-être à ses nombreuses
pop, de Zèbre, le premier titre. Une musique “à programme” Focus” a été enregistré lors des mêmes séances
collaborations dans le domaine
Ensuite, avec Everything Is donc, fort bien agencée, bien
de la variété (il tourne depuis que “Mystified” de Grant, chroniqué dans cette
Gold, l’atmosphère devient plus conduite, très agréable dans sa
des mois avec la chanteuse Zaz, rubrique le mois dernier –, laird rappelle aux
sauvage. Dans l’introduction le modernité, où le tuba joue le rôle
par exemple). Pourtant, depuis oublieux son passé (et son phrasé) d’authentique
batteur Arthur Narcy bastonne non négligeable de l’humoriste
le début des années 90 et le jazzman, vétéran des clubs londoniens des
sans pitié. Le saxophoniste trouble-fête. Bien mise en
magnifique “yes yes yes” (groupe, années 1960, où il accompagna les grands
Elie Jalibert et le tromboniste valeur, la voix d’Alex Taylor est
et album, avec Rémy Chaudagne solistes américains de passage. “Soft Focus”
Gianluca Petrella (au cœur de la bonne découverte de cette
et David Pourradier Duteil), Seva n’est pas un chef-d’œuvre, mais un disque de
tous les morceaux malgré son session familiale. on attend avec
s’est réellement installé dans une
statut d’invité) rivalisent de impatience la publication à venir jazz straight ahead chaleureux, original, intimiste
catégorie assez retreinte : celle un duo de John Taylor avec Kenny
de ceux qui jouent le saxophone stridences et feulements. Leur et attachant. ce n’est pas si courant.
entente, la complémentarité de Wheeler, qui date de 2005. •
(tous les types en fait pour Seva,
ténor, soprano, sopranino, baryton) leurs timbres, la manière dont PHiLiPPe MéziAT Et revoilà John Scofield, cette fois au sein du
ils s’anticipent et se provoquent, John Taylor (p), Alex Taylor (voc), George Adams Don Pullen Quartet, dont nos
de manière absolument intraitable oren Marshall (tuba), Leo Taylor
sur un plan technique. Quant à la donne une intensité étonnante (dm). Ardingly (West Sussex), amis japonais viennent de rééditer le formidable
musique, le multi-saxophoniste à ce quatrième opus du groupe Curtis Schwartz Studio, 25 au 27 “Live At Montmartre” (Timeless), enregistré au
confirme dans ce troisième nantais. Au-delà de cette novembre 2014. club danois en avril 1985. l’esprit de charles
album en leader l’approche qui intensité, le disque se caractérise Mingus est très présent : George Adams, blues
a toujours été la sienne : de la par ses coups de volant rapides. shouter du saxophone ténor post-coltrane, don
beauté et du raffinement avant on ne tourne pas les pages, Pullen, pianiste aux soli gorgés de feeling gospel
tout, et un esprit très ouvert où le on les déchire. on passe des et de “ceciltaylorismes”, Scofield (que Mingus
jazz est constamment imprégné éclats de fureur à un lyrisme avait fort apprécié lors des séances de “Three
d’accents folkloriques. Ici, bien planant, comme dans Fighting
Of Four Shades Of Blues” en 1977) et dannie
qu’une influence bretonne soit Against Zombie Robots, véritable
odyssée sonore de 18 minutes.
Richmond, cet immense batteur, sont tous des
officiellement revendiquée, c’est
finalement un esprit “world” Les lignes de basse dansantes anciens accompagnateurs du maître. le premier
qui prévaut. L’expression de de Clémentine donnent une André Villéger morceau, T.J. (composé par Scofield, qui imrovise
un mémorable solo) est une leçon de swing,
Seva au saxophone ? Goût
infaillible, articulation précise et
tonalité plus légère à la fin du
disque. C’est éclectique, varié,
Philippe Milanta et le suivant, Flame Games, est furieusement
For Duke and Paul groovy. la pression ne retombe pas jusqu’à
riche, justesse parfaite, finesse inclassable, mais toujours habité.
et vélocité peu communes au • JeAn-FrAnçoiS MonDoT 1 CD Camille Prod / Socadisc Song Everlasting, qui clôt ce disque brûlant et
baryton. L’association avec elie Jalibert (as) Manuel Adnot ✪✪✪✪ indispensable. • JuLien FerTé
Daniel Zimmerman, tromboniste (elg), Arthur narcy (dm) + Gianluca Nouveauté. Plus qu’un
d’exception, fonctionne Petrella (tb). Saint-nazaire,
novembre 2014. hommage à Duke Ellington et
parfaitement, l’absence de à Paul Gonsalves (un des plus
guitare ou de clavier contribuant à

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 65


le guide

FOcuS

Voix du Nord
les vocalistes danoises se bousculent
grands solistes de l’orchestre
du maestro), c’est une véritable
célébration d’une musique
bruitistes comme de moulins à
musique (”Stop Freeze Wait Eat”)
et les mélodies pop de Morten
à nos frontières ces derniers temps. Sinne Eeg devenue universelle à laquelle se Quenild tiennent-elles dans les
et Mette Juul en témoignent. livrent ici villéger et Milanta. Leur traitements sonores qu’il fait subir
grande connaissance de l’univers à sa voix et son piano (“Personal
ellingtonien et de celui de Billy Piano”). S’ils sont envoyés à la
Ainsi Sinne Eeg… On se souvient que son “Face Strayhorn (compositeur fétiche du presse sous les qualificatifs de
the Music”, enregistré en petite formation lui avait Duke) alliée au talent que nous “jazz-percussions-sounds”, “jazz-
valu le prix du jazz vocal de l’Académie du Jazz leur connaissons leur permet electronic” ou d’ “Improvised-
l’an dernier, et que “Eeg-Fonnsesbaek” (duo avec de signer un enregistrement electronic”, le plus susceptible
les basses acoustique et électrique de Thomas qui sait aller loin des sentiers d’attirer l’attention de nos
Fonnesbaek) fut distingué par un choc dans notre battus. D’abord par un répertoire lecteurs est le “Piano Kammer”
numéro de juillet. Elle nous revient en ce début judicieusement choisi où des de Christian Wallumrød, ne
d’automne avec “The Beauty of Sadness” (1), morceaux peu connus (Major, serait-ce parce que ce musicien
paru en 2012 mais qui n’avait jamais été distribué en France. la ESP) côtoient quelques “tubes” ne nous est pas inconnu. Il alterne
chanteuse y a sorti les grands moyens : orchestre de chambre, Peter de Strayhorn, mais aussi par un des auscultations sonores des
Erskine à la batterie et répertoire allant de ses parti pris d’originalité qui leur tréfonds de son piano – où les
fait aborder ces titres célèbres résonances de cordes semblent
propres compositions à lennon-Mccartney, u2 ou
sur des rythmes ou dans des être isolées de leur attaque
Michel legrand. On admire, comme on regarderait tonalités nouvelles (I Let A Song et de leur contexte mélodique
une vitrine de Noël, ce beau travail un peu indigeste Go Out Of My Heart, Take The A – avec une sorte de dripping
en regard des deux opus précédents. Et puis Train). Ajoutons également qu’ils pianistique et des ostinato pop
Mette Juul [Révélation !], la concurrente, talonne signent chacun une composition, ou gospelisants qui pourraient
Eeg avec un “There Is A Song” (2) tout nouveau villéger avec son Paul’s Tales être empruntés aux concerts de
tout beau. la musique est de la dame, sauf un d’où il écarte tout mimétisme Keith Jarrett, mais livrés à des
leonard cohen et un Jobim, la voix suinte l’émotion avec Gonsalves et Milanta développements d’une extrême
au niveau du timbre, du phrasé et des inflexions. Mme Juul joue avec EKDE dont les allusions concision dont les discrets
également fort bien de la guitare, sait raconter ellingtoniennes n’empêchent en décalages harmoniques ou
une histoire et possède au plus haut point l’art rien le développement du jeu de rythmiques ne sont pas non plus
de bien s’entourer : Ambrose Akinmusire, Rodney plus en plus personnel de son étrangers aux effets titinnabulants
auteur. Mais rien de tout cela ne chers aux compositeurs Alfred
Green… et Nikolaj hess, pianiste d’une grande saurait être beau sans les qualités Schnitke et Arvo Part. •
finesse harmonique qui coproduit la séance. musicales exceptionnelles de ces FrAnCk BerGeroT
Après trois Eeg en rafale, comment ne pas craquer funambules qui réinventent avec Christian Wallumrød (p). Divers
pour Mette Juul ? • THierrY QuénuM un goût immense tout ce qu’ils se enregistrements live de 2013 à 2014,
proposent d’interpréter. Comme si retraités en studio.
(1) Stunt / UvM. (2) Universal Denmark / UvM.
la musique n’avait pas d’âge. •
PHiLiPPe VinCenT
André Villéger (ts, ss, as, cl),
Philippe Milanta (p). Studio de
Meudon, juin 2015.

NEWS
le nouveau disque de The Workshop, le groupe
du saxophoniste Stéphane Payen, est dédié à Larry Young
la musique du batteur, chanteur, compositeur et The Larry Young Trio
poète Doug hammond. À paraître en novembre 2 CD Fresh Sound Records / Socadisc
sur le label Onze heures Onze (distribution ✪✪✪✪
Socadisc) • l’intégrale des œuvres pour piano christian Réédition. on connaît ses
de Brahms par Nima Sarkechik inaugurée au
Triton (les lilas) en janvier dernier donne lieu
Wallumrød disques Blue Note, tels les
Pianokammer essentiels “Into Somethin’”
ChRISToPhE ALARy

à l’édition d’un deuxième album live, “Brahms (1964) ou “Unity” (1965). on sait
1 CD hubro / outhere Distribution
#2”. Se glisse dans chaque programme une l’importance historique du Tony
pièce composée par un jazzman : après The Workshop
Nouveauté. Les dernières Williams Lifetime, dont il fut le
Africabrahms par Jean-Rémy Guédon, le productions de ce label danois volcanique organiste. Nul n’ignore
pianiste interprète Charlie’s Angles d’Andy Emler (“live au Triton” / témoignent d’une tendance de qu’il joue sur “Bitches Brew”, ce
letriton.com) • Pour rendre hommage au grand compositeur américain la scène scandinave à se défaire qui vaut tous les awards et autres
de ses clichés, entre luminosité victoires de la création. D’aucuns
de comédies musicales Stephen Sondheim, le pianiste contemporain
garbarekienne et nuits de vouent même un culte étrange –
Anthony de Mare a invité trente-six artistes à composer des pièces clubbing de l’hiver subarctique, pourquoi pas ? – à ses albums
pour piano solo inspirées des compositions de Sondheim. Parmi eux, on en se rétractant sur une espèce maudits (“Lawrence of Newark”,
retrouve Wynton Marsalis, Fred hersch et Ethan Iverson. A découvrir de presque rien miniaturiste. “Larry young’s Fuel”). Il ne faudrait
dans “Liaisons - Re-Imagining Sondheim From The Piano” (3 cd EcM Ainsi Erland Dahlen manipule- cependant pas négliger ses trois
New Series / universal) • le saxophoniste anglais Tim Garland, qui joue t-il à proximité de ses micros premiers opus d’origine New
depuis plus de quinze ans avec chick corea, vient de publier “Return To tout un petit attirail sonnant de Jazz et/ou Prestige : “Testifying”,
The Fire” en vinyle et/ou en téléchargement via le site editionrecords. l’infime au débordement punk “young Blues” (1960) et “Groove
com. A ses côtés, Gerard Presencer (tp, bu), Jason Rebello (p, elp), Mick (“Blossom Bells”), Iva Grydeland Street” (1962), réunis ici en un
hutton (b) et Jeremy Stacey (dm) • joue-t-il de ses guitares semi- double cd, augmenté de “Forrest

66 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


GROS PlAN

Joe Castro
Un pianiste fidèle
Joe Castro a séduit Doris Duke, l’une des femmes
les plus riches du monde. Mais qui était vraiment
ce pianiste d’origine mexicaine dont Sunnyside records
vient de publier un coffret de six cd ?
dites-vous bien que si j’avais, financée par Mrs. castro. Qu’elle
moi aussi, été épousé par une en soit remerciée. Examinons-les
milliardaire américaine (voire tout rapidement.
bêtement luxembourgeoise, s’il y
en a), je jouirais d’un tout autre la première date de l’été 1954.
statut dans la presse. Tous les Elle est la seule à contenir une
magnats de la profession seraient interprétation en trio, mais assez
à mes genoux. Est-ce à dire longue, ainsi que les deux autres
que – parce qu’il était le mari de titres qui ménagent donc de qui dépassent presque tous les autres Stan Kenton, pour ne rien
certaine richissime doris duke –, l’espace à chaque soliste, les dix minutes, souffrent un peu dire de tous les orchestres qui ont
le jeune pianiste “latino” Joe autres étant principalement Buddy d’un ressassement fréquent dans fleuri dans les studios au cours
castro usurpa la notoriété qu’il collette (fl, cl), John Anderson des jam-sessions dont les parties de cette période 1950-65 et plus.
connut dans les années 1950 ? (tp, rien à voir avec cat), Buddy arrangées, peut-être par Pettiford, le grand métier a ses avantages,
Nullement. Bien que très jeune Woodson (p) et chico hamilton ont en revanche une tournure balancés par une certaine
encore, en surdoué que j’étais (dm). Séance certes intéressante assez originale. somptueuse froideur d’exécution
(et reste), je l’avais remarqué à et agréable, mais point tant que disque 4 : huit thèmes assez où les solos de castro, de Teddy
l’époque, malgré son genre beau celles de l’été 1955 et de janvier contrastés (Billie’s Bounce et Edwards (Vinnegar est aussi de
gosse si différent du mien, pour 1956 réunies sur le disque 2. il Sweet Georgia Brown, Woody’n la partie) n’apportent que de trop
son talent musical qui ne pouvait est bien sûr fâcheux que castro You et Autumn Leaves…) avec un brèves minutes de réchauffement
m’inspirer aucune jalousie : entre lui-même n’y participe pas. Mais quartette qui, autour de castro, climatique.
vrais virtuoses on s’aime, on se la présence de Stan Getz, puis rassemble trois des associés
comprend. Mais ses prestations de Zoot Sims, fait d’autant plus emblématiques de sa carrière : Presque plus satisfaisant m’a
enregistrées et accessibles aisément passer la déception que Teddy Edwards (ts), leroy Vinnegar paru le disque 6 : un “tentet” dont
étaient assez rares, et j’ai donc le pianiste accompagnateur de (b) et Billy higgins (dm), en janvier la rythmique (avec Vinnegar et
passé plus d’un demi-siècle à me chaque ténor est ici l’un des six 1959. du solide dont la pâte mêle, castro) soutient (en mars 1966)
demander « qui donc, au juste, est grands du jazz d’avant 1950 avec de façon homogène et roborative, – sous la direction nominale
ce Joe castro ? Pourquoi n’a-t-il une touche du “vieux” bebop, une d’Edwards – ce ténor entouré
duke Ellington, Earl hines, Fats
pas obtenu la place qu’il mérite de “soul” et un fond de swing d’un trompettiste et d’un quatuor
Waller, Art Tatum et count Basie :
auprès des claude Williamson, essentiel à toute franche réussite. de trombones. J’aime trop les
Teddy Wilson l’irréprochable, le
Russ Freeman et autres confrères quatuors de trombones pour
lumineux.
de la West coast ? » Pas de Je dois avouer mon goût pour le n’être pas indulgent envers une
réponse. Même de la part de daniel disque 5 enregistré en mai 1966 entreprise qui, avec son intention
le disque 3, auquel castro
Richard qu’on assiégeait, dans (le 5, entre 2 heures 30 et 5 heures manifeste de flatter l’auditeur
participe de nouveau d’un bout
son fief de lido Musique, pour 30 – précision un peu trop floue (ou du moins certains auditeurs),
à l’autre, met encore en vedette
savoir si ce pianiste ne figurait à mon avis, en tout cas optimiste, pâlit fort, comparée à ce qu’ont
le ténor de Zoot Sims, dans un
pas dans l’un ou l’autre de ses si l’on songe que le total des tenté et réussi, pour des groupes
quintette augmenté du trombone
“imports japonais” qu’on payait dix plages – plus quatre prises de composition équivalente, tant
de Sonny Truitt. il s’agit d’ailleurs
des fortunes. Mais daniel est non “masters” – atteint environ d’ensembles de la West coast (et
d’un sextette pour les quatre
un entêté, et je ne m’étonne pas cinquante-neuf minutes. Mais par exemple Shorty Rogers).
premières plages, où Sims reçoit
que ce soit à lui que nous soyons le record peut s’expliquer par le Attendons la prochaine étape
le renfort d’un confrère de haute
professionnalisme des membres pour revenir en détail sur Joe
redevables de “Joe castro – volée, lucky Thompson, unique
du big band qui les interprètent, et castro (1927-2009), un de ces
Lush Life – A Musical Journey” souffleur de la cinquième et
dont les noms sont familiers à tous pianistes du second plan que l’on
(Sunnyside Records / Naïve) qui, absent de la sixième. Partout la
ceux qui ont suivi d’assez près peut promouvoir au premier de
crois-je comprendre, ne représente même rythmique : castro, donc,
cet aspect de la musique west- cette catégorie, où il voisine avec
que le début d’une intégrale de Ron Jefferson (dm) et Oscar
coast qu’on peut qualifier là de beaucoup de mes préférés. Merci
castro. la suite rassemblera Pettiford, contrebassiste à qui
spécifiquement hollywoodienne : de votre attention fidèle à Joe
ses enregistrements réguliers la mort prématurée de Jimmy
Castro. • HuBerT De BonuSTrAC
sous des étiquettes fameuses Blanton avait ouvert une voie Al Porcino (auteur aussi des
comme Pacific et contemporary. royale où il ne devait pas régner arrangements), conte candoli, net joecastrojazz.com
On trouve ici, outre des séances lui-même encore longtemps. Ses Stu Williamson, Frank Rosolino,
privées d’une excellente qualité solos sont sans doutes les plus Anthony Ortega, Gabe Baltazar, Bill
technique, celles qu’il grava au inventifs de ces séances des 5 et hood… et bien d’autres éléments
profit de sa propre marque, clover, 6 février 1956 dont les six titres, d’un contingent où ont puisé entre

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 67


le guide

GROS PlAN
Fire” (1960) du saxophoniste
Jimmy Forrest et featuring,
résultat, vraiment étonnant, n’est
pas toujours convaincant. Mais
Jonathan orland
évidemment, le jeune young l’intention demeure louable.
Small Talk

Evan
(20 ans) à l’orgue. Quoique de A découvrir le 8 novembre à Paris Jazz Underground / Socadisc
souple (et pas stricte) orthodoxie Rennes (festival Jazz à l’Ouest). • Sur son second album en leader,
soul-jazz, ces albums révèlent un FeLix MArCiAno le jeune saxophoniste alto

Parker
soliste qui, déjà, swinguait du feu Jonathan orland affirme ses
des dieux (ceux de la musique),
tout en se démarquant, sans
David fortes intentions musicales, entre

forcer son talent, du modèle calvet expression libre et exacerbée


et jazz introverti et complexe, le
taille patron, Jimmy Smith. À (re) Kajdan tout dans une lignée finalement
Le label québécois Victo publie découvrir d’urgence. • on off très new-yorkaise. Donald
des concerts captés au Festival JuLien FerTé
“Testifying” : Larry Young (org),
Cream Records/ La Baleine Kontomanou (dm), yoni Zelnik (b)
et Nelson veras (g) contribuent
international de Musique Thornel Schwartz (elg), Jimmie
Smith (dm) + Joe Holiday (ts, sur
Le deuxième album du trio formé
par Jean-Michel Kajdan (elg),
avec rigueur et naturel à une
Actuelle. en 2014, evan Parker deux titres). englewood Cliffs, Laurent David (b, elb) et Jean-
musique exigeante qui ne
demande qu’à gagner en intensité
new Jersey, rudy Van Gelder
s’y produisait en duo et en Studio, 2 août 1960. “Forrest
Christophe Calvet (dm) confirme
tout le bien que l’on pensait du
et en épaisseur. • eriC QuenoT
Fire” : Jimmy Forrest (ts), Young
septuor. (org), Schwartz (elg), Smith (dm) premier. Fusionnant blues, rock
+ inconnu (perc). idem, 9 août et jazz dans une esthétique très Pablo held Trio
l’actualité discographique 1960. “Young Blues” : Young moderne, les trois compères ont recondita Armonia
(org), Schwartz (elg), Wendel
de Fred Frith (elg), Marshall (b), Smith (dm). idem, 30 gagné en liberté, en complicité Pirouet / pirouet.com
compositeur chambriste septembre 1960. “Groove Street” : et en expressivité, avec un
Young (org), Bill Leslie (ts), Qui ne connaît pas les
et âme de divers groupes son maîtrisé, des ambiances
Schwartz (elg), Smith (dm). idem, versions originales aura du
raffinées, des textures variées,
de rock oblique, vient 27 février 1962. mal à croire que le répertoire
et des idées bien exploitées au
nourrir le versant impro fil des douze titres originaux qui
est uniquement composé de
de son parcours, des duos avec Michel compositions “classiques”. Qui
laissent beaucoup de place à
doneda, Barry Guy ou John Butcher
s’étant rapidement succédés dans sa kronik l’improvisation. Du bel ouvrage ! •
connaît celles-ci aura bien des
difficultés à mettre un nom sur
express
FeLix MArCiAno
chronologie. Ne manquait à l’appel telle ou telle reprise, cela parce
que les choix de Pablo held sont
qu’une rencontre avec Evan Parker Boulou Ferré originaux (Tournemire, hindemith,
(ts, ss), tuteur indéboulonnable du
genre. Attentes nullement déçues avec Matthieu Boré Elios Ferré Messe de Stravinsky…),
“hello, I Must Be Going”, dont les Naked Songs christophe Astolfi mais aussi parce que son trio
s’en approprie à ce point la
quatre pistes combinent ludisme et Bonsaï Music / harmonia Mundi La Bande des Trois
matière qu’elles en deviennent
décision, focalisation et décontraction. Le chanteur et pianiste Matthieu Label ouest / L’Autre Distribution méconnaissables. Porté par un
Frith multiplie les ouvertures et Parker Boré poursuit son sa carrière de Des compositions signées par les jeu teinté de nostalgie voire de
dévie de sa propension au souffle crooner de salon (parfois siffleur frères Ferré, une bonne part de mélancolie, un album qui illustre
continu pour acquiescer à la manière ou faux trompettiste le temps chansons françaises (Brassens, cet esprit de finesse cher à
fureteuse de son compatriote. « Ma d’un chorus), reprenant quelques Gainsbourg, Bachelet), l’immortel Pascal. • LuDoViC FLorin
façon de composer, c’est de choisir les grands standards d’avant-garde, Nuages chanté par Boulou, voilà
bons musiciens, et de leur demander mais aussi Randy Newman, de quoi nourrir la virtuosité et Walter Ricci
d’improviser » (Evan Parker). Si la pastichant Paul McCartney, l’imagination d’un trio donnant nice & easy
Billy Joel et Burt Bacharach. à la musique manouche ce je
formule tient de la pirouette un brin Jazztime / Wiseband
Anne Gouraud Shrestha tient ne sais quoi d’aérien qui la sort
provocante, elle a le mérite de susciter la contrebasse, Leo Sidran qui de l’ornière traditionnelle et lui À l’approche du centenaire de
la réflexion. Autour du leader s’affairent produit, prête son orgue, son insuffle un sang neuf. • la naissance de Frank Sinatra,
les électroniciens ikue Mori, Sam Pluta vibraphone et ses chœurs. C’est JACQueS ABouCAYA ce CD est sous-titré “A Tribute
et George lewis (aussi au trombone), charmant, sans faute de goût et To Frank”. Quintette dirigé par
et les instrumentistes Peter Evans (tp),
Ned Rothenberg (cl, bcl, shakuhachi)
parfaitement exécuté. • Ramona horvath David Sauzay (ts, fl) qui cosigne,
avec Pierre Christophe (p), Michel
et Okkyung lee (cello). Malgré l’éclat
FrAnCk BerGeroT
Trio Rosciglione (b), Bernd Reiter (dm)
xS Bird
de cette distribution, “Seven” de Dominique carré et Fabien Mary (tp sur 3 titres).
Ça swingue, ça chorus joliment, le
l’Electroacoustic Septet nY Carré Black & Blue / Socadisc
(déclinaison d’un Ensemble Née en Roumanie et installée phrasé de Walter est impeccable.
(Django’s Fusion Project) voilà de quoi se remémorer le
plus étoffé, signé sur EcM) à Paris depuis 2009, Ramona
vilaine Figue / Coop Breizh horvath est une pianiste habile grand chanteur dans la proximité
est perclus de longueurs d’un club tel le Petit-Jouranl
Guitariste autodidacte pétri de jouant un jazz classique générant
et ne comptera pas parmi Montparnasse le 3 novembre. À
musique manouche, Dominique beaucoup de swing. Enregistré
les albums essentiels de en trio avec Nicolas Rageau (b) la maison, la tendresse de la voix
Carré a voulu emmener l’univers
son auteur. Relief et frisson de Django vers d’autres horizons et Frédéric Sicart (dm), “xS Bird” nous inciterait plutôt à chercher
viennent à manquer : sans doute avec ce projet de métissage aux contient quatre compositions dans sa discothèque des versions
fallait-il être là. • DAViD CriSToL multiples parfums allant de la de Jancy Korossy, son mentor, plus musclées de ces standards,
fusion à l’électro en passant par décédé en 2013. Des œuvres par Sinatra lui-même. •
Victo, distribution orkhêstra
le funk groovy et le blues-rock. personnelles de bonne facture FrAnçoiS MArinoT
Las, malgré la présence de parfois adaptées de thèmes
l’excellent Mark Egan à la basse, folkloriques et une poignée de
de belles prouesses guitaristiques standards complètent ce disque
et des idées intéressantes, le attachant. • Pierre De CHoQueuSe

68 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


POUR LA PREMIÈRE FOIS ! LE LABEL VISION FUGITIVE
EST DISPONIBLE EN CD / LP / DOWNLOAD
AVEC UNE OFFRE SPÉCIALE SUR LES CD’S DANS VOS POINTS DE VENTE
HABITUELS ET EN TÉLÉCHARGEMENT SUR QOBUZ

VISIONS FUGITIVES LE LONG DE LA PLAGE


JEAN-MARC FOLTZ, CLARINETTES MICHEL BUTOR, VOIX
STEPHAN OLIVA, PIANO MARC COPLAND, PIANO

Jazz et classique en miroir : un récital Sur le texte original de Michel Butor,


sans frontières (jazz –Naima, Lonnie’s le pianiste Marc Copland dessine
Lament; classique –Prokofiev, Brahms, sa propre poétique musicale.
Poulenc, Berg– , compositions person- Une rencontre au sommet entre
nelles) et une invitation au voyage. musique et poésie.

