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Résumé

Votre adolescent au quotidien


Complet, ce guide de référence accompagne les parents au quotidien à travers les questions le plus souvent posées par les adolescents.
Ainsi, vous saurez parler à votre adolescent de sexualité, de drogue, des nouveaux médias… Mais vous saurez aussi gérer ses chagrins
d’amour, ses troubles alimentaires, ses sorties, etc. Chaque question fait l’objet d’une fiche qui décrypte le problème et donne des pistes
de solution.
Chacune des 100 fiches s’articule autour de trois rubriques : « Bon à savoir », « Dangers », « Propositions ». L’ensemble est
précédé d’une mise au point sur les différents stades de développement de l’adolescent. Et vous trouverez en fin d’ouvrage des
adresses utiles pour prolonger votre lecture et engager des démarches.

Biographie auteur
Michel FIZE

est sociologue au CNRS et consultant-médiateur parental. C’est un spécialiste reconnu de la famille et de l’adolescence. Il
est déjà l’auteur de nombreux ouvrages.

www.editions-eyrolles.com
Michel FIZE

MON ADOLESCENT EN 100 QUESTIONS


GRANDES QUESTIONS ET PETITES DIFFICULTÉS DE MON ADOLESCENT DE 8 À 18 ANS
Groupe Eyrolles
61, bd Saint-Germain
75240 Paris Cedex 05
www.editions-eyrolles.com

En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans
autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.

© Groupe Eyrolles, 2013


ISBN : 978-2-212-55612-4
Dans la même collection
Mon enfant en 100 questions. Grandes questions et petites difficultés de mon enfant de 0 à 10 ans , Agnès Laprelle-Calenge
Dédicace

Ce livre s’adresse aux milliers de parents et d’adolescents qui sont heureux en famille… Ou ne demandent qu’à l’être.

“ En ce qui concerne l’observation qui m’a été faite que mon “Livre pour les parents” n’était pas nécessaire, elle n’est pas tout à fait
justifiée. Bien que les parents soient des grandes personnes, ils ne savent pas toujours comment s’y prendre avec leurs enfants. C’est une erreur
de croire qu’un adulte n’a plus rien à apprendre.

A. MAKARENKO
Sommaire

Dédicace
Avant-propos
Introduction

Partie 1
QU’EST-CE QUE L’ADOLESCENCE ?
Chapitre 1 : L’adolescence au fil du temps
Chapitre 2 : Doctrines, théories et concepts
Chapitre 3 : Modèles éducatifs et méthodes de communication
Chapitre 4 : Différents âges d’adolescence

Partie 2
L’ADOLESCENCE AU QUOTIDIEN
Chapitre 1 : Conseils généraux avant d’ouvrir l’abécédaire
Chapitre 2 : Abécédaire

Conclusion
Adresses utiles
Bibliographie
À propos de l’auteur
Index
Table des matières
Avant-propos

L’auteur précise expressément que ce livre, comme tous ses précédents sur l’adolescence (voir bibliographie en fin d’ouvrage),
s’adresse en priorité aux parents désireux de mieux connaître leurs enfants, adolescents actuels ou futurs adolescents. Il espère
néanmoins qu’il sera utile aussi à tous ceux et à toutes celles qui, dans leurs fonctions, sont en contact, quotidien ou pas, avec des
adolescents, comme les enseignants, les juges pour enfants, les éducateurs spécialisés, les entraîneurs sportifs, les animateurs de
centres de vacances, les policiers, etc.
Cet ouvrage, qui se veut d’« éducation relationnelle », n’a d’autre ambition que celle d’aider les parents à nouer de « bonnes »
relations, ou à améliorer leurs rapports au quotidien, avec ces garçons et filles que l’on nomme couramment « adolescents ».
Comment ?
En leur présentant une série de connaissances avérées sur les adolescents d’aujourd’hui. C’est-à-dire des connaissances
scientifiquement démontrées.
En leur donnant des clés pour avoir, en toute circonstance, des relations non conflictuelles avec leurs enfants. Car un conflit
n’est jamais nécessaire, il ne fait qu’exprimer une défaillance de fonctionnement dans une communication quelle qu’elle soit.
Quand, malgré tout, le conflit surgit, il faut savoir en tirer parti et profit. C’est alors une nécessité.
La plupart des ouvrages sur les adolescents, dont certains font incontestablement autorité, concernent – sans toujours le dire –
l’adolescence malade ou « en crise ». Ils sont écrits par des psychologues, des pédiatres, des psychiatres, des psychanalystes. Ils
parlent d’une catégorie particulière d’adolescents, qui, de par sa situation psychologique ou médicale, n’est en aucune façon
représentative de la population adolescente, forte de six à sept millions d’âmes.
Cet ouvrage parle, lui, d’abord de l’adolescence normale, qui est, répétons-le, la plus fréquente. Il parle des adolescents bien
portants, qui sont aussi les plus nombreux. Des adolescents qui naturellement, dans leur vie quotidienne, rencontrent, tous, de
multiples difficultés, qui viennent empoisonner leur vie.
Cet ouvrage n’a pas pour but premier de vous proposer des faits nouveaux ou des situations inédites sur l’adolescence. Il cherche
à vous faire appréhender différemment les aspects principaux de cette période essentielle de la vie. Cet objectif sera atteint si,
après l’avoir refermé, vous regardez l’adolescence d’une manière moins radicale, moins inquiète. Dans toute sa normalité,
presque sa banalité.
Ce livre, pour nous résumer, n’est pas un livre médical, mais le livre de la relation parent-adolescent.
Introduction

Si l’adolescent est pour beaucoup d’entre nous l’être le plus familier, il est aussi, paradoxalement, celui que nous connaissons le
moins bien. Certes, nous disposons de multiples études sur les « adolescents en difficulté », que ces difficultés soient de nature
psychologique ou sociale, mais nous en avons fort peu en revanche sur les « adolescents ordinaires », qui sont pourtant les plus
nombreux, ces adolescents « normaux » qui ne fréquentent ni les cabinets médicaux ni les consultations psy.
Par « adolescents », nous entendons dans cet ouvrage une tranche assez large, allant de 8 à 18 ans, et non 14 ou 15 ans, comme
nous l’indiquons dans nos autres livres (estimant, études à l’appui, que la fin du collège marque aussi la fin de l’adolescence).
L’extension à 18 ans tient essentiellement au fait qu’à cet âge les enfants vivent encore chez leurs parents. Les difficultés
relationnelles concernant les moins de 15 ans concernent donc aussi les 15-18 ans, c’est-à-dire les lycéens qui relèvent, de fait,
non de l’adolescence, mais de la « première jeunesse ». À partir du lycée en effet, les adolescents n’en veulent plus de leur
adolescence : ils trouvent désormais trop lourds à porter les clichés, la négativité, les vilaines rumeurs de violence ou
d’immaturité, qui sont encore souvent associés à cet âge. Après le très fort désir d’adolescence à 8-9 ans, vient donc le temps du
déni tout aussi virulent ! Le temps de la jeunesse, autrefois ou encore nommé « post-adolescence » (pour souligner la continuité
des âges) est venu ; un temps qui, plus que jamais, avec la prolongation des études et la massification du chômage juvénile,
devient interminable.
Trois sous-groupes seront ici définis : les 8-12 ans, que nous nommons « petits adolescents » ou « jeunes adolescents » ; les 13-14
ans, qui sont les « moyens et grands adolescents », et les 15-18 ans, jeunes gens et jeunes filles, comme il vient d’être dit,
nommés encore « post-adolescents ».
Chaque fois que cela sera possible et/ou nécessaire, cette distinction des trois âges sera faite dans l’ouvrage.

Une approche rigoureuse


Certains, à la lecture de ce livre, pourront penser qu’une nouvelle fois nous faisons preuve d’optimisme envers l’adolescence, que
nous regardons les adolescents avec décidément beaucoup de bienveillance. Il n’est pourtant, dans notre esprit, question ni
d’optimisme ni de bienveillance ou d’admiration béate de cet âge. Pour dire les choses autrement, nous ne pensons pas qu’il y ait
les « gentils » adolescents d’un côté et les « méchants » parents de l’autre, le camp des victimes et le camp des coupables. Nous
considérons seulement l’âge adolescent et le sujet adolescent avec toute l’objectivité qui sied à un scientifique qui observe l’un et
l’autre depuis près de trois décennies maintenant.
L’approche privilégiée dans cet ouvrage est donc, vous l’aurez compris, une approche fondée sur des informations scientifiques.
L’investigation par la preuve a ceci de particulier qu’elle produit des connaissances plus assurées, plus certaines donc, mais,
précisons-le, et c’est tout à leur honneur, « provisoirement certaines ». Autrement dit, la recherche scientifique est relativiste. Ses
découvertes ne s’accumulent pas, au contraire elles se bousculent, se dénoncent, s’annulent.
D’un point de vue méthodique, nous nous appuierons dans cet ouvrage, le plus souvent possible, sur des données chiffrées
résultant d’études, d’enquêtes ou de sondages récents.
PARTIE 1

QU’EST-CE QUE L’ADOLESCENCE ?


Chapitre 1

L’adolescence au fil du temps

Un peu d’histoire pour commencer


Les origines du mot… et de l’idée
Le mot « adolescent » est ancien. Il vient du latin adulescens, qui, dans la Rome antique, désigne « celui qui est en train de
grandir ». Cicéron, auteur bien connu, évoque (quoique rapidement), dans son De Senectute, le temps de son « adolescence ». Il
existe par conséquent des adolescents au pays de César, mais en petit nombre, et principalement des garçons appartenant aux
riches familles patriciennes. Ces jeunes gens suivent un enseignement que l’on nommerait aujourd’hui « secondaire ». La plèbe
(le peuple), pour sa part, qui n’a pas les moyens d’instruire ses enfants, n’a pas d’adolescents.
Avec la disparition de l’Empire romain, le mot « adolescent » tombe en désuétude. L’Ancien Régime français l’ignore totalement
ou presque. La Révolution ne le connaît pas davantage. Jusque dans les années 1850, l’on ne parle ni d’« adolescence » ni d’«
adolescents ». On préfère utiliser les termes d’« enfants », de « jeunesse », de « jouvenceau », de « jeunes gens ». Villermé, pour
ne prendre que ce seul exemple, dans sa célèbre étude sur l’État physique et moral des ouvriers, qu’il publie en 1840, utilise le
terme de « jeunes gens » pour désigner les 12-15 ans ; le mot « adolescents » n’apparaît dans son ouvrage qu’à deux ou trois
reprises (dont une fois en note de bas de page).
L’adolescence étant, comme à Rome, un privilège scolaire, l’on comprend l’inexistence des adolescents dans les sociétés
d’Ancien Régime où le système scolaire est peu développé. En ce temps-là, il faut travailler très vite pour subvenir aux besoins de
la famille. Les enfants des milieux populaires partent donc, les uns dans les champs, les autres dans les usines que l’on appelle
manufactures ou dans les boutiques de commerce. Il suffit de relire Zola et Germinal pour se rendre compte de la vie des enfants
de l’époque. À 7-8 ans, on retrouve donc les « gamins » avec leurs parents, dans les fosses à charbon ou à garder les bêtes, dans
les pâturages près de la maison.
C’est bien l’institution du collège qui, par les classements d’âges qu’elle opère, crée ce nouvel âge. À chaque niveau scolaire va
correspondre désormais un âge défini. Bien sûr, derrière ces classements qui permettent d’assurer la progression des
apprentissages, il y a aussi, ne l’oublions pas, un autre et important projet de société : contrôler ces garçons en âge de puberté,
c’est-à-dire mieux en contenir toutes les menaces potentielles ou présumées pour l’ordre public.
L’adolescence, qui n’existe donc pas comme « période naturelle de l’existence » (Patrice Huerre), est une « classe d’âge », mieux
encore une catégorie sociale. Elle n’est pas un « passage », une transition entre l’enfance et l’âge adulte, mais un « état » social à
part entière.

La construction des grands mythes associés à l’adolescence : « crise


d’adolescence », « dangerosité »…
Le mythe, faut-il le rappeler, est une histoire que l’on raconte, que l’on croit vraie et que l’on se transmet de génération en
génération. Ainsi le mythe définit-il une conduite, qui peut être, dans le domaine de l’adolescence, celle du fatalisme (« Y a rien à
faire », « Faut attendre que l’orage passe »), ou de la rigueur (« Ils sont tous violents, faut les mater ! »).

La « crise d’adolescence »

“ L’adolescence n’est pas une crise, une révolution dans l’organisme physique et psychique, elle ne transforme pas l’individu.„
PR GEORGES HEUYER, INTRODUCTION À LA PSYCHIATRIE INFANTILE.

Parmi les MYTHES les plus puissants liés à l’adolescence, il y a celui de la « crise ». Mythe tenace : il est en effet toujours
universellement admis, dans la plupart des disciplines non scientifiques (psychologie clinique, psychanalyse…), que toute
adolescence, fût-elle normale, s’accompagne d’une « crise », de plus ou moins grande intensité, crise variable selon les sujets, et
donc que tout adolescent n’a d’autre choix, au moment de la puberté, que de « s’opposer » (pour « se poser », dit-on) à son
entourage, parents en tête.
Force est de reconnaître que les familles, dans leur majorité, adhèrent à ce point de vue, même celles (ce qui est un étonnant
paradoxe), pourtant très nombreuses, au sein desquelles les relations avec les adolescents sont paisibles et non conflictuelles.
Harmonie (autre paradoxe) qui ne manque pas d’inquiéter les parents de ces adolescents, à qui les disciplines non scientifiques
ont encore enseigné qu’une adolescence tranquille est une adolescence en danger et donc dangereuse.
L’on attribue couramment la responsabilité de la prétendue « crise d’adolescence » à la puberté, à ces hormones malveillantes qui,
tel un tsunami, viendraient détraquer le cerveau des infortunés adolescents.
À signaler que, selon des voix toutes récentes, soi-disant autorisées, qui nous viennent d’outre-Atlantique, le dérèglement serait
dû en réalité non aux hormones, mais aux « neurones » mal connectés de ces pauvres adolescents !
En réalité, les conflits, quand ils surgissent (ce qui est d’ailleurs beaucoup moins fréquent qu’on l’imagine), ne font que traduire
un « vice de fonctionnement » de la relation parents-adolescents. C’est comme un moteur qui, soudain, se gripperait. C’est la
relation qui est malade, c’est elle qu’il faut traiter, pas les individus : adolescents ou parents. En tout cas, il faut écarter très vite
l’idée que, lorsque tout va mal, c’est obligatoirement la « faute de l’ado » (raccourci inopportun du mot adolescent). Ce sont
souvent les parents qui, à leur insu parfois, créent la mauvaise relation avec les adolescents. Le philosophe Emmanuel Mounier,
dans son Traité du caractère, parlait de « la présence généralement provocante de l’adulte à l’adolescence, à laquelle l’adolescent
réagit par une phase d’autisme et d’hostilité ».
« Crise d’adolescence » : d’où vient cette fable ? Paradoxalement de Jean-Jacques Rousseau qui, en 1762, dans Émile ou de
l’éducation, l’expose rapidement – principalement en deux pages du Livre IV où il est question d’« orageuse révolution », de «
moment de crise », puis ensuite, à quelques reprises, mais par quelques mots seulement… pour, soit dit en passant, la NIER
aussitôt dans les 998 pages restantes d’un volumineux ouvrage (en collection poche).
Le Livre II s’ouvre en effet par cette réflexion : « Le plus dangereux intervalle de la vie humaine est celui de la naissance à l’âge
de douze ans. » Ce n’est donc pas l’adolescence qui est visée. L’exemple d’Émile est significatif de cet état de non-crise. Le jeune
homme qui, enfant, sous la conduite d’un précepteur, a reçu une éducation « libre », « au grand air » selon les lois de la nature, en
explorant les choses, en s’amusant (ce que Rousseau nomme l’éducation « négative »), accède aux environs de sa quinzième
année au raisonnement. Il est dès lors, contrairement aux autres adolescents, précisément parce qu’il n’a pas reçu une éducation
contraignante et ennuyeuse, un être sérieux et raisonnable.
Mais il ne suffit pas, pour un adolescent, d’avoir bénéficié d’une telle éducation pour être préservé de la « crise d’adolescence »,
il faut encore que l’éducateur sache, le moment venu, changer de relation avec lui. « Quittez pour jamais votre ancien ton,
conseille-t-il à l’éducateur. C’est votre disciple encore, mais ce n’est plus votre élève. C’est votre ami, c’est un homme, traitez-le
désormais comme tel » (Livre IV). Rousseau adresse le même conseil à la famille de Sophie : « Sophie, à quinze ans, ne sera
point traitée en enfant par ses parents » (Livre V).
Un second texte est important pour l’affirmation de l’état de « crise » à l’adolescence : c’est le fameux Les Souffrances du jeune
Werther de Goethe, qui est publié quelques années seulement après le livre de Rousseau, en 1774. Werther, on s’en souvient, est
un jeune homme sombre, en proie à des tourments intérieurs formidables, éperdument amoureux d’une femme « impossible », qui
finira par se suicider, signant ainsi tragiquement son échec et condamnant aussi le monde factice qui l’a conduit à ce geste de
désespoir.
Différents auteurs, médecins, psychologues ou psychanalystes, français et étrangers, notamment les psychologues américain
Stanley Hall, en 1904, et français, Pierre Mendousse et Maurice Debesse, durant l’entre-deux-guerres, reprennent pourtant… pour
notre plus grand malheur les deux pages isolées du livre de Rousseau !
La littérature ancienne sur l’adolescence n’est à cet égard pas en reste. Dans la tradition du Werther de Goethe évoqué plus haut,
c’est en effet une « littérature de la crise ». L’adolescent littéraire vit, comme le « vrai » adolescent, un formidable moment
critique (nous ne développerons pas ici, faute de temps, ce point traité dans nos ouvrages antérieurs). Les romans d’adolescence
sont bien, la plupart du temps, des romans de l’échec.
Sans entrer dans le détail d’une analyse que nous avons longuement développée ailleurs (principalement dans notre ouvrage Ne
m’appelez plus jamais crise ! ), nous rappellerons que cette « crise » que l’on nous présente comme « normale » en raison des
importants bouleversements physiques et psychiques qui, nous dit-on, seraient liés à l’afflux soudain d’hormones (censées
réveiller instincts agressifs et pulsions sexuelles), et plus encore, comme « nécessaire », ne repose sur aucune donnée sérieuse.
Déjà en 1930, le psychanalyste dissident Alfred Adler dénonçait « la prétendue crise de la puberté ». Les chercheurs scientifiques
ont confirmé ce constat. D’abord les ethnologues, à l’image de Margaret Mead qui, à la fin des années 1920, observant de jeunes
filles samoanes, conclut à l’absence de toute crise. Puis les psychologues-chercheurs de l’université, dans leurs travaux sur des
populations adolescentes « tout venant ».
Qu’observe-t-on aujourd’hui dans ces travaux scientifiques à la fois français, européens et québécois ? Des adolescents
globalement « bien portants » (terme [encore un paradoxe] utilisé aussi… par les médecins et les psychologues-thérapeutes eux-
mêmes). Des adolescents heureux et fiers de grandir, à l’image finalement de l’Émile cher à Rousseau.
Pourtant, comment le nier, il y a parfois de l’agitation en famille, du tangage. Comment donc expliquer les tensions avec les
proches ?
L’hypothèse est la suivante. Si de telles tensions existent, surtout avec les parents, il faut y voir, non pas l’effet d’un quelconque «
déterminisme biologique », mais le résultat d’une situation peu favorable à l’expression et à la responsabilité adolescentes, l’effet
d’une distorsion entre les facultés nouvelles des adolescents (ils pensent plus, ils pensent mieux – ils ont en quelque sorte un
horizon social plus large ; ils sont aussi sexuellement plus matures qu’auparavant), une distorsion donc entre ces facultés et la
possibilité de les mettre en œuvre. Bien entendu, quand les parents sont capables de faire le « deuil de l’enfance », c’est-à-dire, en
clair, le « deuil du pouvoir », de leur pouvoir absolu sur l’enfant, les choses vont différemment.
Toute « crise », pour être clair (comme tout conflit), est l’expression d’un dysfonctionnement, pas d’un état de bonne santé. Une
crise politique, une crise économique, une crise conjugale expriment le dérèglement : qui oserait le contester ?
Enfin, argument supplémentaire contre l’idée de « crise », si l’on peut considérer une « crise » comme une rupture provisoire, sa
sortie appelle un retour à la situation « normale » antérieure. Or, chacun sait bien que la vie ne revient jamais en arrière,
l’adolescent ne redeviendra pas un enfant après cette rupture.
Question finale : les « défenseurs » de la crise douteraient-ils soudainement de sa pertinence ? Si prompts, hier, à défendre cette
thèse et ce mot, les « pédo-psychiatres-analystes », ces professionnels d’un genre nouveau, produits de ce mélange (étonnant) de
pédiatrie, de psychiatrie et de psychanalyse, entendent aujourd’hui rassurer parents et éducateurs. Alors ils disent que la « crise »
n’est pas ce que l’on croit (et ont longtemps cru eux-mêmes !), qu’il faut prendre le terme dans un sens ancien, celui du vieux
grec crisis qui signifie « choix », « décision ».
Après avoir réalisé ce tour de passe-passe sémantique, ces experts peuvent donc conclure que la « crise n’est pas un drame », que
c’est même « un moment fécond ». Imaginons, à titre de comparaison, quelqu’un qui oserait dire qu’une société « en crise » est
une société bien portante, riche d’avenir, ne lui rirait-on pas au nez ?

La « dangerosité » de l’adolescent
Au XVIII e et surtout au XIX e siècle, l’attention des médecins se focalise sur le phénomène physiologique de la puberté. Cet
événement inquiète. Le pubère, être pleinement sexualisé, apparaît comme un danger. Et d’abord pour lui-même. Médecins, mais
aussi pédagogues, mènent de concert le combat qui vise, notamment, à l’élimination des « pratiques solitaires » (la masturbation)
– pratiques censées « détraquer » l’équilibre physique et mental des enfants.
Les médecins surtout mettent en garde les familles ainsi que les professeurs des écoles contre ce danger permanent. Comme le
note Michel Foucault, dans son Histoire de la sexualité (tome I), « le sexe du collégien est devenu au cours du XVIII e siècle – et
d’une manière plus particulière que celui des adolescents en général – un problème public ». Partout, ajoute-t-il, où ces plaisirs
ténus, « risquaient de se manifester, on a installé des dispositifs de surveillance, établi des pièges pour contraindre aux aveux,
imposé des discours intarissables et correctifs ». Ainsi, « autour du collégien et de son sexe prolifère toute une littérature de
préceptes, d’avis, de conseils médicaux, de cas cliniques, de schémas de réforme, de plans pour des institutions idéales ».
Le pubère est aussi un danger pour la société, à cause de ce trop-plein d’énergie qu’il a en lui et qu’il lui faut absolument libérer
(la « surcharge énergétique » dont parle Freud). La réputation d’agitateurs, de rebelles, de « bâtisseurs de barricades » colle dès
cet instant à la peau des adolescents.
Plus de deux siècles ont passé : les choses ont-elles vraiment changé ? Derrière l’idée d’une période jugée « sensible », « délicate
», instable, n’y a-t-il pas, encore et toujours, la peur du sexe ? L’adolescent, pour parler comme Foucault, n’est-ce pas toujours «
cette chair à maîtriser », cette chair qui doit rester au repos pour ne pas nuire à la performance (scolaire plus qu’intellectuelle
aujourd’hui) ? Bref, énoncer un discours sur les dangers physiques et moraux liés prétendument à cette sexualité, n’est-ce pas en
somme toujours justifier le maintien du pouvoir sur les adolescents ? On connaît, ils connaissent la chanson : « Passe ton bac
d’abord ! »

La violence de l’adolescent
Tout serait violence chez l’adolescent. D’abord à cause de l’événement pubertaire qu’au fil du temps l’on put qualifier d’« orage
», de « tempête » ou de… « violence » tout simplement. Cet événement marquerait l’éveil de pulsions intenses, agressives, et
donc dangereuses.
D’un point de vue social, dans ses pratiques multiples, il y aurait toujours, de sa part, la recherche de l’extrême, du défi violent,
de la prise de risque permanente. Cette vision est à nouveau redevable du XIX e siècle quand médecins et magistrats évoquaient la
criminalité effrayante des adolescents. On stigmatisera par exemple ces nouvelles « bandes de jeunes » que l’on nomme les «
Apaches », qui font l’objet de chroniques régulières dans la presse. À cette violence de la jeunesse, le pouvoir répond par une non
moins grande violence. En 1901, par exemple, 11 des 18 condamnés à mort sont des mineurs !
Comment expliquer cette violence ? Outre la raison pubertaire évoquée plus haut, outre les difficultés sociales, il y aurait, selon le
psychologue américain Stanley Hall, l’idée d’un atavisme primitif, résurgence des sociétés humaines non civilisées. Idée courte,
nous en reparlerons.
Chapitre 2

Doctrines, théories et concepts

Doctrines et théories

Les théories et doctrines classiques de l’adolescence


Les théories et doctrines médicales et psychologiques classiques de l’adolescence, qui sont encore celles en usage aujourd’hui,
reposent toutes sur le présupposé d’une adolescence considérée comme un âge « délicat », un âge de souffrances, de
perturbations, de désordres, de carences diverses, dont, nous l’avons vu, elles attribuent généralement la responsabilité à la
mutation pubertaire.
Ces théories et doctrines ont une première particularité : il s’agit de théories et doctrines pessimistes. À noter que même les
spécialistes qui développent une vision plus optimiste de l’adolescence, à l’image de la psychanalyste d’enfants Françoise Dolto,
ou du très médiatique Pr Marcel Rufo, ou du thérapeute américain Carl Rogers (quoique dans une moindre mesure), adoptent
malgré tout ce présupposé.
Ces théories ont une seconde particularité : elles affirment, ou induisent, la supériorité de l’âge adulte sur les autres âges de la vie.
Elles présentent cet âge, pour reprendre une vieille formulation utilisée lors de la « Fête de l’adolescence », le 30 juillet 1899,
comme « une Terre promise du complet développement intellectuel et moral » de l’Homme (nous savons aujourd’hui que
l’Homme est en réalité un être à jamais « inachevé »).

L’approche médicale généraliste


C’est paradoxalement l’approche la plus négligée s’agissant de l’adolescence. Alors que, pour les adultes, un dérèglement de
santé conduit le patient chez le généraliste ; pour l’adolescent, il le mène plus volontiers directement chez le spécialiste :
pédopsychiatre, psychiatre, voire chez le psychologue ou psychothérapeute. C’est dire combien, dans ce pays, la « médecine de
l’adolescence » occupe une place anormalement restreinte.

La psychiatrie
Le psychiatre est un médecin spécialiste qui prend en charge les personnes souffrant de difficultés ou de pathologies mentales. Il
travaille en cabinet, à l’hôpital, en clinique privée, dans des centres de soins médico-psychologiques, ou dans des institutions
spécifiques (maisons de retraite, maisons pour adolescents aujourd’hui). À l’hôpital, le psychiatre peut travailler dans le seul
service de psychiatrie, ou bien intervenir aux urgences, ou bien encore dans d’autres services de l’hôpital.
Le psychiatre, qui a une formation médicale, peut faire de la psychiatrie générale et/ou se sous-spécialiser dans un domaine
particulier, comme l’adolescence. Nous sommes dans ce dernier cas dans le domaine de la pédopsychiatrie, avec de nouvelles
spécialisations possibles comme l’addictologie (prise en charge des addictions et dépendances) ou la sexologie (traitement des
troubles sexuels). Ces différentes dénominations nécessitent le plus souvent une formation médicale complémentaire.
Le psychiatre peut être également psychanalyste ou psychothérapeute, s’il a suivi naturellement les formations appropriées. En
France, plus des trois quarts des psychiatres ou pédopsychiatres d’adolescents sont aussi psychanalystes.

La ou les psychologies
La psychologie, en tant que discipline spécifique, apparaît au XIX e siècle. Il s’agit à l’origine d’une psychologie « philosophique ».
Dans la seconde moitié de ce même siècle apparaît la psychologie expérimentale, qui entend, par une méthode rigoureuse de type
scientifique, étudier des faits et des notions psychologiques issues de l’observation. Cette psychologie effectue des mesures sur
des éléments isolés à l’aide d’un appareillage particulier qui décompose la personnalité en variables indépendantes et établit des
moyennes (sans support concret).
La psychologie clinique, quant à elle, prend l’homme comme une totalité. D’abord très présente, cette psychologie va connaître
une éclipse. On doit à Daniel Lagache de l’avoir en quelque sorte ressuscitée en 1949. Il la définit alors en ces termes : « étude
approfondie des cas individuels ». Une définition qu’affinera quelques années plus tard Juliette Favez-Boutonier. La psychologie
clinique, déclare-t-elle, c’est « l’étude d’une personnalité singulière dans la totalité de sa situation et de son évolution ».