VF313001 VF313002

STEADY ROLLIN’ MAN EXERCICES D’EVASION


echoes of robert johnson PHILIPPE MOURATOGLOU, GUITARES
PHILIPPE MOURATOGLOU, GUITARES, VOIX
JEAN-MARC FOLTZ, CLARINETTES Un récital de guitare singulier qui
BRUNO CHEVILLON, CONTREBASSE rassemble pièces contemporaines
et Renaissance, improvisations
Une évocation personnelle et compositions originales.
- entre écriture et improvisation -
du bluesman de légende Robert Johnson.

VF313003 VF313004

VIRACOCHAS SUNDAY MORNING


JEAN-MARC FOLTZ, CLARINETTE BASSE BILL CARROTHERS, PIANO
PHILIPPE MOURATOGLOU, GUITARE BARYTON PEG CARROTHERS, VOIX
SEBASTIEN BOISSEAU, CONTREBASSE MATT TURNER, VIOLONCELLE
CHRISTOPHE MARGUET, BATTERIE JEAN-MARC FOLTZ, CLARINETTES
NICK THYS, CONTREBASSE
Inspiré par un voyage en pays Inca + CHŒUR
et par le livre Les Sept Plumes
de l’Aigle de Henri Gougaud. Bill Carrothers retourne à ses racines
Un road-trip chamanique musicales : l’église luthérienne où il a
en quartet volcanique. appris le piano. Une orchestration chambriste
avec voix, chœur et improvisation.
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RUMORES DE LA CALETA ELEANORA SUITE


ALBENIZ & LE FLAMENCO JEAN-MARC FOLTZ, CLARINETTES
PEDRO SOLER, GUITARE FLAMENCO REGIS HUBY, VIOLON
PHILIPPE MOURATOGLOU, GUITARE CLASSIQUE CLAUDIA SOLAL, VOIX

Un dialogue entre les guitaristes Pedro Un hommage à Billie Holiday


Soler et Philippe Mouratoglou autour en écho à Robert Schumann :
de l’œuvre d’Isaac Albéniz – une mise le récit – en huit chapitres –
en relief de l’influence du langage de l’amour et de la vie d’une femme.
des flamenquistes sur celui du grand
compositeur espagnol.

VF313007 VF313008

EDGES OF MY MIND JUNETEENTH


PEG CARROTHERS, VOIX STANLEY COWELL, PIANO
BILL CARROTHERS, PIANO
DEAN MAGRAW, GUITARES & MANDOLINE Un piano solo : L’histoire des origines
BILLY PETERSON, CONTREBASSE de la lutte des Afro-Américains pour
GORDY JOHNSON, CONTREBASSE l’obtention de leurs droits civiques
par le pianiste co-fondateur
L’univers personnel de la chanteuse : du label Strata East.
un siècle et demi de chansons populaires
américaines, de Stephen Foster à Aerosmith
dans une ambiance jazz intimiste.

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Le jeune label Vision Fugitive se singularise par une qualité indéniable dans tous les aspects de sa production :
des musiques qui défient les genres (jazz, classique, contemporain…), un soin particulier donnée à la prise de son, un packaging luxueux.
Les CDs sont accompagnés d’un livret de 40 pages de photographies d’archive ou d’art, ou bien de peintures originales de Emmanuel Guibert.

www.visionfugitive.fr
les ch cs choc
magazine

Pierre de Willem Breuker Arturo Joe McPhee


Bethmann Trio Kollektief o’Farrill & Paal
essais / Volume 1 Angoulême 18 mai 1980 The Afro-Latin Nilssen-Love
1 CD Aléa / Socadisc
NOuBEAuTé. ce trio est né d’un
2 CD Fou Records / fou.records.free.fr
iNédiT. Tous les collectifs
Jazz orchestra Candy
concert impromptu donné par Pierre d’aujourd’hui lui doivent quelque Cuba : The Conversations 7 CD PNL Records / Metamkine
de Bethmann, Sylvain Romano et chose : Willem Breuker, c’était un Continues NOuVEAuTé. un coffret en forme
Tony Rabeson dans un club de la rue cas. Et le claviériste Jean-Marc 2 CD Motema / harmonia Mundi de bouquet d’aventures d’un duo
des lombards, lors d’un de ces gigs Foussat en est un autre, qui était effervescent.
de dernière minute pendant lequels présent à Angoulême, où il enregistra NOuVEAuTé. Voilà que ça scratche
l’improbable peut devenir réalité. ce concert. sur du latin jazz ! Arturo O’Farrill C’est en jouant avec le groupe The Thing
ne recule donc toujours devant que Joe McPhee a fait la connaissance
Un enregistrement devenait nécessaire. Qui d’autre que Foussat aurait le cran rien. Swing indéniable, audaces de Paal Nilssen-Love, né en 1974 à
Situé au pied des Cévennes, le studio de publier un tel disque aujourd’hui ? imprévisibles, cohésion parfaite. Molde et élevé dans un club de jazz
Recall s’imposait. Restait à partager un Et qui oserait consacrer de nos jours dirigé par sa mère et son batteur de père.
répertoire. Éclectique et inattendu, celui un livre au saxophoniste, compositeur Un an après le très réussi “The offense Entre le tambour qui fut son premier
que Pierre de Bethmann et ses complices et chef d’orchestre hollandais, comme of The Drum”, le pianiste conduit une hochet et le jazz son école, pas étonnant
ont choisi leur permet d’explorer la le fit Jean Buzelin en 1992 ? (Réédité nouvelle fois son Afro Latin Jazz orchestra que Nilseen-Love soit apparu à McPhee
ligne mélodique des morceaux qu’ils chez Parenthèses, on relira ce modèle de sur un disque tout aussi énergique et comme « l’un des plus passionnants
reprennent. Repensé par le trio, Promise concision et de précision en écoutant ce captivant. Enregistrée à La havane, cette batteurs entendu depuis longtemps. »
Of The Sun, une des plages en grand double CD.) Ceux qui ont eu la chance session en deux parties se veut un clin Coup de foudre musical qui allait se
orchestre de “The Prisoner” (herbie de se trouver à Angoulême ce 18 mai d’œil au dégel des relations diplomatiques cristalliser à Molde en 2007 avec un duo
hancock), est méconnaissable. Très 1980 se régaleront de réentendre entre les Etats-Unis et Cuba. Aussi inaugural précieusement recueilli par
en doigts, et non sans réflexion, Pierre cet enregistrement. Le côté scénique o’Farrill reprend-il la conversation avec PNL, initiales du jeune Norvégien et nom
en tricote les notes élégantes. Entre manquera, qui déclenchait des fous les rythmes cubains entamée par Dizzy du label sur lequel est publié ce coffret
deux respirations, elles se bousculent, rires inextinguibles. Tout l’arrière-plan Gillespie à la fin des années 1940, et qui en forme de journal reproduisant sept
nombreuses, dans le long chorus au politique anarchiste et entours sera un trouva son sommet dans les partitions épisodes de tous les possibles inhérents à
tempo vif de Without A Song. Quant peu effacé dans vos mémoires – ou que Chico o’Farrill, père d’Arturo, la conjugaison des multi-instrumentismes
à For Heaven’s Sake, réharmonisé en totalement absent –, mais vous finirez composa pour l’album de Dizzy “Afro” du souffleur et du batteur. Du chaleureux
profondeur, on peine à en reconnaître le par reconstituer l’ensemble par la seule en 1954. o’Farrill junior ne manque Moldejazz (CD 1) à l’apothéose de
thème. Les musiciens ayant écarté l’idée vertu des sons qui nous parviennent d’ailleurs pas de rendre hommage à Milwaukee (CD 7) en passant par un
de jouer des originaux, l’album contient après trente-cinq ans d’attente ! Plongez l’Afro-Cuban Jazz Suite de son père en studio d’oslo (CD 2), Kongsberg (CD
plusieurs morceaux que l’on n’a pas dans un bonheur qui fut et qui sera. Et composant à son tour une Afro Latin 3), un festival étatsunien (CD 4), un
l’habitude d’entendre joué par un trio de notez que le deuxième CD est (presque) Jazz Suite en quatre mouvements. The club chicagoan (CD 5) et le Japon (6),
jazz. Pull Marine, que Serge Gainsbourg entièrement consacré aux rappels, ce qui Triumphant Journey fait brillamment le boîtier en carton argenté finit par se
composa pour Isabelle Adjani, est l’un laisse à penser la générosité du “WBK”, office d’ouverture à ce foisonnement de transformer en coffre aux trésors, chaque
d’eux. Reprendre Sicilienne de Gabriel mais aussi l’enthousiasme – le mot fantastiques expérimentations – comme succession de duos se révélant comme
Fauré est inhabituel. Indifférence de est faible – de l’assistance. À l’époque, les scratches du new-yorkais DJ Logic un collier inouï de gemmes sonores,
Tony Murena, l’accordéoniste virtuose du Willem Breuker n’en était encore qu’au sur Vaca Frita, les notes gospelisantes matières noires, formes anciennes, perles
Balajo, aussi. La plus grande surprise de début d’un parcours qui allait faire de et très Nouvelle-orléans sur Second baroques, breloques exotiques et autres
l’album reste toutefois une adaptation du lui une sorte de John Zorn de la free Lina Soca (Brudda Singh), ou encore hybrides de hasards et mémoires inventés
Chant des Marais ou Chant des Déportés, music européenne, avec une activité de l’approche free jazz de There’s A Statue à force de jeux de percussions et de
musique composée en 1933 par Rudi compositeur intense, la fondation d’un Of José Marti In Central Park. L’énergie souffles d’alto, de ténor, de clarinette, de
Goguel, un employé de commerce label, et des collaborations dans les et la justesse de l’orchestre, accompagné bugle, de trompette de poche, impulsés
allemand enfermé par les nazis à domaines du cinéma, du théâtre et de d’un bataillon de musiciens ou chanteurs sans bégaiements ni redites par deux
Börgermoor, en Basse-Saxe, un camp de la danse. À redécouvrir d’urgence ! • invités, cubains pour la plupart, sont poètes de l’instant. • PHiLiPPe CArLeS
concentration pour détenus politiques. PHiLiPPe MéziAT indéniables. Près d’une quarantaine de
Joe McPhee (as, ts, cl, bu, tp), Paal
Les sombres accords que le pianiste Boy raaymakers (tp), Willem van Manen voix donc pour une session magistrale. nilssen-Love (dm). 2007-2014. Voir aussi
plaque dans les graves en rappellent le & Bernard Hunnekink (tb), Willem Breuker on succombe aisément à une aussi sur le site www.subradar.no.
tragique. • Pierre De CHoCQueuSe (ts, ss, as, cl), Bob Driessen (as, bs), grandiose conversation. • kATiA Touré
Maarten van norden (ts), Henk de Jonge
Pierre de Bethmann (p), Sylvain romano (p), Arjen Gorter (b), rob Verdurmen (dm). Arturo o’Farrill (p, arr), The Afro Latin
(b), Tony rabeson (dm). Pompignan studio Théâtre d’Angoulême, 18 mai 1980. Jazz orchestra (personnel détaillé dans le
recall, 30 et 31 mars 2015. livret). Abdala Studios, La Havane, Cuba,
décembre 2014.

70 Jazz Magazine Numéro


Jazz Magazine Numéro678
678 Novembre
Novembre2015
2015
Erroll Garner
The Complete Concert By The Sea
3 CD Columbia Legacy / Sony Music
RéédiTiON. le “concert By The Sea” d’Erroll Garner fut l’un
des plus mémorables de tous les temps. Mais étonnamment, PIERRE DE BETHMANN TRIO
la moitié de son programme n’avait encore jamais vu le jour. ESSAIS / VOLUME 1
Soixante ans plus tard, le voici enfin disponible dans son
intégralité, avec une qualité sonore nettement améliorée.

Lorsque ce concert donné par Erroll Garner le 19 septembre 1955


dans la ville de Carmel en Californie fut publié l’année suivante,
on se doutait bien que certains morceaux avaient été mis de côté
pour se conformer à la durée d’un LP… mais certainement pas
qu’il en restait le double, soit onze titres, à découvrir. Parmi ceux-là,
The Nearness Of You ou I Cover The Waterfront s’inscrivent dans
cette veine romantique, aguicheuse, qui fit le succès du pianiste.
D’autres en revanche, bénéficient d’un traitement plus audacieux,
plus nerveux, à l’image de Caravan qui enchaîne les tournures
rythmiques après un thème habilement malmené, ou S’Wonderful
qui voit son tempo s’envoler. Mais tous illustrent avec une égale
évidence le flamboyant style de Garner : ses longues intros pleines
de suspens et de promesses, sa remarquable indépendance des
deux mains qui lui permettait de superposer différents rythmes
ou mélodies, son swing vigoureusement marqué sur les temps,
son approche quasi orchestrale sur le clavier, ses block chords PIERRE DE BETHMANN TRIO
inattendus, ses nuances infinies, son exubérance, et surtout cet ESSAIS / VOLUME 1
immense sentiment de joie, d’euphorie, qu’il délivrait à travers tout SORTIE LE 16 OCTOBRE 2015
cela. Comme souvent avec lui, ses partenaires Eddie Calhoun et //////////////////////////////////
Denzil DeCosta Best n’avaient pas la moindre idée de ce qu’il allait
interpréter. Au fond, Erroll Garner avait un jeu si dense qu’il pouvait PIERRE DE BETHMANN / PIANO
se passer d’une rythmique, mais il n’aurait alors obtenu ce feeling SYLVAIN ROMANO / CONTREBASSE
à la Count Basie, ni atteint pareille communion avec le public. Le TONY RABESON / BATTERIE
pianiste ne manqua d’ailleurs pas de leur rendre hommage dans //////////////////////////////////
l’interview qu’il accorda juste après le concert et qui est proposée
ici en guise de bonus. A signaler, dans le livret, un texte de la plume EN CONCERT LES 24 ET 25 NOVEMBRE
d’une admiratrice nommée Geri Allen. • JonATHAn GLuSMAn AU SUNSIDE / PARIS
erroll Garner (p), eddie Calhoun (b), Denzil DeCosta Best (dm).
Carmel-by-the-Sea, Sunset Center, 19 septembre 1955. Contacts / cdzpromo@gmail.com / contact@aleamusique.fr
www.aleamusique.fr

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 71


Kiosque digital

NOVEMBRE
VEN 6 / 20H30 • 14€ / 10€ / 8€ MAR 17 / 20H30 • 14€ / 10€ / 8€
OrTie HASSE POULSEN 
+ NASHEET WAITS THE LANGSTON PROJECT
EQUALITY QUARTET + MIKKO INNANEN
& INNKVISITIO
MAR 10 / 20H30 • 14€ / 10€ / 8€
KRIS DAVIS QUINTET  LUN 30 / 20H30 • 14€ / 10€ / 8€
+ CORONADO FESTIVAL AFRICOLOR
MORIARTY invite AFRICOLOR
LUN 16 / 20H30 • 14€ / 10€ / 8€
FESTIVAL NEMO, BIENNALE
INTERNATIONALE DES ARTS
NUMÉRIQUES PARIS / ÎLE-DE-FRANCE
DÉCEMBRE
VEGAN DALLAS • CRÉATION MAR 1er / 20H
Gratuit sur réservation *
+ SUPERSILENT – ARVE
JAZZ MIGRATION 2016
HENRIKSEN & HELGE STEN
• INÉDIT CHROMB! + ELECTRIC
VOCUHILA + SCHWAB -

5€
SORO + UN POCO LOCO
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SUR RÉSERVATION // INFORMATIONS ET RÉSERVATIONS 9, RUE GABRIELLE JOSSERAND
93500 PANTIN • BUS 170-249-330 / RER E PANTIN • M LIGNE 7 AUBERVILLIERS - PANTIN -

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72 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


Le 6 octobre dernier
à La Cigale (Paris),
l’accordéoniste Vincent
Peirani et Living Being
(Émile Parisien au
saxophone, Julien Herné
à la basse, Yoann Serra
à la batterie) ont fait
plusieurs clins d’œil gros
comme ça à Michel Portal
(présent dans la salle),
en jouant notamment

le live
une composition signé
du clarinettiste, Mutinerie.
JEFF hUMBERT

festivals clubs concerts radio internet télévision

Label Abbuehl
La chanteuse Susanne
Abbuehl est en tournée avec le
ANJNA SWAMINAThAN

trompettiste Matthieu Michel,


le pianiste Wolfert Brederode et
deux batteurs, le Finlandais olavi

ERIC RyAN ANDERSoN


Louhivuori le 21 à Paris (Maison
de la Radio, retransmission le
L’année Coulondre 25 sur France Musique) et le
Norvégien Øyvind hegg-Lunde Gilad hekselman
Révélation de ce numéro pour son troisième le 12 à Nevers (D’jazz Festival,
album, révélation des festivals de l’été qu’il a direct sur France Musique en Hekselman excelle
parcourus en tous sens avec le soutien de la avant-concert), le 27 à Genève
(AMR), le 28 à Estavayer-le-Lac Le guitariste Gilad Hekselman séjournera trois jours
Spedidam et de l’Adami, le pianiste-organiste
Laurent Coulondre présentera son trio (le en Suisse. Elle chantera en duo consécutifs, du 26 au 28 novembre, à Paris au Duc
contrebassiste Rémi Boussière et le batteur Martin avec Wolfert Brederode le 25 à des Lombards, en compagnie du contrebassiste Joe
Wagermée) le 6 à Paris au New Morning où, le Rennes (Jazz à l’ouest). Martin et du batteur Kush Abady. Les fans du guitariste
lendemain, il se joindra au groupe horny Tonky de le retrouveront également début décembre à Salon-
Nicolas Folmer (à retrouver le 12 au Théâtre de de-Provence et Marseille. Les fans du contrebassiste
la Manufacture de Nancy et le 30 au Théâtre Lino retrouveront celui-ci au sein du quintette de Mark Turner le
ANDREA LoUx / ECM RECoRDS

ventura de Nice). on pourra également l’entendre 3 à Bâle (Jazz Campus), le 5 au Reims Jazz Festival, le 11 à
le 18 au Sunset avec le quintette du saxophoniste Strasbourg (Jazzdor).
Maxime Berton. Quant à son trio, il sera également
le 14 à Quimper (Théâtre de Cornouailles), le 19 à
Limoges (Eclats d’émail) et le 29 à Beaumont-sur-
oise (Jazz au fil de l’oise).

Suivez ces batteurs !


Deux batteurs leaders sont sur les routes de France et de
Suisse. Nasheet Waits Equality et son Equality Quartet (Darius
Jones / Aruan ortiz / Mark helias) joueront le 5 à Tours (Petit
Faucheux dans le cadre du Festival Emergences), le 6 à Pantin
(La Dynamo), le 8 à Genève (AMR), le 10 à viviers (Cavajazz).
Jack DeJohnette sera en trio avec Ravi Coltrane et Matthew
Garrison le 5 à Amiens (Maison de la culture), le 7 à Caen
(Théâtre), le 9 au D’Jazz Nevers Festival, le 10 à Clermont-
JIMMy KATZ

Nasheet Waits Ferrand (Coopérative de mai), le 12 à Zurich, le 13 à Tours


(festival Emergences).

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 73


rendez-vous

Un quartette Chaque édition de cette


sur la ville “académie” propose à une
promotion de jeunes musiciens
Deux festivals itinérants se bretons de travailler sur
disputent le Miguel Zenon 4tet les questions d’échelle, de
(Luis Perdomo / hans Glawischnig tempérament et de répertoire
/ henry Cole), le 11 à la MJC traditionnel avec des musiciens
Guillaume Perret de Bréquigny dans le cadre de de tous horizons. Cette édition
xDR

consacrée aux cordes a été


Une soirée Epic parrainée par hélène Labarrière
et a reçu les conseils du guitariste
Le saxophoniste Guillaume Perret
Kamel Zekri, du joueur de lyra
ose la Cigale de Paris le 16
Ross Daly, du oudiste et théoricien
novembre avec son Electric Epic
des modes Fawaz Baker et
et entraîne avec lui, en première
des violonistes Jacky Molard et
partie, le trio Sidony Box et son
Miguel Zenon et son quartette Dominique Pifarély.

xDR
invité de marque, le tromboniste
Gianlucca Petrella. Jazz à l’ouest qui répartit ses Masterclass
Lay sur le feu programmes sur l’ensemble de
l’agglomération rennaise et le
et concert
Le pianiste Paul Lay qui fait 7 au Moulin à Jazz de vitrolles, Le 14 novembre, Tony Malaby
sensation au sein du quartette l’une des neuf villes de la région sera à Paris pour une masterclass
de Géraldine Laurent (Choc PACA (de Marseille à Forcalquier) à l’UMJ (xavier.bornens@free.
dans ces pages et concert le 2 participant à l’opération Jazz sur fr). Après quoi il jouera sur la
novembre au Duc des Lombards) la ville qui implique 33 lieux et péniche L’Improviste en trio
Jean-Paul Autin, Jean Bolcato,
est décidément partout : en solo et Jean Aussanaire du Worshop de lyon 200 artistes. avec Richard Bonnet en Sylvain
x/DR

les 9 et 10 à Guebwiller (Les Darrifourcq (1ère partie par le duo


Dominicains), avec le quartette Bonnes intensions Sylvaine hélary et Bruno Chevillon).
Auparavant, il aura joué avec son
de Riccardo Del Fra le 13 au IMAGINAIRE Bill Evans, Stéphane Guillaume,
Thou (Jazz Club) et le 17 à Paris Tubacello (Christopher hoffman,
olivier Louvel, Nguyên Lê, Anthony Bob Stewart et John hollenbeck)
au Sunside où il reviendra les
Tous azimuts
Jambon, Marc Berthoumieux, le 1er à Genève (AMR) et avec
20 et 21 avec le quartette d’Eric Grégory Privat, Dominique Di
Le Lann. Le 27 à Arles (Théâtre Stéphane Kerecki, Daniel humair et
Piaza, Jérôme Regard, Etiénne le guitariste Santiago Quintans le
de la Calade), il redonnera son Gros mois pour l’Arfi (mais Mbappé… Ils ont en commun de 10 au Sunset.
spectacle autour du music hall y en a-t-il de petits pour figurer sur le disque du batteur
marseillais avec Isabelle Sörling
et Simon Tailleu. Il remplacera
l’Association à la recherche Nicolas viccaro “Intensions !” (À Le jazz arrive !
Philippe Milanta dans le rôle du d’un folklore imaginaire ?). Du paraître le 13 novembre, La note
Nos lecteurs qui ont apprécié
4 au 6 novembre à oullins, la bleue Productions / Rue Stendahl).
Duke au sein du Laurent Mignard notre dossier “1918-1944, Quand
Marmite infernale présente Le batteur présentera son disque
orchestra dans la Battle Royal le jazz débarque” retrouveront
lors d’une rencontre-concert en
qui l’opposera au big band de un nouveau spectacle Les solo le 18 novembre à l’école de son auteur Franck Bergerot
Michel Pastre le 29 novembre, il Hommes maintenant mis en batterie Drumming Lab (9 rue de le 5 novembre à la Médiathèque
à Beaumont-sur-oise (Jazz au Fil scène par Jean-Paul Delore. de Rueil le temps d’une
l’éperon, Paris 6e).
de l’oise). En outre, il tiendra le conférence sur l’arrivée du jazz
Le 12 le Workshop de Lyon
piano auprès d’hugh Coltman le 3
à Lannion, le 4 à Cesson-Sévigné, est attendu au D’jazz nevers chapeau(x) bas en France en 1918.

le 5 à Guidel, le 6 à Saint- Festival. Le spectacle musical Le batteur-percusionniste, hommage au Bird


Barthélémy-d’Anjou (Théâtre), le de marionnettes pour enfants spécialiste des claviers percutés,
Alors que l’on célèbre ce mois-ci
12 à Cannes, le 14 à Nevers. Max le naufragé des rêves Jean-Michel Davis, présentera
les 70 ans de l’enregistrement de
sera donné le 20 à Poitiers son nouveau groupe Etherial
Ko-ko (lire p. 36), le saxophoniste
Jazz (Carré bleu). Différents ciné- vibes avec le guitariste Frédéric
Loiseau, le contrebassiste Raphaël Rudresh Mahanthappa jouera
à la ferme concerts sont programmés : Schwab et le batteur Julien son hommage à Charlie Parker
Le quartette James Farm de Les Fantamagories de Segundo Charlet le 28 novembre à Paris (disparu il y un soixante ans
Chomon avec Guy Villerd et et quelques mois) à la tête
Joshua Redman, Aaron Parks, (Sunset). Après avoir enchanté les
Jean Bolcato le 25 à Lyon de son Bird Calls Quintet les 4
Matt Penman et Eric harland se Primitifs du Futur en marchant
et 5 à Paris (Duc des Lombards)
produira le 2 novembre à Zurich (Comeodia), Les Bobines sur les pas de Francisco Cariolato
et le 16 à Gand (Jazz Club).
(Moods), le 18 à Bruxelles (Flagey), mélodies avec Jean-Paul Autin, (le xylophoniste des séances
le 19 à Metz (Arsenal), xavier Garcia et Alfred Spirli le parisiennes dans les années 20),
le 20 à Schiltigheim (Jazzdor), le Jean-Michel Davis adressera
27 novembre à La Tour-du-pin, un double coup de chapeau
21 à Rouen (Théâtre des Arts), le
23 au Monte Carlo Jazz Festival. etc. (détail sur arfi.org). à Gary Burton et Red Norvo.

Jazz Breizh
Le 6 novembre, Erik Marchand
présentera à Quimper (Théâtre
de Cornouailles) la 5e Kreiz Breizh
Akademi à l’enregistrement de
laquelle Jazz Magazine assista cet
JIMMy KATZ

été (voir le Jazzlive du 3 septembre


Rudresh Mahanthappa
xDR

sur jazzmagazine.com).

74 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


le live
agenda Jonathan Glusman

Louis
d’or FeStiVaLS
le 7 novembre Place au jazz REIMS JAZZ FESTIVAL,
Reims, jusqu’au 7 novembre
Dominique Carré, Miguel Zenon
4tet (Luis Perdomo / hans
Le 22 Maluca Beleza
Le 23 Carrot Lights, Mario
au Jazzdor de (03 26 47 00 10, djaz51.com) Glawischnig / henry Cole), Stantchev New Bulgarian Trio
où entendre le trio de Brad
Strasbourg, louis Mehldau en novembre ? virginie Le 4 Laura Perrudin, John Edouard Ravelomanantsoa Le 24 Mario Stantchev New
Sclavis dévoilera son Teychené avec olivier Ker ourio ?
Scofield-Joe Lovano 4tet (Ben Le 10 Nathalie herczog Girls Bulgarian Trio
Jazzdor Ensemble Street / Bill Stewart) Talk 4tet, Jazz Flume Big Band Le 25 To Nola (Cyril Benhamou
Et le quartette de Ralph Moore ? Le 5 Sophia Domancich Le 13 Charlotte Wassy 5tet / Uli Wolters), Jazzojazz
(dominique Pifarély, Une seule adresse : le festival “Snakes And Ladders” (John (Irving Acao / Leonardo Montana / Le 26 Takt, olivier Lalauze 6tet
Benjamin Moussay, Place au Jazz d’Antony dont la Greaves / himiko Paganotti / Damian Nueva / Arnaud Dolmen) Le 27 one Foot, Les Impatients
Sarah Murcia et Eric Daniel), Mark Turner 4tet Le 14 Amira / Bojan Z / du Jazz / Erik Truffaz, Raphaël
onzième édition se tient du 20 au (Avishai Cohen / Joe Martin / Zvonimir Sestak, Safirius / Imbert 5tet
christophe lavergne). 29 novembre. obed Calvaire) Dandin / Sené / Aksit, horndogz Le 28 Trio Bis, Izzo Right, The
il sera le 11 novembre Le 7 Petit Soldat FT Breis Workshop (olivier Laisney /
au d’Jazz Nevers Tirs groupés JAZZ EN chANTEREINE,
Le 25 Susanne Abbuehl /
Wolfert Brederode
Stéphane Payen / Guillaume
Ruelland / vincent Sauve) / Doug
Festival pour le Le 25 novembre à Paris, Gaya chelles, courtry et environs, hammond, Apple Swing, Sarah
spectacle langues et Music Production investit le jusqu’au 21 novembre (marne- JAZZ SUR LA VILLE, Quintana
lueurs avec Sébastien New Morning pour célébrer chantereine.fr) Marseille, Aix-En-Provence, Le 29 Sarah Quintana / Raphaël
Le 4 Laurent Coq et l’orchestre Forcalquier, hyères, Nice, Imbert & Thomas Weirich
Boisseau et l’homme conjointement la sortie de “Nomade du conservatoire Salon-De-Provence, Saint-
de théâtre Jean- sonore” du saxophoniste Eric Séva Le 6 Thomas Enhco Trio Maximin La Sainte-Baume, FESTIVAL EMERGENcES,
Paul delore, le 21 à (avec Daniel Zimmermann, Bruno (Jérémy Bruyère / Nicolas Venelles, Vitrolles, du 4 au Tours et environs, du 5 au 13
Vitrolles (Moulin à Schorp et Matthieu Chazarence) et Charlier) 29 novembre (jazzsurlaville.fr) novembre (festivalemergences.
Le 7 Didier Lockwood Le 4 Airelle Besson / Nelson fr)
Jazz dans le cadre de “The hiding Place” de la batteuse Le 8 Fred Wesley 6tet veras Le 5 Nasheet Waits Equality
de Jazz sur ville) Julie Saury, de la pianiste Carine Le 13 Robyn Bennett & Le 5 Conférence “Beat 4tet (Darius Jones / Aruan ortiz /
avec son Silk and Bonnefoy et du contrebassiste Bang Bang Generation & Be Bop” par Mark helias), Minuit 10 4tet
Felipe Cabrera. Autres concerts Le 14 Romane / Pierre Manetti / François Billard, Gary Bartz Le 6 oska T. (Rémi Dumoulin
Salt Quartet (Gilles Richard Manetti) 4tet, on The Road “La Beat / olivier Thémines / Pascal
coronado, Benjamin pour Eric Séva le 12 à Meilhan-sur- Le 18 yoram Rosilio Tikkun 6tet Generation” (François Billard / Maupeu / Jean-Batpiste Réhault)
Moussay, Keyan Garonne et le 13 à Nérac. avec Andrew Crocker et Jean- Nini Dogskin / Claude vittiglio / Le 7 youpi youpi, Soul
Michel Couchet Robert Pettinelli) Romance, yacht, Miniboxon,
chemirani) et les 26
et 27 à Paris (Atelier couleurs du monde Le 21 Noé huchard Trio Le 6 Daniel huck 4tet, (Paul
Pioli / Christophe Le van /
Mississippi
Le 8 Trio Brp
du Plateau) avec Toujours parrainé par Bojan Z (le 5 JAZZYcoLoRS, Paris, Philippe Le van), The Mymetist, Le 10 Éric Allard 5tet
novembre au Carreau du Temple jusqu’au 27 novembre (01 42 Sudden, Big Buddha, Mohamed Le 11 The West Lines
dominique Pifarély et 84 14 34, jazzycolors.net) Abozekry / Ludovic yapaudjian, Le 12 Mikko Innanen &
Vincent courtois. avec les Serbes vasil hadzimanov Festival des Centres culturels Popa Chubby Innkvisitio / Laurent Blondiau,
(p) et DJs Rahmanee et Uce (dj)), français à Paris. Détail dans la Le 7 henri Florens / Michel Donkey Monkey (Eve Risser /
le festival Jazzycolors des instituts rubrique Paris de notre agenda. Perez, The Souljazz orchestra, yuko oshima)
Bonnes nouvelles culturels étrangers à Paris nous
JAZZ coNILhAc, conilhac-
Mina Agossi 4tet, Miguel Zenon
4tet (Luis Perdomo / hans
Le 13 Jack DeJohnette Trio
(Ravi Coltrane / Matthew
permettra de voyager du 5 au
Très prometteur, l’album “Path corbières, jusqu’au 28 Glawischnig / henry Cole) Garrison), Steak
27 novembre du Mexique et du novembre (04 68 27 71 99, Le 8 Shining Souls
of Decision” du saxophoniste
luxembourgeois Maxime Bender Canada à Taïwan en survolant jazzconilhac.fr) Le 9 Invisible Light D’JAZZ NEVERS FESTIVAL,
des scènes européennes. Le 7 Mickaël Sourd 4tet, Le 10 Gérard Murphy / Eric Nièvre, du 6 au 14 novembre
est resté inédit à la suite des Eric Bibb / habib Koite/ Larry Surmenian, Simon Bozinger Cie (03 86 57 00 00, djazznevers.
difficultés financières du label Recommandé par Jazzmag
Crockett Tambor y Canto, Eric Allard 5tet, com)
Laborie. En attendant de bonnes aux amateurs d’improvisations Le 13 L’Affaire à Swing, Minuit 10 Le 6 Jeff herr Corporation
nouvelles du côté du label, libertaires le trio Michele Rabbia, Jambalaya / Drew Davies Le 11 Les Petits Globe- (Maxime Bender / Laurent
Jean-Michel Leygonie, son Garth Knox et Daniele Roccato Le 14 Didier Labbé 4tet, Paolo Trotteurs au Brésil, Cyril Achard Payfert-
(le 12 au Carreau du Temple), de Fresu-David Linx 5tet / Christophe Leloil Le 7 L’Eléphant Brass Machine,
fondateur, accueille le Maxime Le 21 vincent Peirani 5tet Le 13 Philippe Gillet / olivier Antonin-Tri hoang Solo, Jean-
Bender Quartet le 17 novembre fantaisies électro le trio finlandais Le 28 Jacques Adamo Trio, Lisa Lalauze, Lionel Belmondo / Marc Padovani 5tet (Didier
à Limoges dans le cadre du Elifantree (le 17, Institut suédois), Simone 4tet Thomas Bramerie, Soirée Jazz Mahlerbe / Paul Brousseau /
festival Eclats d’émail. Le 6, le d’expressionnisme post-bop et Polar, Kevin Norwood 4tet Claude Tchamitchian / Dawoud
saxophoniste ouvrira le D’Jazz le quartette du saxophoniste FESTIVAL SoNS9, Paris, du (Cédrick Bec / Sam Favreau / Bounabi), Umlaut Big Band, Lisa
3 au 10 novembre (01 39 75 98 vincent Strazzieri), Bojan Z / Simone (hervé Samb / Reggie
Nevers Festival au sein du trio allemand Sebastian Gille avec 08, sons9.com) Julien Lourau Washington / Sonny Troupé)
Corporation du batteur Jeff herr le pianiste Pablo held (le 25 à Festival autour d’instruments Le 14 Laure Donnat Trio Le 9 Engrenages (Christine
(révélation de notre numéro l’Institut Goethe). Programme rares au MPAA Saint- Mémoires, Caravan Palace, Rita Bertocchi / Julien Padovani /
de février), et se produira dans notre rubrique Paris, détaills Germain. Détail dans la Marcotulli / Luciano Biondini, François Merville / Christophe
rubrique Paris de notre agenda. Trio Prezioso / Cathy heiting, hauser), Aka Moon (Fabrizio
le 21 à Bruxelles (Jazz Station). sur jazzycolors.net. André Minvielle Cassol / Fabian Fiorini / Michel
JAZZ À L’oUEST, Bréquigny, Le 16 Rémy Gauche 4tet / hatzigeorgiou / Stéphan
Rennes et environs, du 3 au Stéphane Guillaume Galland), Stéphane Kerecki 4tet
14 novembre (02 99 86 95 95, Les 17 et 19 Gaël horellou 4tet (Emile Parisien / Guillaume de
jazzalouest.com) (Etienne Deconfin / viktor Nyberg chassy / Fabrice Moreau), Jack
Le 3 out of Nola / Antoine Paganotti) DeJohnette Trio (Ravi Coltrane &
Le 4 Faustine Audebert / Le 18 Charmin Michelle / Jean- Matthew Garrison)
Romaric Bougé / José Topiltzin François Bonnel / Chris Dawson Le 10 Franck Tortiller /
/ Julien Stévenin, hugh Coltman / François Laudet, Jean-Michel François Corneloup, Kami 5tet
5tet avec Misja Fitzgerald Pilc “Extension” (Bastien Ballaz /
Le 5 hugues Charbonneau / Le 20 Sylvain Gargalian / Denis Guivarc’h / Joef Dumoulin
Lise van Dooren, Tribeqa, Dr. Damien Paradisi / Philippe / Guillaume Ruelland / Rafaël
Lonnie Smith Trio Renault, Stéphane Belmondo Koerner), Rita Marcotulli /
Le 6 Malia Trio, Abbe Nguayihi / Jesse van Ruller / Thomas Luciano Biondini, henri Texier
5tet avec Ronald Baker et Jean- Bramerie, The Gravediggers Sky Dancers 6tet (Sébastien
Jacques Elangué Le 21 Rotem Sivan Trio, Antoine Texier / François Corneloup
Le 7 EJMB “hommage à Berjeaut Sax Machine (Juice / Nguyên Lê / Armel Dupas /
Zappa”, oscardus, Richie Cole Aleem / Julien Lourau / Sylvain Louis Moutin)
(Pierre Le Bot / Philippe Dardelle Daniel / Fabrice Moreau), Trio Le 11 Langues et Lueurs
MARLENE SoARES

Maxime Bender, / Patrick Filleul) Buggy, Louis Sclavis Silk And avec Louis Sclavis / Sébastien
Jeff herr, Les 6 et 7 Sand Sisters, Jean- Salt 4tet (Gilles Coronado / Boisseau / Jean-Paul Delore,
laurent Payfert Patrick Cossert Soultime Trio Benjamin Moussay / Keyvan Possible(s) 4tet (Rémi Gaudillat
Le 8 Ilhan Ersahin 4tet, Chemirani) / Fred Roudet / Loïc Bachevillier

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 75


le live

/ Laurent vichard), Donkey Contet, Archie Shepp Attica (Sébastien Texier / François PLAcE AU JAZZ, Antony, du Le 19 Nasser Ben Dadoo, New G.P.S.o. Big Band
Monkey (Eve Risser / yuko Blues Big Band, Carlos Bica Corneloup / Armel Dupas / 17 au 29 novembre (01 40 96 Blues Generation on Tour avec Le 21 Serge Forté Trio / Paolo
oshima), Emile Parisien 4tet / Frank Möbus, Louis Sclavis Nguyên Lê / Louis Moutin) 72 82, billetterie.ville-antony.fr) Jarekus Singleton Fresu
(Julien Touery / Ivan Gélugne Jazzdor Ensemble (Dominique Le 15 Diversion Le 17 Jam session Le 20 Jo harman Group, Jimmy Le 22 La Compagnie Charles
/ Mario Costa), vegan Dallas Pifarély / Benjamin Moussay Le 20 Fred Pallem / Sacre du Le 20 Ploum, Big Band Antony Johnson Blues Band est Stone “Boris vian : l’écume
(Benjamin Flament / Julien / Sarah Murcia / Christophe Tympan Jazz Le 21 Bad Mules, Chicago des jours”
Chamla / Richard Comte / Simon Lavergne) Le 21 Sonia Wieder-Atherton Le 21 virginie Teychené 4tet / Blues on Tour
henocq), Thomas De Pourquery Le 8 Michael Wollny Trio Trio, Avishai Cohen / Nitai olivier Ker ourio MoNTE-cARLo JAZZ
/ Supersonic (Christian Weber / Eric hershkovits / Daneil Dor Le 22 Amazing Keystone Big JAZZ À PART FESTIVAL, FESTIVAL, Monte-carlo, du
Le 12 Daunik Lazro / Jean-Luc Schaefer), Emile Parisien / Le 22 Baptiste Trotignon / Band Rouen, du 19 au 22 novembre 23 novembre au 6 décembre
Cappozzo / Didier Lasserre, Joachim Kühn 5tet (Manu Codjia Minino Garay (06 37 12 69 25, jazzapart.com) (montecarlosbm.com)
Le 28 Brad Mehldau Trio (Larry
Workshop de Lyon (Jean / Simmon Tailleu / Mario Costa) Le 27 Laura Perrudin Le 19 olivier hue Solo Le 23 Richard Manetti 5tet,
Le 28 Thomas Enhco Grenadier / Jeff Ballard) James Farm (Joshua Redman
Aussanaire / Jean-Paul Autin / Le 9 Plaistow, Kris Davis 5tet Le 20 Antoine Berland, henri &
Le 29 Laurent Coulondre Trio, Le 29 Ralph Moore (Michael Sébastien Texier / Aaron Parks / Matt Penman /
Jean Bolcato / Christian Rollet), (Ingrid Laubrock / Sam Barfeld /
Laurent Mignard Duke orchestra Chéret / Patric Cabon / Gary Le 21 Bernard Santacruz Eric harland )
“Réminiscences” d’après Eivind opsvik / Tom Rainey)
L’Etranger de Marcel Camus Le 10 Donkey Monkey (Eve & Michel Pastre Big Band Brunton / Andrea Michelutti) Le 22 Charles hayward, Faust Le 26 Thomas Enhco, Avishai
(Pierre-Jean Peters / Adrien Risser / yuko oshima), Sylvie Cohen
Dennefeld / Guillaume Séguron Courvoisier / Mark Feldman, JAZZ AUX cARRÉS, Annecy- So BLUES FESTIVAL, Le JAZZ À VIAN, Ville-d’Avray, Le 27 Gogo Penguin, Selah Sue
/ Jean-Pierre Jullian), Susanne Il Pergolese (Maria Pia de Le-Vieux, du 11 au 15 Mans et environs, du 18 au du 20 au 22 novembre Le 28 Cory henry, Marcus Miller
Abbuehl 4tet (Matthieu Michel vito / Anja Lechner / François novembre (04 50 23 43 48, 21 novembre (europajazz.fr) (06 24 23 86 00, jazzavian.com)
/ Wolfert Brederode / oyvind Couturier / Michele Rabbia) mjc-annecylevieux.com) Le 18 Lulu And The Fat Dogs, Le 20 Master Class Paolo
hegg-Lunde) Le 11 Polymorphie, Michael Le 11 Sean Carney / Jonn Little Bob Blues Bastard Fresu, Claude Abadie Tentet,
Le 13 Utopian Wind (Marlène Alizon & Jean-René Mourot, Richardson 4tet
Rostaing / Pascal Contet), Pascal Mark Turner 4tet (Avishai Cohen Le 12 Baptiste Trotignon Trio
Schumacher 4tet, François / Joe Martin / Marcus Gilmore) (Thomas Bramerie / hans von
Couturier / Anja Lechner, Enrico Le 12 Christophe Imbs Trio oosterhout)
Rava 4tet (Stefano Di Battista (Matteo Bortone / Anne Paceo), Le 13 Eym Trio, Agathe Jazz
/ Francesco Diodati / Gabrilele Michel Portal / vincent Peirani / 4tet (Pierre Alain Goualch / Juan PariS, LeS adreSSeS, LeS SiteS…
Evangelista / Enrico Morello) Emile Parisien sebastien Jimenez / Pierre Alain
Le 14 Andreas Schaerer / Lucas Le 13 Diego Manuschevich Tocanier) AMBASSAdE dE cAVEAu dES ESPAcE RAchi MuSéE d’ART
Niggli, hugh Coltman (Thomas / Diego Manuschevich duo & Le 14 Pascal Schumacher 4tet, ROuMANiE OuBliETTES 39, rue Broca (5e) ET d’hiSTOiRE
vincent Peirani Living Being 123, rue Saint-Dominique 52, rue Galande (5e) 01 42 17 10 36 du JudAÏSME
Naim / Paul Lay / Christophe 4tet, Julia hülsmann 4tet avec (7e) 01 46 34 23 09 culture-juive.fr 71, rue du Temple (3e)
Mink / Raphaële Chassin), John Theo Bleckmann et Tom Arhurs, (Emile Parisien / Tony Paeleman 01 47 05 15 31 caveaudesoubliettes.com GOEThE iNSTiTuT 01 53 01 86 60
Scofield & Joe Lovano 4tet Lisbeth 4tet / Antonin-Tri hoang, / Julien herné / yoann Serra) institut-roumain.org 17, avenue de Iéna (16e) mahj.org
(Ben Street / Bill Stewart), Jam yves Dormoy “Usage(s) du Le 15 Jean Andreo et les cAVE du 38 RiV’ 01 44 43 92 30 NEW MORNiNG
Session Monde” avec Antoine Berjeaut Flextribu ATEliER chARONNE 38, rue de Rivoli (4e) goethe.de 7, rue des Petites Ecuries
21, rue Charonne (11e) 01 48 87 56 30 (10e)
Le 14 Matthieu Metzger, 01 40 21 83 35 38riv.com l’iMPROViSTE 01 45 23 51 41
BLUES SUR SEINE, Coronado (Matthieu Metzger EcLATS D’EMAIL, Limoges, ateliercharonne.com (PéNichE) newmorning.com
Mantes-en-Yvelines et / Antonin Rayon / Franck du 11 au 22 novembre cENTRE culTuREl Quai d’Austerlitz (13e)
Val-de-Seine, du 6 au 21 vaillant), hans Lüdemann T.E.E. (s370308257.onlinehome.fr/FEE) ATEliERS du cANAdiEN 06 86 46 60 89 PéNichE ANAKO
novembre (01 30 92 35 38, Ensemble (Alexandra Grimal / Le 11 Ambrose Akinmusire 4tet chAudRON 5, rue de Constantine (7e) improviste.fr 61, quai de Seine (19e)
(Sam harris / harish Raghavan / 31, passage de 01 44 43 21 90 09 53 14 90 68
blues-sur-seine.com) yves Robert / Théo Ceccaldi / Ménilmontant (11e) iNSTiTuT dES peniche.anako.com
Avec entre autres : Sébastien Boisseau…), Amok Justin Brown) 01 43 61 17 17 cENTRE culTuREl culTuRES d’iSlAM
Le 6 Eric Bibb & invités, Robyn Amor avec Peter Evans & Le 12 Fatoumata Diawara / ateliersduchaudron.free.fr iRlANdAiS 56, rue Stephenson (18e) PETiT JOuRNAl
Bennett / Bang Bang, Gunwood Christian Lillinger Roberto Fonseca 5, rue des Irlandais (5e) 01 53 09 99 84 MONTPARNASSE
Le 13 Petits Loups du jazz / Jazz l’ATEliER du PlATEAu 01 58 52 10 30 institut-cultures-islam.org 13, rue du Cmdt
Circle, The Wanton Bishops Le 15 Elèves du conservatoire 5, rue du Plateau (19e) centreculturelirlandais.com Mouchotte (14e)
Le 7 Cedric Burnside Project, de Strasbourg, Auditive orchestra du CIMD / Daniel huck 01 42 41 28 22 iNSTiTuT FiNlANdAiS 01 43 21 56 70
Seun Kuti & Egypt 80, vaudou Connection, Richie Beirach Le 14 Sylvain Rifflet Alphabet atelierduplateau.free.fr cENTRE culTuREl 60, rue des écoles (5e) petitjournalmontparnasse.
Game, Karl W Davis & The Le 17 Eve Risser White Desert Mechanics (Joce Mienniel / Phil TchèQuE 01 40 51 89 09 com
Sweetpeas, Thomas Ford orchestra Gordiani / Benjamin Flament) BAB ilO 18, rue Bonaparte (6e) institut-finlandais.asso.fr
Le 15 Sean Carney / Jonn 9, rue du baigneur (18e) 08 99 23 23 49 PETiT JOuRNAl
Le 8 Steel Dance Le 18 Bernard Struber Jazztett 01 42 23 99 19 paris.czechcentres.cz iNSTiTuT hONGROiS SAiNT-MichEl
Le 9 Muddy Waters 100 Le 19 Ciné-concert avec Ark4 Richardson Blues Session babilo.lautre.net 92, rue Bonaparte (6e) 71, boulevard Saint
Le 10 Beth hart, vicious Steel (Pierre Boesflug / François Le 16 Lars Danielsson Group cENTRE WAllONiE- 01 43 26 06 44 Michel (5e)
Le 11 Frank Muschalle, Kyla Guell / Jean Lucas / Christian (Grégory Privat / John Paricelli / lE BAiSER SAlé BRuXEllES instituthongrois.fr 01 43 26 28 59
Brox, The Two Mariotto) Magnus oström) 58, rue des Lombards (1er) 127-129, rue Saint- claude.philips.
Le 17 Maxim Bender 4tet, Itama 01 42 33 37 71 Martin (4e) iNSTiTuT SuédOiS pagesperso-orange.fr
Le 13 Cisco herzhaft & Rockin’ Le 20 Joshua Redman / Aaron lebaisersale.com 01 53 01 96 96 11, rue Payenne (3e)
Squat, No Money Kids, Golden Parks / Matt Penman / Eric Borochov 4tet cwb.fr 01 44 78 89 20 PhilARMONiE
Gate 4tet, The hub harland, Le Bal des Faux Frères Le 18 Pascal Schumacher 4tet, lA BEllEVillOiSE si.se/Paris/Francais Parc de la villette
Le 14 Rock’n’roll Rebel, Dj Gaël Rouillac Trio 19-21, rue Boyer (20e) lE céPAGE 01 44 84 44 84
Les 18 et 20 Emie R. Roussel Trio 01 46 36 07 07 MONTMARTROiS lA JAVA philharmoniedeparis.fr
S.Mos, Songhoy Blues, Tiwayo, JAZZ À GRIGNAN, Grignan, labellevilloise.com 65, rue Caulaincourt (18e) 105, rue du faubourg du
Kyla Brox du 6 au 28 novembre (04 75 91 Le 19 Patrick vanhee Trio, 01 46 06 95 15 Temple (10e) RAdiO FRANcE
Le 15 Bad Mules, New Blues 83 65, chateaux-ladrome.fr) Goran Kajfes Subtropic 6tet, BOuFFES du NORd cepagemontmartrois.fr 01 42 02 20 52 116, av. du Président
Generation Les 6, 7 Laura Perrudin, Les Laurent Coulondre Trio (ThéÂTRE) la-java.fr Kennedy (16e)
Le 17 Blick Bassy, Jordan Chats Badins Le 20 Guillaume de Chassy 37b, boulevard de La lA ciGAlE 01 56 40 15 16
/ orchestre de Limoges et du Chapelle (10e) 120, bd. Rochechouart (18e) MAiSON du dANEMARK radio-france.fr
officer Les 13, 14 Casadesus-Enhco 01 46 07 34 50 01 49 25 81 75 142, avenue des
Le 18 Sarah Savoy Cajun Trio, Les 20, 21 Dj Sir Sway Limousin bouffesdunord.com lacigale.fr Champs-Élysées (8e) SERVicE culTuREl
Guy Bélanger, Chicago Night Les 27, 28 vincent Peirani / Le 21 Ester Rada, Rive gauche 01 56 59 17 40 dE l’AMBASSAdE
With Jimmy Johnson Emile Parisien Le 22 orjazz / Mina Agossi 5tet cAFé uNiVERSEl lA chAPEllE maisondudanemark.dk d’AZERBAÏdJAN
Le 19 Aymeric Maïni, Chicago / Jean-Jacques Milteau 267, rue Saint Jacques dES lOMBARdS 1, avenue Charles
(5e) 19, rue de Lappe (11e) MARcOuNET (PéNichE) Floquet (7e)
Blues Festival, King Size Slim JAZZ AU FIL DE L’oISE, Val- 01 43 25 74 20 01 43 57 24 24 Quai de l’hôtel de ville 01 44 38 78 44
Le 20 hindi Zahra, howlin Jaws, d’oise, du 6 novembre au 13 JAZZ’N’KLEZMER, Paris, du cafe-universel.com la-chapelle-des- (4e)
The Swinging Dice, Tribute To décembre (01 34 48 45 03, 11 novembre au 1er décembre lombards.com 06 60 47 38 52 STudiO dE l’ERMiTAGE
Etta James jafo95.com) (jazznklezmer.fr) cARREAu du TEMPlE peniche-marcounet.fr 8, rue de l’Ermitage (20e)
Le 6 yom / Frédéric Deville / Détail dans la rubrique Paris de 4, rue Eugène Spuller lES diSQuAiRES 01 44 62 02 86
Le 21 Aymeric Maïni, Lehmanns (3e) 4-6, rue de Taillandiers (11e) MélANGES dES studio-ermitage.com
Brothers, Maceo Parker Claude Tchamitchian / Bijan notre agenda (Espace Rachi, 01 83 81 93 30 01 40 21 94 60 GENRES
Chemirani Sunset, la Bellevilloise, New carreaudutemple.eu lesdisquaires.com 44, bd voltaire (11e) SuNSET/SuNSidE
JAZZDoR FESTIVAL, Le 7 Muddy Waters 100 Morning, Synagogue Copernic, 01 47 00 41 06 60, rue des Lombards
Strasbourg et environs, du Le 8 Mec ! (Philippe Torreton / la cigale, Musée d’art cAVEAu duc dES lOMBARdS lemelangesdesgenres.fr (1er)
d’histoire du judaïsme) dE lA huchETTE 42, rue des Lombards (1er) 01 40 26 46 60/21 65
6 au 20 novembre (03 88 36 30 Edward Perraud) 5, rue de la huchette (5e) 01 42 33 22 88 MPAA – SAiNT- sunset-sunside.com
48, jazzdor.com) Le 12 Ibrahim Maalouf / Rick 01 43 26 65 05 ducdeslombards.fr GERMAiN
Le 6 Filiamotsa & G.W.Sok, Margitza / Frank Woeste / Scott FESTIVAL WoRLDSTocK, caveaudelahuchette.fr 4, rue Felibien (6e) ThéÂTRE dE
Jason Moran “Fats Waller Colley / Clarence Penn Paris, du 17 au 28 l’ENTREPÔT 01 46 34 68 58 lA REiNE BlANchE
Dance Party” (Lisa E. harris / Le 13 Renaud Garcia-Fons novembre (01 46 07 34 50, cAVEAu dES léGENdES 7, rue Francis de mpaa.fr 2 b, Passage Ruelle (18e)
bouffesdunord.com) 22, rue Jacob (6e) Pressensé (14e) 01 40 05 06 96
Leron Thomas / Tarus Mateen / Trio (Stephan Caracci / David 01 43 26 36 26 01 45 40 07 50 reineblanche.com
Charles haynes) venitucci) Détail dans la rubrique Paris de caveaudeslegendes.fr lentrepot.fr
Le 7 Daunik Lazro, Pascal Le 14 henri Texier 6tet notre agenda.