La doctrine psychanalytique
La psychanalyse demeure en France, en matière d’adolescence, l’une des grandes doctrines de référence, une doctrine qui, au fil
du temps, s’est glissée subrepticement dans les autres disciplines, médicales et psychologiques, les dénaturant quelquefois. Nous
rappelons que les trois quarts des psychiatres ou pédopsychiatres d’adolescents sont aussi de formation analytique. Constat qui
vaut largement pour les psychologues et les thérapeutes d’adolescents.
Malgré sa prétention, depuis ses origines, à vouloir donner une coloration scientifique à ce qu’elle désigne comme les
perturbations physiques et psychiques de la puberté, la psychanalyse n’est pas une science. Elle ne démontre pas des faits à partir
d’hypothèses. Elle soutient des idées dont elle n’accepte jamais la discussion. Elle ne remet pas en cause ses conclusions – sauf
pressée par les faits quand ils viennent à infirmer certaines de ses affirmations.
La psychanalyse, sur le plan comportemental enfin, est souvent méprisante envers les autres disciplines (qu’elle ne connaît
d’ailleurs pas toujours ou pas correctement). Ainsi n’accorde-t-elle aucun intérêt à la « psychologie différentielle ». Pour elle,
l’adolescent se développe selon des structures et des pensées types, sans considération des particularités individuelles, des
mentalités collectives et des circonstances sociales ou d’environnement alors qu’on le sait bien, les modes de pensée d’une
communauté influent sur l’état biologique.
La psychanalyse se veut finalement « pensée unique », entend incarner, à elle seule, le savoir absolu sur l’adolescence. Or, cette
doctrine n’est pas sans danger pour le sujet adolescent, car, faut-il le rappeler, elle est foncièrement pessimiste . Elle met en avant
les mécanismes de conflit générés durant cette période, par la métamorphose pubertaire qui conduit, selon elle, à une
réactualisation des pulsions les plus agressives. Pulsions qui, selon Anna Freud, poussent l’adolescent au manque d’égard, à la
cruauté mentale avec « déchaînements antisociaux ». Quelle perspective !
Nonobstant le caractère peu probant de ces affirmations, c’est d’optimisme dont l’adolescent a besoin pour mener son chemin.
Néanmoins, comme thérapie, la psychanalyse a évidemment toute sa place dans la panoplie des soins.

Les théories nouvelles : analyse transactionnelle, Gestalt-théorie, PNL…


Nous ne mentionnerons ici que les trois principales. Chacune, naturellement, exigerait de longs développements. Nous n’en
donnerons ici que les lignes essentielles. Le lecteur qui voudrait en savoir plus pourrait utilement se reporter à l’ouvrage collectif
Choisir sa psychothérapie. Les écoles, les méthodes, les traitements (ouvrage référencé en bibliographie et publié sous la
direction d’Alain Braconnier, Bertrand Hanin et al. ).

a) L’analyse transactionnelle
Imaginée par Berne dans les années 1960, cette analyse, qui s’appuie sur les concepts psychanalytiques, décrit des États du
Moi. Bertrand Hanin et Daniel Widlöcher, qui sont tous deux psychiatres et psychanalystes, la résument, dans l’ouvrage cité
ci-dessus, en ces termes : « Le Moi est l’instance qui maintient l’unité et la personnalité en permettant l’adaptation au
principe de réalité, la satisfaction partielle du principe de plaisir et le respect des interdits émanant du surmoi. C’est ce qui
constitue l’individualité… On considère dans cette approche thérapeutique que le Moi du patient peut tour à tour se retrouver
dans la situation d’être un Moi enfant, un Moi parent ou un Moi adulte, tendance vers laquelle il convient de tendre… Les
modes de communication dépendent des états du Moi dans la réception et dans l’émission des messages. L’analyse
transactionnelle permet de reprogrammer, de remodeler les processus de décision et d’interaction liés aux injonctions
précoces reçues par le patient. »
b) La Gestalt-théorie
D’origine allemande, définie par le psychanalyste Perls dans les années 1940, la Gestalt-théorie met en avant le corps, les
émotions, le ressenti du sujet, qu’elle réhabilite grâce à la notion de responsabilité existentielle. Ici le sujet est appréhendé
dans sa globalité, c’est-à-dire dans ses cinq dimensions majeures : sensorielle, affective, intellectuelle, sociale et spirituelle.
La Gestalt-théorie explique que les causes des pathologies résident dans les mauvaises relations avec l’entourage et le
milieu. « C’est, précisent Hanin et Widlöcher, la prise de conscience des éléments morcelés du psychisme et du corps qui
permet un nouveau processus d’unification. »
c) La PNL ou programmation neurolinguistique
La PNL, mise au point en 1975 par Bandler et Grinder, a pour finalité de changer le modèle de perception de
l’environnement dont le sujet est victime à cause d’une perception erronée de la réalité. Les erreurs de raisonnement sont
assimilées à des erreurs d’apprentissage.

Les thérapies et traitements associés à ces théories et doctrines


Aux théories et doctrines classiques, que nous venons de rappeler, sont associées diverses thérapies ou psychothérapies. Celles-ci
ont en commun de s’adresser à des adolescents qui rencontrent certaines difficultés, comme :
l’anxiété, le stress, la dépression ;
des troubles du comportement (hyperactivité, agressivité, retrait social…) ;
des difficultés relationnelles (manque de confiance en soi) ;
des troubles du sommeil ;
des troubles du comportement alimentaire (anorexie, boulimie).
Toutes ces thérapies visent aussi à comprendre et à remédier aux modifications dans les attitudes des adolescents,
symptomatiques quelquefois de pathologies plus ou moins graves.
Rappelons qu’une psychothérapie est un traitement réalisé par des procédés psychiques mettant en relation un thérapeute et un
patient (avec contact de l’entourage ou non).
L’on peut distinguer deux grandes catégories de thérapies : les thérapies individuelles et les thérapies familiales. Les unes et les
autres ont cependant la particularité d’être, le plus souvent, des « thérapies de pouvoir » (pouvoir de spécialistes sur des patients).
La relation duelle qu’elles introduisent : expert-malade ou expert-bloc famille est une relation asymétrique, le premier constituant
la « partie haute » de la relation, le second la « partie basse ». La relation est de type vertical.

Le traitement psychiatrique
Le traitement psychiatrique est un traitement médical, fondé sur une nosologie rigoureuse des pathologies. Le psychiatre peut
proposer à son patient une thérapie psychologique, associée ou non à la prescription de médicaments. Celle-ci peut consister en
une psychothérapie de soutien, une thérapie comportementale/cognitive, une psychanalyse, une thérapie de couple ou une
thérapie familiale (cf. page suivante). Il existe un grand nombre de thérapies psychologiques différentes nécessitant plus ou moins
une formation spécifique. Le psychiatre peut pratiquer une ou plusieurs d’entre elles, en fonction de ses affinités, de ses
formations et des patients à traiter.

Les psychothérapies
Rappelons qu’une psychothérapie est un traitement réalisé par des procédés psychiques, mettant en relation un thérapeute et un
patient.
Elles sont, nous l’avons dit, soit de type individuel, soit de type familial. Mais ces thérapies ainsi définies peuvent encore se
subdiviser en thérapies non psychanalytiques et en thérapies avec usage au moins des concepts psychanalytiques, et, selon
l’analyse de Braconnier, Hanin et Widlöcher, en « thérapies d’interprétation » (psychanalyse principalement), « thérapies de
prescription » et « thérapies d’expression ».
Cela fait au total beaucoup de thérapies, sous-thérapies, sous-sous-thérapies. Il nous est impossible d’entrer, dans le cadre de cet
ouvrage, dans toutes les variantes thérapeutiques aujourd’hui disponibles sur le marché.
Pour chaque grand type de thérapies, individuelles ou collectives, exposé à présent, nous mentionnerons donc à quelle subdivision
il appartient : « interprétation », « prescription » ou « expression ».

a) Les thérapies familiales ou systémiques traditionnelles


Les thérapies systémiques sont nées aux États-Unis. Elles reposent sur la théorie dite des « systèmes ». Elles considèrent la
famille comme un système où les différentes parties forment un tout indissociable, indiquent que tout groupe exige, pour
subsister, une certaine stabilité, et que toucher à l’un de ses membres peut déséquilibrer les autres.
À qui s’adressent ces thérapies ? Principalement à des familles dont un enfant présente de graves troubles psychotiques ou
névrotiques, ou bien des troubles du comportement ou de sérieux troubles des conduites alimentaires.
Elles reposent sur le principe selon lequel un enfant ou un adolescent perturbé fait partie d’une famille troublée elle-même
dans sa totalité. L’enfant est en quelque sorte le symptôme visible de cette famille malade. C’est donc cette dernière qu’il
faut traiter en améliorant le jeu des communications et des interactions.
Pour cela, le thérapeute rencontre, au moins dans les premières séances, les différents membres de la famille : parents,
grands-parents, frères et sœurs du patient en difficulté.
b) Les thérapies familiales ou individuelles d’orientation psychanalytique
Les thérapies familiales psychanalytiques utilisent les concepts psychanalytiques individuels pour comprendre la structure
des conflits interpersonnels en action dans le groupe familial. Elles tiennent compte de la projection des conflits psychiques
non résolus des parents sur leur enfant qui les vit passivement.
Ces thérapies sont mises en scène dans des réunions où, à tour de rôle, les membres présents de la famille prennent la parole,
sous la direction du thérapeute. À côté de cette première salle de réunion existe une seconde, séparée par une glace sans tain.
Là se trouve un superviseur qui dialogue avec le thérapeute, pour le protéger d’une trop grande implication émotionnelle. La
famille est préalablement informée de ce dispositif.

Les thérapies nouvelles de type comportemental/cognitif, art-thérapie et les thérapies humanistes de


type rogérien ou personnaliste

La thérapie comportementale ou cognitive


La thérapie comportementale ou cognitive (TCC) entend elle aussi résoudre les souffrances d’enfants ou d’adolescents, telles
qu’énurésie, phobie scolaire, troubles déficitaires et de l’attention (hyperactivité). Cette thérapie considère que ce ne sont pas les
situations en elles-mêmes qui provoquent les émotions et les comportements, mais plutôt les pensées automatiques (cognitions)
qui traversent l’esprit à ces moments-là. La TCC vise donc à faire repérer les pensées sans fondement réel (appelées « symptômes
invalidants »), pensées apprises à une certaine époque de la vie, et elle apprend à les remplacer par des pensées plus adaptées. Elle
permet aussi d’apprendre à s’apaiser avec ses émotions et sensations.
L’objectif de la thérapie comportementale et cognitive (TCC) est donc totalement différent de celui de la psychanalyse. Il s’agit
ici de thérapies courtes et actives, qui ne visent pas à transformer une personnalité, mais à se débarrasser d’un symptôme
invalidant, cause réelle de la souffrance. Les thérapeutes de la TCC estiment que ce qui a été appris peut être désappris et qu’un
nouvel apprentissage peut être entrepris.
Dix ou quinze séances d’environ quarante-cinq minutes chacune peuvent permettre de venir à bout de phobies très anciennes. Le
thérapeute propose pour ce faire des exercices pratiques de déconditionnement. Il accompagne le patient, lui sert de modèle
comportemental. Le jeu de rôles peut être utilisé, de même que la relaxation. Enfin, certains thérapeutes donnent quelquefois des
petits exercices personnels à faire chez soi.

L’art-thérapie
L’art-thérapie peut se définir comme l’exploitation des facultés et des potentiels psycho-corporels pour acquérir ou recouvrer une
meilleure autonomie et manière d’être dans sa vie quotidienne, grâce à l’expression et au savoir-faire artistiques. Il contribue ainsi
à faire disparaître les troubles et les handicaps somatiques, psychiques ou sociaux, qui, associés ou pas, créent des difficultés
d’apprentissage ou perturbent les relations interpersonnelles. Par le biais d’activités artistiques variées et adaptées, l’enfant ou
l’adolescent se « libère », effaçant inhibitions et tensions personnelles, se mettant en situation de mieux comprendre les autres.
Mieux sans sa peau, il est ainsi à même de développer ses possibilités de coopération et solidarité sociale. L’art-thérapie rassure
l’enfant ou l’adolescent sur ses véritables compétences, l’aide à se familiariser peu à peu avec les règles de la vie quotidienne et à
acquérir de nouvelles performances motrices, sensorielles ou cognitives.

La thérapie rogérienne
Les théories « différentes », incarnées par des psychologues américains comme Carl Rogers (Le Développement de la personne )
ou Thomas Gordon (Parents efficaces ), ne sont pas des « théories du pouvoir », mais des « théories de service ». Elles
n’expriment pas un savoir qui se voudrait incontestable comme dans les autres théories. Ce fait est capital.
Elles ont cependant, redisons-le, dans le domaine de l’adolescence qui nous intéresse ici, un gros défaut. Si elles apportent
d’importantes réponses novatrices en matière de communication avec les jeunes, elles ont cependant le tort de ne pas se départir
totalement de l’idée d’une adolescence conçue comme une période « délicate », « sensible ».
Mais ne nions pas leur force : elles sont un puissant apport à la redéfinition de rapports plus équilibrés entre parents et
adolescents.
Au contraire du psychanalyste, le thérapeute rogérien sait qu’il ne peut se dégager complètement de sa propre subjectivité, ne
peut « réifier » le patient, se distancier de lui.

Le « traitement » ou communication personnaliste


Le philosophe Emmanuel Mounier disait que « tout le secret de l’éducation est de passer entre les deux écueils de l’autoritarisme
et du relâchement ». On sait que l’on peut être « autoritaire » (ce à quoi conduit nécessairement tout système ou structure
d’autorité), soit par besoin de « revanche » : l’on a soi-même souffert de l’autorité familiale de ses propres parents, soit par
faiblesse : l’on n’a pas suffisamment d’imagination pour penser qu’il puisse y avoir d’autres systèmes éducatifs applicables, soit
par méfiance : l’on ne croit pas que les enfants puissent être vraiment responsables ou bien l’on ne veut surtout pas être taxés de «
parent libéral » c’est-à-dire « passant tout » à ses enfants. On peut, en revanche, être hyper-libéral, c’est-à-dire laxiste, en ayant la
conviction que l’enfant n’a besoin que de sa liberté pour grandir correctement.
Au plan scolaire, cela donne des enseignants écartelés entre l’autoritarisme le plus strict (« je me fais obéir tout de suite, après je
suis tranquille pour l’année »), qui redouble d’acharnement à contrôler, interdire, sanctionner, et le « laisser-faire », construit sur
l’idée qu’ainsi il n’y aura aucune rébellion des élèves.
Ces deux méthodes sont donc, au final, insatisfaisantes. Elles sont même, tant elles se ressemblent, blâmables l’une et l’autre. La
psychanalyste Maud Mannoni, dans son livre L’Éducation impossible , dit qu’en réalité « la conduite autoritaire ou libérale
procède d’une même violence, ouverte ou masquée » ; dans les deux cas, précise-telle, il y a contrainte : l’éducation autoritaire
prend la forme d’une violence physique tandis que l’éducation libérale revêt « une forme plus subtile de violence psychique
cachée (il s’agit de persuader l’enfant qu’il est consentant) ».
D’où cette nouvelle technique relationnelle : le « personnalisme éducatif » ou « éducation personnaliste » qu’à travers différentes
thématiques, nous présentons ici, qui a la particularité de reposer sur une vision optimiste de l’enfant et de l’homme.
En ce sens, cette technique se distingue fondamentalement du regard psychanalytique qui, nous l’avons vu, est un regard de
défiance, un regard qui exprime une vision pessimiste de la « nature » humaine. Pour Freud et ses disciples, en effet, quand il est
livré à lui-même, l’homme ne sait, ne peut que s’abandonner à ses bas instincts… et plus encore quand il est en groupe. C’est
pourquoi il a besoin d’autorité, de cadres, de limites, de règles, etc.
Le « personnalisme éducatif » est un pragmatisme organisé autour de trois grandes notions de base, trois notions-clés (qui
forment comme des « principes directeurs » guidant paroles et actes) : personnes, relations, égalité (posture d’). Il se présente
comme un approfondissement du système familial démocratique que nous avons analysé dans notre livre La Démocratie
familiale, il y a plus de vingt ans.
Le « personnalisme éducatif » rejette par conséquent le double postulat communément admis :
1) La supériorité de l’âge adulte sur les autres âges (l’adulte incarnant pour les « supérioristes » la maturité achevée et la
stabilité).
2) L’imperfection (ou immaturité) de l’enfance et de l’adolescence (l’adolescent incarnant alors l’inachèvement de
l’Homme).

Le « traitement relationnel personnaliste », s’il doit beaucoup à Rogers et ses disciples, s’il puise par ailleurs à cette autre source
que sont les pédagogies de l’École nouvelle (Montessori, Dewey, Decroly, Freinet…), se distingue cependant de ces deux
approches, et s’en écarte quelquefois, sur deux points majeurs :

1) Cette méthode ne vise pas, contrairement à la thérapie rogérienne, à un changement psychique des personnes, à
transformer leur personnalité (néanmoins, nous pensons, et espérons qu’en cherchant une amélioration des rapports
interpersonnels, elle est de nature à produire une amélioration du fonctionnement psychique de toutes les personnes en
cause).
2) Elle exprime surtout – et ce point est fondamental – une représentation de l’adolescence qui n’est pas faite de préjugés, de
clichés, d’a priori (dont les auteurs précités n’ont pas, on le sait, toujours réussi à se dégager) ; elle ne considère pas cet âge
comme problématique (ingrat) en soi ; elle regarde au contraire et appréhende cette période de la vie comme un capital de
capacités et de ressources personnelles souvent méconnues ou sous-estimées.

Nous intégrons, pour notre part, l’idée que c’est toujours par et sous le regard de l’autre que l’on vit, que l’on pense, que l’on agit.
Or le regard des gens, des spécialistes, sur l’adolescent est encore trop souvent (parfois à leur insu) un mauvais regard, un regard
d’exaspération ou de compassion, c’est selon.
Trois principes de base inspirent la stratégie relationnelle personnaliste : la considération positive, la confiance inconditionnelle et
l’écoute attentive (taisante).

Concepts

Qu’est-ce que l’adolescence ?


L’adolescence est encore très fréquemment confondue avec la puberté. Pour le médecin et le psychologue, l’adolescent est ce
sujet, cet individu, qui a une certaine constitution physique, un corps possédant des caractéristiques particulières quant à la
longueur des membres, aux systèmes musculaire, respiratoire, etc. Ce point de vue, qui met l’accent sur le seul phénomène
pubertaire, fait ainsi de l’adolescence un phénomène de toujours. C’est une erreur.
L’adolescence, qui ne se résume pas et ne se réduit surtout pas à la puberté (elle s’en passe même aujourd’hui dans ses
commencements), n’a pas toujours existé : ce n’est pas une réalité intemporelle. C’est un « âge nouveau » dans la vie des
hommes, le privilège des nations occidentales. Pour dire les choses autrement, l’adolescence n’est pas un état naturel de
l’existence, c’est une construction sociale. Point d’adolescents dans l’ancienne France. L’historien Philippe Ariès l’a montré
(L’Enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime, 1960), les enfants (des milieux populaires) étaient absorbés trop tôt dans le
monde du travail pour avoir le temps de bénéficier de cet « entredeux-âges ». Ils devenaient adultes « sans transition », des
adultes « précoces » en somme. Il en est d’ailleurs encore ainsi de nos jours dans les sociétés rituelles ou économiquement peu
développées : l’enfant y rejoint, très jeune, les bataillons des travailleurs adultes. L’adolescence est donc bien le produit de
conditions et de circonstances sociales déterminées. Précisons le propos.
C’est de l’extrême fin du XIX e siècle, avec le développement de l’enseignement secondaire, que date la naissance de ce « nouvel
âge de la vie ». En « enfermant » ses fils au collège pour, à la fois mieux les contrôler et les tenir à distance des responsabilités
politiques et économiques, la bourgeoisie invente du même coup l’adolescence. Désormais réunis par âge, par uniforme, ces
garçons (qui ne seront rejoints par les filles que beaucoup plus tard) se créent aussitôt des solidarités, se forgent une première «
conscience de classe (d’âge) ». Ce qui ne manque pas d’inquiéter cette même bourgeoisie, laquelle s’empresse de confier à la
psychologie le soin d’organiser la pédagogie et aux mouvements de jeunesse d’encadrer ces adolescents jugés « turbulents » et «
naturellement » tentés par une vie désordonnée ou aventureuse.
C’est dans les années 1960 et 1970, avec la massification scolaire et la généralisation de la mixité, que cette adolescence qui
n’était réservée qu’à quelques-uns (les jeunes mâles bourgeois) devient une « adolescence pour tous » : ouvriers et bourgeois,
paysans, garçons et filles. L’émergence, à la même époque, puis la propagation d’une culture spécifique à cet âge (d’inspiration
américaine) confortent le sentiment d’appartenance à cette « nouvelle classe d’âge ». Le rock and roll, le cinéma américain, celui
de James Dean et Marlon Brando, les yé-yé et les « blousons noirs » en France commencent à rythmer ce nouveau monde.
Résumons ce point. L’adolescence doit son existence au collège, qui institue de rigoureux classements d’âge, correspondant aux
niveaux d’étude scolaire. Sans collégiens, pas d’adolescents ! L’adolescence est un privilège , celui des sociétés riches qui
peuvent se permettre de donner une instruction prolongée à leurs enfants.
L’adolescence n’est donc pas, répétons-le, une réalité universelle. Dans certaines parties actuelles du monde, les plus déshéritées,
qui sont aussi les plus nombreuses (Afrique subsaharienne, Asie, Amérique latine…), elle n’existe toujours pas.
Le constat est terrible : aujourd’hui, près de la moitié des jeunes de la planète qui ont l’âge de fréquenter le collège n’y vont pas,
en raison soit du coût élevé des études, soit de l’éloignement des écoles, soit des corvées ménagères imposées aux filles, soit du
fait des grossesses ou des mariages précoces. Dans ces pays souvent pauvres, seuls les enfants des milieux favorisés, un peu plus
souvent les garçons que les filles, vont au collège, et sont, pour cette raison, adolescents.

Un exemple : Haïti
Dans ce pays, 80 % des garçons et filles âgés de 10 à 19 ans ne fréquentent pas un établissement d’enseignement secondaire.
Ils sont dans la vie adulte, travaillent, ont charge de famille. À 18 ans, un tiers des filles sont déjà mariées et près de la moitié
(48 %) à 20 ans. Par ailleurs, 30 % ont leur premier enfant à 20 ans.

Quelles tranches d’âge recouvre l’adolescence ?


Les réponses sont variables. Pour les Américains qui ont forgé le concept de teen-agers, l’on est adolescent de 13 à 19 ans. En
France, selon les cliniciens, les tranches varient fortement : 10-25 ans (Alain Braconnier, psychiatre), 12-30 ans (Tony Anatrella,
psychologue). Selon les définitions de l’ONU, l’on est adolescent de 10 à 19 ans. Pour les institutions européennes, à 15 ans, l’on
n’appartient plus à cet âge : on est « jeune », jeune homme ou jeune fille, et on le reste désormais jusqu’à 25 ans au moins.
Nous considérons, quant à nous, que l’on entre aujourd’hui en adolescence beaucoup plus tôt, très tôt : vers 8-9 ans et que l’on en
sort également plus vite : vers 14-15 ans (voir « Partie 2 », p. 46 ).
C’est seulement, par une commodité de langage que nous désignerons, dans cet ouvrage, l’adolescence comme étant la tranche
des 8-18 ans. L’âge d’adolescence stricto sensu s’étend en fait de 8 à 14-15 ans. La période qui suit, de 15 à 18 ans, forme la
première partie de la jeunesse.

Qu’est-ce que la famille ?


Les adolescents vivent en famille. Mais de quelle famille parlons-nous ? Peut-on encore parler en 2013 d’institution familiale ?
Ne faut-il pas plutôt parler aujourd’hui de système relationnel ? Ou de réseau ?
Qu’est-ce donc que la famille aujourd’hui ? Une génération transmet le mot à l’autre, comme quelque chose dont on connaîtrait a
priori la valeur et, par conséquent, dont on n’aurait plus besoin de vérifier le contenu.
Le piège est là : lorsque quelqu’un parle de la « famille » et que quelqu’un d’autre écoute, ils se comprennent aussitôt. Mais nous
accordons-nous vraiment sur le sens du mot ?
Qu’est-ce donc que la famille ? Paraphrasant ce que saint Augustin dit du temps, quelque part dans Les Confessions , il est clair
que « quand personne ne me le demande je le sais, mais dès qu’il s’agit de l’expliquer, je ne le sais plus ».
Jusqu’à une période récente (approximativement les années 1950), la famille était une institution strictement définie par la loi,
très rarement mise en cause par ses membres. Ainsi l’autorité qu’exerçaient le mari sur la femme, ou les parents sur les enfants
n’était pas réellement contestée (au moins dans sa légitimité).
Aussi longtemps que l’activité rurale a été prédominante, la famille française est restée stable. Constituée de toutes les personnes
vivant au foyer – on disait « à même pot et même feu » – unies par des liens de parenté ou d’alliance, elle s’est ainsi transmise,
inchangée, de génération en génération.
Ce type d’organisation n’a pas bougé jusqu’à la Révolution industrielle du XIX e siècle qui, entraînant un puissant mouvement
d’exode rural, a eu pour effet de distendre les liens familiaux traditionnels. La famille conjugale s’est alors développée au
détriment de la famille élargie qui dominait toujours au sud de la Loire. Avec l’intensification de la concentration industrielle au
XX e siècle, la dissociation de l’unité familiale et de l’unité économique s’est aggravée.

La force de la famille traditionnelle reposait en fait sur les trois fonctions fondamentales de reproduction, d’apport de savoirs et
d’éducation.
Du fait de la libération des mœurs, l’on a actuellement de plus en plus d’enfants nés en dehors du mariage (plus de la moitié en
réalité). Ainsi la famille n’est-elle plus le lieu unique et légitime de l’activité sexuelle reproductrice (elle n’est même plus, du
reste, le lieu de démarrage de cette activité).
Par ailleurs, en raison de la multiplication des moyens de communication et d’information (avec Internet, notamment), les enfants
acquièrent de plus en plus de savoirs et d’informations, en dehors de la famille, et même de l’école.
Nous sommes ainsi passés, en quelques siècles, d’un monde solidaire (où les hommes n’étaient que les éléments d’un grand «
tout social ») à un monde solitaire (où chacun constitue un monde à lui tout seul). Avec ce que l’on appelle désormais la «
postmodernité », nos sociétés sont devenues des sociétés du JE. Progressivement, le NOUS a été évacué des communautés
anciennes. Nos sociétés, résolument, visent d’abord l’affirmation du MOI plus que l’épanouissement du NOUS. Du MOI-tout de
suite au détriment du NOUS-perspective. Elles exacerbent l’immédiateté au profit de la durée. Elles sont « sociétés d’individus »,
d’individus déliés , qui ne sont plus soudés par une communauté d’intérêts et de destin. Pour ces individus-là, il n’est d’autre
vérité que personnelle , d’autre mobile que profitable . Alors ces individus, indépendants, interchangeables, souffrent de leur
solitude, si, bien sûr, l’on admet avec Norbert Elias que tout homme a besoin du commerce des autres hommes.
Les familles sont en somme à l’image de ces sociétés post-modernes : individuelles jusqu’à l’excès, méfiantes, indifférentes
même aux autres. Comme nous le dit un jour ce père de famille : « Je veux bien dire bonjour à tout le monde, échanger quelques
mots, mais s’ils n’ont aucune envie d’avoir affaire à moi, je n’ai aucune envie d’avoir affaire à eux. Ils ne me gênent pas. Tout ce
qui m’intéresse, c’est ma petite famille. Ma femme et mes deux enfants, ce sont eux qui comptent. Ma vie ici, c’est chez moi. »
Individualité, intimité. Voilà le vrai « nouvel esprit de famille », essentiellement frileux, atrophié. Le JE conjugal et familial,
assurément, remplace un NOUS désormais suranné ; le désordre libéral n’est plus très loin, l’« égoïsme familial », selon
l’expression de Gide, menace.
La famille est aujourd’hui moins organisée autour de statuts (époux, parents, enfants) que d’individus . La rigidité statutaire (ici
ou là maintenue) laisse la place à des rapports d’individus, devenus par la « grâce » démocratique, potentiellement libres et égaux.
C’est ici l’idée de citoyenneté familiale (poussant à une certaine égalisation des conditions, selon le mot de Tocqueville, qui
s’impose. En effet, dans une famille qui est d’abord d’individus, chacun est avant tout le pair – P.A.I.R. – de l’autre. Nous verrons
que dans les familles d’adolescents cette idée prend toute sa force.
La famille actuelle est, fondamentalement, une famille (d’esprit) démocratique , faite d’individus échangeant des biens et des
services, de nobles sentiments, mais aussi, hélas, des peurs et des angoisses.
Dans cette famille, hélas encore, chacun est guidé par ses propres intérêts, cherche à assouvir ses propres désirs. Et la télévision
de produire C’est mon choix , émission qui a résumé, plusieurs années durant, l’état d’esprit général (qui n’est, somme toute, que
l’addition d’états d’esprit particuliers). Bref, chacun est pour soi, chacun est sa propre fin. Chacun est roi – au moins dans la
sphère privée.
Ouvrons ici une utile parenthèse. Nonobstant cette démocratisation, les enfants restent évidemment soumis au double pouvoir
légal et économique de leurs parents. Assujettis, depuis 1970, à l’« autorité parentale », ils doivent à leurs géniteurs toujours
respect et obéissance. La famille demeure bien l’expression d’un pouvoir hiérarchique : il y a toujours, comme disait le
sociologue allemand Max Weber – définissant la domination – ceux qui commandent (les parents) et ceux qui doivent obéir (les
enfants). Que l’effectivité du pouvoir parental soit aujourd’hui affaiblie ne change rien à la réalité (et, parfois, à l’in-
supportabilité) de ce pouvoir.
L’« individualisation » de la vie familiale produit donc toute une série de dysfonctionnements et de troubles relationnels qu’il
nous faut rapidement présenter, au risque de contrarier nombre d’idées reçues :

a) In-communication. On présente d’ordinaire la famille moderne comme une famille « bavarde ». Certes, des mots sont
échangés, très librement de surcroît, mais les mots suffisent-ils à « faire communication » ? Non. Pour qu’il y ait vraie
communication, il faut qu’il y ait compréhension entre les « échangeurs » – au moins le désir de compréhension –, le
dialogue des points de vue, la confrontation des idées c’est-à-dire des différences. Il faut qu’il y ait un langage commun.
Analysant « le fossé des générations », l’ethnologue américaine Margaret Mead disait, dans les années 1970, que les deux
parties (parents, enfants) manquaient de ce vocabulaire commun. Nous pensons pour cette raison que la famille
d’aujourd’hui n’est pas très communicante.
b) Absence et indisponibilité. Pour toutes sortes de raisons, dont certaines légitimes (comme l’implication professionnelle,
qui peut être lourde dans certaines familles), nombre de parents (de pères surtout) ne sont plus présents aux côtés de leurs
enfants. Nombre d’entre eux préfèrent occuper leur temps libre, avec des partenaires de leur choix (qui sont adultes, et
appartiennent à leur univers professionnel ou à leur cercle de voisinage), au détriment de leurs propres enfants. Conséquence
: vie ludique familiale et filiale divergent – réduisant d’autant le champ des activités communes.
c) In-intérêt. Chacun, en famille, porte d’abord attention à sa propre vie sociale, d’où la méconnaissance fréquente des
parents des activités de leurs enfants (adolescents surtout), des compétences qu’ils mobilisent à cette occasion, d’où
l’ignorance aussi des enfants des centres d’intérêt et d’épanouissement de leurs parents.