76 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


andré robert
PariS
PARIS
New Morning omer Avital 5tet
avec yonathan Avishai
Petit Journal Montparnasse
Restaurateur ès jazz
DIMANchE 1ER Malia
Atelier charonne William Petit Journal Saint-Michel
Brunard / Sébastien Giniaux Swing Combo De Ludo
Baiser Salé hommage à herbie Salle colonne Laurent Naouri /
hancock Guillaume De Chassy / Thomas
caveau de la huchette Savy / Arnault Cuisinier
Megaswing Sunset Sarah Lenka 5tet
le Marcounet Racine de Sunside Gary Bartz 4tet
Swing
Sunset Jazz & Goûter John JEUDI 5
Coltrane avec Samy Thiebault Atelier charonne Rodolphe
4tet Raffalli Trio
Sunside hommage à Nina Bab-ilo Arnaud Dolmen 4tet
Simone avec Mathilde Baiser Salé Tricia Evy
café universel Universel
LUNDI 2 Connection voice

JEAN-BAPTISTE MILLoT
Atelier charonne Angelo carreau du Temple Bojan
Debarre 4tet Z / vasil hadžimanov / Dj’s
caveau de la huchette Jean- Rahmanee / Uce lES
Paul Amouroux caveau de la huchette GENS
duc des lombards Géraldine Pablos Campos Trio du JAZZ
Laurent 4tet (Paul Lay / yoni duc des lombards Rudresh
Zelnik / Donald Kontomanou) Mahanthappa 5tet (Adam
Mélanges des Genres o’Farrill / Joshua White / André Robert, nouveau patron du Petit Journal Montparnasse, magazine

hradcany François Moutin / Dan Weiss) restaure à tous les sens du terme : il fait manger les gens et remet en
New Morning Floating Points,
Jeremy Underground, Christian
l’Entrepôt Now’s The Time
New Morning John Scofield
vigueur ce qui est tombé en désuétude. démonstration.
Tiger School & Joe Lovano 4tet (Ben Street /
Petit Journal Montparnasse Bill Stewart)
Cynthia Abraham 6tet avec Petit Journal Montparnasse En tant que cofondateur et d’abandon artistique. PJM Orchestra  dirigé par
Leonardo Montana et Ralph BD Music avec le PJM orchestra en 1987 de la cagouille, du coup, l’affaire avait Matthieu Allemandou avec
Lavital Petit Journal Saint-Michel établissement situé au périclité et perdu aussi d’aussi brillants musiciens
Sunset hommage à Johnny Bac Jazz 5tet que Baptiste herbin ou
hodges, vandojam Sunset Ilhaam Project, Maciek cœur du Montparnasse vite sa clientèle que sa
Pysz Paris 4tet (Laurent Derache nouveau et dédié aux réputation. Mauro Gargano. « Pour
MARDI 3 / Chris Jennings / Luc Isenmann) poissons, coquillages et redonner aux gens l’envie
Atelier charonne Daisy Castro / Alex Stuart de sortir dans un jazz club
Trio Sunside André villéger & crustacés, André Robert Fan de Zappa dans sa
Bab-ilo Tony Tixier & Friends Philippe Milanta sait d’expérience que la clé jeunesse, André Robert, comme le nôtre, ajoute-
Baiser Salé Fred Perreard du succès d’un bistrot tient 55 ans, s’est donné cinq t-il, il faut qu’on soit bon
Project 4tet avec Irving Acao VENDREDI 6 partout : accueil, cuisine
cave du 38 Riv’ Marvin Parks, Atelier charonne Florin d’abord dans la qualité ans pour réussir son défi
Karim Blal / Geraud Portal / Niculescu Trio de la cuisine que l’on de « reconquête du public et programmation. Le
Philip Maniez Atelier du Plateau Maguelone propose : « On ne se sauve et des musiciens. Cela ne problème majeur du PJM,
caveau de la huchette Dany vidal / Erwan Keravec c’est qu’il additionne deux
Doriz Swing Band Bab-ilo Kuba Wiecek, Arnaud que par la restauration », se fait pas en un jour, parce
institut des cultures d’islam Dolmen 4tet tel est son credo. En tant qu’il est toujours plus dur désavantages : celui d’être
Jean-Marc Padovani / Paloma Baiser Salé AS Malick And que repreneur, en janvier de sauver un lieu qui a la plus petite des grandes
Pradal / Naïssam Jalal / Alain Blue Tribe
2013, du Petit Journal coulé que d’en ouvrir un salles (jamais assez vaste
Bruel / Fréderic Monino / café universel Susanna quand il y a beaucoup de
Dawoud Bounabi Bartilla 4tet Montparnasse, il sait neuf.  Le monde de la nuit
la cigale Esperanza Spalding cave du 38 Riv’ Maureen aussi qu’il est urgent, s’il a aussi beaucoup changé monde) et celui d’être la
le Marcounet Jonathan Esivert
veut gagner son pari, de depuis 1985 ». Avec son plus grande des petites
Chabbey Trio caveau de la huchette salles (200 places assises).
MPAA Saint-Germain Laura Pablos Campos Trio redorer rapidement le décor chic et sobre en
Perrudin, World Kora Trio centre culturel Tchèque Avec l’appui d’une équipe
blason et  de… restaurer rouge et noir, bénéficiant
New Morning Christian Scott Lylit Trio très motivée, en cuisine
Petit Journal Montparnasse cépage Montmartrois l’image d’un lieu tombé d’une excellente
comme en salle, de
Walter Ricci / David Sauzay 5tet Georges Locatelli / Gilda Solvé / en quelques années en acoustique, avec toujours
Petit Journal Saint-Michel Patrice Galas / Frédéric Sicart quinze personnes chaque
désuétude. En effet, le son légendaire comptoir
hommage à Claude Luter duc des lombards Jeremy soir – dont Mélanie
Sunset Leo Sidran Pelt 4tet célèbre jazz club parisien, de onze mètres de long, le Lecointe, responsable
Sunside Gary Bartz 4tet MPAA Saint-Germain olivier fondé il y a trente ans PJM offre une scène idéale de la programmation –,
Py / Alioune Koné, vincent par André damon, pour les big bands. André
MERcREDI 4 Courtois / Théo Ceccaldi je m’efforce, avec notre
Atelier charonne Pierre-yves New Morning Laurent incroyable limonadier Robert ne se prive pas de festival étalé sur  trois
Plat Coulondre Trio Trio aveyronnais aussi ce plaisir en programmant  mois, destiné à célébrer
Atelier du Plateau harvest Petit Journal Montparnasse économe qu’amoureux des régulièrement des grandes
(Guillaume Aknine / Jean-Brice Aurore voilqué 7tet avec les trente ans du PJM, de
Godet / Jean Dousteyssier) François Biensan, Jerry Edwards musiciens (Eddy louiss, formations comme le redonner aux musiciens
Baiser Salé Mario Canonge / et Thomas Savy Michel Petrucciani, claude Brussels Jazz Orchestra, l’envie de rejouer ici et au
Michel Zenino, Rick Margitza Petit Journal Saint-Michel Nougaro, s’ils étaient le Ron Meza Big Band
4tet (Manuel Rocheman / Peter Paris Washboard public celui de revenir les
Giron / Jeff Boudreaux) Sunset Colette & The Strings toujours vivants, pourraient ou le grand orchestre de applaudir ». • PASCAL AnQueTiL 
café universel Fabio Deldongo Band en témoigner), après sa claude Bolling, sous la
cave du 38 Riv’ Kuba Wiecek Sunside Sofia Ribeiro / Marco vente au début des années houlette désormais de NET petitjournalmontparnasse.
Trio Mezquida, Aldo Romano / com
caveau de la huchette Dany Michel Benita / Dino Rubino 2000 à claude Perdriel, Vincent cordelette, avec
Doriz Swing Band ancien propriétaire de Philippe Milanta au piano.
duc des lombards Rudresh SAMEDI 7 l’Obs et grand amateur de depuis quelques mois, le
Mahanthappa 5tet (Adam Ambassade de Roumanie
o’Farrill / Joshua White / Teodora Enache / Theodosii jazz, avait connu une trop PJM accueille également
François Moutin / Dan Weiss) Spassov 5tet longue période de jachère une formation résidente, le

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 77


le live

Atelier charonne Marina Corneloup / Armel Dupas / VENDREDI 13 LUNDI 16


orkestra Tzigane Louis Moutin) Atelier charonne Marcel Atelier charonne Angelo
Bab-ilo Gwen Sampé / José Petit Journal Montparnasse Loeffler 4tet Debarre 4tet
Penjé African Jazz 4tet Daniel John Martin Gypsy Swing Atelier du Plateau Roberto la Bellevilloise Socalled, The
Baiser Salé Carte Blanche à Revival Negro / Bastien Maupomé Angelcy
Tiss Rodriguez Petit Journal Saint-Michel Bab-ilo Christian Lauretta / café universel Moe Seager
café universel La France qui Les Musicanthropes Georges-Edouard Nouel Trio 4tet
ne se couche pas Radio France Elise Dabrowski / Baiser Salé Teol Project (Caro caveau de la huchette Jean-
cave du 38 Riv’ Circuito Claudine Simon, Pascal Contet / Tripet / Nico Moreaux / Pierre Paul Amouroux
Aberto Trio Jean-Marc Foltz Perchaud) duc des lombards Johnny
caveau de la huchette le Marcounet Fred Borey café universel Maria Teresa o’Neal Trio
Pablos Campos Trio Wink 5tet (Michael Felberbaum / Toscano Goethe institut Lucia Luzinska
duc des lombards Jeremy Leonardo Montana / yoni Zelnik caveau de la huchette Blues / ondrej Krajnak
Pelt 4tet / Fred Pasqua) de Paris la cigale Guillaume Perret
MPAA Saint-Germain Sunset Fleur Sana centre Tchèque Márton Electric Epic, Sidony Box /
Aquarela, David Linx et Diederik Sunside vintage orchestra Juhász’s Meeting Point avec Gianluca Petrella
Wissels Tiasci Sylvain Darrifourcq / Kristof Bacso Mélanges des Genres
New Morning Nicolas Folmer Ronan Courty chapelle des lombards hradcany
horny Tonky (Antoine Favenec Chris Donnelly / Daniel Fortin / Petit Journal Saint-Michel
/ olivier Louvel / Laurent MARDI 10 Ernesto Cervini Easy Jazz Duet
Coulondre / Julien herné / Atelier charonne Ninine duc des lombards Catia

x/DR
Damien Schmitt) Garcia 4tet Werneck MARDI 17
Petit Journal Montparnasse Baiser Salé Ralph Lavital Jazz At home Sylvain Atelier charonne Frères
Gilles Seemann 6tet
Petit Journal Saint-Michel
Project, yoann Kempst Band
caveau de la huchette Frank
Danseurs célestes Darrifourcq / Jean-Brice Godet
Petit Journal Montparnasse
Ferré Trio
Bab-ilo Thomas Kpade
Les Rois du Fox Trot Muschalle Après avoir joué au New Morning le 9 Didier Lockwood / Philippe Baiser Salé Lachica, Gustave
Radio France Airelle Besson Péniche Anako Nicolas novembre, henri Texier quittera Paris Petrucciani / Trio Moëbius Reichert Project
/ Nelson veras, The Workshop Fargeix / oboman / Claude Petit Journal Saint-Michel Bouffes du Nord Jowee
(Stéphane Payen / olivier Tchamitchian / François Merville avec ses Sky dancers (Sébastien Passport To Swing omicil, Erik Truffaz 4tet
Laisney / Guillaume Ruelland / Petit Journal Montparnasse Texier, François corneloup, Nguyên Studio de l’Ermitage Akalé cave du 38 Riv’ Jose Fallot
vincent Sauve) Diamant Noir lê, Armel dupas, louis Moutin) pour Wubé 4tet
Sunset Alexandre herer 5tet Petit Journal Saint-Michel se rendre le 10 au d’Jazz Nevers Sunset Irina R duc des lombards Johnny
(Stéphane Payen / Julien San Francisco Jazz Band Sunside Ben Sidran 4tet invite o’Neal Trio
Pontvianne / Alexandre herer Service culturel de Festival et le 14 à Vauréal (festival Rodolphe Burger institut Suédois Elifantree
/ olivier Degabriele / Franck l’Ambassade d’Azerbaïdjan Jazz au fil de l’Oise). le 20, il sera à centre culturel irlandais
vaillant), olivier Laisney & Etibar Asadli Rouen (Espace du moineau) en duo SAMEDI 14 Umbra, Sue Rynhart / Dan Bodwell
Slugged (Adrien Sanchez / Studio de l’Ermitage Do Atelier charonne Costel Petit Journal Montparnasse
Stéphan Caracci / Joachim Montebello avec son fils Sébastien dans le cadre Nitescu 4tet Moutin Factory 5tet (Christophe
Govin / Thibault Perriard) Sunset Stéphane Kerecki / du festival Jazz à Part. Atelier du Plateau Roberto Monniot / Jean-Michel Pilc /
Sunside Eellen, Aldo Romano / Tony Malaby / Daniel humair / Negro / Bastien Maupomé Manu Codjia)
Dino Rubino / Michel Benita Santiago Quintans Bab-ilo Jon handeslman Spirit Petit Journal Saint-Michel
Sunside Ben Sidran 4tet avec house Quartet olivier Franc 4tet
DIMANchE 8 Bob Rockwell / Rodolphe Burger Baiser Salé Jonathan Scales Philharmonie de Paris
Atelier charonne William Fourchestra, Brian Seeger Trio Neerman & Kouyaté
Brunard / Angelo Debarre MERcREDI 11 (Fred Dupont / Jeff Boudreaux) Sunset The 3 Moons (Srdjan
Atelier du chaudron Steve Atelier charonne Ben Toury cave du 38 Riv’ Pingo De Ivanovic / Christophe Panzani /
Potts & the New Giants (Thomas
Savy / Sophia Domancich /
Trio
Baiser Salé Mario Canonge /
ÇA JAMME À PARiS Choro 4tet
caveau de la huchette Blues
Timothée Robert)
Sunside Riccardo Del Fra 4tet
Stéphane Kerecki / Simon Michel Zenino, Mokhtar Samba de Paris (Pierrick Pedron / Paul Lay /
Goubert) café universel Susan Shields Dimanche Babilo A 19h jam session brésilienne duc des lombards Itamar Billy hart)
caveau de la huchette 4tet avec Sorriso / Thierry Chillon / Charles Amed Borochov 4tet
Megaswing cave du 38 Riv’ Manuel Barry / Murillo. Baiser Salé A 21h avec Gustave Goethe-institut Sizhukong MERcREDI 18
Studio de l’Ermitage Patrice Fraiman 4tet Reichert le 1er (programme herbie hancock), l’improviste Tony Malaby Atelier charonne Pierre-yves
Caratini Latinidad 5tet (Rémi Espace Rachi Irith Gabriely / Romain Labaye le 8 (programme Beatles), jam / Richard Bonnet / Sylvain Plat
Sciuto / Manuel Rocheman Irina Loskova vocale avec Laurence Saltiel, Thierry Péala et Darrifourcq, Sylvaine hélary / Baiser Salé Mario Canonge
/ Sebatian Quezada / Inor institut hongrois Salvador Laura Littardi le 14, avec vincent Tortiller le 22 Bruno Chevillon / Michel Zenino, Jean Bardy /
Sotolongo), Tropical Jazz Trio Sobral / Julio Resende (programme Led Zeppelin), avec Romain Cuoq et New Morning Sharon Robinson Emil Spanyi
(Alain Jean-Marie / Roger Raspail) Studio de l’Ermitage Anthony Jambon (programme Radiohead) Petit Journal Montparnasse café universel Robin Mansanti
Sunset Jazz & Goûter Walt Frapadingos Sunset A 20h jam vocale avec Mathilde le 1er Jowee omicil cave du 38 Riv’ Di Falco 4tet
Disney avec Susanna Bartilla Sunset Christophe Dal Sasso Lundi Baiser Salé A 21h30 avec François Petit Journal Saint-Michel caveau de la huchette Boney
4tet 5tet (David El Malek / Pierre de Constantin autour de Dominique Fillon les 2, 8, Les Barbecues Fields / Sweet Screaming Jones
Sunside Les Funambules Bethmann / Manuel Marches / programme Kenny Garrett les 16, 23 et 30. Sunset Julien Lourau & Electric duc des lombards vinicius
Théâtre de la Reine Blanche Lukmil Peres) + trio à cordes cave du 38 Riv’ A 20h30 avec Julien Coriatt Trio Biddle Cantuaria
Gaël Mevel / Jacques Di Donato Sunside Ben Sidran 4tet invite (niveau expérimentés et pros) Sunside Sébastien Lovato institut Suédois Goran Kajfeš
/ Thierry Waziniak Rodolphe Burger Sunset A 21h vandojam avec Michael Chéret 4tet (Lisa Cat-Berro / Marc Subtropic Arkestra 7tet
le 2 (programme Johnny hodges), jam avec Buronfosse / Jean-Pascal Petit Journal Saint-Michel
LUNDI 9 JEUDI 12 Fabien Mary / Jon Boutelier / Fred Nardin / Bernd Molina), Corentin Rio “orpheo” Dixieland Seniors
Atelier charonne Edouard Atelier charonne Aurélien Reiter 4tet le 16 (programme Miles Davis & 6tet (David Fettmann / Romain Philharmonie de Paris
Pennes Duo Bouly Trio John Coltrane), avec Laurent Courthaliac / viktor Cuoq / Fedrico Casagrande / Neerman & Kouyaté
café universel International Baiser Salé Selkies Project, Nyberg / Romain Sarron le 23 (programme Bud Leonardo Montana / Joachim Studio de l’Ermitage
Music Educators of Paris Mokhtar Samba Powell), avec hugo Lipi / Bruno Rousselet / Julie Govin / Corentin Rio) Panorama Circus
caveau de la huchette Frank café universel Sans Elle Saury le 30 (programme George Benson) Sunset Maxime Berton
Muschalle carreau du Temple Fidel Mardi café universel A 21h avec Mathide Jazz DIMANchE 15 5tet (Bastien Ribot / Laurent
centre Wallonie-Bruxelles Fourneyron, Michele Rabbia / 4tet les 3 et 17, Nicolas Chalopin le 10, Robin Atelier charonne William Coulondre / Damien varaillon /
Baby Trio Garth Knox / Daniele Roccato Mansanti 4tet Brunard / Noé Reinhardt Martin Wangerme)
duc des lombards Karrin caveau de la huchette Blues Mercredi Bab-ilo A 21h jazz avec Daniele Atelier du Plateau Jusqu’au Sunside Bruno Angelini /
Allyson / Rod Fleeman de Paris vigilucci le 11, avec Pierre Maury le 25, groove dernier souffle avec Catherine Francesco Bearzatti
la Java Trio Bengalifère duc des lombards Catia avec Rodolphe Lauretta le 18. Delaunay, Pierry hardy,
(Matthieu Lebrun / Julen Werneck Jeudi cave du 38 Riv’ A 20h30 avec Benoît Guillaume Roy… JEUDI 19
Achiary), Baba yaga (Gabriel l’Entrepôt Gwerasato Martin (tous niveaux, acoustique) caveau de la huchette Atelier charonne Steven
Lemaire / Léo Rathier / Romain Petit Journal Saint-Michel Vendredi cave du 38 Riv’ A 22h30 avec Megaswing Reinhardt Trio
Lay / Théo Lanau) Five o’clock Jazz Band Maureen Esivert le 6 (répertoire chanson Sunset Jazz & Goûter fête Bab-ilo Samir Madiouni
Mélanges des Genres Sunset Christophe Dal Sasso française) Michael Jackson avec Margeaux Baiser Salé Jean Bardy & Emil
hradcany (voir au 11) Samedi cave du 38 Riv’. 22h30 programme Lampley 4tet Spanyi
New Morning henri Texier Sunside Ben Sidran 4tet invite brésilien avec Circuit Aberto Trio le 7, Pingo de Sunside Elsi Etna 4tet café universel Floyeal Jazz
6tet (Sébastien Texier / François Rodolphe Burger Choro le 14, avec Laura Buenrostro le 21 Band

78 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


Pascal schumacher
>>>>>>> en tournée >>>>>>> left tokyo right
13 novembre
à Nevers Djazz Festival
14 novembre
à Annecy-le-Vieux, Jazz aux Carrés
18 novembre
à Limoges, Eclats d'Email jazz Festival
19 novembre
à Paris, Jazzy Colors - (centre culturel finlandais)
20 novembre
à Nantes, Pannonica
21 novembre
à Lomme, Jazz en Nord
8 décembre
,
à Strasbourg, Jazz d Or (Cité de la musique et de la dansE)
LABORIE

© Illan Weiss

JAZZ www.pascalschumacher.com

contact booking
www.nemomusic.com
le live
lES
GENS
du JAZZ
magazine

“privilégié”. Quant à
Jazzdor Strasbourg-
Berlin, c’est à la fois une
vitrine du jazz français en
Allemagne mais aussi une
occasion de susciter des
projets transfrontaliers :
« Les musiciens se sont
emparés de cette idée
depuis, explique Ochem.
J’ai fait venir des Français
à Berlin, ils y sont restés
plusieurs jours, ont
rencontré des musiciens
allemands, et des projets
sont nés que Jazzdor
ou d’autres structures
peuvent accompagner. Nous
sommes des “pourvoyeurs
d’outils”, à la fois
instigateurs et à l’écoute,
même si on ne peut pas

Philippe Ochem aider tous les projets. Par


JEAN-BAPTISTE MILLoT

contre avec ceux que nous

Festivalier transfrontalier
soutenons s’établit un vrai
compagnonnage sur la
durée. » On est donc ici bien
au-delà de ce qu’on attend
d’un festival “classique” et,
Voici trente ans que Jazzdor déploie en Alsace une activité culturelle qui n’a cessé de se diversifier, au point
si Strasbourg et Berlin en
de franchir la frontière allemande. Qui mieux que Philippe Ochem, directeur du festival depuis vingt-six ans et sont la face la plus visible,
nouveau patron de l’AJc (ex-AFiJMA), pouvait nous raconter ce parcours remarquable ? les activités de la structure
Jazzdor recouvrent
Jazz d’Or – orthographe festival de bénévoles ses dix ans en juin 2016. “grosses machines” qu’on aussi la pédagogie, la
d’époque – est né à l’Ange répond à une volonté de Strasbourg, Offenburg, voit sur scène ici ou là ne programmation en région,
d’Or, un café strasbourgeois toute l’équipe : élargir des Berlin… : tentation seront jamais programmées la gestion d’un label qui
qui lui a donné son nom. A propositions culturelles tentaculaire ? Plutôt volonté chez nous. Il est par publie deux disques par an
l’époque, Philippe Ochem qui rencontrent un succès d’élargir le paysage et d’y ailleurs certain qu’étant et la production déléguée
est pianiste et joue lors public, lequel aide à susciter des initiatives qui musicien, ma démarche du Jazztet du guitariste
de la première édition convaincre les financeurs ne demandent qu’à être de directeur de festival est Bernard Struber. Si l’on
du festival, tout en se d’apporter leur soutien. soutenues. Ainsi, c’est avant tout musicale. Nous ajoute à cela que Philippe
produisant régulièrement à l’initiative de Jazzdor ne cherchons pas à faire Ochem vient d’être élu
dans un autre lieu dont il de fait, l’ancrage de Jazzdor Strasbourg-Berlin qu’est plaisir au public à tout prix président de l’AJc, qui
est vite amené à assurer dans la ville de Strasbourg né le duo Michel Godard mais plutôt à lui proposer fédère plusieurs dizaines
la programmation. cette – premier partenaire du / Günter “Baby” Sommer des choses qui risquent de festivals et lieux de
double activité fait qu’on festival – et ses environs ou celui de Nils Wogram de lui plaire, à élaborer un diffusion français, on
le sollicite, en 1989, pour est remarquable : les et Bojan Z. « Le soutien de programme de découverte comprend qu’il lui reste peu
prendre la direction de concerts dans les petites sociétés civiles telles que la plutôt qu’à enfoncer des de temps pour se consacrer
Jazz d’Or – qui traverse villes de la vallée du SPEDIDAM ou l’ADAMI, qui portes ouvertes. » à son premier instrument :
une période difficile –, Rhin sont un événement nous assurent une certaine le piano. • THierrY QuénuM
puis pour s’occuper d’une attendu chaque automne indépendance financière, À ce titre, l’ouverture
FestIVAL Jazzdor, du 6 au 20
autre programmation jazz, et, depuis plus de trois accapare, vu la lourdeur aux voisins allemands, si novembre. Avec, entre autres,
celle de Pôle Sud, une MJc lustres, le festival traverse des dossiers, l’activité rares dans les festivals Louis sclavis Jazzdor ensemble,
qui vient de s’ouvrir et où le Rhin pour investir la d’un salarié à plein temps hexagonaux, est devenue Archie shepp Attica Blues Big
Ochem officie toujours. Reithalle d’Offenburg, la toute l’année », constate pour Jazzdor une marque Band, Kris Davis, Daunik Lazro,
« Difficile de mener de ville partenaire, où ont Ochem. le public n’a pas de fabrique, au point que Michael Wollny, emile Parisien-
Joachim Kühn 5tet, Michel Portal
front ces activités et ma lieu des concerts franco- conscience de cette face le programme distribué / Vincent Peirani / emile Parisien,
carrière de musicien : j’ai allemands souvent inédits cachée d’une proposition au public est depuis richard Beirach…
fini par choisir de privilégier et uniques en France. cette artistique riche, diversifiée longtemps bilingue. des
les premières. Jazzdor compétence transfrontalière et peu soumise aux modes artistes tels que Michael net jazzdor.com
prenant de l’ampleur, il a amené le Bureau Export passagères. « Il existe un Wollny, Gebhard ullmann
devenait nécessaire de de la musique française véritable engagement de ou le trio der Rote Bereich,
travailler beaucoup pour à Berlin à demander à toute l’association Jazzdor peu connus ailleurs, ont pu
accompagner ou susciter Philippe Ochem d’organiser – dont quatre permanents – se produire à Strasbourg
cette évolution ». cette Jazzdor Strasbourg-Berlin, envers la musique que ou à Offenburg devant un
professionnalisation d’un un festival qui fêtera nous défendons. Certaines public franco-allemand