Cet « égoïsme familial », selon l’expression déjà rapportée de Gide, éloigne de l’humanité sociale, vient générer diverses
situations pathologiques. Le drame d’absence (de l’autre) est le vrai drame de notre temps. Solitudes des uns (soi-même),
solitudes des autres (clones de soi-même), le monde est organisé autour de toutes ces solitudes, solitudes qui jamais ne se
rejoignent, les pavés de la vie en sont remplis. Plus rien ne semble relier les hommes entre eux.
Ajoutons à ces multiples dysfonctionnements – ces « ères du vide » – la question du surinvestissement affectif (touchant
principalement les jeunes enfants) – zone peut-être unique du « trop-plein familial ».
Les parents ainsi surinvestis ne semblent plus rien sans leurs enfants ; ils s’attachent à leurs basques comme des forcenés à une
embarcation à la dérive. Ils les considèrent un peu comme une possession personnelle. Alors, les « chers petits » semblent
définitivement enchâssés dans l’édifice familial.
Quel avenir pour la famille – puisqu’elle n’est pas « finie », mais continue sa route cahin-caha ? Demandons-nous à quoi pourrait
ou devrait ressembler « une famille de personnes », une famille ouverte au monde et à la gratuité, une famille qui serve réellement
à quelque chose ? Qui soit repère pour chacun, épanouissement pour tous ?
Il est des conditions à remplir. Débarrassons d’abord la famille actuelle des mauvais instincts qu’elle génère : instinct de
domination des parents sur les enfants (surtout adolescents), sens de la propriété à leur endroit. Reconnaissons l’enfance et
l’adolescence comme des « âges en soi » et donc les enfants et les adolescents comme d’authentiques personnes. Portons ensuite
remède aux dysfonctionnements familiaux les plus criants. « J’ai fait un rêve », disait Martin Luther King. Faisons-en un
aujourd’hui pour la famille.
Rêvons d’une Constitution familiale qui, prenant appui à la fois sur le Code civil et la Convention internationale des Droits de
l’Enfant (voir article éponyme, p. 107 ), redéfinirait clairement les droits et les devoirs des partenaires familiaux. Érigeons les
parents en personnes navigatrices donnant le cap à la barque familiale. Accordons à tous les pères et mères les moyens d’amener
la progéniture à la responsabilité et à la liberté. Permettons aux enfants d’entendre les convictions de leurs parents, leur lecture du
monde. Ouvrons enfin la famille à d’autres familiers : grands-parents bien sûr (de plus en plus populaires), mais aussi oncles et
tantes, cousins et cousines. Imaginons pour conclure des « lieux de vie » – sortes de foyers – où les « grands » enfants viendraient
se reposer de la vie de famille (nucléaire). Imaginons, imaginons…

Que signifie être parent d’adolescent ?


« Parent d’adolescent » est un métier à part entière, distinct de celui de « parent d’enfant ». Il s’agit dès lors de mettre en place
une nouvelle organisation relationnelle. C’est une nécessité pour la famille, qui, si elle y répond, évitera bien des conflits et des
tensions.
Le parent d’adolescent est plutôt un parenC, avec un c, qu’un parenT, avec un t.
Dans « parence », il y a l’idée de « parité », d’« égalité ». La parence, c’est l’esprit même de la relation parent-adolescent (ou
enseignant/éducateur-adolescent). On peut la définir comme un processus par lequel des personnes nommées « parents » ou
éducateurs accomplissent une série d’actes relationnels et de communication à l’égard d’autres personnes nommées « adolescents
».
Bien entendu, la « parence », ainsi définie, est un art, celui de mettre en relation des personnes désormais égales en droits et en
devoirs, douées également d’intelligence et disposant, les unes les autres, de capacités et de talents à faire valoir. Toutes ces
personnes, quoique conservant chacune leur statut de parent, d’enseignant, d’éducateur ou d’enfant, doivent à présent avancer de
concert.
L’instauration de cette nouvelle relation suppose pour tous un départ et un abandon de l’enfance : de la part de l’enfant, de la part
de l’éducateur. Pour l’enfant, impatient de quitter son état d’infériorité, la chose est aisée, pour les parents, l’opération est souvent
plus délicate. Pas facile pour lui/pour elle, en effet, d’« effacer » l’enfant, d’accepter un être qui soudainement revendique sa
propre liberté, qui aspire à faire ses propres choix, qui entend analyser seul les situations qui se présentent à lui. Parfois, les
parents trouvent même cela proprement inacceptable. Ces avancées d’autonomie, ils les vivent alors comme autant de défaites
personnelles. D’où leur crispation, leur mauvaise humeur.

Qu’est-ce que la puberté ?


La puberté est une mutation à la fois corporelle et psychique (on parle dans ce cas de « puberté mentale »). On s’explique toujours
mal ce qui la déclenche. On peut seulement dire que la région diencéphale-hypophysaire, qui se trouve à la base du cerveau et
contient les centres de l’activité biologique générale, à un moment donné, entre en activité. Les échanges biologiques
s’accélèrent, la croissance s’engage et se réalise par secteurs successifs.
La puberté est plus précoce qu’autrefois (mais, semble-t-il, seulement pour les filles). Une étude danoise de 2009 a montré en
effet que le développement des seins chez les filles intervenait, en 2006, un an plus tôt qu’en 1991. Il n’est donc plus rare
aujourd’hui qu’à 9 ans des filles voient leur poitrine se former (des cas sont même signalés dès l’âge de 7 ans ! Une étude
américaine portant sur 1 239 petites filles, publiée dans la revue Pediatrics en 2010, révèle que 15 % d’entre elles ont un
développement des seins à partir de cet âge et 20 % un développement des poils pubiens dès l’âge de 8 ans).
S’agissant de la France, l’on constate que si l’âge des premières règles n’a pratiquement pas bougé depuis une trentaine d’années,
s’établissant à 12 ans et 6 mois en 2010, l’âge de l’apparition des seins est de 9 ans et 6 mois, au lieu de 10 ans et 3 mois
auparavant.
Comment expliquer cette imprégnation hormonale précoce ? Diverses hypothèses sont avancées : une contamination par des
perturbateurs endocriniens d’origine chimique (pesticides, bisphénol A, phtalates…) qui « mimeraient » l’action des œstrogènes
(hormones sexuelles féminines à l’origine des modifications anatomiques) ; le surpoids, étant entendu que le tissu adipeux produit
des œstrogènes ; enfin l’hyper-sexualisation de la société qui provoquerait un état d’excitation permanente chez les enfants.

La puberté est-elle une violence faite à l’individu ?


C’est l’opinion courante. L’on parle ainsi, nous l’avons vu, dans la tradition d’un Jean-Jacques Rousseau, d’un Stanley Hall
(célèbre psychologue américain du début du XX e siècle) ou d’un Sigmund Freud (père de la psychanalyse), d’un « moment de
crise », d’une « tempête », d’une période de conflits. L’on parle de nos jours aussi de « violence pubertaire » (Daniel Marcelli),
de « débordement pubertaire » (Patrice Huerre). Le sujet, pris au dépourvu, confronté à une mutation qu’il n’a pas choisie,
proclament de concert les tenants des doctrines classiques de l’adolescence, réagirait naturellement à cet événement par des
conduites à risque, des actes d’agressivité. C’est là pure spéculation.
Car d’abord la puberté n’est un phénomène ni soudain ni brutal. Son évolution, au contraire de celle de certains animaux, s’étend
sur plusieurs années : trois, quatre, cinq, ce qui laisse à l’adolescent le temps de s’acclimater à elle. Et ensuite, la mutation est
globalement appréciée et bien vécue par les intéressés…

N’y a-t-il pas cependant des cas où le phénomène est réellement une cause de mal-être ?
Il existe effectivement deux cas dans lesquels cet événement peut générer stress et angoisse : quand il se fait attendre ou quand au
contraire il vient trop tôt. Nous parlons ici du retard et de la précocité pubertaire, que tous les anciens manuels de psychologie et
de médecine identifiaient comme de possibles sources de « crise ».
Mais aujourd’hui, des études montrent que la précocité pubertaire (féminine) est de mieux en mieux acceptée, qu’elle flatte même
les jeunes filles. Cette génération, en effet, est fière de sa féminité. Les très jeunes filles formées s’empressent de revêtir des
vêtements moulants, d’aller dans des petites soirées festives. La maman d’Agathe (11 ans aujourd’hui, qui a eu de la poitrine à 8
ans et demi et ses règles à 10) estime que les petites adolescentes vivent très bien cette précocité, ne se prenant cependant pas
pour des femmes (contrairement à une opinion répandue).

Qu’est-ce que la culture adolescente ?


Cette culture, on en trouve les prémisses aux États-Unis, dès les années 1920-1930. Le jazz, un certain parler jeune, un style
vestimentaire caractérisent cette époque d’après-Première Guerre mondiale. Ces nouvelles manières juvéniles sont aussitôt
stigmatisées (plusieurs décennies plus tard, le rock et le rap le seront d’ailleurs pareillement). Milton « Mezz » Mezzrow, célèbre
jazzman, en témoigne dans son livre La Rage de vivre. À l’origine, se souvient-il, le jazz était perçu comme une « musique de
bordel faite par des nègres malfaisants ». Mais cette nouvelle musique est très vite récupérée par le système et devient pour les
grandes firmes un moyen de faire de l’argent (ainsi fera-t-on plus tard avec le rock et le rap, par exemple).
Après la Seconde Guerre mondiale, le monde économique se rend compte du pouvoir financier des « teen-agers ». Mode,
musique, cinéma, alimentation se mettent au service des goûts adolescents. Les filles portent à présent des chaussettes blanches,
les garçons des pantalons flottants. Les uns et les autres prennent leurs distances avec le monde adulte, parlent un argot
incompréhensible de lui.
Le phénomène « teen » se répand d’abord en Angleterre avant de débarquer en France : nous sommes toujours au début des
années 1950 et le jazz est toujours la musique rebelle de référence pour les jeunes « zazous ». Mais, bientôt, deux grandes figures
légendaires émergent en Amérique : Elvis Presley et James Dean. Une nouvelle musique rythmée, le rock and roll , remplace le
jazz. Un cinéma propre aux adolescents se met en place, dans lequel la nouvelle génération peut se projeter et s’identifier. Sur
scène, à l’écran, s’affirme le côté rebelle et antiautoritaire des nouveaux jeunes, affirmant des attitudes « contristes »,
d’opposition au monde adulte et à ses valeurs jugées « ringardes ».
On dit fréquemment que les adolescents ont une culture propre, et même des cultures selon leur origine sociale, leur âge, leur
sexe, leur niveau d’instruction… On énumère alors la palette des pratiques musicales, sportives, artistiques, récréatives, dans
lesquelles on retrouve tous ces jeunes : rap, rock, reggae, techno, pour la musique ; roller, skate, surf, pour les sports.
Voilà bien une façon inconvenante, surtout inappropriée, de parler de la « culture adolescente ». Celle-ci ne se résume pas en effet
à une collection de distractions du temps libre, ne se réduit pas à de l’amusement. Elle est autre chose, de plus large, de plus
signifiant. C’est, une véritable « manière de vivre », autrement que les adultes. C’est une manière d’être au monde et avec les
autres, une manière particulière de faire les choses. Elle a ses codes, ses symboles, ses valeurs, ses habitudes, ses projets. Elle a
son langage. C’est un MODE DE VIE.
L’adolescence, en réalité, c’est fondamentalement une mise en scène (sociale) de soi, pour soi, pour affronter l’autre. Elle
implique donc des marqueurs identitaires, comme autant de signes d’appartenance et de reconnaissance. Surgit avec elle un
langage, « pas tout à fait comme les autres », pas tout à fait comme le nôtre. Un langage dont Durkheim disait déjà qu’il ne
consiste pas à manifester la pensée du dehors, une fois qu’elle est formée, mais qui sert au contraire à la former. Langage cru,
agressif, des garçons, mais aussi parfois des filles, langage qu’il faut savoir décoder. Car il y a de la ritualité dans cet excès
langagier.
Cette culture adolescente est globale, trans-sociale et internationale. Elle concerne chaque adolescent, de chaque milieu, de
chaque pays (Occident en tête). Bien entendu, elle n’efface pas totalement les frontières sociales et culturelles, mais elle les
fragilise beaucoup. Les adolescents sont plus semblables que l’imaginent les adultes, plus solidaires qu’on le croit.
Le mode de vie adolescent fait en effet une large place aux groupes de pairs, garçons et filles, séparés ou pas (voir « Bandes
ordinaires », p. 79 ). On ne dira jamais assez combien l’esprit adolescent est d’abord un esprit pluriel, combien il est une manière
collective de prendre ses distances d’avec la famille qui reste lieu d’autorité et de contraintes.
La culture adolescente, pour nous résumer, c’est trois choses distinctes et complémentaires : un langage, une « présentation de soi
», des goûts et des pratiques distractives distinctives.
Cette culture se développe au sein des groupes de pairs évoqués plus haut – son terrain premier d’expression. Il y a là une mise en
scène (sociale) de soi, avec, répétons-le, usage de mots « pas tout à fait comme les autres », où le verlan, mâtiné d’argot ou de
termes français inventés ou de mots venus d’ailleurs (gitans, africains), domine largement.
La parure, avec la place centrale occupée par le vêtement, est aussi un signe identitaire fort. La préoccupation du paraître, dans
une société qui se veut d’abord d’apparences, est même essentielle. Le vêtement (voir « Vêtements », p. 264 ) permet d’affirmer
la virilité pour les uns, la féminité pour les autres. Bijoux, bracelets, tatouages et autres piercings viennent embellir ce corps que
l’on veut d’abord séducteur. Ainsi « marqués », les adolescents peuvent déambuler, MP3 ou iPod en poche, pour écouter leur
musique.
Adolescents que l’on retrouve dans des activités sportives et artistiques qui les passionnent, sans oublier aujourd’hui les activités
du numérique avec Internet.
Il y a pourtant un revers à cette médaille. Cette culture adolescente, librement choisie dans les années 1960, est devenue, pour
beaucoup de jeunes, surtout au collège, une culture contrainte, une culture qu’il faut épouser absolument pour ne pas être exclu de
la communauté des pairs. La conséquence en est le renforcement du divorce de la jeune génération d’avec la génération aînée.
Comme dit Edgar Morin : « Les générations cohabitent, mais n’ont plus guère de langage commun. »

Qu’est-ce que la socialisation de l’adolescence ?


La socialisation est cette opération qui consiste à faire entrer le social dans le mental. Pendant des millénaires, la socialisation
s’est faite, dans le cadre de l’éducation, par TRANSMISSION des parents aux enfants. Dans les sociétés traditionnelles, tout était
simple et clair. Le fils reprenait le travail du père, d’abord sous sa direction, puis à ses côtés, et finalement seul. Aujourd’hui, tout
est beaucoup plus compliqué. Les parents eux-mêmes d’ailleurs déplorent quelquefois de ne plus avoir grande influence sur leur
progéniture.
On sait aujourd’hui que les enfants, dans la construction de leur identité, sont soumis à un large faisceau d’influences extérieures
à la famille. Celle de l’école, celle des médias, qui créent de nouveaux champs de socialisation, échappant pour partie à l’emprise
parentale. École, pairs, médias injectent en permanence des informations au jeune public. Ajoutons encore qu’en raison de
l’investissement professionnel des femmes, le rôle des institutions éducatives d’État (crèches, écoles maternelles, équipements
socioculturels, de loisirs, de vacances) s’est considérablement accru. Ces institutions offrent aujourd’hui aux enfants une pluralité
de relations, de fonctions – plus ou moins cohérentes entre elles.
C’en est donc bien fini de la situation monopolistique du savoir des parents. Désormais, les enfants – et les adolescents – eux
aussi ont des savoirs à faire valoir, ils sont devenus des « sachant ». C’est patent dans le domaine des nouvelles technologies par
exemple où, souvent, ce sont eux qui enseignent aux parents – ce que ces derniers reconnaissent parfois, non sans une certaine
amertume : « J’essaie de suivre, mais je suis écœuré, dit un père. Pour tout ce qui est nouveau, ils ont une compréhension qui est
bien plus rapide que nous. »
Ce que l’on a coutume d’appeler quelquefois « la crise de la famille », c’est donc bel et bien avant tout une « crise de la
transmission ». Si chacun s’accorde en effet à reconnaître que la famille doit transmettre, que transmet-elle désormais ? Des
normes, des valeurs ? Mais lesquelles ? Peut-être la réponse tient-elle dans ce propos de Marcel Proust : « L’individu baigne dans
quelque chose de plus général que lui. À ce compte, les parents ne fournissent pas que ce geste habituel que sont les traits du
visage et la voix, mais aussi certaines manières de parler, certaines phrases consacrées, qui presque aussi inconscientes qu’une
intonation, presque aussi profondes, indiquent, comme elle, un point de vue sur la vie » (À l’ombre des jeunes filles en fleurs ).
Quoi qu’il en soit, la transmission « classique » est bel et bien en panne parce que les identités ne s’héritent plus, ne se
reproduisent plus par « passage de témoin » d’une génération à une autre. Dans nos sociétés, les identités se forment à partir de la
diversité des expériences et des situations dans lesquelles les individus sont pris. Albert Camus disait que les enfants doivent
aujourd’hui apprendre à vivre sans leçon et sans héritage.
Il est clair qu’à l’ère démocratique, en ce temps de « démocratie familiale », comme nous l’avons nommée, la transmission « par
le haut », par l’autorité, par l’imposition, a perdu de son efficience… et de sa légitimité.
En lieu et place de cette « transmission verticale », s’affirme, depuis trois ou quatre décennies, l’expérimentation. Par
tâtonnements, les adolescents s’inventent, de plus en plus librement, leur vie, peu enclins à reproduire systématiquement les
schémas et cultures de leur milieu d’origine. Le fils d’ouvrier n’est plus nécessairement ouvrier, le fils de médecin n’est plus lui-
même nécessairement médecin.
Quant aux transmissions, elles sont désormais d’abord horizontales. C’est la transmission entre pairs : l’on apprend de ses copains
et copines. C’est aussi la transmission entre frères (et sœurs). On ne dira jamais assez combien les fratries jouent un rôle
déterminant dans les apprentissages. Frères et sœurs sont à la fois accompagnateurs (dans les choix culturels) et initiateurs (dans
les domaines intimes, celui de la sexualité par exemple).
Nous résumerons ceci par le tableau suivant :

SOCIALISATION AUTONOMIE
Contrainte Liberté
Transmission par autorité Expérimentation par essais
Limites Repères
But : ressembler à l’autre (l’adulte) Devenir soi-même
Chapitre 3

Modèles éducatifs et méthodes de communication


La réalité familiale est celle d’un grand désarroi de nombreux parents, qui ne savent plus parfois à quel « saint thérapeute » se
vouer pour se tirer d’embarras avec leurs enfants. Conséquence…

Des consultations à tort et à travers…

“ Je suis frappé du nombre d’adolescents bien portants qui viennent consulter.„


UN PSYCHIATRE RENOMMÉ À PARIS .

Le chiffre-clé
Le nombre de consultations en psychiatrie infanto-juvénile publique a augmenté de 15 % entre 2007 et 2009.
Les parents consultent en effet beaucoup… pour tout et rien… à tort et à travers ! Courageusement, les psychiatres consultés
l’admettent volontiers. « Chacun, note l’un d’entre eux, Patrice Huerre, peut se mettre en alerte pour des broutilles, déclencher de
grandes manœuvres pour un petit problème qui autrefois se serait réglé dans le périmètre familial (questions d’autorité, de
débordement, absentéisme ponctuel, un joint de cannabis, abus d’ordinateur). » Il faut savoir qu’aujourd’hui plus de la moitié des
demandes de consultations dans les services pour adolescents concernent des questions scolaires.
Les parents consultent (beaucoup) pour les jeunes enfants, ils consultent (un peu moins) pour les adolescents. Ils viennent voir le
psychologue pour des questions de la vie quotidienne, d’alimentation, de sommeil, de scolarité, d’autorité, de précocité
intellectuelle…
Ce qu’ils attendent : de bons conseils généralement pour améliorer leurs relations avec leurs enfants. Car, bien sûr, les enfants ou
les adolescents dont il est question ici ne présentent que rarement des troubles psychiques avérés. Les problèmes posés relèvent
plus du pédagogue ou de l’éducateur que du psy.
Qu’est-ce qu’éduquer ? La source des difficultés des parents est là. S’il est acquis que la famille éduque, comment le fait-elle ?
Qu’est-ce qu’éduquer dans un monde où l’expérience des uns (les parents) n’est plus l’expérience des autres (les enfants), dans
une société où chacun se construit d’abord avec ses pairs ? Comment opère donc la transmission des uns (les aînés) vers les autres
(les cadets) ?
En l’espace d’à peine un demi-siècle, les manières éducatives ont bien changé. Au temps de la famille patriarcale (encore
régnante dans les années 1950), il allait de soi qu’éduquer, c’était avant tout faire obéir les enfants aux ordres que les parents leur
donnaient. L’autorité, perçue comme étant d’origine divine, n’était guère contestée ; en tout cas, sa légitimité n’était pas mise en
question.
Ce temps-là, qui était celui du « dressage », de l’inculcation des normes et valeurs, pour parler comme le sociologue Durkheim,
est révolu – en dépit d’une vague nostalgique, « à la Naouri », qui voudrait le ressusciter. Le monde a changé, la démocratie, nous
l’avons vu, s’est installée en famille. Qu’on le déplore ou non, l’éducation est devenue un dialogue, un échange entre parents et
enfants, un dialogue, il est vrai, souvent difficile, pour les uns comme pour les autres. Dans ce nouveau système, les parents
doivent en effet désormais convaincre leurs enfants que leur parole est bonne et juste, qu’ils ont raison dans leurs «
commandements ».
Quelles sont les méthodes d’éducation existantes et les modes de communication avec les adolescents ?
Disons d’abord qu’il n’existe pas de méthode d’éducation ou de communication qui ne repose sur une philosophie préalable qui
lui serve de point de départ et de justification.
La nôtre, que nous appelons donc « personnaliste », si, naturellement, elle ne méconnaît pas – mais sans les exagérer cependant –
quelques méfaits et tourments de l’adolescence (qui sont propres en réalité à tout âge de la vie), est fondamentalement « une
philosophie de bienveillance », qui n’a d’autre visée qu’une amélioration de la relation parents-adolescents. Cette philosophie
n’est pas subjectiviste, elle se nourrit au contraire, à chaque instant, des données objectives de la recherche scientifique.
L’enfant, en réalité, n’est plus seulement, en 2013, objet de l’éducation qu’il reçoit, il est aussi sujet de cette éducation qu’il
contribue à élaborer lui-même. L’enfant de la « démocratie familiale » veut dorénavant une éducation qui, en quelque sorte, passe
« inaperçue », il ne veut plus être enfermé dans un cadre strict d’ordres et d’interdictions, il veut comprendre pourquoi il doit
obéir. Et puis, surtout, il veut pouvoir développer toutes ses capacités créatrices dans un climat de confiance et de sécurité. Voilà
ce que veut l’enfant moderne.
Allons plus loin. Éduquer, n’est-ce pas d’abord montrer l’exemple, être un « bon exemple » ? Bruno Bettelheim dit
qu’aujourd’hui comme jadis, la tâche la plus importante – et aussi la plus difficile – de l’éducation est d’aider l’enfant à donner
un sens à sa vie, mais de le faire discrètement, car la meilleure éducation est toujours celle qui passe inaperçue.
La mission des parents est bien de préparer « la sortie » des enfants. On se souvient de ce propos de Rousseau : « Les enfants ne
restent liés au père qu’aussi longtemps qu’ils ont besoin de lui pour se conserver. Sitôt que ce besoin cesse, le lien naturel se
dissout » (Émile ou de l’éducation, 1762).
Qu’en est-il de l’adolescence ? L’on communique d’autant mieux avec un adolescent que l’on est « désintéressé » à son égard,
c’est-à-dire qu’il n’y a pas un enjeu de pouvoir derrière la relation que l’on a avec lui, ce qui permet sans doute de dire que les
parents sont à l’évidence les adultes les plus mal placés pour cet exercice de communication. C’est pourquoi, d’ailleurs, les
adolescents recherchent de préférence le dialogue à l’extérieur de la maison, avec les grands-parents, des amis des parents, des
oncles, des tantes…
L’abécédaire qui suit est imprégné de l’esprit personnaliste. Lui seul rend possible l’émergence d’une vraie communauté familiale
où chacun, pleinement conscient de soi et des autres, se met alors au service du groupe tout entier. Un parent d’adolescent doit
toujours avoir une conduite bienveillante envers « son » adolescent. Il doit faire preuve de sympathie, avoir, pour reprendre le
mot de Rogers, une « considération positive inconditionnelle » à son égard, être toujours dans la compréhension envers lui, ce que
le même Rogers nommait « compréhension empathique ». Il doit aussi pouvoir dire à l’adolescent, dont l’attitude lui déplaît,
qu’en pareille circonstance il aurait peut-être eu la même attitude que lui – ce qui ne la légitime pas pour autant. Il doit aussi et
enfin accepter de transformer ses propres comportements. Les parents n’admettent pas facilement que les enfants ou les
adolescents puissent avoir leur personnalité propre, leur propre manière de penser, leurs propres idées. Ce n’est pas facile, pour
eux, de changer d’attitude. Se transformer en effet, même pour un parent, c’est d’abord perdre ses repères. C’est déplaisant,
insécurisant même. Mais, en 2013, il n’y a pas d’autre choix.
Chapitre 4

Différents âges d’adolescence


Nous définissons, dans ce chapitre, trois âges d’adolescence et de jeunesse (ou « post-adolescence ») : les 8-12 ans, les 13-14 ans
et les 15-18 ans. Chaque fois que nécessaire (et possible naturellement), nous ferons, dans nos recommandations et/ou conseils
aux parents de la seconde partie, les distinctions qui s’imposent.

Et d’abord, combien sont-ils ?


Le nombre d’adolescents (et/ou de jeunes) varie selon la tranche d’âge retenue. Si l’on adopte la définition de l’ONU, la planète
compterait actuellement (en 2009) un milliard et demi d’individus de 10-19 ans, ce qui représente 18 % de la population mondiale
(soit un doublement par rapport à 1950), mais constitue seulement 12 % de la population des pays industrialisés.
Dans leur grande majorité (88 %), les 10-19 ans vivent dans des pays en développement (la moitié en Asie du Sud et de l’Est et
dans le Pacifique).
Il y a plus de garçons que de filles dans quasiment tous les pays. Et les 10-19 ans se répartissent pour moitié en ville pour autre
moitié à la campagne (mais l’on estime qu’en 2050, 70 % d’entre eux vivront en zone urbaine).
La France, selon les données de l’INSEE (2006), compte, quant à elle, un peu plus de 11 millions de 0-14 ans et 4 millions de 14-
19 ans. À la rentrée 2006 (derniers chiffres disponibles), environ 5,5 millions étaient scolarisés : 3,2 millions l’étaient dans les
collèges et 2,3 millions dans les lycées publics et privés dépendant de l’Éducation nationale.