80 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


carreau du Temple Claude Christophe Wallemme / Julien caveau de la huchette The SAMEDI 28 DIMANchE 29
Tchamitchian “Ways out”, Dj Charlet), Susanne Abbuehl 4tet hotdoggers Atelier charonne Brady Atelier charonne William îLe-de-FranCe
Illvibe & Eric Echampard (Susanne Abbuehl / Matthieu les disquaires Doug Winterstein Trio Brunard / Kamlo
caveau de la huchette Boney Michel / Wolfert Brederode / hammond, The Workshop Autour de Midi et Minuit herbin / caveau de la huchette AuVERS-SuR-OiSE,
Fields / Sweet Screaming Jones olavi Louhivuori) (Stéphane Payen / olivier Fleury / Duprey / Culot Megaswing Sous le Porche
centre culturel canadien Sunset viktorija Gecyte & Julien Laisney / Guillaume Ruelland / Bab-ilo Morena Fattorini / Alain Sunset Aude 4tet Jazz (01 30 36 16 50)
Emie R. Roussel Trio Coriatt 4tet vincent Sauve) Jean-Marie, Cacau & invités Sunside Le Salon Idéal par Le 5 Mam
duc des lombards vinicius Sunside Sylvain Ransy, Eric Le Espace Rachi olivier Temime Baiser Salé Minimal orchestra, Arièle Butaux
Cantuaria Lann 4tet (voir au 20) volunteered Slaves / Franck Brice Wassy / Jean-Jacques chEVillY-lARuE, Maison
l’Entrepôt Parisian Chulos Amsallem Elangué Kelin-Kelin’ orchestra LUNDI 30 Léo Ferré (01 46 65 58 10)
institut Finlandais Pascal DIMANchE 22 Goethe-institut Sebastian café universel Martine Atelier charonne Jean- Le 27 Les oracles du Phono
Schumacher 4tet Atelier charonne Fanou GilLe 4tet avec Pablo held Courbet 4tet Baptiste Marino
la chapelle des lombards Torracinta / Ben J New Morning Eric Séva 4tet caveau de la huchette The caveau de la huchette Jean- cONFlANS-SAiNTE-
Fréderic Monino Around Jaco café universel Jonas Jazz (Daniel Zimmermann / Bruno hotdoggers Paul Amouroux hONORiNE, Conservatoire
4tet et invités Schorp / Matthieu Chazenrec), duc des lombards Gilad duc des lombards Campbell (jazzauconfluent.fr)
New Morning Fred Pallem & caveau de la huchette Julie Saury Trio (Carine hekselman Trio (Joe Martin / Brothers Le 7 Alex Stuart / Arnaud
Le Sacre du Tympan autour de Megaswing Bonnefoy / Felipe Cabrera) Kush Abadey) la Java Futura Experience Casenave / Irving Acao / Chris
François de Roubaix chapelle des lombards Petit Journal Saint-Michel New Morning Panam Panic (Franck Assemat / xavier Jennings / Antoine Banville
Petit Journal Montparnasse Jean-Marc Padovani 5tet hommage à Claude Luter (Julien Alour / Max Pinto / Robin Bornens / Sophia Domancich
Marc Berthoumieux 4tet Sunset Jazz & Goûter Ray Studio de l’Ermitage Notte / Julien herné / Arnaud / Michel Edelin / Jean-Marc cOuRBEVOiE, Cabaret Jazz
(Giovanni Mirabassi / Laurent Charles avec Sophie Darly Laurent Cugny / Gil Evans Paris Renaville) / Gaël Faye Foussat / Pierrick Pédron / Club (01 47 68 51 50)
vernerey / Stéphane huchard) Sunside Les Funambules Workshop Petit Journal Montparnasse Dominique Lemerle / Christian Le 2 Walter Ricci & David
Petit Journal Saint-Michel Sunset Katia oray Trio Five o’clock Jazz Band Lété / Jean-François Pauvros / Sauzay 5tet
Marc Laferriere LUNDI 23 Sunside Pierre de Bethmann Petit Journal Saint-Michel Leïla Martial) Le 9 Aurore voilqué 4tet
Studio de l’Ermitage Pédro Archives Nationales Elvis Trio Carte Blanche à François New Morning Albare 6tet Le 16 Natalia M. King
Kouyaté Penava Trio Barnoud Mélanges des Genres Le 23 Clem Cardenas
Sunset Sarah Mikovski Atelier charonne Christophe JEUDI 26 Sunset Jean-Michel Davis hradcany
Sunside Ramona horvath Trio Astolfi Duo Atelier charonne Samy Etherial vibes (Frédéric Loiseau Olympia Gregory Porter cOuRBEVOiE, Espace
Synagogue Copernic Azafea caveau de la huchette Jean- Daussat Trio / Raphaël Schwab / Julien Petit Journal Saint-Michel Carpeaux (01 47 68 51 50,
Paul Amouroux Atelier du Plateau Louis Charlet) Fabrice Eulry sortiracourbevoie.com)
VENDREDI 20 duc des lombards Bennie Sclavis / Dominique Pifarély / Sunside Damien Nedonchelle, Sunset hommage à George Le 19 hugh Coltman,
Atelier charonne Norig 4tet Maupin 4tet vincent Courtois Jesse Davis-Ronald Baker 5tet Benson, Jam Session Neeskens
Bab-ilo In the Moment Trio Mélanges des Genres Baiser Salé viviane Ginapé /
Baiser Salé Nadège Beausson- hradcany Antoine Delprat, Anonymama
Diagne, Mario Canonge / Michel New Morning Malted Milk & café universel Neehna 4tet
Zenino 5tet Toni Green Pop Jazz
café universel Cecil Recchia Petit Journal Saint-Michel caveau de la huchette The
4tet Super Swing Project hotdoggers
caveau de la huchette Boney centre Wallonie-Bruxelles
Fields / Sweet Screaming Jones MARDI 24 LG Jazz Collective
centre Tchèque Agharta 4tet Atelier charonne Adrien duc des lombards Gilad
cépage Montmartrois Moignard Trio hekselman Trio (Joe Martin /
Patricia Bonner / Jean-Michel Baiser Salé Ellinoa “Wanderlust” Kush Abadey)
Proust / Pierre Christophe / cave du 38 Riv’ The Soul la chapelle des lombards
Cédric Caillaud / Michel Denis Mutation “Wen 4tet”
chapelle des lombards caveau de la huchette Jeff Petit Journal Montparnasse
Jean-Marc Padovani 5tet hoffman Mina Agossi
duc des lombards omer duc des lombards Bennie Petit Journal Saint-Michel
Klein Trio Maupin 4tet Fidgety Feet
Maison du danemark Malene église Protestante Sunset Régis Kole
Kjærgård Group luthérienne de Bon Secours Sunside Robert Kaddouch

9
New Morning Sheila Jordan / Joël Bouquet / Charles Calamel / Laurent Chavoit / Milena

20 > 2 15
Jean-Michel Pilc Trio (François / Bernard Drouillet Kartowski
institut hongrois Kestutis
et Louis Moutin)
0
NOV. 2
Petit Journal Saint-Michel vaiginis 4tet VENDREDI 27
hommage à Louis Armstrong Musée d’Art et d’histoire du Atelier charonne Brady
Sunside Eric Le Lann 4tet (Paul Judaïsme Shalosh Winterstein Trio
Lay / Sylvain Romano / Aldo New Morning Laurent David / Atelier du Plateau Louis
Romano) Jean-Christophe Calvet / Jean- Sclavis / Dominique Pifarély /
Michel Kajdan vincent Courtois
SAMEDI 21 Petit Journal Montparnasse Autour de Midi et Minuit
Atelier charonne Marina Le Grand orchestre du Cirque herbin / Fleury / Duprey / Culot
orkestra Tzigane National Alexis Grüss Bab-ilo Cacau et invités
Atelier du Plateau olivier Lété Petit Journal Saint-Michel Baiser Salé Brice Wassy /
Bab-ilo Jean-Claude Marcel Zanini Jean-Jacques Elangué Kelin-
Montredon et invités Studio de l’Ermitage Jerez Le Kelin’ orchestra
Baiser Salé Nadège Beausson- Cam 4tet café universel Shanna
Diagne, Jam vocale Sunset Ilaria Graziano & Waterstown 4tet
café universel Caroline Porta Francesco Forni caveau de la huchette The
4tet Sunside Pierre De Bethmann hotdoggers
cave du 38 Riv’ Laura Trio (Sylvain Romano / Tony duc des lombards Gilad
Buenrostro 4tet Rabeson) hekselman Trio (Joe Martin /
Licence entrepreneur du spectacle : 3-1039436

caveau de la huchette Boney Bouffes du Nord Alela Diane & Kush Abadey)
Fields / Sweet Screaming Jones Ryan Francesconi institut Finlandais vojciech
intet
né Qu
centre culturel irlandais Myrczek / Pawell Tomaszewski
Carrot Lights MERcREDI 25 Petit Journal Montparnasse
g in ie Teyche
chapelle des lombards Atelier charonne Maria Zarifa Claude Bolling Big Band Vir Moore
Jean-Marc Padovani 5tet duc & hugo Lippi Trio Petit Journal Saint-Michel Ralph hldau Trio
nd e
des lombards omer Klein Trio Baiser Salé Mario Canonge Certains l’aiment chaud
y Jazz ne Big
Ba Brad M
Anton zing Keysto
• 08/2015

la cigale David Krakauer / Michel Zenino, xavier Sunset Philippe Petrucciani-


a
Petit Journal Montparnasse Roumagnac Eklectik Band avec Nathalie Blanc 4tet The Am
Blue Rose Big Band Lisa Cat Berro et yoann Kempst Sunside Nicola Sergio / Jean- tony.fr
ille-an
Mairie d’Antony •

Petit Journal Saint-Michel café universel Donna Lorraine


Trio
Charles Richard
www.v 96 72 82
Southern Stompers
cave du 38 Riv’ Swing Too 01 40
Radio France Sylvain Beuf 4tet
(Sylvain Beuf / Manu Codjia / Bop 5tet

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 81


le live

cOuRTRY, L’Ecoutille (01 60 MAlAKOFF, Ackenbush Le 7 Sylvain Rifflet Mechanics


08 38 48, lecoutille.fr) (ackenbush.com) (Joce Mienniel / Philippe
voir Jazz en Chantereine dans la Le 6 Sophia Domancich / John Giordani / Benjamin Flament)
rubrique festival. Greaves
ViTRY-SuR-SEiNE, Théâtre
élANcOuRT, Le Prisme (01 30 MAlAKOFF, Théâtre 71 (01 55 Jean vilar
51 46 06, leprisme.sqy.fr) 48 91 00, theatre71.com) Le 22 Josse De Pauw / Kris

JAKoB KARoLINA ZAPoLSKA


Le 21 opus 4 Le 9 Alex Terrier 4tet Defoort Trio «An old Monk»

éVRY, Place Agora


Le 14 Bounce Trio (Toine Thys Mario Canonge lES
MEudON, La Boutique du val
(01 74 34 35 33, archimusic. rÉGiOn
et Michel Zenino 
/ Matthieu Marthouret / Gautier com/la-boutique-du-val)
Garrigue) GENS Les 5, 6, 7 Maryse Ngalula /
du JAZZ Jean-Rémy Guédon AiX-EN-PROVENcE,

Naissance
FONTENAY-SOuS-BOiS, Le Les 19, 20, 21 Accord’ébène Grand Théâtre de Provence
Comptoir (01 48 75 64 31, magazine Les 5, 6 Laurent De Wilde /
musiquesaucomptoir.fr) MONTREuil, Instants Jacques Gamblin

d’un quintette
Le 6 Pierre De Trégomain 4tet Chavirés (01 42 87 25 91,
Le 13 Naga (Alexandra Grimal / instantschavires.com) AiX-EN-PROVENcE, Le
Lynn Cassiers / Jozef Dumoulin Le 5 Franck vigroux, Paskine, Petit Duc (04 42 27 37 39,
/ Nelson veras / Marc Ducret / Crypto Tropic lepetitduc.net)
Céline Grangey) Le 13 Terrine, Mamiedaragon, Le 13 Kevin Norwood 4tet
Le 14 Rap Jam / open Mic avec Après des années de complicité en duo, le pianiste Marius Loris Le 27 Raphaël Imbert 5tet
hubert Dupont / K-Lame martiniquais et le contrebassiste marseillais lancent
Le 19 Wassim Ismail Trio, un quintette, qui nous a d’emblée enthousiasmés. NANTERRE, Maison de la ANGERS, Espace Culturel de
Naïssam Jalal & Rhythms of Musique (01 41 37 94 20) l’Université d’Angers
Resistance À retrouver le 20 novembre au Baiser Salé ! Le 13 Sheila E Le 6 Alain Jean-Marie /
Le 27 G!Rafe & Bruno Girard François Ripoche
En ce 23 septembre 2015, c’était l’ambiance des grands soirs PANTiN, La Dynamo (01 49 22
iSSY-lES-MOuliNEAuX, au Baiser Salé. il faut préciser que Mario canonge et Michel 10 10, banlieuesbleues.org) ANGERS, T’es Rock Coco
River Café (01 40 93 50 20, Zenino jouaient un peu à domicile : pensez donc, déjà huit Le 6 ortie (Elodie Pasquier / (02 41 25 00 44)
rivercafeparis.com) Grégoire Gensse), Nasheet Waits Le 28 April Fishes
Le 6 Denise King & Tony Match ans qu’ils se produisent tous les mercredis en duo dans le Equality 4tet (Darius Jones /
Trio club de la rue des lombards ! Sans doute faut-il attribuer à ce Aruan ortiz / Mark helias) ANNEcY, Bonlieu Scène
Le 13 Fréderic Couderc 4tet long compagnonnage l’extraordinaire cohésion de ce nouveau Le 10 Kris Davis 4tet (Ingrid Nationale (04 50 33 44 11)
Le 20 Sweet System Laubrock / Matt Maneri / Eivind Le 27 Jacky Terrasson / Cécile
Le 27 Tricia Evy 4tet quintette au répertoire original, créé en juillet dernier. difficile opsvik / Tom Rainey), Coronado McLorin-Salvant / Sly Jhonson
en effet de croire qu’ils n’en étaient là qu’à leur troisième (Matthieu Metzger / Antonin / Marcia Faraco / Stéphane
JOiNVillE-lE-PONT, Péniche concert, tant leur hard bop aux reflets caribéens semblait Rayon / Franck vaillant) Belmondo
Lapin vert (06 06 77 79 26, couler de source, propulsé par un enthousiasme irrésistible Le 16 vegan Dallas (Simon
lelapinvert.com) henocq / Richard Comte / ARNAGE, Salle L’Éolienne
Le 15 olivier Lété, We Shot et une indéfectible joie de jouer. Au ténor, le cubain Ricardo Benjamin Flament / (02 43 23 78 99, europajazz.fr)
Izquierdo confirme sa maturité, à travers un jeu conjuguant Richard Comte), Arve henriksen Le 5 Ray Anderson organic 4tet
lE VéSiNET, Théâtre (01 30 intensité et décontraction. À la trompette, la découverte de / helge Sten (Steve Salerno / Gary versace /
15 66 00) Le 17 hasse Poulsen Langston Tommy Campbell)
Le 6 vincent Peirani Living Josiah Woodson est un choc : comment a-t-on pu passer Project (Debbie Cameron /
Being 5tet à côté de ce jeune Américain au jeu étincelant, qui réside Luc Ex / Mark Sanders), Mikko AuXERRE, Le Silex
paraît-il depuis trois ans à Paris ? On nous dit qu’il joue Innanen Innkvisitio 4tet (03 86 40 95 40, lesilex.fr)
lES lilAS, Le Triton (01 49 72 Le 20 Ludivine Issambourg
83 13, letriton.com) tout aussi bien de la flûte et de la guitare, et qu’il parle par RuEil-MAlMAiSON, Cabaret Antiloops 5tet
du 5 au 7 Pierre Bensusan ailleurs parfaitement le français. décidément … Enfin, tout du cinéma Ariel
Le 5 Manuel Nunez Camelino & cela est drivé de main de maître par Arnaud Dolmen* : repéré Le 6 Mariannick Saint-Céran / AViGNON, Ajmi (04 90 86 08
L’Ensemble Almaviva Rémi Toulon trio 61, jazzalajmi.com)
Le 6 Frédéric Maurin / Julien
notamment au sein des formations de Jacques Schwarz-Bart, Le 7 Régis huby 4tet
Desprez / Pierre Durand ce Guadeloupéen à peine trentenaire a coupé ses rastas, et RuEil-MAlMAiSON, (Bruno Angelini / Marc Ducret /
Le 7 The Watch s’affirme ici comme un batteur de jazz de tout premier plan, Médiathèque Michele Rabbia)
Le 12 Jean-Jacques Birgé au goût sûr et au swing indéfectible. Aussi ne manquera-t-on Le 5 1918 : Le jazz débarque Le 19 hasse Poulsen Langston
/ Pascal Contet / Antonin-Tri en France par Franck Bergerot Project (Debbie Cameron / Luc
hoang pas les concerts de son quartette personnel (Adrien Sanchez Ex / Mark Sanders)
les 13, 14 Christian vander, / léonardo Montana / Joachim Govin) les 5 et 6 novembre au RuEil-MAlMAiSON, Théâtre Le 27 Doug hammond, The
Julie vander, Andy Emler Bab-Ilo. Qu’on se le dise ! • PASCAL rozAT André Malraux Workshop (Stéphane Payen
Megaoctet Le 4 Kyle Eastwood Quintet / olivier Laisney / Guillaume
Le 17 Trio Soleil (Franck Nicolas * Déjà salué dans le Jazzlive de jazzmagazine.com, Arnault Dolmen présentera Ruelland / vincent Sauve)
/ Nelson veras / Sonny Troupé) son quartette le 5 novembre dans la petite cave du Bab-Ilo à Paris. SAiNT-dENiS, Jazz club
Le 18 Ronald Tulle 4tet avec Le 2 olivier Témime volunteered BAYONNE, Scène Nationale
Michel Alibo Slaves (05 59 59 07 27)
du 19 au 21 Elise Caron & Las les 29, 30 The Amazing
Malenas SAiNT-MAuR-dES-FOSSéS, Keystone Big Band
Le 19 Anne Quillier 6tet
Le 20 Thomas Savy 5tet avec
NEWS Auditorium du Conservatoire
(01 48 83 14 67) BElFORT, Le Granit
Pierre de Bethmann le festival Le 6 Laura Littardi Trio / Sylvain (03 84 58 67 67)
Le 21 Daniel humair / Cédric marseillais Jazz des Beuf Le 17 Roberto Fonseca /
Piromalli / Jérôme Regard cinq continents a Fatoumata Diawara
Le 25 Sonny Troupe 4tet avec perdu son directeur ScEAuX, Les Gémeaux
Grégory Privat (01 46 61 36 67) BORdEAuX, Comptoir de Sèze
Le 27 Sylvain Cathala 7tet artistique Bernard Le 6 orchestre Franck Tortiller (05 56 14 16 16)
Les 27 et 28 yves Rousseau- Souroque (ci-contre “Isokrony” Le 5 Akoda
Christophe Marguet Spirit avec Wayne Shorter, Le 19 Two And A Miss
Dance 5tet (Fabrice Martinez / Marcus Miller, VillEJuiF, Maison Pour Tous
David Chevallier / Bruno Ruder / herbie hancok et Gérard Philipe (01 46 86 08 05) BOuRG-EN-BRESSE,
Christophe Marguet Sean Rickman), Le 19 Charmin Michelle / Chris La Ferme à Jazz
Dawson / Jean-François Bonnel (09 51 62 87 49,
lES lilAS, Théâtre du Garde- mort des suites / François Laudet fermeajazz.com)
Chasse (01 43 60 43 59) d’une longue Le 6 Mystère Trio 4tet
Le 27 Ensemble Archimusic maladie à l’âge de ViNcENNES, Espace Sorano (01 Le 20 Glossy Sisters
67 ans. 43 74 73 74, espacesorano.com)

82 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


BREST, Espace Roz-valan / Le 13 Lou Tavano / Alexey Le 21 Svin, Das Kaff / hasse Le 18 hasse Poulsen Langston Le 19 Gaël hoerellou 4tet Du 4 au 6 La Marmite infernale
Bohars (conservatoire-brest. Asantcheeff 5tet Poulsen Project (Debbie Cameron / Luc Le 26 Takt, olivier Lalauze 6tet
com/saison-culturelle) Ex / Mark Sanders) POiTiERS, Lieu Multiple
Le 20 Didier Ithursarry / diJON, Atheneum hONFlEuR, Le vintage Café Le 19 Antoine Berjeaut MARSEillE, Théâtre du (05 49 50 33 00)
oboman (03 80 39 52 20) Le 6 Emmanuel Duprey / Rénald Wasteland 5tet (Juice Aleem / Gymnase (08 20 13 20 13) Le 15 Jac Berrocal / David
Le 18 Mikko Innanen Innkvisitio Fleury / Jean-Benoît Culot Julien Lourau / Sylvain Daniel / Le 21 Guillaume Perret Electric Fenech / vincent Epplay
BRON, Espace Albert Camus 4tet Maxime Zampieri) Epic
(04 72 14 63 40) hYèRES, Théâtre Denis POiTiERS, Carré Bleu
Le 17 Chango Spasiuk 4tet duNKERQuE, Jazz-Club (03 28 (04 94 35 38 64) lYON, Le Sirius (04 78 71 78 71) MARSEillE, Théâtre La (05 49 39 29 29)
63 51 00, jazzclubdunkerque.fr) Le 20 Stéphane Belmondo Trio Le 10 Thomas Ibanez 4tet Minoterie Le 26 Earthly Bird
cAEN, Le yoota les 26, 27, 28 Laure Donnat Les 26, 27, 28 Josse De
Le 7 Emmanuel Duprey / Rénald 5tet (olivier Louvel / Fabrice lA chAPEllE-SAiNT-AuBiN, lYON, Collège JB de la Salle Pauw / Kris Defoort Trio «An QuiMPER, Théâtre de
Fleury / Jean-Benoît Culot Devienne / henri Dorina / Salle Saint-Christophe Le 13 Bruno Tocanne / old Monk» Cornouailles
Stéphane Edouard) (02 43 23 78 99, europajazz.fr) Sébastien François / Federico Le 6 Erik Marchand Kreiz Breizh
cAEN, Théâtre Le 26 vincent Peirani / Emile Casagrande MEllE, Café du Boulevard Akademi
(02 31 30 48 14, theatre. éPiNAl, Théâtre Municipal Parisien (05 49 27 01 28, Le 14 Didier Lockwood / Philip
caen.fr) (03 29 31 04 85) lYON, Auditorium de Lyon lecafeduboulevard.com) Catherine / Richard Galliano,
Le 7 Jack DeJohnette Trio (Ravi Le 14 Gaïa Cuatro / lA FORÊT-FOuESNANT, Le (04 78 95 95 95) Le 14 Louis Minus Seize Laurent Coulondre Trio, Régis
Coltrane / Matthew Garrison) Trash à Cordes Nautile (02 98 51 43 15) Le 18 Avishai Cohen Trio huby 4tet
Le 17 Lars Danielson 4tet Le 15 Janysett McPherson 5tet (omri Mor / Daniel Dor) / METZ, L’Arsenal
(Grégory Privat / John Parricelli / éPiNAl, Lavoir-Théâtre orchestre national de Lyon (03 87 74 16 16, arsenal-metz.fr) QuiMPER, Auditorium
Magnus oström) (03 29 31 04 85) lA SEYNE-SuR-MER, Jazz au Le 19 James Farm (Joshua Le 8 violontare / Guicelle
Le 27 Jean-Marc Robin / Fort Napoléon (04 94 09 47 18) lYON, opéra (04 69 85 54 54) Redman / Aaron Parks / Matt
cAEN, La Poterne Jean-yves Jung / Pol Belardi / Le 13 Sempéré Trio Le 18 David Enhco / Roberto Penman / Eric harland ) REiMS, CRR Auditorium
Le 12 Emmanuel Duprey / Jean-Louis Léon Le 27 Martine Kamoun 4tet Negro (03 26 35 61 35)
Rénald Fleury / Jean-Benoît Le 21 David Enhco 4tet / Michel MEYlAN, hexagone Le 5 Christian Sebille / Francis
Culot GiGNAc, Salle des Fêtes lANGONNET, La Grande Portal (04 76 90 00 45) Le Bras
Le 19 Rémi Biet / Philippe Le 6 Didier Labbé 4tet Boutique (02 97 23 82 82) Le 24 Josse De Pauw / Kris
Carment / Stéphane Legallais Le 1er hadouk 4tet MÂcON, La Cave à Musique Defoort Trio «An old Monk» REiMS, La Cartonnerie
/ Culot GRAMAT, Salle de l’horloge (03 85 21 96 69, cavazik.org) (03 26 36 72 40)
Le 7 Didier Labbé 4tet lE MANS, hôtel Le Concordia Le 3 Fred Wesley New JB’s MONTPElliER, Jam Le 12 “L.o.v.E” A Nat King Cole
cAEN, Bistrot du Palais (02 43 23 78 99, europajazz.fr) (04 67 58 30 30, lejam.com) Tribute
Le 13 Nicolas Leneveu / GRENOBlE, La Soupe aux Le 28 Swing of France MÂcON, Crescent Jazz Club Le 5 Djamanawak
Duprey-Fleury- Culot Trio Choux (04 76 87 05 67, (03 85 39 08 45, lecrescent.net) Le 6 Gary Bartz 4tet RENNES, Mettre en Scène
jazzalasoupe.fr) lE ThOu, Jazzclub Le 6 Carte Blanche à Baptiste Le 11 Fred Chapellier Les 19, 21 Emmanuelle huynh
cAEN, El Camino Le 3 Alfio origlio / Jérôme Le 13 Riccardo Del Fra 4tet Poulin Le 12 Redbeans / Erwan Keravec
Le 18 Ella Angella / Jérémy Regard / Andy Barron (Pierrick Pedron / Paul Lay / Le 7 Big Band Bress Band Blues Le 14 Kami 5tet “Extension”
Bruger / Jean-Baptiste Breton / Le 4 Antoine Laville Trio Dré Pallemaerts) Le 9 Geraud Portal / Etienne Le 19 Kiera-Lorelle ROuEN, Conservatoire
Jean-Benoît Culot Le 5 Benoît Sourisse Deconfin / Kush Abadey Le 25 Arekus Singleton Le 19 Antoien hervé “Leçon de
Le 6 Cornet double lEOGNAN, halle de Gascogne Le 14 Agathe Iracema Le 26 4tet Raven jazz : Dave Brubeck”
cOuTANcES, Théâtre Le 7 Five For Fun (05 56 45 63 23) 4tet (Pierre-Alain Goualch / Le 27 Cory henry
Le 15 Fatoumata Diawara & Le 11 vandojam 5tet avec Le 21 Mighty Mo Rodgers, Christophe Wallemme / ROuEN, Théâtre des Arts
Roberto Fonseca Michael Cheret Eric Lavalette Band Pierre-Alain Tocanier) MOuScRON, Centre culturel (rouenjazzaction.asso.fr)
Le 12 Malcolm Potter 4tet Le 21 Caroline Schmid Trio Le 21 Toine Thys Trio (Arno Le 21 James Farm (Joshua
chAMBéRY, Jazz Club de Le 14 Captain Flapscat lillE, La Malterie Le 28 Bam 6tet Krijger / Antoine Pierre) Redman / Aaron Parks / Matt
Savoie (04 79 33 43 85, Le 18 Pierre Bensusan (03 28 04 77 68) Penman / Eric harland )
jazzclubdesavoie.fr) Le 20 harlem Rythm Band Le 14 Digital Primitives MARciAc, L’Astrada NANTES, Pannonica
Le 13 Electravoice Le 21 Label Blues (jazzinmarciac.com) (02 51 72 10 10, pannonica.com) ROuEN, hangar 23
Le 25 xavier Sanchez lOMME, Maison Folie Beaulieu Le 7 hugh Coltman 5tet avec Le 4 Théo Ceccaldi Petite Le 24 Elise Caron & Las Malenas
chAMBéRY, Espace Malraux Le 26 À la santé de Django (03 28 04 77 68) Bojan Z Moutarde (Alexandra Grimal /
(04 79 85 55 43) Le 27 B4 Blues Le 7 Fred Wesley & Le 28 Stochelo Rosenberg / Biel Ivan Gélugne / Florian Satche) SAiNT-éTiENNE, Le Fil (06 27
Le 19 olivier Mellano / François Le 28 Jean-Marie Peyrin The New JB’s Ballester Trio Le 6 Aquaserge orchestra avec 49 10 99, gagajazz.com)
Jeanneau Le 21 Luxembourg Jazz Focus Robin Fincker Le 15 Charlotte Wassy 5tet
GRENOBlE, MJC Les avec Paul Fox Collective, MARcQ-EN-BAROEul, Le 13 Chlorine Free, Tribeqa
chANGé, Les ondines Allobroges (04 76 42 56 96) Marly Marques 5tet, Pascal Théâtre Charcot Le 14 Groove Catchers, Fall In! SAiNT-QuENTiN, Auditorium
(02 43 53 34 42) Le 5 vibrasax Schumacher 4tet (03 28 04 77 68) The Band, Dj Tom Select du conservatoire (jazzaisneco.
Le 17 Julien Lallier / Le 10 Daddy Mt & The Matches Le 27 Cyril Mokaiesh / Giovanni Le 5 Emmanuel Pi Djob Le 19 Tigran hamasyan wix.com/jazzaisneco)
Charlotte Wassy Le 19 Baby Clavel 4tet Mirabassi Le 17 Rick Latham Mockroot (Sam Minaie / Arthur Le 29 Didier Levallet 5tet (Airelle
Le 26 Manuel Rocheman / Le 26 Grand orchestre de hnatek) Besson / Sylvaine hélary / Céline
chÂTEAu-ARNOuX-SAiNT- olivier Ker ourio lYON, cinéma Comoedia Marcq / Johan Renard Le 20 Pascal Schumacher 4tet Bonacina / François Laizeau)
AuBAN, Théâtre Durance Les 25 et 26 ARFI ciné-concert Le 22 Boeuf de 5 à 7
Le 14 Josse De Pauw / Kris GRENOBlE, Ciné Plaisir - MARcQ-EN-BAROEul, Le 25 Antonio Farao SAiNTE-AdRESSE,
Defoort Trio «An old Monk» Le Ciel lYON, MJC vieux Lyon Théâtre de la Rianderie Le 27 hoarse, April Fishes Espace Sarah Bernhardt
Le 26 Buffle ! Le 26 ARFI vidéo-concert autour (03 28 04 77 68) (02 35 54 54 05,
clERMONT-FERRANd, d’Armand Avril Le 15 Dimanches de l’impro, NiORT, Moulin du Roc dixiedayssainteadresselehavre.
Le Puy de la Lune GuidEl, L’Estran Assif Tsahar (05 49 77 32 30) blogspot.com)
(04 73 37 15 51) (02 97 02 97 40, lestran.net) LYoN, Le Périscope (04 78 38 Le 3 Jean-Marie Machado Le 19 David Sauzay / Guillaume
Le 19 Pierre Bensusan Le 5 hugh Coltman 5tet avec 89 29, periscope-lyon.com) MARSEillE, Le Cri du Port (04 Danzas “Lagrima Latina” Naud / Grégory Serrier / Pierre
Misja Fitzgerald Le 6 Régis huby 4tet (Marc 91 50 51 41, criduport.fr) Touquet
cluSES, Théâtre des Le 12 François Ripoche / Alain Ducret / Bruno Angelini / Le 5 Gary Bartz 4tet ORléANS, Théâtre (ojazz.fr)
Allobroges (04 50 98 97 45) Jean-Marie Michele Rabbia) Le 7 Souljazz orchestra Le 14 Guy-Claude Charcellay / SAOÛ, L’oiseau sur sa Branche
Le 5 Ernie odoom / Cyril Moulas Le 29 Thomas Enhco Le 11 Sylvie Courvoisier / Mark Le 10 Simon Bolzinger Cie hervé Masson (04 75 76 02 03)
Feldman Tambor y Canto Le 26 Michel Mandel / yves
diJON, Théâtre des Feuillants héROuVillE-SAiNT-clAiR, Le 13 Mikko Innanen & Le 14 Rita Marcotulli / OulliN, Théâtre de la Gerbelot
(03 80 30 98 99, abcdijon.org) Big Band Café (02 31 47 96 13) Innkvisitio 4tet Luciano Biondini Renaissance

Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 83


le live

SchilTiGhEiM, Cheval Blanc VillEuRBANNE, Festival FRANcE MuSiQuE


(03 88 83 84 85, Guitares (04 78 93 11 38) À l’improviste, le samedi tV
ville-schiltigheim.fr) Le 27 Sylvain Luc / Philip de 23h à minuit, par Anne
Le 30 Marc Copland Zenith 4tet Catherine Montaron MEZZO (les temps forts du
(Ralph Alessi / Drew Gress / Le 7 Jacques Di Donato / xavier mois, programmes complets sur
Joey Baron) VillEuRBANNE, Toï Toï Le Charles. Le 14 Jean-François mezzo.tv)
Zinc vrod. Le 21 Le Trio Kimmig
TERGNiER, Centre Culturel Le 27 Arfi ciné-concert / Studer / Zimmerlin / John Le 5 Brésil
François Mitterrand, 20h30 Baden Powell 4tet, 1971,
Butcher. Le 28 Bertrand Denzler
(03 23 40 24 40) ViTROllES, Le Moulin à Jazz par Bernard Lion
Le 6 Mam / Pierre-Antoine Badaroux / 21h10 Caetano veloso &
(04 42 79 63 60, charliefree. Louis Laurain / Fidel Fourneyron
com ) Gilberto Gil à Jazz à vienne
ThONON-lES-BAiNS, Maison Le 7 Miguel Zenon 4tet (Luis 2015, par Eric Michaud
des Arts / Espace Novarina JAZZ CLUB, le vendredi de 22h25 Gilberto Gil à Nancy Jazz
Perdomo / hans Glawischnig / 22h30 à minuit, par yvan Amar
(04 50 71 39 47)
Le 10 Garcia-Fons y Dorantes
henry Cole)
Le 21 Louis Sclavis 4tet (Gilles
Un Miles very Nice Le 13 Enrico Rava 4tet en direct
Pulations 2014, par Samuel
Petit
de Nevers
Coronado / Benjamin Moussay / le 4 novembre, dans ses Mercredis
TOulOuSE, Rest’ô Jazz (05 61 Keyvan Chemirani) Le 12 Saxophone
57 96 95, restojazz.com) Le 28 Doug hammond, The du jazz sur France Musique, Jérôme LES MERCREDI DU JAZZ, le 20h30 Illinois Jacquet au studio
Les 3, 17, 24 Rémi Panossian Badini diffusera un concert inédit mercredi, de 20h à 22h30, par 104, 1973, par Marc Pravaux
Workshop (Stéphane Payen 21h10 Wayne Shorter, 2014,
Solo que Miles davis donna au Arènes de Jérôme Badini
/ olivier Laisney / Guillaume par Samuel Thiebaut
Le 4 Rest’ôpéra Le 4 Concert inédit INA-
Le 5 Jazzcats Ruelland / vincent Sauve) cimiez de Nice le 14 juillet 1988. Avec 22h20 Soweto Kinch, 2011, par
Kenny Garrett, Foley, Robert irving iii, Radio France : Miles Davis
Les 6, 7 Rémi Panossian Trio au Festival de Jazz de Nice le Kate Thompson Gory
Le 10 Ciné-Concert Chaplin ViViERS, Cavajazz Adam holzman, Benny Rietveld, Ricky
(04 75 90 17 84, smac07.com) 14/07/1988. Le 11 Jazz sur
Le 12 El Bec Trio Wellman et Marilyn Mazur. le vif : Airelle Besson / Nelson
Le 19 Piano
Le 13 Tiger Jazz Le 10 Nasheet Waits Equality 20h30 John Lewis, 1980, par
Le 14 Carré d’As 4tet (Darius Jones / Aruan ortiz / veras, Stéphane Payen “The Claude ventura
Le 18 Philippe Laudet Mark helias) Workshop” (avec olivier Laisney 21h25 Ahmad Jamal, Paris
Le 19 Easy Living Le 20 Antoine Berjeaut / Guillaume Ruelland / vincent 2012, par Patrick Savey
Le 20 Jamy’s 4tet “Wasteland” (Juice Aleem / Sauve). Le 18 Festival Jazzdor : 22h50 Kris Brouwers, 2014, par
Julien Lourau / Sylvain Daniel / SUISSE Jason Moran “Fats Waller Dance
Le 21 hush 4tet
Le 25 Esther Nourri 4tet Maxime Zampieri) GENÈVE, Amr (amr-geneve.ch) radiO Party”. Le 25 Jazz sur le vif :
Samuel Thiebaut

Le 26 Alain Angeli & xavier Faro Le 1er Tony Malaby’s Tubacello Sylvain Beuf 4tet (avec Manu Le 26 Jazz Archive
Les 27, 28 happy Feet (Christopher hoffman / Bob 24 hEURES SUR 24 Codjia / Christophe Wallemme 20h30 Dexter Gordon au studio
ÉtranGer Stewart / John hollenbeck)
TSF Jazz (89.9 Paris / 99.8
/ Julien Charlet), Susanne 104, 1973, par Marc Pravaux
TOulOuSE, Espace Croix- Le 6 Marie Krüttli Trio Abbuehl 4tet (avec Matthieu
Baragnon (05 62 27 60 60) Amiens / 98.5 Bourg-en-Bresse MEZZO liVE hd (les temps
Le 7 Brit Pak Michel / Wolfert Brederode /
Le 19 Donkey Monkey BELGIQUE / 98.1 Cannes / 91.4 Chambéry forts du mois, programmes
Le 8 Nasheet Waits Equality / 97.7 Laval / 90.2 Nevers / olavi Louhivuori)
4tet (Darius Jones / Aruan ortiz / complets sur mezzo.tv)
TOulOuSE, Jazz au Mercure BRuXEllES, Flagey 98.1 Nice / 106.7 orléans /
Mark helias) 96.6 Poitiers / 89.5 valence) oN NE PEUT PAS ToUT SAvoIR,
(jazzaumercure.com) (+32 2 641 10 20, flagey.be) Le 3 Jazz Sous Les Pommiers
Du 9 au 12 Evaristo Perez 5tet (tsfjazz.com) le samedi de 15h à 16h, par 20h30 Didier Lockwood Trio
Les 21, 22 “10 ans de Jazz au Le 3 Ambrose Akinmusire 4tet
Le 13 Igor Le 17h-20h, du lundi au Arnaud Merlin invite Biréli Lagrène, 2015, par
Mercure” avec Philippe Lejeune, (Sam harris / harish Raghavan /
Philippe Duchemin, Thierry ollé, Justin Brown) Le 14 Trygve Seim / Frode haltli vendredi, par Sébastien vidal Jean-François Claire
Claude Tissendier, Paul Chéron, Le 18 James Farm (Joshua Le 20 Kara Fulah Blues Band JAZZLIvE, du lundi au vendredi oPEN JAZZ, du lundi au 21h30 Costel Nitescu Trio,
Michel Pastre, Boss Quéraud, Redman / Aaron Parks / Matt Le 21 hector Martignon & de 20h à 00h, par Jean-Charles vendredi de 18h à 19h, par 2012, par Jean-François Claire
etc. Penman / Eric harland ) Friends Doukhan Alex Dutilh 22h35 L’orchestre Tout
Le 20 Roberto Fonseca et Le 27 Susanne Abbuehl / LES LUNDIS DU DUC, le lundi de Le 2 Bruno Angelini. Le 3 Puissant Marcel Duchamp, en
TOuR du PiN Matthieu Michel / Wolfert 19h à 20h, en direct du Duc des Benoit Delbecq. Le 4 John 2015, par Laurent hasse
Fatoumata Diawara
Le 27 Arfi “Bobines Mélodies” Brederode / Øyvind hegg-Lunde Lombards, par Sébastien vidal Coltrane “A Love Supreme”. Le
et Laurent Sapir 5 Joe Castro. Le 6 Strasbourg, Le 10 Jazz Sous Les Pommiers
BRuXEllES, Jazz Station (+32 Le 28 Molecules
TOuRS, Impasse Matisse JAMIE CULLUM ShoW, le mardi Jason Moran. Le 9 Aka Moon. 20h30 Tigran / yerevan State
2 733 13 78, jazzstation.be) de 19h à 20h, par Jamie Cullum
Le 29 Sylvain Darrifourcq / Le 4 Elvin Galland 4tet Le 10 David Linx, Paolo Fresu Chamber Choir, 2015, par
FRiBOuRG, La Spirale PoRTRAIT IN JAZZ, le jeudi de villeneuve
Ronan Courty Le 5 Peripheral vision & Diederik Wissels. Le 11 Eric
(laspirale.ch) 19h à 20h, par Laure Albernhe 21h30 Snarky Puppy &
Le 7 Sofia Ribeiro / Marco Le 6 Ray Anderson’s organic Le Lann. Le 12 en public à
TOuRS, Café Colette’s BoN TEMPS RoULER, le samedi Metropole orkest, 2015, par
Mezquida Quartet (Steve Salerno / Gary de 19h à 20h, par Jean- Nevers, avec Susanne Abbuehl
Le 12 The Workshop (Stéphane Laurent hasse
Le 14 PhD versace / Tommy Campbell) Jacques Milteau et Guillaume Séguron. Le 13 22h30 Go Go Penguin, 2015,
Payen / olivier Laisney / Le 18 Mephiti en public à Nevers, avec Enrico
Guillaume Ruelland / vincent Le 13 Shai Maestro Trio (Jorge SI BEMoL & FADAISES, le par Thierry villeneuve
Le 19 Greg Lamy 4tet dimanche de 19h à 20h30, par Rava et Stefano Di Battista. Le
Sauve) Le 20 Gast Waltzing & Largo Roeder / Ziv Ravitz)
Pierre Bouteiller 16 Stacey Kent. Le 17 Stanley Le 17 Djazz Nevers
Le 21 Jeff herr Corporation Le 21 Alfredo Rodriguez Trio
VAlENcE, Jazz Action Clarke, Biréli Lagrène & Jean- 20h30 Bill Frisell, 2014, par
(Maxime Bender / Laurent Payfert) Le 28 Paco Sery Troup
valence (04 75 41 89 60, SWiNG FM (101.2 Limoges / Luc Ponty. Le 18 Palmarès Jazz Samuel Thiebaut
Le 28 Greg houben 4tet swingfm.asso.fr) et Blues de l’Académie Charles 21h20 vincent Courtois
jazzactionvalence.com) lAuSANNE, Chorus
Le 6 Terry Bozzio Cros. Le 19 Initiative h. Le 20 “Médiums”, 2012, par Josselin
BRuXEllES, Le Bravo Le 6 Alain Della Maestra 6tet JAZZ RAdiO (97.3 Lyon / Francesco Bearzatti. Le 23 Nat Carre
Le 19 Perrine Mansuy Rainbow
Le 11 Mikko Innanen & Le 7 Mark Sherman Dream jazzradio.fr) King Cole. Le 24 Kirk Knuffke. 22h35 Atlas Trio, 2011, par
Shell 5tet, Alice Perret
Innkvisitio 4tet 4tet (Antonio Farao / Martin Le 25 Chano Dominguez. Le Jacques Goldstein
VAREillES, Le Maquis Gjakonovski / André Ceccarelli) RADIoS NATIoNALES 26 Kenny Wheeler & John
(lemaquisdevareilles.fr) BRuXEllES, Palais des Le 12 JP Pasquier 4tet Taylor. Le 27 The Good Books, Le 24 Jazz à Porquerolles
Les 13, 14 Adrien Dennefeld Beaux-Arts Le 13 Michelangelo 4tet FRANcE iNFO 20h30 Charles Lloyd 4tet, 2011,
en public pour la Fête du livre
Les 20, 21 olivier Py Birds of Le 13 Keith Jarrett Le 14 Benjamin Lackner Trio TENDANCES JAZZ, le dimanche par Frank Cassenti
Le 28 Aka Balkan Moon / à Radio France. Le 30 Jazz
Paradise Trio (Jean-Philippe (Jérôme Regard / Matthieu plusieurs fois par jour, par Anne 21h35 David Krakauer Ancestral
Burhan ocal / Trakya All Stars Migration, les lauréats 2016 Groove, 2014, par David Unger
Morel / Franck vaillant) Chazarenc) Chépeau
Les 27, 28 Stéphane Tsapis Le 15 Jam With “That Pork” 22h30 Marc Ribot y Los
GANd, Ghent Jazz Club RFI Cubanos Postizos, 2012, par
Trio Le 19 A Day’s Lodging FiP
Le 16 Rudresh Mahanthappa CLUB JAZZAFIP, tous les jours L’ÉPoPÉE DES MUSIQUES Samuel Thiebaut
Bird Calls 5tet (Adam o’farrill / Le 20 hector Martignon & NoIRES, le dimanche à 16h30,
VillEFRANchE-SuR-SAÔNE, de 19h à 21h
Joshua White / François Moutin Friends 4tet 22h10 et 3h30, par Joe Farmer
Auditorium (04 74 60 31 95)
Le 29 Les Grandes Gueules / Dan Weiss) Le 21 olivier hutman Trio /Gary FRANcE iNTER
VillENEuVE-d’AScQ, La Smulyan voUS AvEZ DIT CLASSIQUE ?, RTL
Ferme d’En haut GANd, handelsbeurs Le 26 Colour Sound du lundi au vendredi de 16h à L’hEURE DU JAZZ, le dimanche
(03 20 61 01 46) (handelsbeurs.be) Le 27 Tanga Zoo 17h, par Elsa Boublil de 23h à minuit, par Jean-yves
Le 8 Jungle Juice, Spectrum Le 26 Aka Moon / Fabian Fiorini Le 28 olivier Ker ourio / Manuel Tous les vendredis consacrés Chaperon
orchestrum “The Scarlatti Book” Rocheman au jazz

84 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


ine
gaz
ma
Le magazine de All that Jazz
novembre 2015 - mAI 2016

Kenny
Garrett
La vie
d’altiste
Kyle Eastwood
Le jazz en
cinémascope
Maceo Parker
La fabuleuse
histoire de
Mister Groove
Lucky Peterson
Le blues
du guitariste

Avishai Cohen
Le maître du trio
Stacey Kent
Une voix
enchanteuse
Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 85
le conseil départemental présente

destination loir-et-cher

d ’ exce p t i o n
Cap sur un territoire
© a. charron

86 Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015


www.leloiretcher.fr

L’éDITO DE PHILIPPE DEJUST

Un
P.D.G. DU GROUPE CAP’ CINéMA

nouvel
écrin” Quand j’ai décidé de rénover la grande salle de
cinéma Art & Essai Les Lobis à Blois, j’ai voulu
retourner à l’origine des salles de cinéma, c’est
à dire un film, des attractions, une salle de spec-
tacle, un bar. En effet, les nombreux ciné-concerts
et autres interventions mélangeant cinéma et Sommaire
musique étaient souvent faits dans de mauvaises
conditions, la rénovation était l’occasion de créer 4
une vraie salle de spectacle. Aujourd’hui les Kenny Garrett
images sont partout, et il faut transformer la salle 8
de cinéma en lieu de vie. Lucky Peterson
ANToINE ANToNIoL

En 2009, Didier Bergen est venu me trouver pour


me proposer d’organiser une série de concerts 12
de jazz tout au long de l’année, l’idée m’a spon-
Sirius Plan
Opus Jam
tanément séduit. N’était-ce pas le moyen que je Milla Brune
cherchais depuis longtemps de “réenchanter” la salle de cinéma, en lui offrant la Electrophazz
possibilité de renouer avec les valeurs de proximité et de convivialité qui étaient
celles de ses origines ? N’était ce pas également, dans les petites villes de province 14
où Cap’Cinéma était implanté, l’occasion d’offrir au jazz un nouvel écrin à la mesure Avishai Cohen
de son élégance et de sa créativité ? Encore fallait-il que le public adhère à ce projet 14
parfaitement inédit… Stacey Kent
Sept années se sont écoulées depuis ce concert inaugural et le bilan est sans appel.
Non seulement All that Jazz est devenu un événement culturel incontournable de 16
Cap’Cinema dans les lieux où il s’est installé et progressivement développé. Mais
Kyle Eastwood
le concept a essaimé au point de se décliner aujourd’hui dans 6 villes partout sur le 20
territoire, et de projeter dès l’année prochaine de continuer son essor dans l’ensemble Didier Bergen
des multiplexes Cap’Cinéma sur une quinzaine de villes, mettant pleinement à profit
22
l’élargissement de son réseau de salles.
Maceo Parker
All that Jazz innove cette saison en proposant à des artistes de l’envergure de Maceo
Parker, Stacey Kent et Kenny Garrett d’effectuer chacun une sorte de mini-tournée de 26
3 ou 4 dates, en profitant des conditions d’accueil et d’écoute optimales qui depuis Sansévérino
le début sont notre marque de fabrique. Une façon pour All that Jazz de gagner The Puppini
encore en crédibilité auprès des artistes, en visibilité auprès du public et en force de Sisters
proposition auprès des professionnels du spectacle vivant. Ainsi, les salles de Cap’Ci- 28
néma deviennent des lieux incontournables dans les villes moyennes. L’aventure de Programme
Cap’Cinéma et d’All that Jazz n’en est décidément qu’à ses débuts ! • Tarifs

Supplément All that Jazz 2015


Publi-rédactionnel
textes : Christophe Geudin, Jonathan Glusman, Jean Levin et Stéphane ollivier.
Maquette : Claude Gentiletti. editing : Frédéric Goaty.
Photos : xavier Chauvet, Marc vaillard et François Christophe.
Imprimé en France. Imprimeries Léonce déprez, Z.I. Le Moulin, 62620 RUITZ

Novembre 87
Octobre 2015 Numéro 678
677 Jazz Magazine 87
Pas
que
Miles
qui
KENNY GARRETT
nombreux furent les jazzfans à découvrir
Kenny Garrett à la fin des années
1980 aux côtés de miles Davis, sans
savoir spontanément que penser de
ce phénomène de l’instrument un peu

lui
corseté dans son rôle de faire-valoir.
Depuis, tout a bien changé...