Adolescents dès 8-9 ans


Nous l’avons vu précédemment, les adolescents sont de plus en plus jeunes. Ce rajeunissement est attribué à la précocité
pubertaire. Il est vrai que, dans les pays occidentaux, la puberté survient de plus en plus tôt. Aujourd’hui, l’on estime qu’une
puberté « normale » commence à 13 ans chez le garçon, à 11 ans chez la fille et dure, en moyenne, de deux à trois ans. Ce
phénomène de précocité pubertaire, signalé au début des années 1960, faisait alors dire à un observateur : « Si cela continue, dans
quelques années, ces filles seront pubères à l’âge des poupées et les garçons à l’âge des billes » (Pierre Gascar, Vertiges du
présent, 1962). La réalité est que, probablement, nous avons gagné de deux à trois ans sur le démarrage du mécanisme
physiologique, ce qui paraît être dû à la fois à une meilleure alimentation et à de meilleures conditions de vie générales. Une
chose est sûre, déjà signalée par Buffon au XVIII e siècle, l’entrée en puberté des filles reste plus rapide que celle des garçons.
Qu’à cela ne tienne, le fait essentiel est de toute façon ailleurs. L’adolescence actuelle débute avant l’apparition des caractères
sexuels secondaires. Ce n’est pas en effet la puberté qui déclenche le processus d’adolescence, mais l’identification culturelle. À
l’issue d’une étude, que nous avons menée entre 1995 et 2001, avec la psychosociologue Marie Cipriani-Crauste, auprès d’un
groupe de 30 garçons et filles suivis du CM2 à la classe de seconde, nous avons pu montrer que l’entrée dans l’adolescence se
faisait par projection et immersion dans l’univers culturel des « grands pairs ». Un univers valorisé par le système médiatico-
commercial qui pousse les enfants aux consommations précoces. Démonstration : en juillet 2012, l’Institut des mamans, qui avait
interrogé 300 mères d’enfants de 1 à 6 ans, révéla que sur les 57 % qui possédaient un smartphone et les 19 % une tablette, 85 %
déclaraient que leur enfant était attiré par leur appareil et 80 % qu’ils l’utilisaient.
D’où, chez les enfants, très vite, cette revendication d’adolescence, qui les fait vouloir s’échapper rapidement du monde étroit et
jugé peu glorieux de l’enfance. De plus en plus tôt par conséquent, l’enfant ne veut plus l’être. Il veut être adolescent.
Conséquence : celui ou celle que l’on s’entête encore à qualifier de « gamin » ou de « fillette », à 8 ou 9 ans, ne l’est plus tout à
fait.
Nouveau langage, nouveaux codes vestimentaires, nouveaux goûts (sportifs, musicaux, alimentaires…) forment l’armature de ces
« petits » ou « jeunes » adolescents (débarrassons-nous au passage du terme « préadolescent » qui n’a aucun sens chez les
scientifiques).
Cette idée de rajeunissement de l’adolescence, vérifiée chaque jour par l’observateur, est certes une « pilule » dure à avaler pour
les parents. Fini désormais le petit chéri obéissant ! Le 8-9 ans veut du respect, qu’on ne le traite plus comme un « bébé ». Il se
méfie désormais de ces manifestations trop démonstratives d’affection. Lui, si désireux de sortir de sa « condition d’enfant »,
trouve à présent ces gestes d’amour terriblement humiliants et « déplacés ».
Le passage précoce à l’adolescence est difficile à accepter également par les médias. Prenons-en pour preuve les titres des papiers
de la presse écrite relatant les suicides en cascade de garçons de 10-11 ans au début de l’année 2011. Ouvrons Le Parisien. Voici
quelques titres : « Un enfant de 11 ans se suicide » (28/01/2011) ; « Encore un enfant de 11 ans qui se suicide » (10/02/2011).
Dans Libération à présent : « Suicide des enfants : comprendre l’impensable » (29/09/2011), Métro : « Un enfant (10 ans)
retrouvé pendu » (26/10/2011), 20 minutes pour conclure : « L’enfant de 11 ans a été hospitalisé à Marseille dans un état grave »
(27/05/2011).
Pourquoi cette difficulté, surtout des parents, à admettre ce changement d’âge et à appeler « ado » un sujet de 10 ou 11 ans ?
Dans la représentation commune (qui est aussi celle des « psys »), l’enfant reste défini par sa taille (qui est petite), tandis que
l’adolescent, lui, l’est avant tout par son esprit , qui est mauvais, dit-on, à tout le moins imparfait. C’est pourquoi, par réflexe et
habitude, les parents, et les adultes en général, refusent à celui qui est petit par la taille le nom, pour lui prestigieux, d’adolescent.
Ce qui est tout à fait curieux comme raisonnement. Il faudrait donc une certaine taille, peut-être 1,50 m (ou plus), pour ne plus
être un enfant. Chacun voit l’absurdité de cette définition. Tout juste consent-on à qualifier cet « enfant » de « préadolescent »
(terme, répétons-le, impropre). Les parents ne sont pas dupes en effet, ils sentent bien qu’un changement est à l’œuvre chez leur
enfant, mais se refusent à aller plus loin dans les appellations d’âge.
La vérité dans cette histoire, répétons-le, est que l’enfant, de plus en plus tôt, n’a qu’un souci : s’évader de son enfance. Il en a
assez d’être commandé, surveillé, contraint à dire ou à faire ce qu’il ne veut pas dire ou faire. Il veut, sinon une pleine liberté, du
moins une autonomie conséquente : voir ses amis, les recevoir… Il est fin prêt pour l’opération de transformation. Le temps est
venu pour lui de changer son « look », d’adopter de nouvelles façons de faire et d’être. La transformation pubertaire viendra plus
tard.
Ainsi, à la manière du jeune animal qui s’imprègne de sa mère et finit par lui ressembler, le 8-9 ans, que l’on peut appeler au
choix « petit adolescent » ou « jeune adolescent » s’imbibe des manières de ses aînés, qui ont 13, 14 ans (voire un peu plus). Il
reproduit tout ce qu’il peut de leurs façons de parler : vive le verlan, les « meufs », les « teufs » ; de leurs façons de se vêtir : vive
les luxueux vêtements de marque, les Nike, Adidas, Diesel ; de leurs façons de s’amuser : vive la glisse urbaine, le skate ou le
basket de rue, les sorties avec les copines ! Alors, évidemment, à force de ressembler à plus grand que lui, le 8-9 ans devient cet
autre qu’il envie tant.
Et puis, il grandit ; cet enfant qui, au cours primaire, rêvait d’adolescence, à son entrée au lycée, de cet âge il ne veut plus. Après
le DÉSIR, le DÉNI. Les « années-collège » referment la parenthèse de l’adolescence. Ayant gagné en maturation, en capacité de
résistance, à l’ordre parental et au conformisme générationnel, le lycéen éprouve désormais un nouveau sentiment, le « sentiment
de jeunesse ». Il entre dans la « première jeunesse ».
Bien sûr, comme l’adolescence, mais pour d’autres raisons, la jeunesse a mauvaise réputation. À relire l’Histoire depuis la plus
haute Antiquité, on l’a toujours tenue en mésestime. Dans les années 1950-1960, les jeunes passaient encore fréquemment pour
des « tricheurs » ou des « blousons noirs ». Ils sont aujourd’hui jugés « sauvageons », « lascars » ou « voyous ». Sans compter le
soupçon de fierté, d’insouciance, d’impétuosité, ou d’impatience qu’on leur attribue volontiers.

L’adolescent est un sujet… normal et bien portant


Puisque l’adolescence n’est pas une maladie (tous les psys et les médecins le disent), l’adolescent n’est pas un malade. C’est vrai
: dans la grande majorité des cas, l’adolescent est un être bien portant (seuls, apparemment, 10 à 15 % d’entre eux présentent des
signes pathologiques).
Redisons-le : contrairement à ce que l’on dit, il n’y a, dans cette population, que très peu de boulimiques, d’anorexiques, de
suicidants ; les parents peuvent dormir sur leurs deux oreilles ! Car la probabilité que leur fille devienne anorexique ou leur fils
complètement dépressif reste très, très faible. Mais, bien entendu, il faut rester vigilant !
De toute façon, les proportions 80-20 ou 85-15 n’ont pas grand sens de nos jours de crise économique, familiale, etc. Ce sont bien
aujourd’hui 100 % des adolescents qui, à un moment ou un autre de leur adolescence, vont croiser une ou plusieurs difficultés de
vie : familiale, scolaire…
PARTIE 2

L’ADOLESCENCE AU QUOTIDIEN
Chapitre 1

Conseils généraux avant d’ouvrir l’abécédaire


Nous allons présenter cette « Adolescence au quotidien » sous la forme d’un ABÉCÉDAIRE. Précisons immédiatement que l’on
ne trouvera pas ici (ou fort peu) ce que l’on a coutume de trouver dans les abécédaires des manuels ou guides classiques de
l’adolescence (adolescence « à problèmes » en fait), manuels constitués pour une très large part de mots exprimant la « pathologie
», le « mal-être », la « souffrance ». Inutile de chercher dans ce texte ces nombreux termes stigmatisant, comme « crise
d’adolescence » (terme que nous avons évoqué, on s’en souvient, dans les grands concepts), « deuil de l’enfance », « opposition
», « agressivité », « pulsions incestueuses », c’est-à-dire, répétons-le, tout un vocabulaire psycho-médical, qui appartient au
registre de l’adolescence pathologique .
À travers le choix de nos MOTS-CLÉS, nous ne visons pas, prioritairement du moins, les cas lourds de l’adolescence qui relèvent
du traitement thérapeutique, mais les problèmes relationnels qui expliquent les tensions et conflits, qui peuvent quelquefois se
développer à cet âge de la vie.
Tous les mots retenus n’ont pas une place égale dans le texte. Certains mots sont importants, majeurs même, comme besoins,
sexualité… ; ils auront donc les développements qu’ils méritent. D’autres, au contraire, parce qu’ils indiquent un simple moment
de vie, une situation particulière, n’auront pas le même « traitement de faveur ».
Derrière chaque MOT-CLÉ, il y a entre parents et adolescents une possibilité de conflit. D’où ces quelques conseils généraux
préliminaires.

Premier conseil
L’on n’aborde jamais un conflit en désignant à l’avance le coupable, et on ne le résout pas davantage en indiquant tout aussi
préalablement celui qui doit en sortir vainqueur – « évidemment », vous, le parent. Un conflit bien résolu est un conflit où il n’y a
ni vainqueur ni vaincu. Chacun est un peu gagnant, un peu perdant : c’est affaire de proportions, mais, bien sûr, de justes
proportions.

Deuxième conseil
Il est essentiel, quand vous vous adressez à « vos » adolescents, que vous vous pénétriez, dès à présent, selon la terminologie du
thérapeute Thomas Gordon, des messages « je » ; que vous éliminiez les messages « tu ». Rappelons que le message « je » est
celui qui permet au locuteur de mettre en avant ses propres sentiments, par exemple l’agacement, la colère, la frustration…, tandis
que le message « tu » est un acte d’accusation contre les enfants pour leur signaler généralement un « vilain défaut ».

Troisième conseil
Il faut user à l’égard des enfants et des adolescents d’un langage POSITIF, à tout le moins NEUTRE, jamais d’un langage
NÉGATIF.
Quelques exemples qui vous aideront à mieux comprendre mon propos :

Mots à ÉVITER Mots à EMPLOYER


Contrainte Confiance
Crise Désaccord
Limites (poser des) Repères (donner des)
Interdits (fixer des) Loi civile, pénale (faire connaître la)
Responsabiliser Responsabilités (confier des)
Frustration Choix (appendre à faire des)
Il s’oppose Il s’affirme

Quatrième conseil
Faites preuve le plus possible d’empathie. Imaginez ce que vos enfants peuvent ressentir. N’hésitez pas à leur parler de vous au
même âge, parce qu’après tout vous faisiez un peu la même chose, non ?
Chapitre 2

Abécédaire
Voici donc 100 grandes ou petites questions concernant l’adolescence, présentées dans un abécédaire recensant les mots-clés liés
aux problématiques relationnelles rencontrées par les adolescents et leur entourage.
Chaque thème de cet abécédaire est développé en 3 volets :
« Bon à savoir » : l’essentiel de ce qu’il faut savoir sur le sujet qu’il sous-tend ;
« Dangers » : ce qu’il semble vraiment déconseillé de dire ou faire ;
« Propositions » : enfin ce qu’au contraire il serait opportun de dire et/ou faire.
Nous espérons que ces éclairages et conseils vous permettront de mieux comprendre et appréhender cette période essentielle de la
vie qu’est l’adolescence.
Adoption

Bon à savoir
Jouant sur les mots, nous pouvons dire que tout adolescent, à l’entrée dans l’âge d’adolescence, a besoin d’être « adopté » à
nouveau par ses parents. Le terme est pris ici, évidemment, dans le sens commun d’« accueilli », de « reconnu », dans toute sa
différence d’avec l’enfant. C’est en effet une personne nouvelle qui surgit sur la scène familiale, et qu’il va falloir traiter
comme telle.
Mais venons-en à l’« adopté » au sens juridique du terme. Nous savons qu’il y a des adoptés en France (à l’issue d’une
procédure longue et aléatoire) et des adoptés à l’étranger (Asie, Amérique latine).
L’adopté a les mêmes droits que l’enfant biologique. Il fut même des temps, à Rome par exemple, où l’adoption était la règle
dans les familles fortunées, où l’adopté était même considéré comme plus légitime que l’enfant par le sang.

Dangers

Tous âges
— Traiter différemment, même ponctuellement, les enfants adoptés des autres enfants de la fratrie. Sous le coup de la colère,
de vilaines paroles, qui seront vite regrettées, peuvent être prononcées : « Décidément, mon garçon, tu n’as pas notre caractère,
et l’on connaît la raison, toi comme moi ! ».
— Cacher aux enfants qu’ils sont des enfants adoptés est aussi à éviter. Tous les spécialistes s’accordent à dire que la
révélation de l’adoption doit être faite, avec toute la douceur qui s’impose, le plus rapidement possible. C’est une racine que
l’enfant recherche, pas forcément un nouveau père ou une nouvelle mère. Cet enfant vous aime, mais il a le droit de connaître
ses origines. Il y va de son équilibre actuel et futur.

Propositions

Tous âges
Seul l’amour compte. Or la plupart des parents d’enfants adoptés aiment ces enfants comme les leurs propres. Occasion de
redire ici, après Rousseau, que les liens du sang sont peu de chose par rapport aux liens du cœur.
Adultes

Bon à savoir
Il est normal de placer l’adulte aux premiers rangs de cet abécédaire. N’est-il pas le premier personnage du quotidien de
l’adolescent, au lever avec les parents, puis dans la journée en classe avec les professeurs ?
L’adulte, dit-on, serait la « bête noire » des adolescents. Ils n’en voudraient plus dans leur vie et, l’adolescence venue,
rejetteraient les plus proches d’entre eux : leurs géniteurs. Rien n’est plus inexact. Il y a là un premier malentendu entre les
deux générations. Selon un sondage Ipsos Santé, effectué en mars 2012 auprès de 805 jeunes âgés de 15 à 18 ans, 85 %
d’entre eux considèrent qu’ils ont besoin des adultes et près de la moitié souhaiterait même avoir plus d’échanges avec eux.
S’agissant des parents, 92 % des jeunes sondés comptent d’abord sur leur mère pour devenir adulte et 74 % sur leur père, enfin
58 % sur leurs amis. Du côté des adultes, en revanche, les sentiments sont très différents, inverses même. Les trois quarts sont
persuadés que les jeunes n’ont pas besoin d’eux et une même proportion estime que ces derniers comptent d’abord sur leurs
amis pour devenir adultes à leur tour. Un dernier mot. Si malmenée dans nombre d’études, la figure du père est pourtant une
référence pour 83 % des adolescents « bien portants » (pour seulement 57 % de ceux qui éprouvent un mal-être).
Mais « besoin d’adultes » ne signifie pas « ingérence » ou « domination » de leur part. Il faut se souvenir qu’à l’âge de
l’autonomie (ce qu’est fondamentalement l’adolescence), les adolescents doivent désormais concilier l’impératif de libre
disposition de soi avec la présence d’aînés qui, reconnaissons-le, peuvent quelquefois se montrer souvent encombrants ou
intrusifs.

Dangers

Tous âges
Ne vous comportez pas avec vos enfants, quel que soit leur âge, en adultes « tout-puissants », convaincus de savoir tout sur
tout, d’être, en raison de votre âge, de votre statut de parents précisément, de votre expérience acquise avec les ans, les «
maîtres de la pensée ». Sachez que nul n’a raison sur tout, toujours. La valeur, faut-il le rappeler, n’attend pas le nombre des
années !

Propositions

Tous âges
Sachez faire preuve d’une grande humilité. La modestie, qui n’est pas la faiblesse, n’a jamais nui à personne. Personne ne
vous demande d’abandonner vos convictions ni vos préférences éducatives. Mais souvenez-vous que l’on n’IMPOSE rien à un
adolescent. On ne peut que lui proposer des pistes de vie et de comportement, lui suggérer des valeurs et des principes
auxquels l’on croit : c’est même votre droit, et votre devoir !
Affirmation

Bon à savoir
Pouvoir s’affirmer est le premier désir et la première préoccupation de l’adolescent. Ayant découvert qu’il avait une « pensée
propre » (voir « Penser »), distincte de celle de ses parents, il veut naturellement les prendre à témoin de son nouveau «
pouvoir ». Ce n’est pas simple. Ces derniers préfèrent souvent que leur « enfant » continue à penser comme eux. Le
philosophe Alain disait (dans Propos d’un Normand ) que souvent, dans les conversations, l’on n’avait d’autre moyen
d’affirmer sa liberté que de contredire. Il y a en effet, ajoutait-il, un ton dogmatique, insupportable, qui veut faire entendre que
la discussion n’est pas admise. Voici précisément le piège dans lequel se retrouve enfermé l’adolescent. Ne pouvant
s’affirmer, il ne va avoir d’autre choix, pour se faire entendre, que de « s’opposer ». C’est l’« opposition réactive ».

Dangers

8-12 ans
Il ne faut pas contrarier le besoin d’expression de vos enfants, surtout dès lors qu’ils n’en sont plus ! Puisque ces garçons et
filles pensent désormais par eux-mêmes, ils expriment, à l’occasion, des désaccords avec vous sur tel ou tel sujet. C’est la loi
du vrai dialogue. Il n’est pas pire chose qu’un parent qui croit avoir raison en tout en toute circonstance (ce qui est le propre de
l’Homme, grand vaniteux), qui estime que ce n’est tout de même pas un « plus petit que lui » qui va faire la loi à la maison !

Autres âges
Ne contrariez pas leur point de vue, ne cherchez pas à annihiler leur esprit critique. S’expriment-ils avec virulence, ne leur en
tenez pas rigueur. Il est si agréable de développer des idées toutes neuves.

Propositions

Tous âges
Il faut laisser les adolescents dérouler leur propos, en considérant que, s’ils n’ont pas toujours raison dans ce qu’ils disent, ils
n’ont pas toujours tort non plus. Le vrai dialogue est celui qui accepte la parole de l’autre comme pouvant être vraie.
Agressivité

Bon à savoir
L’âge de l’adolescence, dit-on couramment, est celui de l’agressivité (pouvant conduire, dans certains cas, à des actes
d’agression). La cause en serait le réveil des pulsions, une déferlante d’émotions incontrôlées. Voici bien encore une idée
reçue que les faits ne confirment guère depuis le temps qu’on les énonce.
Ce que les adultes nomment « agressivité » n’est souvent qu’une attitude de désaccord, plus ou moins bruyant, manifesté par
l’adolescent, en telle ou telle circonstance.

Dangers

Tous âges
On ne répond pas à l’agressivité par l’agressivité. La sérénité est le meilleur argument. Et puis n’oubliez pas que l’agressivité
peut dissimuler une souffrance qu’il faut débusquer au plus vite pour éviter que le mal-être n’empire.

Propositions

Tous âges
Il faut relativiser. Dire par exemple que nul n’est à l’abri d’un mouvement d’humeur. Que vous-même, dix fois par jour, êtes
tenté de perdre patience. Il est rassurant pour un adolescent d’entendre dire que l’agressivité est la chose du monde la mieux
partagée, qu’il n’est pas, lui seul, « anormal » de ce seul fait.
Alcool

“ Beaucoup de jeunes de quinze à vingt ans, lorsqu’ils sont réunis, veulent jouer à l’adulte en absorbant des apéritifs, des cocktails, des digestifs, du
gin ou du whisky…

HENRI JOUBREL, MAUVAIS GARÇONS DE BONNES FAMILLES

Bon à savoir
Les adolescents boivent un peu, beaucoup, passionnément, à la folie (« binge drinking »)… ou pas du tout, car, contrairement
à une idée reçue, les adolescents français, globalement, ne boivent pas (ou très peu), en tout cas pas régulièrement (tous les
jours).
Ceux qui boivent, en revanche, le font plus tôt qu’autrefois. Dès 2003, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) observait
que partout en Europe la consommation d’alcool augmentait entre 11 et 15 ans, avec une préférence pour la bière et les
spiritueux. À 11 ans aujourd’hui, 60 % ont déjà bu de l’alcool, 72 % à 13 ans, 84 % à 15 ans (chiffres extraits de l’enquête
internationale du Health Behaviour in School-Aged Children de 2006)… et 91 % à 17 ans (ce dernier chiffre est issu de
l’enquête Escapad de 2011).
Ceux qui boivent le font de plus en plus régulièrement (+ 18 % entre 2008 et 2011), et cela concerne aussi bien les filles que
les garçons, mais seuls ces derniers avouent une consommation « quotidienne ».
Le collège reste la période de l’expérimentation de l’alcool. Il faut dire que boire de l’alcool n’est plus considéré comme un
tabou (on boit donc dans la rue sans scrupule et même quelquefois dans l’enceinte du collège). Huit élèves sur dix environ
déclarent ainsi avoir déjà bu de l’alcool une fois dans leur vie (ce qui n’est pas beaucoup, convenons-en). Mais, heureusement,
seuls 7 % des troisièmes reconnaissent une consommation « régulière » et 15 % un état d’ivresse. Selon l’enquête Escapad
précitée, menée lors de la Journée d’appel de préparation à la défense, 28 % des jeunes de 17 ans admettent avoir été ivres au
moins trois fois dans l’année. Ces chiffres, resitués sur l’échelle européenne, placent la France à une intéressante 25e place sur
39 pays observés. Notons, à titre de comparaison, que 38 % des jeunes Tchèques de 15 ans par exemple, boivent de l’alcool au
moins une fois par semaine.

Le phénomène d’hyperalcoolisation
Un danger guette cependant les adolescents de 15-18 ans et même, de plus en plus, les 13-15 ans : le fameux binge drinking,
phénomène venu d’Angleterre qui consiste à absorber – souvent en soirée – un maximum d’alcool en un minimum de temps.
La France a découvert ce phénomène au début des années 2000. En 2006, la presse quotidienne lui a consacré de nombreux
papiers (voir par exemple Le Parisien du 9 novembre 2006).
Le week-end ou pendant les vacances, avant de partir en soirée, l’on passe donc au supermarché acheter une bouteille de
pastis, de whisky ou de vodka.
Divers facteurs peuvent être mis en avant pour expliquer cette alcoolisation (relative) : la pression ou l’échec scolaire, les
exigences sociales poussant à la performance… L’alcool devient une sorte d’antidote au stress (qui est considérable) ; il
permet de mettre entre parenthèses, d’« anesthésier » en quelque sorte un présent trop lourd à supporter pour cette génération.

Dangers

8-12 ans
— Comme souvent, la « leçon de morale » que vous pourriez être tenté de faire à « votre » jeune adolescent n’est pas une
bonne réponse, à moins que sur le sujet vous ne soyez totalement exemplaire (en ne buvant pas vous-même, par exemple).
Indiquez seulement que l’alcool est une drogue qui modifie les comportements, peut rendre violent, et pas seulement les
jeunes, ajouterez-vous alors.
— Sachant que l’alcoolisation commence aujourd’hui en moyenne à 11 ans, évitez toute initiation précoce. On sait combien, à
l’occasion de fêtes, d’anniversaires, l’on peut être tenté de faire boire aux enfants un « fond » de champagne ou quelques
gouttes de vin, en leur disant qu’ils sont des « hommes » à présent (vieux rite culturel du vin). À ne pas faire. Plus un enfant
ou un adolescent commence à boire tôt, plus il augmente le risque de devenir plus tard un gros buveur. En effet, l’alcool
marque les circuits du plaisir dans les zones limbiques du cerveau. Et, si ces circuits prennent l’habitude de se déclencher avec
l’alcool, le risque de dépendance s’accroît considérablement.
13-14 ans
— Une fois encore, ne faites pas de sermon, insistez plutôt sur les dangers de l’alcool, l’accoutumance au produit. Dites
combien vous regrettez d’avoir commencé vous-même à boire (même modérément) trop tôt, que vous l’avez regretté ensuite.
Notez que l’on peut s’amuser sans boire (certaines discothèques organisent, pour les plus jeunes, des après-midi dansantes «
Coca-Cola »). Dites, vous qui ne buvez pas, qu’il n’y a pas de honte à ne pas boire, et puis que certaines pratiques (comme le
sport auquel vous vous adonnez) ne sont guère compatibles avec la prise d’alcool.
— Enfin, soyez conscient que tout encouragement à boire à la maison est néfaste. Une étude menée en 2011 aux Pays-Bas sur
428 familles (avec deux enfants par foyer âgés de 13 à 15 ans) le démontre. Plus les adolescents sont autorisés à boire chez
eux, plus ils auront tendance à boire à l’extérieur. Boire devant ses enfants pour leur donner l’exemple d’une consommation
maîtrisée est donc à proscrire.

15-18 ans
Garçons et filles sont devenus des jeunes gens et des jeunes filles à présent. Il ne servirait à rien, pour cette tranche d’âge, de
proclamer l’interdiction totale de consommation d’alcool. Une bière, de temps en temps, fait partie des habitudes non
dangereuses, des habitudes de groupe, de la convivialité. Mais attention au binge drinking déjà signalé, il peut causer des
dégâts énormes comme des comas éthyliques, suivis quelquefois de décès.

Propositions

8-12 ans
Faites comprendre qu’il y a un âge pour tout, un âge pour ne pas boire (le leur), un âge pour boire un peu. Il est important que
vous rappeliez que beaucoup de gens, jeunes ou adultes, s’amusent, y compris dans des soirées, ou avec des amis, sans
nécessairement boire jusqu’à l’enivrement. Dites aux 8-12 ans que dire « non à l’alcool », c’est faire preuve de force de
caractère, et ne pas être un mouton.

13-14 ans
Les arguments avancés pour les plus jeunes sont encore valables pour cette tranche d’âge.

15-18 ans
Reprenant le slogan bien connu, dites que l’alcool doit en toute circonstance être consommé avec modération. L’excès seul est
blâmable. « Boire un petit coup est agréable, mais il ne faut pas rouler dessous la table », comme dit la chanson. Un petit verre
de vin n’a jamais tué personne, la médecine le recommande même pour ses vertus thérapeutiques.
Alimentation

Bon à savoir
À l’extérieur de la maison, les adolescents de tous âges aiment pratiquer le « snacking ». Selon l’enquête « Ado Food, une
assiette sous influence », qui a été réalisée par Consofood de KantorMedia, fin 2010, ils sont ainsi 69 % (des 8-19 ans) à
grignoter un peu toute la journée (mais ce chiffre est en baisse). Par ailleurs, 87 % des jeunes de cet âge sont allés au fast-food
au moins une fois dans les douze derniers mois (un chiffre en augmentation par rapport à 2006). Près de 40 % des adolescents
interrogés affirment même y aller deux ou trois fois par mois. À la maison, il semble que le petit déjeuner, avec céréales et
chocolat chaud, reste très apprécié des 8-19 ans. Le goûter en revanche est une pratique alimentaire en recul : ils ne sont plus
que 71 % à en prendre un de manière régulière contre 80 % en 2006. S’agissant des grands repas équilibrés, si l’on en juge par
les résultats de l’enquête de 2012 de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, la situation est plutôt bonne.
La consommation quotidienne des fameux « 5 fruits et légumes » est en hausse, depuis 2006, chez les 11-15 ans : 39 % contre
31 % chez les 11 ans, et 45 % contre 42 % chez les 15 ans.

Dangers

Tous âges
Il ne sert à rien de stigmatiser la restauration rapide, de type McDo. Ne la condamnez pas ! Ces espaces de restauration sont
des lieux de convivialité pour les adolescents. Mais restez fermes sur les « 5 fruits et légumes » et continuez à traquer le
grignotage.

Propositions

Tous âges
Certains aliments sont indispensables à une bonne croissance. À la maison, ne négligez pas les protéines (viandes, poissons,
œufs…) qui sont indispensables au développement musculaire et qui, riches en fer, constituent un remède efficace contre la
fatigue et l’anémie. N’oubliez pas non plus les produits laitiers tout aussi nécessaires, mais qui doivent être consommés avec
modération (ce qui n’est pas toujours le cas). Pour le calcium, les nutritionnistes recommandent les légumes (brocolis,
épinards fenouil). Une tranche de jambon ou un steak haché, une portion de pâtes, une salade de tomates, voilà un exemple de
bon repas. L’idéal, bien sûr, est de manger à heures fixes, d’éviter de grignoter entre les repas et de prendre ses repas à table. À
l’extérieur, suggérez à votre enfant adolescent de consommer tout de même McDo avec modération. S’il préfère les
sandwicheries, conseillez-lui de choisir des sandwiches avec des protéines (thon, poulet) et des légumes. Manger équilibré est
assurément essentiel.
Amitié

“ Amitiés sans replis qui sont le privilège de l’adolescence.„


DANIEL-ROPS, MORT, OÙ EST TA VICTOIRE ?

Bon à savoir
L’adolescence est le temps des grands sentiments. Amour et amitié y occupent une place essentielle. On sait la place de choix
occupée par « la meilleure amie » dans la vie des filles. Les amies se font des confidences, se confient leurs peines, mais aussi
leurs joies. Rien de vraiment comparable chez les garçons, dont la préférence va à la « bande de copains », plus qu’à un «
meilleur ami ». Le temps des solides amitiés, chez eux, viendra plus tard.
Car il y a amis et amis. Les vrais et les faux. Les « amis » sur Facebook sont généralement de « faux amis », à peine des
relations. Heureusement, plus de 80 % des jeunes de 15 ans déclarent avoir, dans la vie réelle, trois véritables amis (ou plus), à
qui ils peuvent se confier. S’agissant d’Internet et des réseaux sociaux, ne leur jetons pas trop vite la pierre. Ils permettent tout
de même aux adolescents timides de se risquer à la relation, ce qui peut leur servir de terrain d’apprentissage pour nouer
ensuite, inhibition levée, de véritables relations à l’extérieur.

Dangers

Tous âges
Interdire à vos enfants la fréquentation d’untel ou d’unetelle, au motif qu’il ou elle ne vous plaît pas, n’est pas chose
raisonnable. Cette interdiction est d’autant plus inopportune si l’ami ou l’amie choisie n’a rien à se reprocher, sinon un « genre
» (qui peut être vestimentaire) qui ne vous plaît pas. Si les fréquentations de vos enfants vous paraissent « louches », engagez
le dialogue avec eux, informez-vous sur ce que les amis sont réellement, mais évitez de vous livrer à une « enquête de police
», en appelant par exemple les parents de ces adolescents ou adolescentes. Si vous apprenez que les amis de vos enfants sont
consommateurs de produits toxiques, ne les stigmatisez pas trop vite. Du dialogue encore et toujours.

Propositions

Tous âges
Vous avez informé « vos » adolescents, alors qu’ils étaient encore très jeunes, des dangers de la drogue, de la délinquance, des
mauvais comportements en général. Ils savent donc ce qu’il est raisonnable de faire ou de ne pas faire. Bien sûr, il y a
toujours, dans l’entourage, quelqu’un qui prendra un malin plaisir à tenter de les faire chuter. Il y a amis et amis, nous l’avons
dit.
Amour

“ L’inquiétude de cet âge est une soif d’aimer.„


STENDHAL, DE L’AMOUR

Bon à savoir
Malgré l’expansion de la pornographie, les adolescents restent très « fleur bleue ». N’être plus aimé, ne plus être « populaire »
(voir « Populaire »), plus encore être rejeté, constitue une immense souffrance. La première sécurité de l’enfant, ne l’oublions
pas, est la sécurité affective.
Les « années-collège » sont souvent celles du premier baiser (avec la langue) – vers 14 ans environ, mais pas de la « première
fois » (avec pénétration). Seulement 9 % des garçons et 4 % des filles affirment avoir eu des rapports sexuels avant 13 ans,
selon les données françaises de la dernière enquête internationale sur la santé des adolescents (Inpes/OMS, 2012). En classe de
4e , plus de 92 % des filles et 86 % des garçons sont toujours vierges, en 3e les chiffres sont respectivement de 81 et 72 % (voir
« Sexualité »).
Malgré le développement d’une sexualité pornographique, les adolescents restent donc de vrais sentimentaux.

Dangers

Tous âges
Ne sacrifiez jamais l’amour, ni dans vos propos ni dans vos conduites. Les adolescents ont besoin qu’on les aime et qu’on le
leur dise.

Propositions

Tous âges
— L’amour c’est d’abord le sentiment que vous devez témoigner à vos enfants. Il est important de dire aux enfants, avec des
mots, vos mots, que vous les aimez. C’est dur quelquefois, et plus encore pour les pères que les mères. Combien d’entre vous,
les pères, osez dire votre amour à votre fils adolescent ?
— Réjouissez-vous des « flirts » de vos enfants. Ne l’avez-vous pas fait vous-même ? Revivez, grâce à vos enfants, ces
moments merveilleux.
Argent de poche

Le chiffre-clé
En 2008, 68 % des parents étaient favorables au principe de l’argent de poche.

Bon à savoir
L’argent, dit-on, est le nerf de la guerre. Ne pas en avoir (du tout) ne peut que plonger les « démunis » dans la « crise de nerfs
». L’argent est nécessaire aux enfants, il leur permet de consommer : c’est un « droit non écrit de l’enfant ». S’il ne fait pas
leur bonheur, quand ils en manquent totalement, le malheur n’est pas très loin. L’argent est aussi, ne l’oublions pas, dans cette
société de l’« avoir » et du paraître, un symbole de richesse et d’aisance. Tous les adolescents savent cela. L’argent, c’est le
moyen de s’affirmer, d’être valorisé.
Les adolescents disposent d’un formidable pouvoir d’achat. L’argent en poche est de loin supérieur à l’argent de poche. En
effet, outre l’argent donné par les parents, il y a celui reçu d’autres membres de la famille (grands-parents, oncles et tantes…)
et à l’occasion d’événements particuliers (anniversaires, fêtes de fin d’année…). Et, puis pour les plus grands (à partir de 16
ans), il peut y avoir les revenus provenant de petits boulots (baby-sitting, emplois McDo…). Notons cependant qu’après la
crise financière de 2008, selon une enquête CSA commandée par le Crédit agricole, le montant alloué par les parents aux 6-15
ans a baissé. Finalement, ils donnent aujourd’hui un peu moins de 20 € par mois.
Pourquoi les parents donnent-ils de l’argent de poche ? Les motivations sont diverses : apprendre aux enfants et aux
adolescents à gérer un budget, les récompenser, leur faire plaisir…

Dangers

Tous âges
— Il ne faut pas priver les enfants d’argent de poche, non seulement parce qu’ils ont besoin, répétons-le, d’argent pour
consommer dans la vie courante, mais parce que cela leur permet d’apprendre à être autonomes et à savoir gérer un budget. En
ce sens, il est déconseillé de faire des « avances » permanentes d’argent de poche, il faut apprendre à se débrouiller avec ce
que l’on a.
— Il est tout aussi déconseillé de rémunérer systématiquement de bonnes notes en classe ou le moindre service rendu à la
maison. Si l’on peut récompenser l’obtention d’un diplôme (à partir du brevet du collège) ou un service exceptionnel en
famille (garde d’un petit frère ou d’une petite sœur tout un week-end par exemple, au détriment de ses propres loisirs), il ne
faut pas faire plus. Ce serait accréditer l’idée que l’on ne peut rien faire par solidarité ou par générosité, par simple plaisir de
faire plaisir. De la même manière, nous déconseillons le retrait d’argent de poche pour punir un enfant ou un adolescent d’une
quelconque faute commise. Il y a d’autres moyens pour réparer des « fautes ». L’argent de poche est un « dû », qu’on ne peut
retirer, quand on est parent, au gré de son humeur ou de ses fantaisies.
— À chaque enfant d’utiliser son argent comme bon lui semble (le contrôle des achats – sauf achats illicites naturellement –
est interdit).

Propositions

8-12 ans
— La question de savoir s’il faut donner de l’argent de poche à la semaine ou au mois est à la discrétion de chaque famille.
Cependant, au moins pour les 8-9 ans (voire 10 ans), nous recommandons le versement hebdomadaire. À ces âges, l’on a
encore un peu de mal à se projeter loin dans le temps, et un mois ça peut paraître très, très long.
— Pour les 8-9 ans, 5 € par semaine paraît une bonne somme, qui sera augmentée ensuite.

Autres âges
— Un paiement au mois paraît ici préférable. Quelle somme ? Peut-être 20 € pour les 13-14 ans, 30 pour les 15-16 et 40 ou 50
pour les 17-18 ans. Les sommes seront nécessairement plus élevées si avec elles les enfants doivent aussi s’acheter leurs
propres vêtements.
— Ces sommes bien entendu sont des repères. Chaque famille donne aussi en fonction de ses ressources. Il est à cet égard
recommandé d’indiquer aux enfants le budget de la famille, de pointer les périodes difficiles pour demander à chacun de faire
de petits sacrifices le cas échéant.
Autorité

Bon à savoir
L’autorité colle à la famille comme la sangsue à la chair. On la place ordinairement du côté du père. Erreur, comme l’amour,
l’autorité est moins un « fait de nature », qui concernerait préférentiellement tel ou tel sexe, qu’un « fait de culture », qui
dépend de choix sociaux et de modèles politiques. Il n’y a pas plus d’autorité « naturelle » qu’il n’existe d’amour « instinctif
». Les hommes savent ou ne savent pas exercer l’autorité. Les femmes aiment ou n’aiment pas leurs enfants. Chaque parent
fait ce qu’il peut avec ce qu’il est : c’est ce que nous appelons le « parent de proximité ».

Dangers

Tous âges
Ne parlez pas d’autorité aux adolescents avec quelque arrière-pensée de continuer en réalité à leur imposer votre pouvoir. À
l’adolescence, le temps n’est plus à l’autorité mais à l’autonomie.

Propositions

Tous âges
Même si sondages et enquêtes s’entêtent quelquefois à le leur faire dire : les adolescents ne réclament pas d’autorité et,
rappelons-le, n’en ont pas besoin. Ce qu’ils veulent c’est de la sécurité. Celle-ci passe par des repères, des références, une
grille de lecture du monde, des convictions affichées (par les parents).
Avortement

Bon à savoir
Il est des réalités qui fâchent. En voici une : l’avortement. Depuis une vingtaine d’années, l’on observe une hausse des IVG
chez les adolescentes. Selon les chiffres de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees),
sur les 210 000 avortements pratiqués en France métropolitaine en 2009, 29 000 concernaient des jeunes filles âgées de 15 à
19 ans. Parmi elles, 11 600 étaient mineures (13 500 en 2011).
Sans doute les filles, se retrouvant en situation de grossesse non désirée (ce qui est loin d’être toujours le cas), sont-elles plus
promptes que par le passé à recourir à l’IVG que de subir une maternité qu’elles peineraient à assumer pleinement. Sans doute
aussi le fait que l’avortement soit anonyme et gratuit pour les mineures (la contraception – sauf pilule du lendemain – qui ne
l’était pas l’est devenue par décision du gouvernement Ayrault) peut-il expliquer cette augmentation des chiffres.

Dangers

8-12 ans
Cette question de l’IVG n’est pas de leur âge. Elle n’est pas traitée ici. Rien n’empêche cependant les parents d’enseigner un
peu d’anatomie.

Autres âges
— Ne réduisez pas la sexualité à ses dangers. Si votre fille tombe enceinte, elle aura besoin de votre soutien. Et si elle veut
garder son enfant : c’est son choix ! La loi lui permet d’avoir le dernier mot.
— Cela ne doit pas vous empêcher d’en discuter jusqu’au bout et d’essayer de faire changer d’avis l’intéressée si vous
estimez, pour toutes sortes de raisons, qu’il y va de sa santé et de son bien-être.
— Ne la rejetez pas en tout cas ! Des parents, on le sait, mettent à la porte leur enfant, ou menacent de le faire lorsque celui-ci
s’oppose à toute IVG.

Propositions

8-12 ans
Aux plus jeunes, il faut d’abord parler d’amour et de tendresse. Mais un peu d’éducation sexuelle n’est pas à négliger. Aux
Pays-Bas, elle commence à l’école dès l’âge de 4 ans.

Autres âges
L’information sexuelle est un devoir des parents, à tout âge pourrait-on dire. D’autant que la loi de 2001, qui prévoyait une
information à l’école à raison de trois heures hebdomadaires à partir de la 6e , n’est pas appliquée. Il faut en particulier parler
de contraception, de préservatifs. Mais, encore une fois, sans oublier de parler des sentiments et du plaisir.
Bandes ordinaires

Chose vue ce jour (30/10/2012)


Une bande est là, devant nous. Elle est mixte : quatre filles, trois garçons, âgés de 13 à 15 ans environ. Ils sont assis sur les
marches du grand escalier qui plonge sur la rue Montorgueil à Paris. Un peu en retrait, le couple de la bande. Le garçon tient la
jeune fille par l’épaule. Ils restent là une vingtaine de minutes. Et puis, selon la coutume adolescente, ils bougent…

Bon à savoir
Si l’adolescent est avant tout un être singulier, une personne, il vit au pluriel : « tous ensemble », selon le slogan d’usage, il vit
en « groupe ». Le rapport à soi est donc aussi un rapport de l’entre soi. C’est dire combien l’adolescence est un bloc, une
totalité : physique, psychique, culturelle et sociale, politique peut-être, demain.
L’adolescence, c’est bien moins « une affaire de points noirs », selon l’expression de Montherlant, qu’un état social et culturel
spécifique, une nouvelle situation de vie. Être adolescent, c’est être soi avec les autres, par les autres. C’est devenir soi par
l’autre. L’autre comme (seul) moyen de communion avec soi. Lui ressembler et s’en distinguer à la fois. Pour être soi, il faut
être comme les autres, et, en même temps, il faut s’en dissocier. Pour devenir un soi complet, il ne faut plus être totalement
comme les autres. Pas simple.

Un besoin d’appartenance
Les adolescents aiment être en « bande ». Les « groupes de pairs », comme on les nomme, occupent donc une place essentielle
dans leur vie. Ces groupes sont à la fois intemporels et universels, on en trouve à toutes les époques et dans toutes les
communautés et sociétés. Ils sont constitués de garçons (fréquemment), les filles étant plus surveillées sortent moins de chez
elles.
Tandis que le monde environnant se montre si peu accueillant et compréhensif envers les adolescents, le groupe apporte la
reconnaissance mutuelle et la solidarité, qui s’expriment d’autant mieux que l’on partage le même langage, des intérêts
communs et que l’on garde dans le collectif son autonomie et sa personnalité. Le groupe est aussi le lieu où chacun peut
montrer aux autres de quoi il est capable. Les relations au sein du groupe passent d’ailleurs souvent moins par le langage (on
n’y parle pas nécessairement beaucoup) que par une similitude de comportements. Les « groupes de pairs » sont enfin le lieu
des performances, des exploits individuels.

Dangers

8-12 ans
Ne cherchez pas à empêcher le jeune adolescent de sortir, au moins un peu. Il doit se séparer progressivement de vous.

13-14 ans
Le besoin de sortir, si naturel à l’adolescence, se renforce. Ne le contrariez pas, ne cherchez pas, au nom de fallacieuses
raisons parfois, à empêcher vos enfants d’aller « courir le monde » (les copains et copines). (N’est-ce pas souvent l’envie
refoulée de ne pas pouvoir le faire vous-même qui vous incite à interdire ?)

15-18 ans
Maintenant que vous avez accepté les sorties, gardez la bonne attitude. Ne cherchez pas à savoir absolument avec qui vos
enfants sortent, pour faire quoi. Sachez que le copain ou la copine n’est pas toujours désigné à l’avance, avant la sortie, et que
vos enfants ne savent pas toujours ce qu’ils vont faire au cours de leur sortie.

Propositions
Tous âges
Un adolescent ne doit pas être confiné chez lui 24 heures sur 24. Il doit avoir une vie sociale. Encouragez-le à sortir, à voir des
amis, à faire des activités, des visites.
Banque

Bon à savoir
Ayant compris le formidable pouvoir d’achat des adolescents, les banques redoublent d’efforts pour les attirer vers elles. C’est
ce que l’on a pu appeler autrefois la « bancarisation ».

Des produits pour chaque âge


À partir de 12 ans, il existe le livret jeune (lancé en mai 1996). Il s’agit d’un livret d’épargne dont les banques fixent librement
le taux d’intérêt. La plupart d’entre elles offrent une rémunération de 1,75 % net depuis le 1er août 2010. Ce livret jeune (à la
même date) est plafonné à 1 600 €. Il est associé le plus souvent à une carte de retrait. Certaines banques permettent aux
parents de fixer le montant maximal des retraits par période de temps (toutes les semaines ou tous les mois). Ce livret est
disponible jusqu’aux 25 ans de son titulaire.
À partir de 16 ans, un jeune peut ouvrir seul un livret A. En revanche, pour ouvrir un compte courant, avec un chéquier et une
carte de paiement, l’accord des parents, assorti de leur caution, est obligatoire. Pour limiter les risques, certaines banques
proposent des cartes de paiement avec autorisation préalable. Les retraits et les paiements ne sont alors possibles que dans la
limite de la somme disponible sur le compte.
À partir de 18 ans, un jeune peut, sans autorisation parentale, ouvrir un compte bancaire, avec chéquier et carte de paiement. Il
peut tout aussi librement contracter un crédit. Mais, lorsque la somme est importante, les banques demandent généralement
aux parents de se porter garants.
Tout est bon pour les banques afin de séduire la jeune clientèle, surtout la première année : cartes de retrait gratuites,
découvert autorisé sans frais, assurance en cas de vol des papiers, offres de réductions dans les magasins et les restaurants,
offres spéciales de téléphonie mobile. Mais les jeunes ne sont pas dupes de ces manœuvres financières et leur fidélité n’est
jamais acquise. Certaines études montrent qu’avant ses 29 ans un jeune sur deux aura changé d’établissement bancaire.

Dangers

8-12 ans
N’interdisez pas aux 12 ans cette première expérience qui apprend la responsabilité. C’est important de se sentir responsable !

Autres âges
Même conseil : pas d’interdit.

Propositions

Tous âges
Épluchez bien avec vos enfants les offres qui leur sont faites. Choisissez les banques qui s’engagent à les accompagner tout au
long de leur vie. Regardez aussi celles qui seront là en cas de difficultés.
Besoins capitaux

Bon à savoir
L’adolescent est moins un « sujet de soins » qu’un « être de besoins ». Reliant les deux idées, nous dirons que c’est en
satisfaisant les besoins du sujet adolescent qu’on le « soigne » le mieux. L’enjeu est aujourd’hui de « démédicaliser », de « dé-
psychanalyser » l’adolescence, plus encore de « banaliser » cet âge, de le rendre « ordinaire » (ce qu’il est plus qu’on
n’imagine et plus que les intéressés eux-mêmes le pensent).
À cet égard, soulignons immédiatement, pour n’en plus parler ensuite, qu’il n’existe pas deux types d’adolescents – les « bien-
portants » (les faciles) et les « malportants » (les « difficiles ») –, mais un seul type : des adolescents ordinaires dont, il est
vrai, certains peuvent se retrouver, passagèrement ou durablement, dans des situations extraordinaires ou difficiles, conduisant
parfois, certains d’entre eux, à des conduites pathologiques.
Nous avons dit plus haut que le souci majeur de l’adolescent était de S’AFFIRMER, pas de s’opposer. Redisons une fois
encore qu’il n’y a pas d’opposition nécessaire entre les adultes et les adolescents, pas de tensions obligées, pas de crise
nécessaire.
Mais pour ces derniers, SEPT besoins capitaux doivent, impérativement, être satisfaits : besoin de confiance, besoin de
dialogue, besoin de sécurité, besoin d’autonomie, besoin de responsabilités, besoin d’affection et besoin d’espoir. C’est « la
colonne vertébrale » de la relation parents-adolescents. Considérons chacun de ces besoins.

Premier besoin : la confiance


Si elle est nécessaire à tout âge du processus éducatif, elle l’est plus encore durant l’adolescence. La confiance est
inconditionnelle ; elle ne saurait s’accompagner de réserves. Celui qui donne la confiance renonce, du même coup, au contrôle
de celui qui la reçoit. Ce dernier, ainsi doté, est un gagnant qui acquiert (ou retrouve) l’estime de soi, qui est à présent apte à
prendre des risques utiles et positifs et peut, à son tour, donner sa confiance aux autres.

Deuxième besoin : le dialogue et la communication


Dialoguer, c’est échanger des idées, donc exprimer des désaccords, des divergences. Pensant désormais par lui-même (voir «
Penser »), l’adolescent a beaucoup d’idées à produire – des idées qui expriment sa vision personnelle du monde et des autres,
sa vision de lui-même. La famille, par la grâce de la modernité politique étant devenue démocratique, c’est là une seconde
raison pour activer le dialogue. C’est une posture égalitaire qui dorénavant doit guider la relation. Il s’agit pour les parents,
plus que jamais, de traiter d’adulte à adulte avec les « enfants ». Assurément, le dialogue est une procédure délicate, mais il
n’y faut point renoncer sous prétexte de cette délicatesse. Dans un temps où, pour combattre la violence et l’indiscipline,
autorité et limites sont à nouveau réclamées, il faut, plus que jamais, au contraire, engager toutes les parties familiales à plus
de dialogue et de démocratie.

Troisième besoin : la sécurité


Nous le distinguerons de l’autorité qui, contrairement à ce qu’études et sondages voudraient nous faire croire, nous l’avons vu,
n’est pas demandée par l’adolescent, et, en tout cas, n’est nullement applicable dans une société qui n’est plus d’autorité.
Élevés dans une ambiance de libertés, les adolescents ne veulent plus de l’auctoritas dont chacun pressent qu’elle n’a jamais
été, par le passé, que pouvoir et domination, potestas.
L’autorité « naturelle », dont on nous rebat les oreilles pour qualifier les temps antérieurs, n’a en effet jamais existé ; elle
n’était qu’un funeste exercice de puissance, d’autant plus efficace que sa légitimité n’était pas sérieusement mise en cause. Les
adolescents d’aujourd’hui réclament, cela est clair, moins des limites (qu’on voudrait à nouveau leur imposer) que des repères
et des références. Ils attendent des adultes moins des commandements que des convictions, ils réclament une force morale qui
les rassure (voir « Adultes »). C’est un « nouvel adulte » qui est aujourd’hui espéré, qui n’est plus l’adulte « tout-puissant »
d’hier, mais un adulte modeste capable d’admettre qu’il ne sait pas tout sur tout : tel est désormais l’adulte « fort ».
La sécurité demandée par l’adolescent passe naturellement par une ambiance familiale détendue, amicale. Voir ses parents se
disputer à longueur de repas (ou à d’autres moments) n’a rien d’apaisant pour lui qui est en quête de stabilité. La sécurité c’est
encore celle qu’apporte l’aisance matérielle. Faut-il rappeler ici qu’il y a en France deux millions d’enfants pauvres ? La
sécurité, c’est encore de se savoir aimé et respecté, encouragé, stimulé.
Quatrième besoin : l’autonomie
Un besoin essentiel, toute l’éducation est, ou devrait être, tournée vers elle. N’oublions pas l’étymologie : ex-ducare qui
signifie préparer la sortie, libérer l’enfant du « nid » familial – après l’avoir doté, cela va de soi, des outils et des valeurs
nécessaires à son épanouissement personnel et à son insertion sociale. Paraphrasant Jaurès évoquant la Révolution, nous
pouvons dire que l’adolescence n’est pas une rupture, c’est une conquête.
Les adolescents – parce qu’ils le sont précisément – entendent se libérer des contraintes de leur enfance qui en est pleine. Ils
veulent se prendre en main, librement. D’où cette revendication d’égalité avec les parents, qui en est la condition.
L’autonomie passe par l’expérimentation, d’aucuns parleraient de « prise de risque ». Pourquoi pas ? À condition
d’appréhender cette notion aussi dans le sens positif qu’elle peut avoir : celui de levier pour grandir. Le risque ainsi conçu est
utile. C’est lui qui permet de progresser, de s’autoévaluer, de s’estimer.

Cinquième besoin : les responsabilités


Très vite, l’enfant doit être habitué à cet exercice. Ivan Ilich, le célèbre abolitionniste de l’école, disait qu’« un garçon ou une
fille de douze ans devait devenir un citoyen responsable en commençant de tenir un rôle, d’assumer des tâches dans la
communauté ».
L’adolescent, en effet, doit pouvoir prendre sa place dans la cité, réfléchir aux côtés de ses aînés pour inventer une société plus
juste, plus solidaire, car c’est bien d’inutilité sociale qu’il souffre le plus ; les jeunes ont le sentiment d’être des « laissés-pour-
compte », dont l’intelligence reste toujours inemployée.
C’est à cet égard toujours une erreur de vouloir organiser pour des adolescents des choses qu’ils peuvent organiser eux-mêmes
– simplement pour légitimer une place d’adulte, d’éducateur, de « responsable ». Se substituer à l’adolescent dans le
management d’une activité qu’il conduit fort bien est le plus sûr moyen de l’en dégoûter très vite.

Sixième besoin : l’affection


On le sait, les liens d’affection sont essentiels dans le processus de maturation de l’enfant. Ce sont eux qui consolident sa
personnalité. Ces liens demeurent déterminants ensuite. Dans un monde rude, brutal quelquefois, l’amour n’est jamais en trop,
et il n’y a jamais trop d’amour dispensé. Comme chacun d’entre nous, l’adolescent a donc besoin d’aimer et d’être aimé. Sans
doute devrions-nous lui dire plus souvent combien il est important et compte à nos yeux. Nous vivons tous par amour, pour
l’amour, lui aussi.

Dernier besoin, capital : l’espoir


Dans ce monde compétitif qui lui demande beaucoup : réussir en classe, réussir sa vie sentimentale, réussir son orientation,
l’adolescent peut quelquefois perdre espoir, ne plus voir le chemin devant lui : il est de notre responsabilité de lui redonner des
raisons fortes de croire en l’avenir.

Dangers

Tous âges
Ne négligez pas ces besoins. Nombre de difficultés relationnelles proviennent de leur non-satisfaction.

Propositions

Tous âges
Rappelons que l’adolescent est moins un « sujet de soins » qu’un « être de besoins ». Les sept besoins capitaux forment une
solide armature. On ne grandit qu’avec la confiance, des responsabilités, etc.
Bonheur

“ J’entrais [à 15 ans]… dans une vie réelle où j’avais ma place, dans une harmonie immense… Je goûtais avec joie cet épanouissement charmant, et
mes sens s’éveillant ajoutaient à mon orgueil…

GUSTAVE FLAUBERT, NOVEMBRE

Bon à savoir
Pourquoi à cette question « qu’est-ce que l’adolescence ? » ne pouvons-nous, sans avoir la certitude d’être bien entendu et
compris, répondre aisément : « l’âge du bonheur » ? Partout, dans notre société, il n’est question pourtant que de lui. Que de
livres pour en vanter les mérites et les moyens de l’obtenir au mieux et au plus vite en quelques magistrales recettes !
Les adolescents, quoique traqués par d’innombrables problèmes familiaux ou scolaires, sont plutôt des gens heureux (presque
par nature), ils n’ont pas besoin de « livres de recettes de bonheur ». Et pourquoi d’ailleurs, heureux, ne le seraient-ils pas ? Ne
jouissent-ils pas, outre des précieuses modifications physiques, qui apportent virilité pour les uns, féminité pour les autres, de
ces précieuses libertés de pensée, de sorties, d’actions, dont les adultes, peu à peu dépossédés, éprouvent sûrement la nostalgie
?

Dangers

Tous âges
Nous vivons tous pour le bonheur. Ne considérez pas que, chez les adolescents, cette quête soit superflue.

Propositions

Tous âges
Vos enfants sont heureux, soyez-le avec eux. Le bonheur est communicatif. Ils ne le sont pas ? Comportez-vous pour les aider
à en trouver le chemin, fait bien souvent de petits riens, de quelques paroles flatteuses.
Bruit

Bon à savoir
À défaut d’avouer qu’ils aiment le bruit, force est de reconnaître que la plupart des adolescents sont en permanence dans le
bruit. Des exemples ? Ils écoutent la musique avec forte intensité. Ils parlent fort. Ils rient bruyamment. Du bruit, toujours.
Nous revient à l’esprit cette scène d’un téléfilm français projeté récemment à la télévision : un éducateur a réuni quelques
jeunes dont il a la responsabilité au milieu de la forêt. C’est le silence total seulement entrecoupé de chants d’oiseaux. Les
jeunes n’en peuvent plus de tout ce silence. Quelle souffrance pour ces garçons habitués à la bruyance de la cité !

Dangers

Tous âges
Inutile d’évoquer les « de mon temps ! », un temps où, affirmez-vous, le bruit n’existait pas chez les jeunes. L’enthousiasme
de cet âge s’est toujours accompagné d’un déferlement sonore.

Propositions

Tous âges
Il y a un temps et des lieux pour faire du bruit. Le bruit doit s’arrêter là où commence le désagrément pour autrui. C’est une
question de respect. Et une fois encore une question de dialogue et de compromis.
« Call of Duty »

Bon à savoir
Parmi les jeux vidéo (voir « Jeux vidéo »), le plus célèbre du moment est sans nul doute Call of Duty. En novembre 2012, est
sorti le neuvième épisode de la série, intitulé « Black Ops 2 ». Rappelons que Call of Duty est un jeu de guerre qui plonge le
joueur dans des actions s’enchaînant les unes aux autres, sans aucune pause. Ce jeu, comme le rappelle le logo rouge sur la
jaquette, est, légalement, réservé aux adultes.

Dangers

8-12 ans
Bien sûr, les jeunes adolescents (voir rubrique éponyme), qui veulent faire tout ce que font leurs aînés, ne manqueront pas de
vous réclamer ce jeu à la mode. Plutôt que de leur lancer « Ce n’est pas de ton âge ! » indiquez-leur que ce jeu est interdit à la
vente pour les mineurs, et qu’il est du rôle des parents de respecter la loi.

13-14 ans
Même recommandation.

15-18 ans
Difficile pour cette tranche d’âge d’invoquer la seule loi, d’autant que le classement des joueurs par catégories d’âge, surtout
pour les catégories supérieures, est assez arbitraire. Ainsi la différence entre la recommandation 16 ans et + et 18 ans et + est-
elle assez ténue.

Propositions

8-14 ans
Prenez le temps de parler avec vos enfants. Soulignez combien ce type de jeu ultra-réaliste est violent. S’ils ne veulent pas
renoncer, laissez-les peut-être se faire peur.

15-18 ans
À partir de 15 ans, âge qui coïncide, redisons-le, avec l’entrée en période de jeunesse, sachez lâcher du lest. Que vos enfants
testent le produit. Soyez attentifs à leurs comportements. Si vous ne remarquez rien de changé dans leur comportement, qu’ils
s’amusent !
Cannabis

Bon à savoir
La France figure, depuis vingt ans, parmi les plus gros consommateurs (réguliers) de cannabis en Europe. Elle occupe la 4e
place sur 39 pays observés. Les dernières études montrent que les « années-collège » sont aussi les « années-cannabis ». En
2010, un collégien sur dix a déjà consommé cette substance au moins une fois dans sa vie. Si l’on détaille par niveau scolaire,
l’on obtient les résultats suivants : 11 % des élèves de 6e ont goûté au joint et 24 % des élèves de 3e . La France fait partie des
4 pays (sur 26 étudiés) où la proportion des jeunes ayant expérimenté cette substance augmente le plus rapidement. L’on peut
parler d’une « banalisation » du produit et d’une « nationalisation » de sa consommation, le milieu rural n’étant pas épargné
par le phénomène.
Prenons l’exemple des jeunes Parisiens ? En moyenne, ceux aujourd’hui âgés de 17 ans disent avoir fumé leur premier joint au
début de leur quinzième année. Les plus concernés par cette drogue résident, semble-t-il, à l’ouest et au sud de la capitale.
Cependant, les plus gros consommateurs se trouvent dans le nord-est.
Quelle est la signification de cette haute consommation (la part des jeunes de 15-16 ans qui ont déjà fumé une fois dans leur
vie est passée de 23 % en 1997 à 39 % en 2011) ? Elle est à relier, nous semble-t-il, parmi de nombreux facteurs, à un état
dégradé de la société, source de beaucoup d’inquiétudes personnelles, lesquelles poussent nombre de jeunes à vouloir s’en
extraire : c’est la « vocation » du cannabis, qui est donc moins aujourd’hui une « pratique festive » (en groupe) qu’une pratique
dépressive (en solitaire).

En quête d’apaisement
Ne parlons donc plus de sociabilité, c’est être « hors sujet » ! Le produit a désormais principalement une fonction «
anesthésiante » (de la réalité). L’on consomme pour « déstresser », se sentir mieux, pour retrouver un équilibre, pour éviter
l’ennui. Il s’agit rarement de plaisir, aujourd’hui.
Le jeune consommateur de cannabis a souvent une mauvaise estime de lui-même liée à une angoisse dans la relation à l’autre,
et sur laquelle le produit a un effet provisoirement apaisant.
La consommation régulière de cannabis est souvent associée à d’autres consommations régulières, comme celles du tabac et
de l’alcool (principalement chez les garçons).
L’un des dangers identifiés est que, plus la consommation est élevée, plus elle est dangereuse, et moins elle est perçue comme
telle par les intéressés (qui placent le danger plutôt du côté des « drogues dures »).
Mais, rassurons-nous, les experts sont unanimes à dire qu’il n’existe pas de preuve scientifique d’un lien de causalité directe
entre consommation de cannabis et expérimentation d’autres drogues.