aille ...
S
Saxophoniste alto indéniablement virtuose, au phrasé l’âge de 8 ans au saxophone par son père, charpentier et
fluide, énergétique et volontiers exubérant, Kenny musicien de jazz amateur, le petit Kenny s’était formé à
Garrett mettait son impeccable technicité au service l’ancienne, puisant l’essentiel de son savoir académique
d’interventions calibrées s’intégrant impeccablement au sein des orchestres de son collège, puis en fréquentant
aux contextes résolument funky qui servaient d’écrin assidûment, dès l’adolescence, les clubs de jazz de sa
à la trompette de Miles. À la fois sous-utilisé et surex- région, en quête de jam sessions où en découdre avec la
posé dans ses moments d’expression solo toujours un concurrence. Intégrant à l’âge de 15 ans les ateliers d’im-
peu clinquants, notre (jeune) homme ne trouvait visible- provisation d’une des figures légendaires de la scène jazz
ment pas dans cette collaboration, aussi prestigieuse de Detroit, le grand trompettiste Marcus Belgrave – qui lui
fût-elle, l’espace idéal où faire entendre sa sensibilité offrira très vit-e ses premiers gigs professionnels, en com-
et la singularité de son style. Ce nouveau “jeune lion” pagnie notamment de la pianiste Geri Allen.
du saxophone n’était-il qu’un instrumentiste surdoué
et un peu surfait sorti des écoles de jazz américaines Installé à New York à l’orée des années 1980, le jeune saxo-
? Ou possédait-il une voix personnelle et originale qui phoniste alto va dès lors commencer une carrière de musi-
ne demandait rien d’autre qu’un peu plus de liberté et cien “free lance”, accumulant les collaborations occasion-
d’autonomie pour s’exprimer et s’épanouir dans toute nelles dans les registres les plus variés. Passant du grand
l’étendue de ses registres ? La question était légitime... orchestre de Mel Lewis à celui de Frank Foster, du quartette
de Dannie Richmond à celui du trompettiste Woody Shaw,
On s’avisa alors de son parcours antérieur, pour dé- Kenny Garrett muscle son style durant ces années de “com-
couvrir que le jeune musicien, né à Detroit en 1960, bat”, qui l’ancrent dans le terreau du blues, tout en l’ouvrant
x/DR

n’était pas tout à fait celui qu’on imaginait. Initié dès résolument aux improvisations sophistiquées du néo hard-

88 88
Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
89
Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 89
le
saviez
vous
Très jeune, Kenny
?
Garrett fut repéré bop moderniste de l’époque. Enregistrant en
par le fils du grand 1984 pour la firme néerlandaise Criss Cross son
Duke Ellington, premier disque en leader, “Introducing Kenny
Mercer, qui l’accueilla Garrett”, à la tête d’un groupe composé, entre
progressivement dans
ses formations, pour autres, de trompettiste Woody Shaw et du pia-
finalement lui offrir une niste Mulgrew Miller, Garrett est invité l’année
place au sein du Duke suivante par le label Blue Note, alors renaissant
Ellington Orchestra, et en quête de jeunes talents représentatifs de
l’orchestre qui porte
son esthétique, à participer à l’orchestre Out Of
le nom de son illustre
créateur et qui continue, The Blue, en compagnie de Robert Hurst, Ralph
aujourd’hui encore, à Peterson ou encore Ralph Bowen... Il n’y res-
faire vivre sur scène la tera qu’une petite année, courtisé bientôt par le
musique du Duke. C’est grand trompettiste Freddie Hubbard, puis invité
dans les pupitres de ce
big band prestigieux et dans la foulée par Art Blakey à rejoindre ses
au cours d’interminables Jazz Messengers pour finalement, consécration
tournées, que Kenny ultime, être convoqué en 1987 par Miles Davis,
Garrett apprendra toujours à l’affût de musiciens emblématiques
humblement les bases
de leur époque. Il restera à ses côtés jusqu’en
de son métier. Ce qui
vaut sans doute les 1991, le temps de participer notamment aux
meilleures écoles... émouvantes retrouvailles du trompettiste avec
Quincy Jones au festival de Montreux, mais sur-
tout de s’imposer définitivement sur la scène
internationale comme l’un des nouveaux noms
incontournables du jazz moderne.

Pour autant, même s’il avait déjà commencé de


travailler à l’élaboration se son propre univers en
enregistrant coup sur coup pour la firme Atlantic
“Prisoner of Love” (1989) et “African Exchange
Student” (1990), deux disques de transition of-
frant un aperçu assez large de ses références
(du jazz funky de Grover Washington, Jr. à l’uni-
vers modal de John Coltrane), Kenny Garrett
ne trouvera véritablement sa voix qu’une fois la
parenthèse Miles Davis définitivement refermée.
Entouré d’une nouvelle génération de musiciens
talentueux en phase avec ses orientations es-
thétiques (le pianiste Kenny Kirkland ou encore

‘‘
Kenny Garrett rend
hommage à la puissance
ancestrale du blues
et au pouvoir libérateur
du groove.”
x/DR

90
90
Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
le batteur Brian Blade), Kenny Garrett va au cours des années 1990 enre-
gistrer pour la firme Warner une série d’albums inspirés (“Black Hope”
en 1992, “Trilogy” en 1995, “Pursuance : The Music of John Coltrane”
en 1996) qui lui permettront progressivement de changer de catégorie,
en imposant l’image d’un musicien toujours aussi virtuose et généreux,
mais désormais totalement sûr de sa musique. Enregistré en 1997 et
pour la première fois entièrement constitué de thèmes originaux de sa
composition, “Songbook” viendra définitivement confirmer cette mutation :
s’inscrivant plus que jamais dans la lignée des grands solistes à l’alto, de “Songbook” (199) et “Pursuance - the Music Of John Coltrane”
Charlie Parker à Cannonball Adderley en passant par Jackie McLean, (199), deux des meilleurs disques de Kenny Garrett.
Garrett y posait définitivement les fondements d’un langage totalement
personnel, à la fois moderne, lyrique, sophistiqué et inventif.
En 2002, venant mettre un terme à sa collaboration avec le label Warner,
l’album “Happy People”, produit par Marcus Miller, ouvrira momentané- rythmes plus dans l’air du temps, emprun-
ment une nouvelle fenêtre dans son univers en développant une musique tés à la pop et au R&B. “Beyond The Wall”,
plus crossover, alternant références à la tradition jazz et sonorités et paru trois ans plus tard et dédié au pianiste de
John Coltrane, McCoy Tyner, viendra replacer
le centre de gravité de sa musique du côté
d’un jazz modal lyrique plus conforme à son
style habituel, tout en confirmant l’orientation
générale de son langage vers toujours plus de
simplicité dans l’expression et d’ouverture for-
melle à la diversité et la complexité du monde.

Aujourd’hui, sans rien sacrifier de sa virtuosité


ni du caractère éminemment spectaculaire de
son jeu, Kenny Garrett, dans sa quête quasi
mystique de lisibilité, semble vouloir don-
ner toujours plus de profondeur historique
et d’évidence expressive à sa musique. En
concert notamment, dans l’intimité de petites
formations organiques toujours composées
de musiciens pour qui faire tourner une ryth-
mique semble inscrit dans les gênes, Garrett
n’aime rien tant que se lancer à corps perdu
dans une traversée oblique des différentes
formes prises au fil du temps par la tradi-
tion résolument groovy du jazz afro-améri-
cain, donnant à entendre sa profonde unité
culturelle. Passant en quelques mesures du
hard-bop funky au jazz modal post-coltra-
nien, s’enhardissant parfois jusque vers des
atmosphères oniriques évoquant les premiers
orchestres jazz-rock d’Herbie Hancock du
début des années 1970, Kenny Garrett laisse
s’exprimer dans toute sa démesure l’extra-
ordinaire flamboyance de son style, tout en
rendant hommage à la puissance ancestrale en ConCert le 27 avril 2016
à Cagnes, le 28 à rodez,
du blues et au pouvoir libérateur du groove. le 29 à Périgueux et
• STéPHAne oLLiVier le 30 à Blois.
ChRISTIAN RoSE

Miles Davis face à son saxophoniste alto préféré des


années 1980 : Kenny Garrett.

91
Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 91
LUCKY PETERSON

Plus
qu’un
bluesman Ce n’est sans doute pas un hasard si, parvenu
à la cinquantaine, ce grand guitariste, organiste
et chanteur a nommé son dernier album “The Son
of A bluesman”, replongeant de façon clairement
autobiogra phique aux racines mêmes de
sa vocation. Comme pour mieux se réinventer.
oLIvIER hoFFSChIR (JAZZ vILLAGE)

92 92
Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
an
93
Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 93
LUCKY PETERSON

le
saviez
?
S
S’il est bien un musicien pour qui l’art est une
vous Il faudra attendre l’adolescence pour que Lucky
« affaire de famille », de filiations multiples, un Peterson entreprenne de s’émanciper progressi-
moyen d’interroger de façon féconde l’idée même vement des valeurs truquées de ce vaste cirque
d’incarner un héritage, c’est incontestablement médiatique et, s’attachant à s’extirper vivant
Lucky Peterson. Star précoce outrageusement des pièges d’une célébrité surfaite, commencer
douée, passant de l’orgue Hammond à la guitare sa petite révolution personnelle en replongeant
électrique avec le même talent désinvolte à l’âge humblement aux racines de son art. Multipliant
où les autres enfants commencent à peine à dé- les gigs occasionnels avec les plus grands noms
chiffrer leur alphabet, Lucky Peterson fut propulsé du blues (de B.B. King à Albert Collins), Peter-
tel un phénomène de foire sous les sunlights des son va, à 17 ans, franchir un cap décisif en inté-
grands shows TV américains des années 1970. Il grant ses claviers à l’orchestre de Little Minton,
aurait très bien pu se perdre à tout jamais dans ce puis trois ans plus tard à celui de Bobby Bland.
jeu de miroirs déformants imaginé par la Société Lucky Peterson a Etoffant son jeu d’une humanité nouvelle, com-
toujours entretenu
du spectacle et, confortablement installé dans la plexe et vibrante, ancrant sa guitare, son orgue,
un rapport privilégié
prison dorée de sa célébrité, renoncer à jamais avec la France. En sa voix, ses textes dans un vécu authentique,
à trouver sa voix. enregistrant d’abord en Lucky Peterson, durant ces riches années de for-
S’il est finalement parvenu à s’imposer comme 1984, en marge de la mation, va plus que consolider les fondamentaux
l’incontestable chef de file d’une nouvelle géné- tournée “Young Blues de son métier : il va transformer l’enfant prodige
Giants”, son premier
ration de bluesmen bien décidés à propulser dans véritable disque en en authentique musicien, bien décidé désormais
le troisième millénaire cette tradition afro-améri- leader, “Ridin’”, sur le à s’offrir corps et âme à cet art du diable, sensuel,

‘‘
caine ancestrale dans ce qu’elle a de plus au- label français Isabel primitif et délicieusement subversif.
thentique, c’est que passés, déjà, quarante-cinq Records. Mais surtout
en signant par la suite
ans de carrière, Peterson n’aura finalement jamais
la plupart de ses grands
cessé de se remettre en question et de travailler albums novateurs des
humblement à se forger un style toujours plus années 1990 sur le
label Polygram Jazz,
personnel, afin de se hisser à la hauteur de son
destin exceptionnel. dirigé par Jean-Philippe Le “fils du bluesman”
Allard. Sans oublier,
dans les années n’a plus rien à prouver,
Né à Buffalo dans l’état de New York en 1963,
c’est dans l’atmosphère électrique du Governor’s
2000, quelques belles
réussites sur Dreyfus
et peut revendiquer
Inn, le club de jazz et de blues que tenait alors son Jazz. On ne s’étonnera sa place aux côtés de
père (lui même chanteur de blues), que le petit
guère, dès lors, que
Lucky Peterson ait ses idoles de jeunesse.”
Judge Kenneth Peterson va passer l’essentiel tenu à confier son
de ses premières années. Bercé par les guitares magnifique album Après une poignée d’albums pour le label Alli-
ensorcelantes de Buddy Guy ou Muddy Waters, testament, “The Son of gator, déployant les sortilèges soniques d’un
habitués des lieux, Lucky va d’abord tâter de la A Bluesman”, à un autre blues funky et électrique encore marqué par
label français, Jazz
batterie avant de tomber en extase devant l’orgue Village. Une idylle qui la tradition, Lucky Peterson va véritablement
Hammond de Bill Dogget, y démontrant de telles ne semble pas prête de commencer de trouver sa voix au début des
aptitudes que son père n’hésitera pas longtemps s’étioler si l’on en juge année 1990 en signant une série d’albums
avant de l’intégrer parfois à son orchestre pour à la qualité de son tout ambitieux et novateurs, plongeant le blues
nouveau disque, “Live in
des tournées. Il n’a que 5 ans lorsqu’il enregistre le plus “roots” dans le grand maelström des
Marciac”, enregistré en
son premier single, 1-2-3-4, sous la houlette direct devant un public courants de la musique noire traditionnelle
du légendaire Willie Dixon et, fort de son suc- français visiblement et contemporaine. Passant au fil des plages
cès dans les charts R&B, à peine un an de plus conquis. et des projets du rhythm’n’blues au funk, du
lorsqu’il investit pour la première fois les studios jazz au gospel, Lucky Peterson va non seu-
de télévision du Ed Sullivan Show et du Tonight lement s’affirmer aux yeux du monde comme
Show. Reconnu partout comme un authentique un remarquable réformateur de ces fameuses
phénomène, aussi à l’aise à l’orgue, qui long- douze mesures canoniques (d’autant plus fidèle
en ConCert le 7 janvier
temps demeurera son instrument de prédilection, 2016 à Blois, le 9 à Cagnes. à l’esprit du blues ancestral qu’il en malmènera
qu’à la guitare dont il s’est également entiché, amoureusement les formes archétypales), mais
Lucky Peterson va durant toute son enfance faire aussi comme l’inventeur inspiré d’une musique
sensation, déclinant avec autant de naïveté que moderne, lyrique et syncrétique, transgressant
de virtuosité tous les attendus d’un blues festif et allègrement les frontières stylistiques instituées
séducteur concentré quasi-exclusivement sur son pour mieux célébrer l’âme éternelle de la mu-
versant spectaculaire. sique noire.

94 94
Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
JEAN-MARC LUBRANo (JAZZ vILLAGE)

Il multiplie les collaborations dans les registres les plus variés (Bootsy Col- Aujourd’hui, le “fils du bluesman” n’a plus rien à prouver, et peut légitime-
lins, Bill Laswell, Henry Threadgill ou encore la grande chanteuse Mavis ment revendiquer sa place aux côtés de ses idoles de jeunesse, dans la
Staple avec qui il enregistre en 1996 un remarquable hommage à la diva du longue lignée des grands maîtres de la musique afro-américaine. Sa mu-
gospel Mahalia Jackson) et ouvre résolument son répertoire aux influences sique vibrante, de l’âme et du corps indissociablement réconciliés, exaltée
d’artistes rock et funk – Stevie Wonder, les Rolling Stones, Jimi Hendrix... et incandescente, pleine de ferveur, de spiritualité et de sensualité mêlées,
Lucky Peterson, dans sa façon décomplexée de s’engager résolument sonne sans discussion comme une nouvelle preuve en acte de l’extraor-
dans les plus folles hybridations stylistiques, va rapidement s’imposer dinaire capacité de renouvellement des musiques noires aux Etats-Unis.
comme le grand artiste de blues de son temps, proposant avec sa musique Plus encore qu’un grand guitariste et chanteur de blues, Lucky Peterson
naturellement métissée et œcuménique le plus magnifique exemple d’une est devenu ce que chacun s’accordait à reconnaître en lui à l’orée de sa
tradition renouvelée, s’ouvrant au monde dans toute sa diversité sans rien carrière : un musicien authentiquement touché par la grâce. C’est son génie
abandonner de son esprit d’origine : frondeur, jouisseur, ironique, festif et et la beauté de son parcours d’homme et d’artiste, que d’avoir su ne pas
mélancolique. mentir à son destin. • STéPHAne oLLiVier

95
Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 95
En
pleine
lumière
Faire tomber les frontières
stylistiques trop rigides entre
les genres, mais aussi éviter le
Milla
plus possible les stéréotypes et
les conforts de programmation :
Brune
All that Jazz sait également

I
prendre des risques.
Il faut savoir s’éloigner des chapelles instituées et des orthodoxies dans
lesquelles le jazz se fige parfois dans des pauses compassées pour faire
des paris sur l’avenir et mettre en pleine lumière des artistes et des formes
d’expression atypiques et décalées. Comme les années précédentes, en
contrepoint de têtes d’affiche prestigieuses, le directeur artistique Didier
Bergen a donc épicé sa programmation de quelques coups de cœur plus
personnels couvrant tout le spectre stylistique des musiques actuelles pou-
vant se référer au jazz et à son histoire, tout en s’ouvrant généreusement
aux rumeurs de toutes les (bonnes) musiques du monde.

Pour preuve, le sextette vocal Opus Jam, qui s’aventure avec virtuosité
dans une délicieuse relecture a cappella des grand standards soul seventies
de Motown via de polyphonies complexes pulsées de beatboxing groovy ; le
girls band Sirius Plan, power trio furieusement sensuel déclinant de façon
très contemporaine la mythologie des grands espaces américains à travers
un songwriting à la fois brut et raffiné ressuscitant les fantômes des grands
bluesmen du Deep South à l’aune du rock garage des années 1970 ; le néo
jazz-soul très tendance du groupe lyonnais Electrophazz, électrisant de
grooves funky ravageurs, réhaussé par le flow tendu du rappeur NotaBene
et les envolées lyriques d’un trio de chanteuses flirtant avec l’ensemble de la
Opus
Jam
tradition vocale afro-américaine ; et, enfin, l’univers acoustique minimaliste,
mélancolique et délicieusement sophistiqué de la chanteuse, auteur-com-
positrice belge Milla Brune, faisant naturellement le lien entre pop, soul,
jazz et musique urbaines. Ce cocktail savamment équilibré reflète toute la
PhoToS : x/DR

vitalité et la diversité de la jeune scène contemporaine qu’All that Jazz vous


offre sur un plateau. • JeAn LeVin

96 96
Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
‘‘ Une programmation
généreusement ouverte
aux rumeurs de toutes
les musiques du monde.”

oPUs JAM sIrIUs PLAn MILLA BrUne eLeCtroPHAzz


en concert en concert en concert le en concert
le 11 décembre le 12 mars 2016 12 février 2016 le 19 mai 2016
2015 à Agen, le 13 à Blois, le 27 mai à Périgueux, à Périgueux,
mai 2016 à Blois. 2016 à Moulins. le 16 avril 2016 le 20 à Agen
à Agen. et le 21 à rodez.

Sirius
Plan

Electrophazz

97
Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 97
AVISHAI COHEN

“À trois
c’est
mieux”
Pour ceux qui ont découvert Avishai Cohen il y a
vingt ans dans le groupe de Chick Corea, il était clair
que ce jeune contrebassiste fraîchement débarqué
d’Israël ne resterait pas inconnu bien longtemps.
mais nul n’aurait pu prédire une telle trajectoire...

Avishai Cohen a non seulement revivifié la En favorisant ainsi l’improvisation et l’in-


canonique formule du trio comme aucun teraction à l’écriture, le contrebassiste a
autre jazzman depuis Brad Mehldau, également pu renouer avec un feeling et
grâce à “Gently Disturbed” (2008), mais des codes qu’il avait peu à peu délaissés :
il a surtout créé une esthétique unique, « Pour la première fois depuis des années,
reconnaissable dès les premières notes, j’ai retrouvé avec Nitai et Daniel Dor [son
en puisant dans la musique classique, nouveau batteur] cette connexion ryth-
la pop et les traditions orientales. Avec mique, ce swing naturel et profond que je
“Aurora” (2009) puis “Seven Seas” (2011), ressentais à mes débuts lorsque j’accom-
envisagés tous deux comme un retour pagnais mes musiciens préférés à New
aux origines, il s’est même essayé au York. Avec eux, je peux improviser plus
chant en ladino, la langue des rabbins que je ne l’avais jamais fait auparavant. »
espagnols.
Malgré cette audacieuse fusion des Sept ans après “Gently Disturbed”, son
genres, Avishai Cohen est pourtant tou- premier disque en trio, ce format reste
jours resté fidèle au jazz, à son histoire aujourd’hui encore celui qu’il préfère et
comme à son langage. En duo avec le avec lequel il conçoit chacun de ses pro-
pianiste Nitai Hershkovits dans “Duende” jets. Mais au fond, même accompagné
(2012) ou en trio pour son dernier album, d’un quatuor à cordes et d’un hautbois,
“From Darkness” (2015), ses formations comme pour “Almah” (2013), ou d’un or-
plus intimes ont d’ailleurs remis l’accent chestre symphonique, le contrebassiste
sur sa technique instrumentale : « Je joue délivre toujours cette musique si per-
beaucoup moins de notes depuis que j’ai sonnelle, capable de marier l’héritage de
MILUTA M. FLUERAS

commencé à chanter mais je les choisis Bach à des rythmes latinos, qu’il qualifie
en ConCert le 12 octobre
désormais avec plus de finesse, d’exi- à rodez, le 13 à Périgueux, lui-même de « kind of chamber classical
gence, de sens des responsabilités. » le 25 mars 2016 à Cagnes. jazz folk ». • JonATHAn GLuSMAn

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Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
STACEY KENT

Si
sensuelle
C’est au milieu des années 1990 que l’Américaine
Stacey Kent a fait son apparition, toute en douceur
et délicatesse, dans le cercle ô combien restreint
des chanteuses contemporaines pour qui le jazz est
x/DR (oKEh RECoRDS)

sans ambiguïté la première langue vivante.


en ConCert
le 23 octobre 2016 à Blois.

Très vite, Stacey Kent a spontanément ouvert sont appropriés au fil des années pour en faire jouer sur l’équilibre instable entre la force et
son répertoire et son univers aux harmonies, leur matière première), Stacey Kent possède en la fragilité, et balancer dans leurs interpréta-
couleurs et fragrances d’autres traditions musi- effet ce timbre clair et tonique, cette fluidité dans tions entre la tristesse et la joie », résume-t-elle.
cales, s’aventurant notamment, avec audace, l’articulation et ce sens inné du swing qui depuis « Pour moi, l’essence même de la musique que
intelligence et goût sur ces territoires particu- toujours font les grandes chanteuses de jazz. j’aime tient dans cette fragilité assumée, dans
lièrement difficiles à investir que sont la bossa cette façon d’être dans une écoute très fine de
nova brésilienne et la chanson française. Mais Mais ce qui fait la spécificité et la richesse de son la vie et de ses mouvements contradictoires. »
elle l’a toujours fait avec le naturel confondant sens exquis de l’interprétation, c’est la profonde On ne saurait mieux définir la profonde origi-
d’une artiste sûre de son langage, et profon- musicalité avec laquelle Stacey Kent s’empare nalité d’un art à la fois sensuel et sophistiqué,
dément ancrée dans la culture musicale de son des langues, des mélodies, des rythmes et des tout en nuances émotionnelles et séductions
pays. Interprète extraordinairement sensible du traditions d’ailleurs pour les éclairer de sa propre virtuoses. • JeAn LeVin
Great American Songbook (ce répertoire de culture et les marquer de sa sensibilité… « Au-
chansons pour la plupart issues des comédies delà des genres et des traditions, je crois que j’ai Stacey Kent est la marraine
musicales de Broadway que les jazzmen se toujours été attirée par les musiciens qui savent de la saison 2015-2016 de All that Jazz.

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Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
KYLE EASTWOOD

Le jazz
en
cinémascope
Un peu timide, charmant, attentif et parfaitement à l’aise
avec son statut de fils de star, aussi légendaire soit-elle – faut-il
rappeler le prénom de son père, Clint ? –, le fringuant contrebassiste
quadragénaire échappe à toute forme de caricature.

N
Né en 1968 au moment même où son père son amour du jazz (à voir, le dvd “Eastwood After Hours : Live At Carnegie
Clint obtenait ses premiers grands succès dans Hall”). Loin des projecteurs de cinéma et de la faune hollywoodienne, c’est
les films de Sergio Leone et de Don Siegel, dans le petit monde feutré et confidentiel du jazz made in USA que le fils
Kyle Eastwood aura toujours su éviter avec Eastwood commence alors à se faire un prénom.
intelligence une exposition trop frontale à la re-
nommée, en prenant radicalement la tangente Mais c’est en faisant paraître en 1998 son tout premier disque en leader,
d’avec le star system. Initié très tôt à la mu- “From There To Here”, que Kyle Eastwood va commencer à véritablement
sique par ses parents, grands amateurs de jazz affirmer sa personnalité et franchir les premières étapes qui le mèneront
(de Miles Davis à Stan Kenton en passant par bientôt à une renommée internationale. Ancrant résolument ses références
Thelonious Monk), c’est spontanément dans dans l’âge d’or du jazz orchestral des années 1950, le jeune musicien, dans
cette direction qu’il s’engage à l’adolescence, ce disque cultivé et élégant, fait non seulement la démonstration de ses
jouant d’abord de la basse électrique dans talents de contrebassiste mais, secondé par le grand Vince Mendoza aux
des orchestres de jazz-rock et de R&B fondés arrangements, déploie avec générosité toute l’étendue et la profondeur

‘‘
essentiellement sur le pur plaisir du groove,
pour peu à peu s’essayer à la contrebasse
et s’aventurer dans des contextes acoustiques
plus sophistiqués, relevant d’un jazz moderne
post-bop de bonne facture. Multipliant les gigs
dans des petits clubs de New York et de Los
Kyle Eastwood fonde une
SyLvAIN GRIPoIx (JAZZ vILLAGE)

Angeles, Kyle formera son premier quartette


au milieu des années 1990 et connaîtra une grande part de son discours
première consécration publique en 1996 en
participant au concert organisé au prestigieux sur le plaisir du jeu et
Carnegie Hall en l’honneur de son père et de de l’interaction collective.”