Dangers

8-12 ans
— Comme sur d’autres sujets, il faut éviter le cours de morale. Mais ne pensez pas que le cannabis ne concerne que les
adolescents plus âgés, et seulement les garçons : même s’ils restent majoritaires, les filles consomment aussi, mais moins, c’est
tout.
— On sait qu’aujourd’hui le premier joint se fume dès 12 ans (en lieu et place de la bonne vieille cigarette). Certains indices
peuvent attirer l’attention : les yeux rougis, un fléchissement subit et incompréhensible des résultats scolaires, de nouvelles
fréquentations…
— Mais n’éprouvez aucune honte si votre enfant consomme. Parlez-en avec lui. Rien n’est plus dramatique que de garder le
silence. Et si l’addiction est là, trouvez ensemble les moyens d’y mettre fin.

Autres âges
— Ne dites pas que le cannabis est une « drogue douce ». Il n’y a pas de « drogues douces » ni de « drogues dures », il existe
seulement des usages qui, pour chaque produit, peuvent être « modérés » ou « intensifs ».
— Si, d’après tous les experts, il n’existe pas de réelle dépendance physique au cannabis, il existe une dépendance
psychologique, avec craving (envie irrépressible), surtout dès lors que le sujet a commencé à fumer tôt, et qu’il consomme
quotidiennement (jusqu’à 15 joints quelquefois).

Propositions

Tous âges
— Donner une information sur la nature, la nocivité des produits n’est jamais inutile (mais il faut savoir que cette
connaissance modifie rarement les comportements).
— Quels sont les vrais dangers ? Ils sont du côté d’une consommation « régulière et abondante ». Celle-ci altère en effet une
zone spécifique du cerveau, la substance blanche, qui entraîne une baisse de l’attention et de la mémoire. Elle peut aussi
provoquer une diminution de l’activité de certains neurotransmetteurs. Le taux de dopamine en particulier, impliqué dans les
processus de plaisir, peut chuter jusqu’à 20 %, un niveau inconnu chez un sujet « normal ». Sachez encore que le « joint » fait
inhaler de 6 à 7 fois plus de goudrons et de monoxyde de carbone qu’une cigarette. D’où un risque de cancers (gorge, lèvre,
poumon…) démultiplié.
— En conclusion, rassurez du mieux que vous pouvez vos enfants pour qu’ils retrouvent confiance en eux. Le vrai problème,
en effet, n’est pas le produit, mais le problème qu’il masque : un sentiment d’abandon, une tristesse, un traumatisme dans
l’enfance. Luttez contre cette détresse.
Chambre

Bon à savoir
La chambre est à la fois le lieu d’autonomie et l’espace d’évasion de l’adolescent. Là, il est à la fois dedans et dehors, dans
l’espace familial et dans l’espace-monde (grâce à Internet qui le transporte aux quatre coins de la planète).
La chambre doit être considérée comme un territoire privé. L’écriteau : « Défense d’entrer » est donc on ne peut plus justifié.

Dangers

Tous âges
— La chambre de votre fils/votre fille n’est pas rangée, et cela vous ennuie, vous qui, bien sûr, êtes très ordonné. Vous devez
éviter de tenir ce langage : « Mon pauvre garçon/ma pauvre fille, tu es décidément bien désordonné(e). Tu vas me ranger ton
bazar, tout de suite. » C’est la manière forte, autoritaire, et souvent sans effet : c’est amplement démontré !
— Vous devez tout autant éviter de ranger la chambre à la place de l’adolescent.

Propositions

Tous âges
Voici plutôt ce qu’il faut dire : « Le désordre de ta chambre me gêne. Il gêne aussi notre femme de ménage qui m’a dit l’autre
jour qu’elle n’y arrivait plus avec ton capharnaüm et qu’elle allait probablement nous quitter. Tu le sais, travaillant toute la
journée, j’ai besoin d’elle. Ce serait donc sympa que nous lui facilitions la tâche. Qu’en penses-tu ? Je te remercie des efforts
que tu pourras faire en ce sens. » Cela est la manière fine, démocratique, empathique, et croyez-moi terriblement efficace.
Collège

Bon à savoir
Le collège est l’école des adolescents par excellence. Même si, nous le savons, les premiers adolescents se rencontrent dans le
primaire, à partir du CE2, c’est bien au collège que, principalement, la vie des adolescents se déroule, pour le meilleur et,
quelquefois, pour le pire (violences, consommation de tabac, de cannabis).
Nous n’évoquerons pas ici, faute de temps, la scolarité proprement dite, les programmes.
Notons seulement que c’est au collège que se dessinent souvent les mauvais destins sociaux par le biais des orientations-
exclusions (des filières d’excellence), des mauvaises appréciations de certains enseignants, des stigmatisations diverses dont
font l’objet certains élèves. Il s’ensuit démotivations et découragement, dégoût de l’école, et bientôt absentéisme (voir « Échec
amoureux, échec scolaire », p. 125).
Le collège est le lieu de sociabilité des adolescents. S’y développent à la fois des fraternités, des plaisirs, mais aussi des
inimitiés fortes.

Dangers

8-12 ans et 13-14 ans


N’exigez pas trop de vos enfants. Ne vous polarisez pas sur les seules matières « nobles » comme les maths ou le français. Vos
enfants sont peut-être meilleurs en sport ou en guitare. Ce sont aussi des compétences qui, de surcroît, ne sont pas données à
tout le monde. Et puis, la scolarité est une chose, la camaraderie en est une autre. Laissez vos collégiens vivre également leur «
vie de groupe ». Le temps du collège est aussi le « temps des copains ».

15-18 ans
Non concernés.

Propositions

8-12 ans et 13-14 ans


Souvent présenté comme le « maillon faible » du système scolaire, le collège est une étape importante dans la vie de vos
enfants. Parfois, ils aimeraient être ailleurs qu’« enfermés » dans une salle de classe, mais personne n’a le choix – obligation
scolaire oblige ! Alors, valorisez tout ce qu’ils font de bien et oubliez un peu le reste.

15-18 ans
Non concernés.
Conduites d’excès

Bon à savoir
Si la « prise de risque » n’est finalement pas plus « naturelle » à l’adolescence que « la crise pubertaire » (beaucoup
d’adolescents, garçons ou filles, n’aiment pas le risque), force est de reconnaître que certains adolescents se mettent parfois en
danger en ne prenant pas les précautions d’usage pour éviter des accidents.
Les uns par exemple font du ski hors piste, les autres, à partir de 10-11 ans, rechignent (mais comme les adultes) à porter le
casque lorsqu’ils pratiquent ce sport (observation qui vaut aussi pour les adeptes du roller).

Dangers

Tous âges
Ne jamais dire : « Tu vas me mettre des protections pour aller skier, que cela te plaise ou non. Je ne veux pas que tu nous
reviennes avec une fracture du crâne ! »

Propositions

Tous âges
Dire : « Je suis inquiet des accidents de ski : il y en a des milliers par an et l’on dit que 20 % des accidentés souffrent de
lésions de la tête et de traumatismes crâniens. J’ai lu, l’autre jour, une enquête canadienne (de février 2010) qui indique que le
port du casque permet de réduire ce risque de 35 %. Tu sais combien tu comptes pour nous, je ne voudrais pas qu’il t’arrive
pareil accident. »
Conformisme

Bon à savoir
On fustige quelquefois le conformisme des adolescents en les comparant à des « moutons de Panurge ». Vieille rengaine des «
ados » « habillés tous pareils », dépourvus de tout esprit critique ! La réalité est pour le moins quelque peu différente. Le
conformisme, qui s’abat sur les « années-collège », est en réalité moins un choix qu’une contrainte (parfois épouvantable).
Comme le note cette adolescente de 14 ans : « Le monde des “ados” est très dur et ne laisse rien passer… Si l’on n’est pas
conforme à la mode, que ce soit pour les vêtements, la musique, si l’on n’est pas ami avec les gens qu’il faut, si l’on n’aime
pas les fêtes, ou ce genre de choses, on a très vite fait d’être rejeté par cette société de jeunes. »
Chaque adolescent est en permanence sous le regard (c’est-à-dire la critique) des autres, et ce n’est pas toujours facile à vivre.

Dangers

8-12 ans
Ne jamais dire : « Les marques (vestimentaires), ce n’est pas important, reste-toi même, tu vaux mieux que tous ces clones. »

13-14 ans
Dès lors que la tenue de l’adolescent est décente, ne critiquez pas ses choix. En 2013, l’on n’aime ni les mêmes musiques ni
les mêmes distractions qu’autrefois. Et il en sera toujours ainsi.

15-18 ans
Regardez, admirez même si vous voulez, mais ne jugez pas.

Propositions

8-12 ans
Il faut apprendre aux jeunes adolescents à savoir affirmer leurs véritables goûts (qui peuvent ne pas être ceux du groupe). Mais
il faut le faire avec intelligence : un adolescent doit suivre, au moins en partie, les codes de son groupe d’appartenance. Sinon,
c’est l’exclusion garantie.

13-14 ans
Sachez apprécier les goûts de vos enfants – jusqu’à l’enthousiasme quelquefois. C’est reconnaître la valeur de leurs choix.

15-18 ans
La liberté vestimentaire fait partie aujourd’hui des grandes libertés adolescentes.
Conseils d’enfants et de jeunes

Bon à savoir
Les conseils municipaux d’enfants ont été institués en 1979. Ils permettent à de jeunes volontaires, de tous âges, de développer
toutes sortes d’initiatives et de s’inscrire dans la vie de leur quartier ou de leur commune, en menant à bien différents projets.
Ces conseils sont un lieu d’expression démocratique et d’apprentissage de la citoyenneté. La coordination en est généralement
confiée à l’adjoint au maire élu à la jeunesse ou à son représentant et son fonctionnement à un « animateur ».

Dangers

Tous âges
Ne détournez pas vos enfants de cette expérience citoyenne. Ils en sortent généralement grandis.

Propositions

Tous âges
Cette démocratie pour les jeunes est utile. Vivez-la comme un engagement, comme une première marche de responsabilité.
Encouragez donc vos enfants à s’impliquer dans la vie de la cité.
Consommation

Bon à savoir
L’adolescent est de plain-pied avec son temps. Il est donc, comme chacun d’entre nous, un consommateur, et plutôt un gros
consommateur. Le problème est que pour lui, comme pour ses aînés, le nombre de produits qui sont à sa « disposition » se
développe plus rapidement que les moyens monétaires pour les acquérir. Ce décalage a des incidences importantes ; il crée de
la frustration, surtout chez les adolescents les plus démunis, qui peuvent alors être conduits à recourir à des procédés illégaux
pour obtenir les produits qu’ils convoitent.
Malgré tout, nous l’avons dit, les adolescents ont de l’argent. Cet argent qui fascine. Et, si l’on en croit un sondage du site
Aufeminin.com , réalisé en novembre 2012 auprès d’un millier de mères, c’est ce que plus d’un tiers (34 %) des enfants
réclament aujourd’hui pour leur Noël. Viennent ensuite le Smartphone (25 %), puis les jeux et les jouets (23 %). Chez les 13-
18 ans, la demande d’argent concerne 40 % et celle de Smartphone ou de tablette 40 % aussi.

Dangers

8-12 ans
Rien ne sert de fustiger la « société de consommation », nous en sommes tous dépendants… plus ou moins.

Autres âges
Puisque vos enfants ont de l’argent, qu’ils consomment ! S’ils consomment mal, ils l’apprendront vite à leurs dépens. C’est
ainsi, après tout, que l’on acquiert de l’expérience.

Propositions

8-12 ans
L’argent de poche, dont nous avons parlé, est un bon moyen pour « consommer utile ». Les très jeunes sont, nous l’avons vu,
sous la tentation permanente de la consommation : les vitrines sont si alléchantes. Apprenez à vos enfants qu’il faut parfois
savoir différer un achat pour en faire un plus important plus tard.

Autres âges
Munis de leur argent, les 13-18 ans sont maintenant assez grands pour savoir ce qu’ils ont à faire.
Convention internationale des Droits de l’Enfant

Bon à savoir
La Convention internationale des Droits de l’Enfant, que la France a signée et ratifiée en 1990, est le premier instrument
juridique international ayant force obligatoire qui énonce une série de droits de l’enfant dans les domaines civil, culturel,
économique, politique et social.
En 1989, les États ont décidé que les enfants (entendus au sens de « mineurs civils » : 18 ans en France) devaient avoir
un texte spécial les protégeant en différents domaines. En cinquante-quatre articles et deux protocoles facultatifs, la
Convention a donc énoncé les droits fondamentaux qui sont ceux de tous les enfants du monde. Parmi ceux-ci, le droit à la vie,
le droit de se développer normalement, le droit d’être protégé contre les influences nocives, les mauvais traitements et
l’exploitation, le droit de participer à part entière à la vie familiale, culturelle et sociale, le droit à l’intimité, le droit de
réunion, d’association, d’expression, etc.
Tous les droits reconnus dans la Convention sont inhérents à la dignité humaine et au développement harmonieux des
enfants et des adolescents. La Convention fixe ainsi des normes en matière de soins de santé, d’éducation et de services
juridiques, civils et sociaux.
En acceptant d’honorer les obligations stipulées dans la Convention (en la ratifiant ou en y adhérant), les gouvernements se
sont engagés à défendre et à garantir les droits des enfants, ainsi qu’à répondre de ces engagements devant la communauté
internationale. Les États parties à la Convention sont tenus de concevoir et de mettre en œuvre des mesures et des politiques
qui tiennent compte de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Dangers

Tous âges
Il ne faut pas cacher cette Convention aux enfants et aux adolescents mineurs. Les droits qui y sont définis les protègent et leur
donnent les moyens d’être des acteurs dans la société.

Propositions

Tous âges
Les parents connaissent mal, voire pas du tout cette convention. Il est donc important que vous la lisiez attentivement. Puis
que vous la lisiez ou la fassiez lire à vos enfants. Il sera temps ensuite d’en discuter librement avec eux.
Corps

Bon à savoir
Le corps est pour l’adolescent à la fois une découverte et une conquête. Une découverte qui le conduit à en explorer les parties
les plus intimes. On sait combien la masturbation occupe à cet âge une place importante, avec curieusement, ici, un discours
assez paradoxal des adultes. Comme dit le psychanalyste Joël Clerget, « imaginairement, il [ce discours] fait d’elle un point de
passage de l’adolescence, sans en reconnaître l’effectivité »… et, ajouterons-nous, une « vraie légitimité ».
Si l’on admet donc qu’il est normal que le jeune enfant explore son corps pour le connaître, l’on semble plutôt, quoique plus
discrètement qu’autrefois, s’offusquer que l’adolescent prenne possession du sien. Car, comme nous le disions, le corps est
une conquête pour l’adolescent. Voilà au moins une chose qui lui appartient et qu’on ne peut lui contester. On trouve là sans
doute la vraie raison qui le pousse à ne plus vouloir le montrer. C’est donc moins par pudeur qu’il ferme la porte de la salle de
bains à l’arrivée des parents que pour leur signifier son droit à sa propre intimité.
On dit que l’adolescent a tendance à cacher ce corps parce qu’il ne l’aime pas, qu’il lui fait peur, qu’il ne le reconnaît pas, que
c’est un « corps étranger », « indésirable », bref qu’il est pour lui une source de préoccupations et d’angoisses. MAIS NON,
l’adolescent a un rapport à son corps moins conflictuel qu’on le pense d’ordinaire. MAIS NON, il n’a pas ce sentiment
d’étrangeté qu’on lui prête. Plus des trois quarts des adolescents se disent « bien portants », tandis que seulement un quart des
parents ont ce sentiment et pensent au contraire que leurs enfants sont « mal dans leur peau ».

Dangers

8-12 ans et 13-14 ans


— Le corps est quelque chose que, tout petit déjà, l’enfant aime parer. Bracelets, colliers, petits bijoux font partie de
l’ornement corporel. Personne ne s’en offusque plus.
— Devenu adolescent, ce souci demeure, ne le contrariez pas ! Accompagnez-le en donnant votre sentiment sur les choix qu’il
fait.

15-18 ans
La parure du corps se fait plus méthodique. Les envies de tatouages ou de piercings peuvent alors se faire plus pressantes. Dès
lors que ces inscriptions ne présentent pas de risque pour la santé, elles ne sont pas un outil d’exhibitionnisme. Ne soyez donc
pas dans la tentation de l’interdit.

Propositions

8-12 ans et 13-14 ans


Sachant que tatouages et piercings ne sont pas nécessairement l’expression d’un mal-être, d’une souffrance particulière, vous
accepterez que vos enfants recherchent l’originalité. On le sait, il faut savoir se distinguer dans le monde adolescent.
Cependant, les limites de la décence doivent être respectées et la santé préservée. On ne pose pas, sans risque, un piercing ou
un tatouage n’importe où sur le corps. D’ailleurs, tant que vos enfants sont mineurs, rien ne peut être fait sans votre
consentement. Entre 8 et 12 ans, conseillez plutôt les décalcomanies, ces tatouages que l’on retire à son gré.

15-18 ans
Discutez entre personnes « responsables » des risques réels de ces nouvelles pratiques de marquage du corps. Car les risques
sont réels : l’infection, la contamination. Et puis il y a la douleur liée aux inscriptions corporelles, qui pour certaines seront
ensuite ineffaçables, sauf à subir une douleur encore plus grande au moment de l’effaçage. Il faut donc choisir un bon
professionnel, installé dans des locaux propres, utilisant un matériel stérilisé.
Crise parentale

Bon à savoir
S’il existe une « crise » dont la réalité n’est pas douteuse (au contraire de la « crise d’adolescence »), une « crise » qui se
produit généralement à l’âge de l’adolescence des enfants, c’est bien celle des parents, que l’on nomme, soit « crise du milieu
de la vie », soit « crise de la maturité ». Sait-on que, dans les années 1950 encore, « l’âge critique » était d’ailleurs constitué
par la seule ménopause des femmes ?
Avec la « naissance » de l’adolescent, le parent éprouve un sentiment de « perte » (de l’enfant et, plus encore, de son pouvoir
sur lui). Il a soudainement l’impression de ne plus être utile à rien. Certains parents en ressentent alors une profonde angoisse
(l’« ado-blues » ?). Angoisse avivée par un autre sentiment, celui de sa propre finitude : un enfant qui grandit, n’est-ce pas un
parent qui vieillit ? Et puis le petit enfant servait d’équilibre conjugal, faisait oublier les heurs et malheurs du couple. À cet
instant, celui-ci se retrouve face à lui-même. C’est parfois insupportable. C’est, faut-il le rappeler, à l’âge de l’adolescence que
les parents, âgés en moyenne de 40-50 ans (milieu de vie), se séparent le plus. C’est aussi à ce moment que les difficultés
professionnelles peuvent s’accroître, les licenciements se profiler.

Dangers

Tous âges
Ne faites pas de vos enfants les « boucs émissaires » de vos difficultés, qu’elles soient physiologiques (pour vous surtout, les
mamans), conjugales, financières ou professionnelles.

Propositions

Tous âges
Il vous faut accomplir le processus de « séparation » d’avec votre enfant (qui, précisément, n’en est plus un). C’est difficile,
chacun en convient. Mais l’heure est venue de traiter cet « enfant » comme ce qu’il est devenu : une personne adolescente.
Délinquant

Bon à savoir
Il existe de jeunes délinquants, que l’on appelle « mineurs » dans le Code pénal. Si l’on se réfère aux statistiques du ministère
de la Justice (pour l’année 2010), il apparaît que les mineurs sont d’abord condamnés pour des atteintes aux biens (un peu plus
de 20 % du total de ces atteintes), puis pour des atteintes à la personne (20 %), pour des atteintes à la sûreté publique (15 %),
pour commerce et transport d’armes (12-13 %), pour atteintes à l’ordre administratif et judiciaire (un peu plus de 10 %), pour
infractions aux stupéfiants (7 %).
Il existe, parmi ces mineurs, des adolescents meurtriers. Chacun se souvient du drame du Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire)
en novembre 2011. Le 16 de ce mois, Agnès, 13 ans, disparaît soudainement. Le lendemain, Matthieu, 17 ans, scolarisé dans
le même internat que l’adolescente, est placé en garde à vue et reconnaît partiellement être mêlé à cette histoire. Le 18, grâce
aux indications du jeune homme, le corps calciné de la jeune fille est découvert dans une forêt du Chambon. Le 19, le parquet
de Clermont-Ferrand ouvre une information judiciaire pour assassinat et viol sur mineure de moins de 15 ans. Matthieu est
écroué (il était sous contrôle judiciaire après sa mise en examen pour un précédent viol commis durant l’été 2010, dans le
Gard).
Chacun se souvient encore du quadruple meurtre de ses parents et de ses frères jumeaux, perpétré, en 2009, par Andy, 16 ans.
Jugé irresponsable en novembre 2012, le jeune homme est interné.
Ces actes particulièrement choquants sont fortement médiatisés, d’où cette impression d’ampleur du phénomène, mais il faut
rappeler que moins de 2 % des homicides sont imputables à des mineurs. C’est une situation très différente de la situation
américaine où, à cause de rivalités entre bandes très armées, le meurtre d’adolescents commis par d’autres adolescents est une
réalité quotidienne.
Il existe enfin des « délinquants malgré soi », une nouvelle race de délinquants en quelque sorte, qui commettent des délits
sans savoir que ce sont des délits. La Toile offre ici le meilleur exemple de cette délinquance « non intentionnelle », souvent
très toxique. C’est l’adolescent (qui peut être une fille) qui fait circuler des rumeurs sur untel ou untel, ou unetelle ou unetelle,
de sa classe ou qui va montrer des images de sa professeure, filmée à son insu, dans des situations désavantageuses pour elle.

Dangers

Tous âges
Pour regrettable qu’elle soit, une infraction ne fait pas un délinquant. Il y a (beaucoup, du reste) de délinquance occasionnelle.
Si vous êtes audacieux, vous irez même jusqu’à penser que le « délinquant », ça n’existe pas, qu’il n’y a que des individus qui,
à un moment de leur vie, commettent des actes d’infraction à la loi. Bien entendu, tenir de pareils propos, ce n’est pas «
couvrir » la faute de l’adolescent dont il vous appartient de rappeler que le droit chemin vaut toujours mieux que les « chemins
de traverse » !

Propositions

Tous âges
La délinquance cache souvent un mal-être, des besoins non satisfaits. Tendez l’oreille. Rassurez.
Désir

Bon à savoir
L’homme est un être de désirs. À tout âge ! D’abord, l’enfant a le désir de soi : c’est son narcissisme à lui (qui conduit à
l’amour de soi – un amour nécessaire –, amour bien compris commence en effet par soi-même).
Ce désir est, dans un premier temps, associé au désir de ses parents (l’enfant veut se marier avec son papa ou sa maman).
L’adolescent a, au début de son adolescence, disent les psys, ce même désir (nous n’en sommes pas très sûrs,
personnellement), puis il acquiert, notamment dans la relation amoureuse, le désir sexuel de l’autre. Parfois, quand il va très
mal, il est au contraire dans le désir de mort.

Dangers

Tous âges
Il ne faut pas nier la légitimité du désir. Nous en avons tous, et en grand nombre. La vie, fort heureusement, n’est pas faite que
de devoirs.

Propositions

Tous âges
Au-delà du désir, il y a le plaisir qui donne sens à nos vies. L’homme est en vie tant qu’il éprouve du désir pour quelqu’un ou
pour quelque chose.
Détenu

Le chiffre-clé
Au 1er mai 2011, 791 mineurs étaient incarcérés en France.

Bon à savoir
Un mineur condamné à une peine d’emprisonnement doit être placé, soit dans un établissement spécial pour mineurs (il en
existe une dizaine), soit dans une prison ordinaire, mais disposant d’un quartier spécial pour mineurs. Dans ce dernier cas, les
mineurs sont, théoriquement, séparés des détenus majeurs. Les détenus âgés de moins de 16 ans doivent suivre une scolarité
normale, ceux plus âgés peuvent bénéficier d’une formation scolaire adaptée.
Le mineur emprisonné est pris en charge dès son arrivée par des personnels pénitentiaires spécialement attachés à la prise en
charge de cette jeune population. Des éducateurs de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) interviennent également.
Alors que le personnel de surveillance assure, sous tous ses aspects, le bon fonctionnement du quartier et suit au quotidien
chaque mineur, les personnels médicaux (qui dépendent d’un hôpital civil) assurent la prise en charge médicale, et organisent
des actions de prévention. Des enseignants de l’Éducation nationale conduisent enfin des activités pédagogiques permettant
aux jeunes détenus, nous l’avons dit, de poursuivre ou de reprendre leur scolarité.
Dès sa sortie de prison, le mineur est pris en charge par sa famille ou par un service éducatif de la Protection judiciaire de la
jeunesse.

Dangers

8-12 ans
Peu concernés par cette question.

Autres âges
Il n’est pas facile d’être parents d’un jeune détenu. Cela suppose une bonne organisation de vie. Il y a en effet des jours et des
heures spécifiques pour les visites. Il y a un temps de transport à prendre en compte. Il y a la rancœur que certains parents
peuvent éprouver envers leurs enfants qui n’ont pas respecté la loi. Mais ne les abandonnez pas.

Propositions

8-12 ans
Peu concernés par cette question.

Autres âges
Il faut soutenir les adolescents dans leur nouvelle vie carcérale, qui est difficile. La détention reste une épreuve, et plus encore
pour les plus jeunes. Le réconfort familial est important.
Deuil

Bon à savoir
Dans la tradition psychanalytique classique, l’adolescent, confondu injustement, répétons-le, avec le pubère, doit faire le «
deuil de l’enfance », c’est-à-dire rompre avec « le refuge maternel intériorisé psychiquement » (Alain Braconnier), pour
accéder à l’autonomie.
Mais l’adolescent ne demande que ça : faire le deuil. Ce sont les parents qui, très souvent, s’y refusent. Pour eux, « faire le
deuil de l’enfance » équivaut à faire le « deuil du pouvoir ».
Mais venons-en au « vrai » deuil (touchant les êtres vivants). Les adolescents, plus encore que les enfants, sont éprouvés par la
disparition d’un proche ou d’un ami/d’une amie. Il leur est parfois difficile d’exprimer (surtout les garçons) leurs émotions,
qu’ils dissimulent souvent pour ne pas apparaître faibles. Si le disparu est un parent (père ou mère) ou un membre plus jeune
de la fratrie, l’adolescent va quelquefois avoir tendance à se comporter en « chef de famille », refoulant ainsi sa douleur
personnelle, ou du moins en la déplaçant du centre de l’attention de ses proches.
Un décès peut aussi déclencher chez l’adolescent une formidable colère et l’entraîner à des prises de risque compensatoires.
La colère peut être dirigée contre le défunt lui-même ou contre sa famille, voire contre le monde entier rendu responsable.

Dangers

Tous âges
Il ne faut stigmatiser ni le silence de l’adolescent (qui peut être terriblement affecté par la disparition de l’être aimé), ni son
débordement d’émotions (qui peuvent vous paraître excessives).

Propositions

Tous âges
— Vous devez respecter le besoin d’isolement de votre enfant ou au contraire ses envies presque frénétiques de sorties avec
des copains. C’est sa façon d’oublier son chagrin.
— Il est important de vous rappeler que vous êtes là pour l’aider et le soutenir dans l’épreuve. Certains adolescents accablés
par la douleur peuvent se réfugier dans les stupéfiants interdits et l’alcool. Ces produits n’apportent cependant qu’un répit
provisoire, anesthésiant en quelque sorte le chagrin, mais à longue échéance ils ne parviennent qu’à compromettre le travail
nécessaire de deuil. D’autres adolescents peuvent évoquer le suicide, une idée, nous le verrons, qu’il faut toujours prendre au
sérieux.
— Quand le mal-être perdure ou s’aggrave, il faut chercher à consulter.
Drogues

Bon à savoir
Si le cannabis reste le premier produit toxique illicite consommé par les adolescents (il concerne 41,7 % des jeunes de 17 ans),
arrive en 2e position, mais loin derrière, le « poppers » (testé par 9 %), suivi de la cocaïne (3 %), de l’ecstasy (2 %) et de
l’héroïne (1 %). S’agissant plus spécifiquement des 15-19 ans, le Baromètre santé de l’INPES pour l’année 2010 indique les
chiffres suivants : champignons hallucinogènes (1,5 %), cocaïne (1,4 %), ecstasy et MDMA (1,2 %), amphétamines (1 %) et
héroïne (0,2 %).
Les jeunes connaissent très bien les noms de tous ces produits qui existent sur le marché, et de plus en plus tôt, mais ils n’en
connaissent généralement pas les vrais dangers (pour leur santé). Fort heureusement, les niveaux de consommation, comme
nous venons de le voir, restent faibles.
Cependant, en Europe, l’essor des drogues de synthèse inquiète de plus en plus les autorités. Rappelons qu’en 2011, 49
nouvelles substances psychoactives – soit près d’une par semaine – ont été officiellement identifiées. Une enquête de 2011
indique que 5 % des jeunes Européens de 15-24 ans ont déjà consommé des « euphorisants légaux » (substances psychoactives
non réglementées ou produits annoncés comme contenant de telles substances, qui sont spécifiquement conçues pour limiter
les effets des substances contrôlées). Principaux pays touchés : l’Irlande (16 %), puis la Lettonie, la Pologne et le Royaume-
Uni (chacun 10 %).

Dangers

Tous âges
Il ne faut ni exagérer ni sous-évaluer le problème. Un fumeur occasionnel de joint n’est pas un toxicomane, mais cette
consommation n’est jamais innocente. Elle doit vous interpeller. Ne pensez pas que vous pourrez, dans tous les cas, résoudre
le problème seul. N’hésitez donc pas à consulter un tiers, qu’il soit pharmacien, médecin, conseiller familial. Évitez la colère
ou les grandes envolées du genre : « Comme tu me déçois ! »

Propositions

Tous âges
Vous devez vous informer sur ces produits : leurs effets, leurs dangers. Certains effets sont d’abord positifs, comme la griserie,
le sentiment de puissance, la désinhibition : il faut les indiquer pour être crédibles à l’égard des adolescents. Avec
l’énonciation ensuite des effets négatifs, rappelez également les interdictions légales et les risques encourus avec la
transgression de la loi. Mais, surtout, sachez faire preuve d’empathie et n’ayez pas honte d’exprimer votre inquiétude. Dites
clairement : « Je suis inquiet », « Je me sens tellement impuissant ». Et puis offrez le dialogue.
Droits

“ Tel un migrant, l’adolescent devra camper dans les faubourgs de la vie.„


ANDRÉ BURGUIÈRE, HISTORIEN, 1978

Bon à savoir
Bruno Bettelheim disait, dans Les Enfants du rêve, ouvrage qui a été publié en France en 1972, que « ce qui cause la révolte de
l’adolescence c’est le fait qu’une société garde trop longtemps la nouvelle génération dans un état de dépendance – trop
longtemps en termes de maturité sexuelle et d’efforts vers l’indépendance ».
Jusqu’à leur majorité civile, fixée à 18 ans depuis 1974, les jeunes sont en effet, essentiellement, des mineurs juridiques, qui
ne disposent que d’un minimum de droits : ce n’est que progressivement qu’ils entrent dans les responsabilités, à partir de
seuils d’âges différenciés.
Entre 10 et 18 ans, apparaissent ainsi les premiers droits pour les adolescents. En voici les principaux : à 10 ans, le droit de
regarder les spectacles qui leur étaient interdits jusqu’alors, le droit d’occuper la place avant passager dans la voiture d’un
adulte ; à 12 ans, le droit d’ouvrir un livret jeune dans un établissement bancaire ; à 14 ans le droit de conduire un véhicule à
deux roues (type scooter, mais de faible cylindrée), de travailler la moitié des vacances scolaires à condition que les travaux ne
soient pas pénibles ; à 15 ans, c’est la majorité sexuelle ; à 16 ans, le droit d’ouvrir un compte bancaire personnel, d’arrêter
théoriquement d’aller en classe (fin de l’obligation scolaire), c’est le droit de signer un premier contrat de travail et d’adhérer à
un syndicat de son choix, de créer une association (depuis 2011), de commencer la conduite automobile accompagnée, de
devenir sapeur-pompier volontaire, d’effectuer le service civique ; à 17 ans, le droit de s’engager dans l’armée, de passer le
Bafa (Brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur), etc.
Faut-il aller plus loin et abaisser par exemple l’âge de la majorité civile ? Chez les spécialistes, les avis sont partagés.
Françoise Dolto était favorable à cet abaissement, situant le nouveau palier à l’âge de la puberté. D’autres, comme le
psychiatre Patrice Huerre, verraient bien une majorité civile à 15 ans. À titre personnel, nous ne sommes pas favorables à cette
évolution, non pas parce que nous pensons que des garçons et des filles de moins de 18 ans soient incapables d’assumer les
droits de la majorité, mais parce que, dans le contexte social et économique actuel, où la dépendance financière des jeunes
s’accroît, ce serait, nous semble-t-il, un bien mauvais service à leur rendre que de les abandonner trop vite à une vie adulte
sans les moyens d’y faire face.

Dangers

Tous âges
Les droits sont faits pour être exercés. Ne les contrariez pas. Avec les droits naissent les responsabilités qui permettent de
devenir adultes.

Propositions

Tous âges
Soyez fiers d’enfants prenant en main leur destinée, prêts à s’engager au service des autres (en entrant dans l’armée ou en
créant une association, par exemple).
Échec amoureux, échec scolaire

Bon à savoir
La massification de l’école opérée à partir des années 1960 n’a pas entraîné, on le sait, parallèlement une complète et réelle
démocratisation scolaire. La création des baccalauréats professionnels en 1985 n’a pas permis de réduire les inégalités entre
élèves. Toutes les études montrent que l’école n’a même jamais été aussi élitiste qu’aujourd’hui. Ainsi, la proportion d’élèves
des classes sociales les plus modestes est d’autant plus faible que le niveau d’études est élevé. Les enfants d’ouvriers et
d’employés, qui représentent la majorité des élèves de 6e , ne représentent plus qu’un quart des bacheliers et moins d’un élève
sur cinq en classe préparatoire aux grandes écoles. Et un élève dont le père est enseignant a quatorze fois plus de chances
d’obtenir le bac que l’élève dont le père est un ouvrier non qualifié.
De mauvais apprentissages existent, se traduisant notamment par le fait qu’à l’entrée au collège plus de 15 % des collégiens
éprouvent des difficultés en lecture, en restitution de sens de textes élémentaires, et qu’à l’issue de la scolarité obligatoire plus
de 10 % des élèves peinent à l’écrit. Et, bien sûr, il y a les échecs : nombreux. Chaque année, ce sont, au bas mot, 150 000
élèves qui sortent du système scolaire sans formation ni diplôme. À peu près autant qui sont « décrocheurs » (en réalité des «
décrochés »)… et l’on compterait 300 000 absentéistes. Cette « désaffiliation » et ce « désamour » scolaire ont évidemment de
multiples causes dont la démotivation n’est pas la moindre : « Mais qu’est-ce que je fous en classe ? Chez moi, ils ont tous fait
des études, et ils sont chômeurs, alors à quoi ça sert d’aller en cours ? » Des situations familiales compliquées, marquées par la
faiblesse des ressources, l’impossibilité de suivre la scolarité des enfants – par manque de temps ou de compétences –,
l’exercice de petits boulots pour pallier le manque d’argent de la famille ou pour consommer comme les autres jeunes sont
aussi des facteurs explicatifs à prendre en compte.
Autre échec : l’échec amoureux. À tout âge, il est une souffrance et remet en question l’estime de soi.

Dangers

Tous âges
— Un échec amoureux, à tout âge, est une grande épreuve. Ne minimisez pas ceux de l’adolescent. Évitez des expressions
telles que « Une de perdue, dix de retrouvées » ou bien « Ce garçon (ou cette fille) n’était pas fait(e) pour toi ».
— Un échec scolaire n’est jamais bien vécu non plus (y compris chez les « cancres » avides de succès comme les autres).
Mais ne le dramatisez pas. Et surtout, attention aux mots blessants tels que « Décidément, tu n’arriveras jamais à rien », ou
bien pire encore « Tu es vraiment nul, mon pauvre garçon (ou ma pauvre fille) ! »

Propositions

Tous âges
— Face à l’échec amoureux de votre enfant, faites à nouveau preuve d’empathie. Puisez dans vos souvenirs personnels et
dites-lui combien vous avez pu souffrir vous aussi d’une rupture amoureuse.
— Face à l’échec scolaire, qui peut n’être que momentané, sachez garder la sérénité. Pour dommageable qu’il soit, on n’en
meurt pas ! Il y a toujours une solution.
École

Bon à savoir
Curieusement et sans parti pris de notre part, dans cet abécédaire, « école » est situé entre « échec » et « ennui ». Ces deux
mots, hélas, ne sont pas sans fondement.
Les élèves, qu’ils soient collégiens, lycéens et même parfois écoliers, s’ennuient en (salle de) classe. Les cours sont longs,
abstraits, déconnectés des réalités sociales (vieille rengaine que celle-ci ! Jean Jaurès l’observait déjà il y a un siècle, voyant
dans ce fait la volonté du pouvoir de ne pas permettre aux élèves d’acquérir une conscience de classe [sociale] et un esprit de
révolte). Vincent Peillon, le ministre de l’Éducation nationale, a donc bien raison de dire que, globalement, les adolescents ne
sont pas très heureux à l’école. Heureusement, il y a les copains et les copines : cela sauve la face et la mise de cette pauvre
institution scolaire. Comme le dit Juliette, 13 ans : « Il n’y a pas beaucoup de gens qui aiment l’école, mais il y a tous nos
amis, donc ça n’est pas horrible ! »
Pour un adolescent, l’école est donc avant tout un lieu de sociabilité, d’apprentissage des rapports humains. Vive la cour de
récré ! Pour le reste, la plupart des élèves rêvent d’une « autre école », avec moins d’heures de cours, des profs plus sympas et
intéressants, avec plus de sorties et de voyages aussi.
L’école d’aujourd’hui, qui devrait rimer avec savoir et plaisir d’apprendre, rime plus volontiers avec « réussite ». Pour les
parents comme pour les enseignants, la priorité est et reste bien la « réussite scolaire » de leurs enfants ou élèves. C’est
pourquoi, la crainte, pour les uns comme pour les autres, est, nous l’avons vu, l’échec.

Dangers

Tous âges
— Il ne faut pas avoir l’obsession de la réussite en classe. Hélas, il y a plus de vingt ans, nous montrions déjà, dans La
Démocratie familiale, que les parents avaient cette préoccupation obsessionnelle – préoccupation d’autant plus forte que l’on
s’élève dans l’échelle sociale.
— Certes, comment en douter ? La réussite scolaire est importante, elle conditionne même aujourd’hui très souvent la réussite
sociale, mais il faut rappeler aussi qu’une vie est possible sans le bac, que la motivation produit parfois les meilleurs destins.

Propositions

Tous âges
— Il faut être attentif autant au mal-être des enfants qu’à la réussite scolaire. On peut avoir peur d’aller en classe, jusqu’à la
phobie quelquefois. En effet, l’école moderne est devenue, en raison des nombreuses épreuves qu’elle impose, un lieu de
souffrances.
S’agissant des études, soyez positifs : encouragez, soutenez, valorisez les efforts autant que les bonnes notes. Un adolescent
est-il insatisfait d’une école, vérifiez-en les raisons. S’il a de bons motifs de vouloir en changer (les professeurs sont durs avec
lui, il est victime de harcèlement, etc.), trouvez-lui un autre établissement où il retrouvera le plaisir d’étudier.
— Rappelez à vos enfants que l’école, aussi en difficulté soit-elle aujourd’hui, reste le lieu du savoir commun, utile pour
pouvoir se comprendre, communiquer et échanger.
Engagement

Bon à savoir
Les adolescents s’engagent comme ils peuvent, et en fonction de leur temps disponible. Il faut savoir qu’ils sont impatients
d’agir. Face à eux, pourtant, ils trouvent quelquefois des adultes méfiants ou sceptiques.
Ils s’engagent pour toutes sortes de causes : humanitaire, environnement, aide aux personnes âgées, sport…
Voici Baptiste. Il a 16 ans. Il a créé son club de futsal (football en salle) à Lescar (Pyrénées-Atlantiques). Après avoir obtenu
le prêt d’un gymnase, une quinzaine de personnes ont adhéré à son club qu’il a pu inscrire à un championnat. « Grâce à cette
action, raconte-t-il au journal 20 minutes (19 novembre 2012), j’ai appris beaucoup de choses en termes administratifs,
économiques et sociaux. J’ai découvert réellement ce que c’était d’avoir le sens des responsabilités. »

Dangers

Tous âges
Il ne faut pas décourager les bonnes volontés de vos enfants au motif qu’ils auraient bien d’autres choses à faire, des choses
plus sérieuses, comme les études. Il y a un temps pour tout, un temps pour soi, un temps pour les autres.

Propositions

Tous âges
Vous devez favoriser l’engagement de vos enfants : il y a tant de choses à faire pour aider son prochain ! Et puis, comme le
montre l’exemple de Baptiste, s’engager, c’est grandir, assumer des responsabilités, être acteur dans la cité.
Ennui

Bon à savoir
L’ennui est considérable dans le monde adolescent contemporain. Il est même mortel quelquefois (voir « Suicide », p. 252).
L’on regarde la télévision, l’on s’active sur les réseaux sociaux pour ne pas se sentir seul dans ces « villes de grande solitude »
dont parlait naguère Michel Sardou dans l’une de ses chansons.

Dangers

Tous âges
Ne dites pas que vous ne comprenez pas l’ennui, qu’il y a tant de choses que l’on peut faire aujourd’hui (ce qui n’était pas le
cas autrefois). Proposez des activités, des sorties communes.

Propositions

Tous âges
L’ennui est propre à l’homme. Vous-même vous vous ennuyez parfois : ce n’est pas un drame. Tout ennui n’est pas inutile.
Sachez dire à vos enfants que c’est un temps utile de récupération, propice à la réflexion.
Expérimenter

Bon à savoir
Aux expressions usuelles de « prises de risque » ou de « conduites à risques », nous préférons les termes d’« expériences » ou
d’« entreprises ». L’adolescent en effet a moins besoin de prendre des risques (ce que beaucoup, du reste, tant garçons que
filles, ne font pas) que de « tester » ses capacités, en s’affrontant ou en affrontant les autres (ce que, dans le jargon adolescent,
l’on nomme « lancer » ou « se lancer » des « défis »). Il lui faut alors faire des expériences pour connaître sa vraie valeur,
l’influence qu’il a sur les autres.

Dangers

Tous âges
Ne « couvez » pas vos adolescents comme vous avez pu couver vos jeunes enfants. Ils ont besoin de sortir dans le monde,
d’aller voir ce qui s’y passe. Ils ont besoin de se mettre à l’épreuve : c’est ainsi que l’on grandit.

Propositions

Tous âges
Expérimenter, c’est vivre. Nous sommes dans un monde où chacun se forge sa propre identité, au gré des expériences
accumulées.
Exploits

Bon à savoir
Les adolescents ne sont pas avares d’exploits, sportifs notamment. On se souvient de celui poursuivi en août 2010 par une
jeune Néerlandaise, Laura Dekker, âgée de 14 ans. L’adolescente s’engageait dans un tour du monde à la voile en solitaire.
Durée : un an. Objectif : battre le record du plus jeune navigateur en solitaire détenu, depuis mai 2010, par une jeune
Australienne de 16 ans et 362 jours. Pour cette expédition, le père, confiant dans les capacités de sa fille, décidait de lui
apporter son concours et ses conseils.
Laura n’est pas seule en quête d’exploits. D’autres adolescents, voire des enfants, se sont lancés dans de grandes aventures et
ont battu des records, tel Jordan Romero, devenu, en mai 2010, à seulement 13 ans, le plus jeune conquérant de l’Everest (8
848 m), pulvérisant le record d’un jeune Népalais de 16 ans. En France, nous pourrions citer l’exploit d’une petite fille de 7
ans qui, en août 1991, accompagnée de son père, réussissait l’escalade du mont Blanc.

Dangers

Tous âges
Il ne faut pas, immédiatement, contrarier ou décourager un enfant ou un adolescent qui rêve d’exploit. Mais il faut vérifier que
le projet n’est pas un simple caprice, que la motivation chez lui est forte. L’opinion est si mal préparée à pareilles initiatives
chez des jeunes qu’elle se met souvent en travers de telles ambitions. C’est ainsi que la justice néerlandaise s’opposa
longtemps au projet de Laura Dekker. Pour nombre d’experts, c’est proprement insensé que d’autoriser des très jeunes à
prendre d’aussi grands risques.

Propositions

Tous âges
Après avoir validé le projet et vous être assuré de sa conformité aux règlements publics, votre rôle de conseil est
indispensable.
Facebook et les autres réseaux sociaux

Le chiffre-clé
48 % des 8-17 ans ont un compte sur Facebook. Chacun d’entre eux a 210 « amis » en moyenne (source : TNS/Sofres, octobre
2012).

Bon à savoir
Facebook est le plus grand réseau social. Il compte plus d’un milliard d’abonnés dans le monde, et 26 millions en France. Près
de la moitié des 8-17 ans français ont un compte sur ce réseau, qui, rappelons-le, est gratuit. Il y a aussi Twitter, qui concerne
aujourd’hui 1 million de 15-24 ans, c’est-à-dire un jeune sur cinq (soit un doublement d’abonnés en un an). 20 % des
adolescents disent aujourd’hui préférer Twitter à Facebook (moins surveillé par les parents).
Une chose est sûre, les réseaux sociaux ont détrôné les blogs. Aux États-Unis par exemple, par rapport à 2006, les adolescents
sont plus de deux fois moins nombreux à en avoir un (ou plusieurs). Baisse perçue aussi chez les 18-33 ans. Une tendance
similaire existe en France. Selon la station de radio Skyrock, qui hébergeait plus de 6 millions de blogueurs en février 2010, la
perte était déjà de 8 % en huit mois. D’où l’invention du « blog secret » qui n’est accessible qu’aux personnes que l’on a
choisies et qui sont inscrites sur sa liste VIP.
Facebook, c’est l’occasion de parler de SOI, de montrer aux autres que l’on vaut quelque chose, de montrer au monde ses
passions et centres d’intérêt dans la vie. C’est se faire de nouveaux amis, en ayant le plus de « contacts » possible, ce qui vous
rend aussitôt très « populaire ».
S’agissant de Twitter, son avantage est qu’il permet d’envoyer de brefs messages (de 140 caractères au maximum), qu’il est
moins « codifié » que Facebook. Les jeunes l’utilisent comme ils envoient des SMS. Ainsi que nous l’explique Éric Delcroix,
expert en médias sociaux : « Les 15-24 ans sont très à l’aise sur le réseau, car ils ont l’impression d’être dans une gigantesque
cour de récréation ; ils peuvent commenter, discuter, se chamailler avec n’importe qui, sur n’importe quoi tout en conservant
l’anonymat s’ils le souhaitent. » Et puis ils peuvent dialoguer avec leurs « stars » qui ont presque toutes un compte Twitter.

Dangers

Tous âges
— Vous inscrire vous-même sur Facebook, juste pour devenir « amis » de vos enfants. Or, selon une étude réalisée par la
société AVG, vous seriez 92 % dans ce cas. Ces inscriptions sont motivées souvent par le désir de surveiller les enfants. « Je
découvre les petits copains de ma fille de 16 ans », explique ainsi Laetitia, dont les trois enfants sont inscrits sur le réseau. Il
est vrai qu’en devenant « ami » de vos enfants, vous accédez à leurs photos, à leurs commentaires, à leur intimité en somme
(vous êtes même 45 % à avouer avoir eu accès à la page de votre enfant… à son insu).
— Deux commentaires. D’abord, le « face-à-face », nous semble-t-il, reste un moyen plus approprié de développer et
d’enrichir la communication en famille. Ensuite, vos enfants ont droit, comme vous, au respect de leur vie privée.
— C’est bien parce que vous les suivez de plus en plus, et de trop près, sur Facebook qu’ils choisissent d’ailleurs, comme nous
l’avons dit, à l’image de Maxime, 17 ans, un réseau comme Twitter. Là, protégés par l’anonymat, ils peuvent se soustraire à
vos regards intrusifs.

Propositions

8-12 ans
— Il n’est jamais trop tôt pour informer ses enfants (et s’informer soi-même) des vertus et possibilités des réseaux sociaux.
Cela suppose que vous les connaissiez un tant soit peu. Des organismes vous aident aujourd’hui à vous familiariser avec un
réseau comme Facebook (voir en fin d’ouvrage).
— Voici cependant quelques « infos » de base. Rappelez d’abord à vos enfants que l’accès à ce réseau est interdit aux moins
de 13 ans. En vain : plus de 30 % des 9-12 ans possèdent déjà un compte (la plupart du temps avec votre accord) ; 31 % s’y
connectent tous les jours ou presque (la plupart du temps, dans 72 % des cas, en passant par l’ordinateur familial).
— Pour les adolescents encore non inscrits, en prévision de leur future inscription, expliquez-leur comment bien « paramétrer
» leur compte. Insistez, en leur montrant le menu accueil, sur les « paramètres de confidentialité » situés en haut à droite. Il
faut cliquer sur « amis » et pas « amis et leurs amis ». Cela permet de limiter les informations fournies sur le réseau aux seules
personnes qu’un abonné possède comme « amis ». Indiquez ensuite à vos enfants que Facebook est un « livre ouvert », pas un
journal intime, qu’il ne faut, par exemple, pas donner son numéro de portable ou son adresse, pas même le nom de son école
ou collège, qu’il ne faut pas y inscrire de choses trop personnelles, y exposer des photos trop intimes. Recommandez-leur
d’utiliser un « pseudo » pour éviter tout désagrément. Ces recommandations sont d’autant plus nécessaires que, selon le
sondage TNS-Sofres, réalisé en octobre 2012, 90 % des 8-17 ans, en ouvrant leur compte, donnent leur vrai nom, que 88 %
montrent une ou plusieurs photos d’eux, que 67 % indiquent le nom de leur établissement scolaire et même 27 % leur adresse
postale.
— Enfin, initiez vos enfants au « droit à l’image ». Dites-leur qu’on ne peut ni photographier ni se faire photographier sans
donner son autorisation.

13-14 ans
Vos enfants ont à présent le précieux compte Facebook. Il n’est pas inutile de leur rappeler les précautions à prendre,
indiquées plus haut. Le dialogue avec eux est important, notamment quant à la durée d’utilisation. Selon une étude réalisée
pour l’Union nationale des associations familiales (Unaf), la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) et
l’association Action Innocence, publiée en juillet 2011, plus des trois quarts des parents ne fixent aucune limite d’utilisation à
leurs enfants.

15-18 ans
Il faut ici rappeler à vos enfants majeurs qu’à partir de 18 ans toutes les infractions qu’ils pourraient commettre sur la Toile
leur seraient imputables comme majeurs avec les peines plus lourdes appliquées aux majeurs.
Fans et groupies

Bon à savoir
Certains adolescents et adolescentes, manquant parfois d’une réelle solidité identitaire, éprouvent le besoin de s’identifier à
telle ou telle star, se mettant ainsi à l’unisson de la personnalité d’un ou d’une autre « vedette » qui leur plaisent. Un sondage
un peu ancien (il date de 1998), mais qui est néanmoins révélateur, paru dans L’Événement du jeudi indiquait que 59 % des
adolescents disaient avoir une idole par besoin de suivre un exemple, de lui ressembler, et 29 % par besoin de vivre des
aventures à travers elle.
« Stars », « étoiles », « vedettes », « idoles des jeunes », les noms sont donc multiples et changeants pour qualifier ceux et
celles à qui les adolescents et les jeunes vouent leur admiration. Une admiration avec la frénésie que l’on sait. Une apparition
de Justin Bieber aujourd’hui n’est pas sans nous rappeler une sortie des Beatles autrefois.
Le phénomène n’est pas nouveau, assurément. Chaque époque a ses fans et ses groupies. Longtemps, le théâtre et, surtout, le
cinéma ont généré les plus grands mythes. On se souvient de Sarah Bernhardt ou bien encore de Rudolph Valentino qui firent
s’émouvoir – et parfois se tuer – des admirateurs subjugués. On se souvient de Greta Garbo, de Marlene Dietrich, de Marilyn
Monroe, de James Dean. Plus récemment de Doc Gynéco, de Michael Jordan, de Zinédine Zidane, de Leonardo DiCaprio.
Aujourd’hui, aux acteurs de cinéma jadis prédominants, s’ajoutent, voués à tous les cultes, les sportifs et les chanteurs ou les
groupes de musique. La liste est longue, inépuisable sans doute, des nouvelles stars : Ronaldo, Messi, Tony Parker chez les
sportifs, One Direction (groupe de cinq garçons ayant déjà écoulé 12 millions d’albums dans le monde, voir rubrique plus
bas), Lady Gaga, Justin Bieber et Selena Gomez, les Jonas Brothers, pour les vedettes musicales, Taylor Lautner, le jeune
acteur du film Twilight .

Des idoles qui leur ressemblent


Néanmoins, le rapport aux stars a changé. Alors que le mystère et la distance régissaient l’univers des Greta Garbo et autres
Marilyn Monroe (ces femmes, par définition, étaient inaccessibles et leur mystère nourrissait l’imaginaire de leurs
admirateurs), la connaissance et la proximité caractérisent le monde des stars (des jeunes) d’aujourd’hui. On pourrait parler
d’une sorte de banalisation de la starisation. La « star » est, en somme, un jeune homme (ou une jeune femme), comme les
autres… mais qui a réussi : voilà la différence, génératrice de toutes les envies et, souvent, des pires souffrances.
Depuis l’invention de la culture adolescente, avec les Elvis Presley, Johnny Hallyday et autres Claude François, Sheila ou
Sylvie Vartan, la « vedette de variétés » ou le sportif (de haut niveau) se sont ainsi complètement désacralisés. D’autres
valeurs sont mises en avant, comme la simplicité ou la proximité (groupes de rap), qui permettent une meilleure identification.
Ajoutons un désir d’imitation – sans doute nouveau et lié à la montée d’une « société des égaux ». Devenir soi-même une «
star » ne relève plus du rêve, mais de ce que Gérard Mendel aurait appelé « une utopie réaliste ». D’ailleurs, quand on les
interroge sur leur avenir, nombre de collégiennes se voient volontiers « vedettes de la chanson », et nombre de collégiens
sportifs professionnels.
Le monde féerique de jadis, qui est devenu, plus que jamais, monde du « fric », est, de nos jours, à portée de mains. Chacun
sait que la réussite est possible. La télé-réalité entend donner sa chance à chacun. Elle est utile de ce strict point de vue.
Ce qui est plus nouveau encore, c’est que les « idoles des jeunes » sont souvent des jeunes eux-mêmes, de leur âge, sortis du
rang, évadés de cette société juvénile qui, plus que jamais, veut croire en l’égalité des chances. Les idoles, hormis quelques
exceptions, ne sont plus des hommes ou des femmes de 40 ou 50 ans. Elles ont 20 ans, parfois juste 18 ans, et même 15 (citons
Britney Spears ou Justin Bieber). Ce qui accroît le sentiment de proximité évoqué plus haut et nourrit la complicité entre ceux
qui ont réussi et ceux qui sont en attente de succès à leur tour.
Les stars elles-mêmes entendent souvent rester les garçons (ou les filles) ordinaires qu’elles ont été.
Bref, on fabrique aujourd’hui des stars comme des savonnettes (voir le phénomène boys band il y a quelques années). Pas si
nouveau que ça. « Viens auditionner au studio, disait-on déjà dans les années 1960. Pathé Marconi et Ciné-monde t’attendent
tous les jeudis de 14 h 30 à 18 h 30… Condition à remplir : avoir moins de vingt ans. »

Dangers

Tous âges
Dénigrer les choix et les goûts de vos enfants, considérant, selon un poncif éternel, que leur musique est « une musique de
sauvage » et leurs films des films médiocres. Admirer quelqu’un, qui de surcroît vous ressemble, a votre âge, c’est important.
À travers leurs « vedettes », vos enfants acquièrent une reconnaissance sociale, tout en fuyant la banalité et souvent la tristesse
du quotidien.

Propositions

Tous âges
Essayez de comprendre ces choix, ces goûts. Prenons l’exemple du nouveau boys band à la mode One Direction, alias 1D. Ces
cinq garçons délivrent un message positif à la jeune génération : qu’il faut croire en ses rêves. N’est-ce pas réconfortant dans
ce monde de grisaille ?
Fête

Bon à savoir
Faire la fête a toujours fait partie des rituels de la jeunesse. Tout peut être prétexte à la fête dans le monde adolescent, à « se
taper un bon délire » entre potes ou copines. Il faut « s’éclater » par tous les moyens, y compris par la prise de risque. Sur le
bitume, à rollers ou en skate, à la montagne sur la piste de surf, lecteur MP3 aux oreilles souvent, le risque pris avec ses
semblables génère le plaisir. Nous sommes déjà dans l’esprit festif. Vient en soirée la « teuf » (« fête », en verlan) proprement
dite.
Si les mots pour dire la fête ont changé – « surprises-parties », « boums » hier, « soirées » aujourd’hui –, les buts poursuivis
n’ont pas changé : être bien ensemble, échapper au regard des parents, à la grisaille (scolaire) quotidienne, oublier parfois un
avenir incertain. La fête se veut thérapeutique aussi.
Les enfants, aujourd’hui, veulent faire la fête de plus en plus tôt. Dès 7-8 ans, ils aspirent à se réunir et, à 10 ans, devenus
pleinement jeunes adolescents, ils réclament leurs premières « soirées ». Parvenus au collège, ils obtiendront satisfaction, avec
néanmoins des heures de retour imposées par les parents.
Vers le milieu du primaire, en CE2, CM1, les fêtes sont encore à base de jeux ; nous sommes encore un peu dans l’esprit du «
goûter-anniversaire ». Mais la musique est déjà présente : on danse, on boit (des boissons non alcoolisées), on discute. Les
groupes ne sont pas encore véritablement mixtes.
Tout s’accélère au collège. Les revendications se font plus pressantes. On veut sortir davantage, rentrer plus tard. À partir de la
4e , et même la 5e , les groupes sont résolument mixtes. La soirée est l’occasion de nouer ses premières relations amoureuses
(ou de les approfondir pour les plus âgés), de fumer sa première cigarette, de consommer un peu d’alcool, nous en reparlerons.
En ce sens, l’on peut parler de rite de passage au monde des grands. C’est notamment, pour les garçons, une manière
d’affirmer leur virilité, pour les filles le moyen d’exprimer leur féminité.
Bien entendu, la fête est un lieu d’expérimentation. Pour les collégiens de 4e et 3e , il peut y avoir consommation de produits
toxiques interdits, comme le cannabis, dont on ne dira jamais assez combien, aujourd’hui, elle est banale. Il peut y avoir aussi
consommation excessive d’alcool. L’ivresse, qui grise les sens, l’emporte alors sur la sagesse. Tout est alors prétexte pour
s’enivrer : un anniversaire, un diplôme obtenu… L’alcool est devenu une sorte de rituel d’appartenance.

Dangers

8-12 ans
Il n’y a pas d’âge pour faire la fête. Pas d’interdit a priori à poser.

Autres âges
Interdire une sortie au motif que l’on sait que l’on va y boire. « Boire un petit coup c’est agréable, dit la chanson, mais il ne
faut pas rouler sous la table. » Ne dites donc pas : « Je t’interdis de boire », mais « amuse-toi bien, sans faire d’excès ».