101
Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 101
‘‘Kyle Eastwood revisite de
façon extrêmement cohérente
l’esprit aventurier des Jazz
Messengers d’Art Blakey.”

le
saviez
?
de ses connaissances musicales. C’est fort de ces errances expérimen-
Jonglant avec les styles – cool, hard- tales très contrôlées que le contrebas-

vous
bop, jazz modal –, invitant même sur siste, au tournant des années 2010,
une plage la grande Joni Mitchell à semble avoir entrepris de revenir, tant
reprendre un standard soul de Mar- dans la forme que dans l’esprit, à un
vin Gaye, Kyle Eastwood, dans ce jazz plus direct, lyrique et mélodique,
disque aux allures de manifeste dans visiblement en quête d’une relation à Parallèlement à sa
son éclectisme totalement assumé, la tradition réaffirmée et renouvelée. carrière de jazzman,
Kyle Eastwood, à partir
décline plage après plage les princi- L’enregistrement, en 2011, de l’album des années 2000, va
paux ingrédients qui par la suite ne “Songs From The Château” peut lé- collaborer de façon
cesseront de constituer la signature gitimement être considéré comme régulière avec Michael
stylistique de sa musique... l’amorce de cette nouvelle phase Stevens aux BO des
grands films de son
décisive de sa carrière, en forme de
père, à la fois en tant
Happé par l’air du temps, mais aussi “retour au pays natal”. A la tête d’un que compositeur et
de façon plus profonde et intime par sa tout nouveau quintette composé arrangeur (Mystic
soif jamais rassasiée de nouveauté et de jeunes musiciens anglais à peu River, Million Dollar
sa curiosité artistique sans limite, Kyle près inconnus mais talentueux et en Baby, Letters from
Iwo Jima ou encore
Eastwood va pourtant passer l’essen- phase avec ses parti-pris musicaux, Invictus). Mais sa
tiel des années 2000 à, sinon prendre le contrebassiste y pose les jalons participation au cinéma
ses distances d’avec le monde du jazz d’une musique mélodieuse et pleine de Clint Eastwood
traditionnel, tout au moins s’appliquer de swing, à la fois simple dans ses ne se limite pas à la
musique, et Kyle, à
à repousser toujours plus loin les fron- formes et extrêmement raffinée dans
plusieurs reprises,
tières de son univers personnel, en son expression. “The View From apparaît à l’écran en
s’aventurant avec beaucoup d’élé- Here”, paru en 2013, confirmera avec tant qu’acteur. Dans ce
gance, d’humilité et de savoir faire brio cette nouvelle orientation esthé- registre sa prestation la
sur des territoires idiomatiques d’une tique – le contrebassiste, accompa- plus importante date de
1982 dans Honkytonk
extraordinaire variété. Au fil d’albums gné toujours de la même formation, Man, sorte de road
aussi éclectiques que raffinés flirtant donnant souvent l’impression de cher- movie musical fondé
tour à tour avec l’électro-jazz cool et cher à renouer avec l’essence même sur la vie romancée
sophistiqué (“Paris Blues”), le smooth du jazz en s’appropriant quelques une du grand musicien de
country Hank Williams.
jazz aux accents seventies et résolu- de ses formes archétypales mais sur-
Il y joue le neveu du
ment groovy (“Now”), voire le mani- tout en fondant pour une grande part personnage principal,
feste “arty”, chic et urbain, subtilement son discours sur le plaisir du jeu et de interprété par Clint
métissé (“Métropolitain”), il va ainsi l’interaction collective. Eastwood en personne,
explorer de façon à la fois amoureuse avec beaucoup de
sensibilité.
et érudite les multiples tendances Aujourd’hui, ainsi qu’en atteste bril-
de la pop music mondialisée la plus lamment son dernier album en date,
contemporaine, enrichissant sa pra- “Time Pieces”, Kyle Eastwood semble
tique et son imaginaire d’un ancrage être parvenu au terme de ce vaste
dans le réel plus intime et complexe. mouvement introspectif à une sorte

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Jazz Magazine Numéro 677
678 Octobre
Novembre2015
2015
d’aboutissement esthétique. Nourrie
par une approche permettant à cha-
cun des musiciens impliqués dans
le projet de s’exprimer pleinement
et d’apporter sa propre expérience
de l’histoire du jazz, sa musique n’a
jamais donné une telle impression
de maturité. Elle ne se contente plus
d’emprunter des formes du passé,
mais elle s’équilibre désormais entre
une référence toujours plus affirmée
à l’esthétique hard-bop du tournant
des années 1960 et une manière
résolument actuelle d’“interpréter”
cette tradition. Kyle Eastwood revi-
site de façon extrêmement cohérente
l’esprit aventurier des Jazz Messen-
gers d’Art Blakey, des formations
d’Horace Silver, de Lee Morgan et de
Wayne Shorter sur le label Blue Note,
sans parler des quintettes dirigés par
Miles Davis tout au long des années
1960. Le contrebassiste, désormais
leader affirmé, intégre même à son
répertoire quelques thèmes emprunté
à son travail pour le cinéma de son
père. Résultat ? Une musique authen-
tiquement personnelle, à la signature
sonore immédiatement identifiable. •
JeAn LeVin

en ConCert le 19 février 2016


à Moulins.
SyLvAIN GRIPoIx (JAZZ vILLAGE)

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Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 103
DIDIER BERGEN

“un
Être
passeur

d’émotion musicien, directeur de club, créateur de festival,
Didier bergen a toujours fait graviter sa vie
autour de sa passion du jazz. A l’origine du
concept d’All that Jazz, il en assure la direction
artistique depuis sa création en 2009.

D
Didier Bergen, qui a toujours habilement mêlé dans ses Vous êtes donc catalyseur dans cette histoire…
programmations artistes renommés et musiciens en deve- C’est vrai que j’aime lancer des projets, être à l’origine des choses et mettre
nir, n’a qu’un credo : mettre en lumière la convivialité et toute mon énergie à les voir se réaliser… Mais il faut rester humble et hon-
l’élégance, ces valeurs essentielles au jazz. Rencontre avec nête : rien de tout ça n’aurait vu le jour si Philippe Dejust n’avait pas mis
un authentique “passeur culturel”. à disposition ses multiplexes et n’avait pas totalement adhéré au projet.

MARC vEILLARD
Seul, je n’aurais jamais eu les épaules assez larges pour rendre cette idée
Comment est venue s’inscrire dans votre parcours concrète. Je suis le moteur, mais la personne qui fournit le véhicule et l’es-
l’aventure All that Jazz ? sence, c’est Philipe Dejust.
C’est à la fois un concours de circonstance et l’aboutis-
sement logique d’une vraie passion pour le jazz, qui ne Comment définiriez vous l’originalité de ce projet ?
me quitte pas depuis ma plus tendre enfance. J’ai long- Vous savez, j’ai 51 ans, et j’ai le souvenir de la salle de cinéma telle qu’elle
temps été moi-même musicien – je continue d’ailleurs de existait encore à l’époque de mes parents. Il y avait des entractes, des
chanter dans une petite formation – et, en 2005, pour ouvreuses, on mangeait des glaces, c’était tout un monde, un lieu plein
rendre encore plus concret mon investissement dans cette de vie où se succédaient à l’écran dessins animés, informations, longs
musique, j’ai décidé de créer à Blois mon propre club. métrages, mais où l’on pouvait aussi, parfois, voir sur scène des chanson-
Mais ça ne me suffisait pas, et en 2008, alors même qu’il niers, des musiciens… Tout ça s’est perdu, et je pense sincèrement qu’il
existait déjà à l’époque dans la région deux beaux festivals y a quelque chose de neuf à inventer pour faire revivre cet esprit à la fois
de jazz, à Tours et à Orléans, j’ai créé avec quelques parte- populaire et familial. All that Jazz est une proposition qui va dans ce sens.
naires locaux le festival Jazz in Cheverny. L’aventure a duré C’est une façon originale de participer à ce renouveau en offrant la salle
un an, je me suis replié sur mon petit club de Blois, mais en de cinéma comme un magnifique écrin aux artistes et au public. Et puis
conservant dans un coin de mon esprit que quelque chose c’est également l’opportunité d’ouvrir un nouvel espace au jazz qui, dans
de plus ambitieux restait à inventer pour mettre le jazz en les villes moyennes, n’a souvent d’existence que quelques jours en été le
valeur dans la région. Et puis un jour je suis allé au cinéma temps d’un festival, et pas toujours dans les meilleures conditions. Aller
et ç’a été l’illumination : c’était clairement l’endroit idéal écouter de grands musiciens sous des chapiteaux de 5000 places, assis
pour organiser des concerts ! J’ai décidé alors d’aller voir sur des chaises en plastique, à regarder la scène sur des écrans géants,
le PDG de Cap’Cinéma Philippe Dejust, pour lui proposer tout ça relève de l’hérésie et ne permet pas de goûter la musique. La salle
une collaboration. Il m’a fait confiance et l’aventure s’est de cinéma, avec sa petite jauge, permet une écoute optimale, fondée sur le
lancée comme ça… confort et la proximité. C’est selon moi la façon idéale de découvrir le jazz.

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Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
Concrètement qu’est ce que All that Jazz propose de diffé- Pour attirer ce public, souvent néophyte, et le fidéliser comment élaborez
rent ? vous vos programmations ?
Je cherche à être un passeur d’émotion. Je veux qu’il y ait chaque Le jazz est souvent considéré par les gens comme élitiste et compliqué. Pour
fois une vraie rencontre entre les artistes et le public, que ce soit un faire sauter ce préjugé, je ne vois qu’une solution : permettre au plus grand
véritable événement et pas un simple moment de consommation nombre d’y aller voir par soi-même. C’est pour ça que mes programmations,
culturelle. Ça passe bien sûr, comme je l’ai dit, par le format de la tout en demeurant centrées sur le jazz, s’ouvrent naturellement aux musiques
salle, cette petite jauge de 300 à 400 places, qui est idéale pour le voisines que sont le funk, la soul, le blues, en mettant en avant des artistes qui ont
jazz. Mais ça se joue aussi en amont et en aval du concert par la déjà une vraie renommée internationale, et auxquels le public peut se rattacher.
qualité de l’accueil que l’on réserve à la fois au public et à l’artiste. Ensuite, j’ai tout loisir d’intégrer au programme des artistes moins connus, qui
Un artiste bien accueilli donnera le meilleur de lui-même. Et ça, font la vitalité et la diversité de la scène actuelle. Là, je fonctionne au coup de
même s’ils ne sont pas initiés à ce genre de musique, les gens le cœur, sans me soucier des styles et des chapelles. Par exemple cette année on
sentent, la générosité passe. Et puis à la fin de chaque prestation va passer de Maceo Parker à Stacey Kent, des Puppini Sisters à Lucky Peterson,
les artistes sont invités à rencontrer le public, à discuter avec lui, à de Sansévérino à Kenny Garrett : la palette est on ne peut plus large en terme
signer des autographes… C’est une vraie valeur ajoutée qui per- de genres et de styles. Mais je crois que c’est ce qui donne sa couleur singulière
met le brassage des gens. Quand à la fin d’un concert lors d’une à l’ensemble, cet éclectisme revendiqué. Et puis, au-delà de leurs différences,
dédicace je vois un jeune de 20 ans partager ses impressions et tous ces artistes ont une chose en commun : l’élégance. C’est une qualité pour
ses émotions avec quelqu’un d’une cinquantaine d’années, je me moi essentielle, au fondement même du jazz depuis ses origines. C’est aussi la
dis que je suis dans le vrai. pierre de touche de ma programmation. • Au MiCro : STéPHAne oLLiVier

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Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 105
MACEO PARKER

Blow
Maceo,
blow !
Une vie au service du groove auprès des plus grandes
figures du genre, James brown en tête : tout cela
n’empêche pas ce grand saxophoniste d’avoir souvent
payé son tribut au jazz. Story.

« 2% de jazz, 98 % de funk » : tel est le credo est séduit par le jeu véloce du jeune batteur et lui propose de rejoindre sa
du saxophoniste Maceo Parker, le fidèle lieute- formation une fois ses études terminées. Il tiendra sa promesse deux ans plus
nant de James Brown, Commandant Suprême tard : recruté avec son frère Melvin dans les rangs du Parrain de la soul dès
du groove. Maceo – prononcez mey-ssi-o – 1964, Maceo Parker s’illustre au saxophone ténor – mais aussi au baryton et
découvre le souffle chaud et puissant du saxo- parfois à la flûte – sur les plus célèbres compositions de James Brown pour
phone lorsqu’il assiste, enfant, au défilé d’une le label King. On peut entendre son inimitable phrasé dynamique sur Out Of
fanfare locale dans sa modeste ville de Kinston, Sight, Cold Sweat, Papa’s Got A Brand New Bag et le fameux break cuivré d’I
en Caroline du Nord. Issu d’une famille de musi- Got You (I Feel Good), un des innombrables prototypes d’une musique qu’on
ciens, il effectue ses premiers pas au saxophone allait bientôt estampiller du nom “funk”. Pièce maîtresse des JB’s, la formation
baryton aux côtés de son frère Melvin, qui joue à géométrie variable des accompagnateurs de James Brown, Maceo Parker
de la batterie, tandis que Kellis, le troisième sera aussi le premier musicien à provoquer une mutinerie dans une organisation
membre de la fratrie, brille au trombone. Un aux méthodes paramilitaires. Insatisfaits des retards de paiement et du traite-
soir de 1962, le groupe emmené par Melvin ment parfois humiliant du “Hardest working man in show business” envers ses
Parker se produit dans un club de Greenville. troupes, Maceo Parker et une partie des JB’s désertent le navire amiral le 9 mars
Présent dans le public, un certain James Brown 1970, à la veille d’un concert à Columbus, en Georgie. 

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Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
‘‘ Maceo Parker
réussit l’exploit
de réunir
les amateurs
éclairés
de soul-funk
et un grand
public avide
de communions
festives.”
PhILIP DUCAP

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Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 107
MACEO PARKER

le
Quelques semaines après son départ, le saxo-
saviez
vous ? nouvelles versions de titres puisées dans l’inson-
phoniste monte une nouvelle formation. Maceo & dable catalogue de James Brown et quelques
All The King’s Men comprend quelques anciens reprises du hit-parade de l’époque. Bien connues
JB’s et son frère Melvin à la batterie. “Doing Their Prince et des possesseurs des compilations James
son NPG
Own Thing”, un solide album jazz-funk, ne rem- featuring Brown’s Funky People (la rouge et la bleue,
porte qu’un maigre succès d’estime à sa sortie Maceo comme pour les Beatles !), Soul Power, Doin’

x/DR
en 1970. Et pour cause : James Brown a interdit Parker It To Death et Parrty constituent des tremplins
aux programmateurs radio de diffuser le disque En juillet 1999, de choix pour les performances en roue libre du
de son officier rebelle. Désillusionné par l’industrie lors d’une session saxophoniste. On peut également y entendre
du disque, Maceo Parker se retire temporaire- d’enregistrement, dans l’intense Soul Of A Black Man le fameux
Maceo Parker croise
ment de la musique. Il vend son saxophone et le chemin d’une «  Blow Maceo, blow ! », une des plus fameuses
rejoint son beau-père, qui dirige une entreprise nouvelle icône du phrases-signatures du funk adressée par James
de ramassage d’ordures basée à Brooklyn. Le funk : Prince ! Dès Brown à son saxophoniste fétiche. Néanmoins,
saxophoniste n’aura pas le temps de souffler : lors, il accompagnera Maceo Parker quittera à nouveau les JB’s un an
souvent sur scène et
dans un revirement de situation inattendu de la en studio celui qu’on
plus tard. Après avoir croisé la route de James
part d’un James Brown revigoré par le succès de nommait naguère le Brown, Maceo effectue alors une rencontre déci-
son album “The Payback”, Maceo Parker effectue “Kid de Minneapolis”. sive avec un autre géant du funk : le fantasque et
son retour officiel en ajoutant un solo de flûte sur Maceo Parker a gravé exubérant George Clinton.
Doin’It To Death, un hit national pour les JB’s, ses solos dynamiques
et spontanés sur
et le nouveau thème d’introduction des perfor- plusieurs albums du Le deuxième souffle
mances scéniques de Mister Dynamite. multi-instrumentiste «  Chez James Brown, c’était l’armée. Avec
À sa grande surprise, Maceo Parker se voit même surdoué, dont “The George Clinton, c’était le cirque », commente
offrir la possibilité d’enregistrer son premier album Rainbow Children” Maceo Parker au sujet de son bref (mais percu-
(2001) et “Musicology”
solo. Produit par le tromboniste Fred Wesley et (2004). « J’adore
tant) passage dans Parliament/Funkadelic, le pro-
James “Razor” Brown (également crédité en tant travailler avec Prince. jet bicéphale de George Clinton. Aux antipodes
que “Minister” sur la pochette), “Us” aligne de J’aime faire partie de de la vision brute et frontale de James Brown,
ses expériences. Jouer George Clinton développe un funk maximaliste
dans son groupe, c’est aux confins de l’acid-rock psychédélique : le
une récompense »,
s’enthousiasme le P-Funk, avec un P pour Pure et Psychédélique.
saxophoniste hyperactif En compagnie de Randy et Michael Brecker et
au sujet d’une de
ses plus importantes
collaborations.

Boston, 1968, James Brown et Maceo


Parker en pleine action

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Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
de quelques renégats des JB’s, Maceo Parker James Brown à l’orgue.
À droite : Maceo Parker
rejoint les Horny Horns, un ensemble de cuivres au saxophone ténor.
dédié aux projets multiples de George Clinton
(le Bootsy’s Rubber Band de Bootsy Collins,
les Brides of Funkenstein et Parlet). Les Horny
Horns publient deux albums, “A Blow For Me,
A Toot For You” (1977) et “Say Blow By Blow
Backwards” en 1979, au moment où l’explosion
disco contribue considérablement à l’affaiblis-
sement de l’empire funk. Au cours des années
1980, Maceo Parker collabore épisodiquement
avec George Clinton et James Brown à l’occa-
sion du retour en grâce inespéré du Parrain de la
Soul, vedette de la bande-son du quatrième volet
de la saga des Rocky.

À l’instar de nombreuses légendes du funk et


de la soul music, le saxophoniste a frôlé le K.O
technique au cœur de la nouvelle décennie. C’est
pourtant sous son propre nom que Maceo Par-
ker va bientôt bénéficier d’un second souffle :
en 1990, la sortie de l’album “Roots Revisited”,
où le saxophoniste revisite avec succès ses
racines soul-jazz, sert de prélude à une formi-
dable résurrection. Stakhanoviste de la scène
et du studio, Maceo Parker devient à son tour
“The hardest working man in show business” en
enchaînant à une cadence infernale tournées et
enregistrements, parmi lesquels l’indispensable
“Life On Planet Groove”, en 1992. Lentement
mais sûrement, Maceo Parker réussit l’exploit
de réunir les amateurs éclairés de soul-funk et New york, 1968 à l’Apollo de
un grand public avide de communions festives. harlem : Maceo Parker, James
Brown et Saint-Clair Pinckey.
Des clubs anonymes aux plus grandes scènes
des festivals internationaux, et près de trente ans

PhoToS : x/DR
après ses premiers pas de sideman aux côtés
de James Brown, Mey-ssi-o s’est enfin fait un
prénom, synonyme de performances extatiques Boston, 1968 : quand
et de funky good times. Cet éternel galopin de Maceo Parker faisait le

‘‘
“MC” pour Mister Brown,
72 ans poursuit son parcours en multipliant les alias The Godfather of Soul.
grands rendez-vous live et les expériences dis-
cographiques variées, dont un vibrant hommage
à Ray Charles en 2007 (“Roots & Grooves”) et un
album de reprises de standards soul en compa-
gnie du WDR Big Band de Cologne, “Soul Clas- Cet éternel galopin de
sics”, publié en 2012. Portées par un répertoire
irrésistible retraçant près d’un demi-siècle de
72 ans poursuit son
Great Black Music, ses réjouissantes prestations parcours en multipliant
scéniques constituent une valeur sûre grâce à
une recette infaillible : 2% de jazz, 98 % de funk
les grands rendez-vous
et toujours 100% de groove. Blow Maceo, Blow ! live et les expériences en ConCert le 27 octobre 2015
à Cagnes, le 3 novembre 2015
• CHriSToPHe GeuDin discographiques variées.” à Moulins, le 4 à Agen et le 11 à Blois.

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Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 109
PUPPINI SISTERS
Pétillantes
comme le swing
De tout temps, le jazz a flirté avec la variété populaire, et grand
fut le succès aux états-unis dans les années 1940 et 1950 de
ces petites formations, le plus souvent féminines, revisitant
en harmonies vocales sophistiquées pleines de swing, de
désinvolture canaille et de fantaisie les chansons à la mode des
grandes comédies musicales de Broadway. Après être tombé en
désuétude, le genre a connu ces dernières années un véritable
regain d’intérêt, trouvant notamment dans les Puppini Sisters des
ambassadrices de talent et de charme. Jouant à fond la carte
du rétro glamour, notamment au niveau du look délicieusement
vintage, ce trio britannique décline avec virtuosité tous les codes
d’une musique pleine de séduction, légère et enivrante comme
une bulle de champagne. • JeAn LeVin
en ConCert le 3 décembre 2015 à rodez, le 4 à Périgueux,
le 5 à Blois, le 13 février 2016 à Agen.

PhILIPPE DELACRoIx-SANSE
SANSéVéRINO
Tendre
et frondeur
Avec ses allures de Gavroche post-moderne
qui aurait grandi par inadvertance, Sansévérino
incarne à merveille l’éternelle jeunesse et la
gouaille intemporelle du Paris populaire et de ses
traditions musicales fondamentalement métissées.
empruntant son vocabulaire et son imaginaire
à la poésie truculente d’un certain esprit village
miraculeusement préservé et joyeusement
métamorphosé à l’heure de la mondialisation,
Sansévérino fabrique ses chansons réalistes et
fantaisistes en recyclant tout ce qui lui passe sous
la main, du jazz manouche de Django reinhardt à
la java des guinguettes, du bluegrass américain au
swing musette, de la zazie de Queneau aux fantômes
de la Commune. À la fois tendre et frondeur, son
petit monde poétique joyeusement libertaire est
irrésistible. • JeAn LeVin
x/DR

en ConCert Le 5 février 2016 à Blois, le 6 à rodez.

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Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
ESCAPADE
2 jours/ 1 nuit

JAZZ
*Suivant le programme des concerts - IM041100005

Ce séjour comprend :

- L’hébergement : 1 nuit et petit déjeuner selon la catégorie choisie


- Les visites : le Château Royal de Blois et son musée des Beaux-
Arts, le château de Chambord (avec audio guide), le Château de
Chaumont-sur-Loire, une visite d’un chai puis dégustation de vin,
accompagnée de produits régionaux
- Un Concert «All That Jazz» aux Lobis à Blois*

DEMANDEZ VOTRE BROCHURE À NOTRE AGENCE RÉCEPTIVE


Office de Tourisme & Congrès de Blois I Chambord
02 54 90 41 42 I resa@bloischambord.com I www.bloischambord.com
Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 111
Blois

Perigueux Moulins

Agen
Rodez
cagnes-Sur-Mer

112 112
Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
Blois Périgueux
STAcEY KENT 23 octobre 2015 AViShAi cOhEN 13 octobre 2015

MAcEO PARKER 11 novembre 2015 PuPPiNi SiSTERS 4 décembre 2015

PuPPiNi SiSTERS 5 décembre 2015 MillA BRuNE 12 février 2016

lucKY PETERSON 7 janvier 2016 KENNY GARRETT 29 avril 2016

SANSéVéRiNO 5 février 2016 ElEcTROPhAZZ 19 mai 2016

SiRiuS PlAN 12 mars 2016

KENNY GARRETT 30 avril 2016

OPuS JAM 13 mai 2016

Agen Rodez
MAcEO PARKER 4 novembre 2015 AViShAi cOhEN 12 octobre 2015

OPuS JAM 11 décembre 2015 PuPPiNi SiSTERS 3 décembre 2015

PuPPiNi SiSTERS 13 février 2016 SANSéVéRiNO 6 février 2016

MillA BRuNE 16 avril 2016 KENNY GARRETT 28 avril 2016

ElEcTROPhAZZ 20 mai 2016 ElEcTROPhAZZ 21 mai 2016

Moulins cagnes-Sur-Mer
MAcEO PARKER 3 novembre 2015 MAcEO PARKER 27 octobre 2015

KYlE EASTWOOd 19 février 2016 lucKY PETERSON 9 janvier 2016

SiRiuS PlAN 27 mai 2016 AViShAi cOhEN 25 mars 2016

KENNY GARRETT 27 avril 2016

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Novembre 2015 Numéro 678 Jazz Magazine 113
La saison 2015 / 2016

Programmation
Blois Périgueux Agen Rodez Moulins cagnes
Octobre Stacey Kent Avishai cohen Avishai cohen Maceo Parker
23 octobre 2015 13 octobre 2015 12 octobre 2015 27 octobre 2015

Novembre Maceo Parker


11 novembre 2015
Maceo Parker
4 novembre 2015
Maceo Parker
3 novembre 2015

décembre 5Puppini Sisters Puppini Sisters Opus Jam


décembre 2015 4 décembre 2015 11 décembre 2015
Puppini Sisters
3 décembre 2015

Janvier lucky Peterson lucky Peterson


7 janvier 2016 9 janvier 2016

Février Sansévérino Milla Brune Puppini Sisters Sansévérino Kyle Eastwood


5 février 2016 12 février 2016 13 février 2016 6 février 2016 19 février 2016

Mars Sirius Plan Avishai cohen


12 mars 2016 25 mars 2016

Avril Kenny Garrett Kenny Garrett Milla Brune Kenny Garrett Kenny Garrett
30 avril 2016 29 avril 2016 16 avril 2016 28 avril 2016 27 avril 2016

Mai Opus Jam Electrophazz Electrophazz Electrophazz Sirius Plan


13 mai 2016 19 mai 2016 20 mai 2016 21 mai 2016 27 mai 2016

Tarifs
Tarif grand public : 37€ cartes nominatives :
Tarif réduit : 31€
Tarif enfant : 15€ (-14 ans sur présentation d’un justificatif.)

Vente et réservation :
all that Jazz à Cap’Cinéma 8 places à 27€ 5 places à 27€ 3 places à 28€
carte nominative carte nominative carte nominative
Billetterie : valable 2 saisons valable 2 saisons** valable 2 saisons**
2 places / 1 place / utilisation
- allthatjazz.fr utilisation**
- Cap’cinéma
* un euro de frais de gestion par carte et deux euros
- réseau fnac par chèque concert. voir conditions générales de vente.
** saison de septembre à juin.
- ticketmaster

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Jazz Magazine Numéro 678 Novembre 2015
Les artisans chocolatiers, partenaires d’All that Jazz, font
déguster leurs créations aux spectateurs à chaque concert.

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