Propositions

8-12 ans
Le choix de fêtes (bien) organisées est légitime. Un coup de fil aux parents organisateurs vous rassurera utilement. Pour le
reste, faites confiance : vos enfants ne sont plus des bébés.

Autres âges
Réjouissez-vous que vos enfants aillent faire la fête (comme vous le faisiez sans doute vous-même à leur âge).
Frères et sœurs

Bon à savoir
Depuis l’aube des temps, les rapports des fratries sont compliqués, faits d’amour et de haine – jusqu’au meurtre quelquefois.
Souvenons-nous de Caïn et Abel. Ces rapports sont de grande proximité ou au contraire très conflictuels. Ils sont parfois tout
cela à la fois.

Dangers

Tous âges
N’intervenez pas dans les « règlements de comptes » de vos enfants… dès lors qu’aucun ne recourt à l’usage de la force pour
faire entendre raison à tous les autres. Dans cette dernière hypothèse, vous avez au contraire un devoir d’intervention et de
protection.

Propositions

Tous âges
Apprenez à vos enfants à régler pacifiquement leurs différends. Proposez-leur votre médiation éventuellement.
Fugue

Bon à savoir
La fugue est pour le fugueur le moyen de rompre momentanément les amarres avec l’entourage, de « prendre de la distance »,
au sens propre comme au sens figuré, de trouver ailleurs ce qui fait défaut à la maison quelquefois : un air respirable, la faculté
d’aller et de venir à sa guise. On enregistre environ 100 000 fugues de mineurs chaque année.

Dangers

Tous âges
Ne considérez pas la fugue comme le résultat d’une erreur éducative. À l’âge de l’autonomie, elle serait même plutôt un signe
de bonne santé.

Propositions

Tous âges
Il faut accueillir le fugueur avec calme. Lui dire combien vous êtes heureux de son retour. Surtout, ne le questionnez pas
immédiatement. S’il a les traits tirés par sa « cavale », conseillez-lui d’aller se reposer, que vous parlerez de tout ça plus tard,
quand il sera prêt, et s’il le veut !
Générosité

Bon à savoir
Cette génération d’adolescents a mauvaise réputation. On la dit égoïste. Ce n’est pas juste. Tout adolescent doit effectivement
« se battre » pour faire sa place dans cette société, ce qui passe notamment par de bons résultats en classe, car la compétition
est rude. D’où un certain repli sur soi.
Mais ces adolescents, comme tous ceux qui les ont précédés, ne manquent pas d’esprit altruiste. Ils sont sensibles aux
injustices, dénoncent les violences faites aux plus faibles, aux démunis, sans toit. Le racisme leur est abject tout comme la
misère du monde.
Appoline, 14 ans, a cette conscience sociale : « Nous, explique-t-elle, il nous suffit d’ouvrir un robinet pour avoir de l’eau,
alors qu’en Afrique ils souffrent de la sécheresse. » Ferdinand, 12 ans, s’insurge, lui, contre l’existence d’enfants-soldats ou
d’enfants très pauvres obligés de travailler dans des mines.

Dangers

Tous âges
Nous vivons dans un monde où l’égoïsme est souvent roi. Ne découragez donc pas chez vos enfants leur volonté d’être utiles.

Propositions

Tous âges
Il faut encourager l’expression de la générosité. Il existe mille et une manières d’aider son prochain. Nous n’en citerons
qu’une, ici, le volontariat des sapeurs-pompiers (possible à partir de 16 ans), dont on a parlé à la suite du décès tragique au feu
d’un jeune sapeur-pompier de cet âge. Cette histoire, en 2012, a fait la une de l’actualité.
Indiquons qu’il existe actuellement 4 200 volontaires mineurs en France qui le deviennent à l’issue d’une formation de quatre
ans.
Handicap

Le chiffre-clé
Seuls 20 % des jeunes en situation de handicap poursuivent des études supérieures.

Bon à savoir
L’adolescent en situation de handicap a les mêmes besoins que les autres adolescents. Il veut plus d’autonomie, trouver sa
place dans le monde, avoir des copains et des copines, aimer aussi. Cet adolescent va devoir accepter définitivement son
handicap. Ce n’est pas simple surtout si son entourage a eu tendance, pendant de nombreuses années, à le nier ou à en sous-
estimer l’importance.
Pour un adolescent en situation de handicap visible, assumer sa différence est une véritable épreuve et cela peut être à
l’origine, chez lui, d’un vrai mal-être, parfois d’un repli sur soi. L’adolescent est pris alors dans un dilemme : avoir des amis,
comme tout le monde, ou se tenir en retrait, pour ne pas souffrir, ne pas être victime de moqueries, de quolibets, pour ne pas
connaître l’échec amical ou amoureux qu’il ne manquerait pas d’attribuer à son handicap.
Il est parfois difficile pour un adolescent en situation de handicap d’accepter son corps, qu’il ne juge pas comme les autres, de
parler de ses craintes à des personnes de confiance.

Handicap et sexualité
La sexualisation du corps est, on le sait, une étape importante dans la vie de tout adolescent. L’adolescent en situation de
handicap doit avoir été averti de ce qui va lui arriver, de cette transformation majeure qui en fait progressivement un adulte.
La plupart des adolescents font leurs premières expériences sexuelles dans le groupe des pairs, ce qui « handicape » les jeunes
en situation de handicap, souvent solitaires malgré eux. Ils ont moins l’occasion en effet, à cause de leur différence, d’être
avec d’autres adolescents du même âge. Cela vaut d’abord pour les handicaps moteurs. « À 14 ans, explique Aurélien, tu as la
découverte de la sexualité, les flirts, les filles et le fait d’être en fauteuil, ça fausse un peu la donne. Sur ça, conclut-il, ça a été
dur donc j’avais besoin d’enchaîner les filles pour me prouver que j’étais comme tout le monde. »
La situation est encore plus délicate pour les adolescents atteints d’un handicap mental. En effet, ces jeunes peuvent avoir,
s’agissant du sexe, une attitude provocante, choquante même, car ils ont moins de pudeur et de retenue et expriment
volontiers, spontanément et directement, leurs sentiments. L’envie de toucher l’autre est particulièrement prononcée chez les
adolescents affectés de déficience mentale. Puisque les mots leur manquent, c’est par le comportement qu’ils s’expriment.
Cette envie peut être ressentie par l’autre comme de la familiarité déplacée ou être interprétée comme des volontés de flirt.

Handicap et scolarité
Les adolescents en situation de handicap posent des problèmes particuliers de prise en charge ou de communication tant pour
les familles que pour le système scolaire.
En dépit des progrès réalisés, depuis la loi du 11 février 2005, quant à l’accueil scolaire (libre accès des élèves en situation de
handicap dans les établissements scolaires communs proches de leur domicile), la situation de scolarisation de ces élèves,
surtout après 16 ans, demeure imparfaite. À peine 30 % sont scolarisés en milieu ordinaire après 18 ans, contre 80 % en
moyenne pour les jeunes de cet âge.
Quel bilan peut-on dresser de la situation scolaire ? À la rentrée scolaire 2011, 210 000 élèves en situation de handicap étaient
scolarisés dans un établissement ordinaire, dont 80 000 en collèges et lycées, et 71 000 en établissement spécialisé.

Dangers

Tous âges
— Vous ne devez pas maintenir l’adolescent dans votre dépendance ; il vous faut au contraire lui apprendre à se débrouiller
par lui-même le plus possible. Quand on est dans une situation de handicap, l’on est souvent contraint de demander de l’aide.
C’est parfois humiliant s’agissant de choses ou de situations intimes de la vie quotidienne (comme la toilette, par exemple).
Sachez qu’il est important pour l’adolescent de faire un maximum de choses par ses propres moyens, si limités soient-ils, de
tester ses capacités réelles.
— Vous ne devez pas penser qu’un enfant en situation de handicap n’a pas le même désir que les autres adolescents
d’expérimenter, de tenter des choses (qui peuvent vous paraître impossibles).

Propositions

Tous âges
— Lâchez un peu la bride de vos enfants. Les habitudes de surprotection naturelle doivent laisser la place à plus de liberté. Ces
adolescents doivent, rappelons-le, tester leurs capacités, faire leurs preuves. « J’ai touché à différents sports juste pour me
prouver que j’en étais capable parce que l’on m’avait toujours dit : fais pas ci, fais pas ça ! T’as un handicap », se souvient
Marc sur un forum canadien concernant la prise de conscience de sa différence. « Empêcher quelqu’un de faire quelque chose,
ajoute-t-il en guise de conclusion, c’est aussi lui créer des barrières qui peuvent le handicaper. »
— Laissez sortir vos enfants avec des amis, laissez-les utiliser les transports publics pour se rendre à l’école par exemple.
Faites confiance en somme comme vous le feriez pour n’importe quel enfant « normal ». Et puis laissez-les communiquer.
Vos adolescents veulent un téléphone portable, un ordinateur. Consentez à leur désir : ils ont besoin eux aussi de nouer des
contacts, d’entretenir des liens amicaux. Pouvoir échanger avec des garçons ou des filles de son âge, c’est important à
l’adolescence. Il faut donc permettre à l’adolescent en situation de handicap d’avoir une vie sociale comme tous les autres
adolescents, de recevoir des amis, de les visiter, de sortir avec eux, de faire du sport en club, du théâtre…
— Ne les renvoyez surtout pas à leur handicap. Aidez-les à s’aimer, à s’accepter tels qu’ils sont, à développer des pensées plus
positives sur eux-mêmes, à mettre mieux en avant leurs qualités, leurs capacités – qu’ils ne soupçonnent pas toujours.
Homosexualité

Bon à savoir
Il existe plusieurs orientations sexuelles chez l’Homme. L’hétérosexualité est la plus fréquente. L’homosexualité fait partie
des orientations différentes.
Longtemps considérée comme une maladie (elle ne sortira du répertoire des pathologies qu’en 1973), l’homosexualité a même
constitué une infraction pénale en France jusqu’en 1982. Mais certains pays, principalement musulmans, la considèrent encore
comme telle, la punissant parfois de la peine de mort.
L’homosexualité n’est ni un « choix » (de vie) ni la manifestation d’un trouble du comportement acquis durant l’enfance. Les
psychanalystes traditionnels continuent pour leur part de relier l’homosexualité à un attachement excessif à la mère (ou à une
admiration amoureuse au père).
L’homosexualité n’est pas non plus une faute d’éducation. Il semble qu’elle soit de nature génétique.

Dangers

Tous âges
— Rejeter son enfant au motif qu’il est homosexuel, c’est-à-dire différent, est une ignominie. Voilà bien en effet une curieuse
façon d’aimer quand on est parent. Par ailleurs, essayer à tout prix, allant d’un spécialiste à un autre, de transformer votre fils
ou votre fille en hétérosexuel/le, est à la fois vain et indigne de votre part.
— Culpabiliser enfin : « Mais qu’ai-je pu bien faire pour qu’il soit ainsi ? » est une attitude également à rejeter.

Propositions

Tous âges
Soutenez votre enfant, car la découverte de cette différence, souvent à l’adolescence, est traumatique pour le jeune garçon/la
jeune fille. Il/elle va donc d’abord chercher à changer, à être comme les autres. Il/elle va consulter des médecins, espérant
devenir hétéro « comme tout le monde ».
Hyper-sexualisation

Bon à savoir
Le débat sur l’hyper-sexualisation (des petites filles ? des jeunes filles ? on ne sait plus trop) est fort mal posé. De quoi parle-
ton, ou de quoi veut-on parler, en usant de ce terme choquant et inquiétant à la fois ?
Les concours de mini-miss (des enfants), très en vogue aux États-Unis, qui ont déclenché l’inquiétude dans notre pays et
suscité – sans doute au nom du principe de précaution – de la part de la ministre de la Santé de l’époque, Roselyne Bachelot,
une enquête officielle, demeurent en France un épiphénomène sans grande portée. Les petites filles de chez nous continuent,
comme elles l’ont toujours fait, à emprunter un peu de produits de maquillage à leur maman ou quelques vêtements de leur
goût, qui les font ressembler à de plus « grandes personnes ».
L’important alors n’est-il pas de ne pas offenser la décence ? Un maquillage, très prononcé, pour se rendre en classe, ou une
jupe extra-courte, des escarpins aux pieds sont, à l’évidence, problématiques quand l’enfant ou la jeune adolescente se trouve à
l’extérieur de la maison.
Cependant, en règle générale, le terme d’« hyper-sexualisation » ne convient pas pour évoquer le désir des très jeunes filles de
ressembler à des jeunes filles plus âgées.

Que désigne ce terme ?


C’est assurément le projet conscient de donner un caractère sexuel à une conduite ou à un produit donné. Or, les petites filles
de moins de 8 ans ne sont pas dans cette intention. Ce qu’elles recherchent, c’est de paraître une plus « grande personne »
(phénomène d’imitation bien connu chez les enfants). Quant à leur désir, il est celui de la séduction, pas du « sexe » (au sens
de « pratique » sexuelle, ce que le mot « sexualisation » laisse tout de même entendre). Les petites filles veulent plaire. Plaire
pour être « populaires » (voir « Populaire »), c’est-à-dire aimées, admirées. Et plus le temps passe, plus ce désir s’accroît. Un
désir qui s’affirme aujourd’hui par une féminité retrouvée, réhabilitée, après des décennies où elle se cachait, presque
honteuse.
Par leurs tenues vestimentaires (qui posent parfois tant de problèmes à l’institution scolaire), les jeunes filles de 8-15 ans
affichent une identité sexuée dont elles sont fières. Faut-il leur reprocher cette fierté ? Les filles, qui montrent leur féminité,
qui la mettent en valeur, se sentent-elles pour autant soumises ou « putes » (pour les plus grandes) ? Non, elles ne se vivent
pas comme des « femmes-objets » – idée colportée par certaines « grandes personnes » (dont la bonne foi n’est pas en cause,
mais qui se trompent dans le diagnostic).
Féminines et égales, les « nouvelles adolescentes » ne développent en effet aucun « complexe d’infériorité » par rapport aux
garçons. Certes, quand l’outrance vient, la féminité peut devenir « hyperféminisation ».
Que reste-t-il alors de l’« hyper-sexualisation » ? Nous pensons qu’elle est ailleurs que dans le jeune corps féminin, qu’elle est
dans le corps social, dans l’esprit de nos gouvernants économiques et publicitaires. C’est bien la société qui est hyper-
sexualisée, pas la jeune adolescente, qui n’est ici somme toute que bouc émissaire.

Dangers

8-12 ans
La féminisation des petites filles et des jeunes adolescentes ne doit pas dépasser la mesure. Il vous appartient en tant que mère
de rappeler à votre enfant qu’à 5 ou 6 ans (moins parfois), il y a des tenues que l’on ne peut pas accepter d’une petite fille en
dehors de la maison. Ce n’est pas toujours facile. D’importantes offensives médiatico-commercialo-publicitaires, toujours plus
arrogantes, poussent vos enfants vers toujours plus d’outrances vestimentaires. On se souvient de la polémique née il y a
quelques années autour du string, ou de celle, en Grande-Bretagne, des soutiens-gorge rembourrés à destination de très jeunes
filles.

Autres âges
La recherche de féminité est naturelle. Il est normal que vos enfants devenus adolescents cherchent à séduire. Le vêtement les
y aide. Mais ne cherchez pas à leur imposer vos goûts.
Propositions

8-12 ans
À cet âge où les achats se font encore en famille, suggérez vos préférences sans chercher à les imposer. Pourvu, une fois
encore, que la décence soit respectée, le reste est affaire de goûts !

Autres âges
La liberté vestimentaire des adolescents n’est plus contestée dans les familles actuelles. Valorisez leurs choix. Ou n’en dites
rien !
Idées reçues

Bon à savoir
L’adolescence, c’est d’abord un « DISCOURS sur », une REPRÉSENTATION. Cet âge est donc gangrené par les idées
reçues, qui sont autant de mythes puissants venant faire barrage à la connaissance de cette période de la vie. Toutes ces idées
en effet sont soit fausses, soit non démontrées par le travail scientifique.
Nous allons en donner quelques exemples, en indiquant à côté de chacune leur fausseté (par la lettre F) ou leur non-
démonstration (par les lettres ND) :
– L’adolescence est une rupture brutale d’avec l’enfance. C’est l’idée chère à Rousseau de « seconde naissance ». F
– L’adolescent est une sorte d’« opposant né ». C’est l’idée qu’il doit s’opposer pour se poser. F
– L’adolescent est « étranger » à lui-même, il ne se reconnaît plus dans le miroir, il est mal dans sa peau. F
– L’adolescent est un dépressif. F
– L’adolescent est ambivalent, plein de contradictions, à la fois dans le désir d’autonomie et le besoin de dépendance. F
– L’adolescent est un violent par définition. F
– L’adolescent aime le risque et les pratiques extrêmes, c’est une espèce de spécialiste des conduites addictives. F
– L’adolescent est fatigué et fragile à cause de la poussée pubertaire. ND
– L’adolescent est timide et maladroit. ND
– L’adolescent est influençable. ND
– L’adolescent est insouciant. ND
– L’adolescent est affecté par des sautes d’humeur permanentes. ND
– L’adolescent ne veut pas être compris et n’a de cesse de rejeter les adultes. F
– L’adolescent est un idéaliste toujours prêt à changer le monde. ND
– L’adolescent est un excentrique qui cherche à se faire remarquer. ND
– L’adolescent a honte de ses parents. F
– L’adolescent est sujet au réveil des pulsions œdipiennes incestueuses. ND
– L’adolescent est narcissique et égoïste. F
– L’adolescent est immature. F
– L’adolescent paisible est un adolescent en danger. F
– L’adolescent est fasciné par la mort et le morbide. F
Etc. La liste n’a pas la prétention d’être exhaustive !

Dangers

Tous âges
Ne dialoguez pas avec des idées reçues, mais avec des personnes qui toutes et chacune ont leur caractère, leur personnalité.
Considérez que l’adolescent est d’abord une personne, une personne normale, mature, pensante, qui ne doit plus être traitée
comme un enfant. Considérez l’adolescent non comme un problème, mais comme une ressource.

Propositions

Tous âges
Derrière votre enfant, il y une personne : traitez-le comme telle.
Identité

Bon à savoir
On dit encore couramment que l’adolescence est le temps de la « construction » de l’identité, quelle drôle d’idée ! N’en avait-
il pas une auparavant ? Nous retrouvons ici la vilaine idée de « rupture » qui marquerait le passage de l’enfance à ce deuxième
âge de la vie ?
De fait, l’adolescent ne construit rien, ne fait table rase de rien, il se borne à conforter son identité antérieure, à l’enrichir de
ses nouvelles capacités. Il est vrai que, dans les premiers temps de son adolescence, cette consolidation identitaire passe par
une phase d’identification, non pas à l’« adulte-parent » comme autrefois, non pas au « père tout-puissant », mais aux « grands
pairs » bienveillants.

Dangers

Tous âges
Chaque être humain a son identité propre. Ne cherchez pas à retrouver la vôtre dans celle de vos enfants.

Propositions

Tous âges
Encouragez votre enfant dans son « affirmation identitaire ».
Intelligence

Bon à savoir
Marcel Proust, dans À l’ombre des jeunes filles en fleurs, l’avait pressenti bien avant la science : l’adolescence est un temps
d’intelligence. Piaget confirmera plus tard qu’elle est le temps de l’abstraction, ce temps où l’on apprend à « penser sur les
pensées », à formuler des hypothèses. À 14-15 ans, les capacités cognitives s’accroissent, les interrogations sur le monde, les
autres… se multiplient. C’est un signe positif d’évolution.

Dangers

Tous âges
Ces mauvais résultats scolaires, qui vous inquiètent tant, ne sont pas signe d’inintelligence, mais de manque d’efforts par suite
de manque de motivation. On sait aujourd’hui que les formes d’intelligence sont multiples. À cet égard, 80 % des échecs
scolaires seraient imputables à l’école elle-même qui ne mobilise pas les intelligences spécifiques des élèves échouant : elle
n’attend d’eux qu’une forme d’intelligence, l’intelligence logico-mathématique, qui n’est pas la leur.

Propositions

Tous âges
Soyez fiers des capacités de vos enfants : ils en ont tous. Mais chacun a sa forme d’intelligence qui lui est propre.
Internet

Un horrible fait divers


Victime de chantage sur Internet, un Brestois de 18 ans se suicide. Localisée en Côte d’Ivoire, la femme maître chanteur
l’aurait menacé de dévoiler sur Facebook une vidéo le montrant nu s’il ne la payait pas.

Bon à savoir
Internet fait peur aux parents (même si plus de la moitié déclarent que leur enfant ne court pas de risque en fréquentant la
Toile et que plus de 90 % déclarent savoir ce que font leurs enfants lorsqu’ils sont en ligne). C’est malgré tout
(paradoxalement ?), aux yeux d’une majorité importante, l’espace de tous les dangers. Pour ces parents, les enfants jouent
toujours trop (trop longtemps) aux jeux vidéo, ils chattent ou échangent toujours trop (sur leurs blogs ou les réseaux sociaux à
la mode, comme Facebook, dont, nous avons vu qu’ils sont de grands adeptes), et cela au risque, pensent-ils, de faire de
mauvaises rencontres. Une enquête anglaise, très inquiétante, publiée fin octobre 2012, indique que 88 % des images déposées
sur Internet par les adolescents se retrouvent sur des sites pornographiques. Nous n’avons pas de données pour la France.
Une chose est sûre, les adolescents sont de grands usagers d’Internet : à l’entrée au lycée, 46 % des garçons et 65 % des filles
sont connectés quotidiennement. Rappelons que la moitié d’entre eux se connectent seuls. Les 15-18 ans déclarent être
connectés en moyenne 5 h 30 par jour et entrer quotidiennement en contact avec quinze amis sur les réseaux sociaux. Les plus
jeunes sont moins présents. Selon une enquête réalisée, en novembre 2010, en Charente-Maritime auprès de 2 000 collégiens,
plus de la moitié des élèves de 3e passent plus de 3 heures par jour sur Internet.
D’après une étude réalisée par l’éditeur de logiciels antivirus Trend Micro et publiée en octobre 2011, à la question : « Quel
outil te manquerait le plus si tu devais t’en passer ? », 28 % des 9-16 ans et 36 % des 13-16 ans répondent : « Internet ».

Que font les adolescents sur Internet ?


Un clivage fort existe entre garçons et filles. E-mails, blogs, chats et Facebook représentent 80 % de la consommation des
jeunes internautes féminins. Quant aux garçons, ils consacrent 40 % de leur temps aux jeux en ligne, 30 % à regarder des
vidéos, le reste du temps est consacré aux forums et aux achats. L’enquête charentaise évoquée plus haut, menée auprès de
collégiens, indique que 62 % des filles et 31 % des garçons, tous âges confondus, disent ne jamais aller sur des sites
pornographiques (16 % des garçons et 2 % des filles avouant au contraire y aller très souvent). S’agissant des sites « violents
», « choquants », « horribles », 46 % des internautes féminins et 28 % des internautes masculins disent les éviter.

Qu’en est-il donc des « mauvaises rencontres » ?


Beaucoup de parents redoutent qu’abrité derrière l’anonymat, tel ou tel prédateur pédophile n’entre en contact avec leur
enfant. Qu’en est-il exactement ? Selon une étude américaine, un enfant sur quatre en ligne a déjà été sollicité par un prédateur
sexuel, un sur cinq a été victime d’envoi d’images pornographiques. Les chiffres français sont un peu différents. Si 44 % des
adolescents évoquent ce risque, seuls 7 % se sont vus proposer une rencontre par un inconnu.
Bien sûr, il existe un profil d’enfants ou d’adolescents plus susceptibles que d’autres d’être inquiétés par des personnes
malveillantes : jeunes délaissés ou ayant des difficultés de communication avec leurs parents, enfants curieux ou
psychologiquement fragiles.
Un autre danger, ce sont les sectes qui ont fait d’Internet un lieu de recrutement d’adolescents en détresse (cibles de choix).
Et, bien sûr, il y a les images pornographiques. Il existerait au moins 800 000 sites pornographiques sur Internet. On le sait,
avec à peu près n’importe quel « mot-clé », parfois des plus anodins, comme whitehouse.com , maison privée, sensuelle,
bande dessinée, manga, l’on peut se retrouver sur un tel site. Sans compter qu’à chaque instant de la navigation, l’on peut
recevoir ce que l’on appelle des pop-up, c’est-à-dire, par le truchement de petites fenêtres qui s’incrustent sur l’écran, des
invitations à cliquer sur des liens qui dirigent vers de tels sites. Au final, 87 % des jeunes de moins de 14 ans ont déjà vu sur le
Net des images pornographiques et près du tiers des 50 sites préférés des 14-15 ans comportent de telles images.
Quel est l’impact de l’exposition à de telles images ? Pour les psys, ces images peuvent être nuisibles en ce qu’elles assurent la
satisfaction immédiate d’une pulsion sur un mode bestial, au préjudice souvent de la femme et de sa dignité. Les jeunes
spectateurs n’ont alors pas le temps de se construire affectivement. Ils sont plongés dans le « tout, tout de suite », sans
considération de l’avis de l’autre, réduit au rang d’objet.
Pourtant, malgré tous ces dangers potentiels, Internet n’est pas un outil « dangereux en soi » (il peut même être très utile : il
aide à faire les devoirs, permet d’écouter de la musique ou de regarder des films, en toute facilité).
La génération « digitale native »
Les enfants et les adolescents sont nés avec le Web, qui fait désormais partie de leur vie. On les appelle pour cette raison la
génération « digitale native », grandie le pouce sur un écran. Selon une étude du groupe de communication Aegis Medias
France, publié en mars 2012, 89 % des 7-12 ans surfent sur Internet chaque semaine et la fréquence de connexion croît avec
l’âge : 28 % des 10-12 ans surfent tous les jours et près de la moitié ont un compte pour discuter en ligne. À signaler que les
plus petits sont déjà présents sur la Toile : 68 % des 3-6 ans y vont chaque semaine (soit entre 10 et 20 minutes par jour), mais
ils sont accompagnés par leurs parents, ce qui n’est pas le cas des 10-12 ans qui sont 69 % à surfer seuls.
Activités favorites : dans cet ordre, le visionnage de vidéos, puis les jeux et l’écoute de musique. Selon des données extraites
d’une enquête réalisée en octobre 2008 auprès de 804 parents d’enfants et d’adolescents âgés de 6 à 17 ans, 96 % jouent aux
jeux vidéo (que leur achètent les parents dans la plupart des cas) et 85 % jouent au moins 1 fois par semaine et un tiers au
moins 1 fois par jour.
Les tout-petits naviguent aussi sur les sites de magasins de jouets pour trouver les nouveautés.
Au fil des ans, la « consommation numérique » s’accroît. Selon l’étude réalisée par le Bureau régional Europe de
l’Organisation mondiale de la santé, publiée en septembre 2012, chez les 11-15 ans l’usage du téléphone mobile et de
l’ordinateur a fortement augmenté entre 2006 et 2010. Plus de 90 % des 11-15 ans interrogés déclarent consacrer aux écrans
plus de deux heures par jour (écourtant d’autant les sorties du soir avec les copains). Ce chiffre, nous l’avons vu, est presque
multiplié par trois chez les 15-18 ans.

Dangers

8-12 ans
— À éviter de faire : leur interdire purement et simplement tout ordinateur à la maison. Ou bien, s’ils en ont un, de le placer
dans une pièce commune, comme le salon ou la salle à manger. Si l’ordinateur est dans leur chambre (selon une étude datant
de 2010, 1/3 de collégiens parisiens de 6e ont une connexion Internet dans leur chambre), fixer d’autorité des heures d’usage et
des durées d’utilisation (les durées données par les experts selon l’âge des enfants sont totalement arbitraires).
— À éviter encore : lire leurs messages ou consulter l’historique de navigation de leurs conversations. C’est tout simplement
une atteinte à leur vie privée.
— Ne pas parler d’Internet est aussi une chose à proscrire. Or les deux tiers d’entre vous avouent ne rien dire à ce sujet à leurs
enfants, ou pas grand-chose ; 43 % disent même ne pas leur donner souvent de règles quant à l’utilisation de cet outil. Et
environ les deux tiers encore reconnaissent ne pas les informer des dangers.

Autres âges
Ne soyez pas intrusifs. Vous avez pointé les problèmes liés à Internet quand vos enfants étaient plus jeunes. Ils savent à
présent ce qu’ils doivent faire ou ne pas faire.

Propositions

8-12 ans
— Vous pouvez installer un logiciel de contrôle parental. Plus de la moitié d’entre vous (56 %) l’ont déjà fait, mais il vous
reste à apprendre à bien vous en servir, ce qui n’est pas toujours le cas. Il faut rappeler que, selon une enquête récente de
l’académie de Versailles, l’âge moyen du premier accès à Internet est de 8 ans.
— Vous devez en tout cas être vigilants s’agissant des tout-petits. Une étude de la société AVG réalisée, en janvier 2011, dans
plusieurs pays occidentaux, auprès de 2 000 enfants, montre que 58 % des jeunes enfants sont capables de jouer à un jeu vidéo
simple, mais qu’ils ne sont que 11 % à savoir nouer leurs lacets ! Un usage intensif d’Internet entraînerait aussi une baisse de
la faculté de concentration, préjudiciable à la lecture.

Autres âges
— Vous devez informer vos enfants qu’Internet, c’est donc la possibilité (même faible) de faire de mauvaises rencontres, de se
retrouver, parfois malgré soi, sur des sites interdits (pornographiques ou violents), de tomber dans la dépendance aux jeux
(jeux vidéo et aujourd’hui jeux de hasard comme le poker), d’être victime de rumeurs, de cyberbullying, de découvrir
l’exhibitionnisme sexuel. À cet égard, 30 % des 8-17 ans disent avoir été gênés ou choqués, soit par des images
pornographiques, soit par de la violence, soit par des propos racistes ou homophobes.
— Vous devez rappeler à vos enfants la LOI, qu’il est interdit de diffuser de fausses informations, de télécharger ou de
revendre des fichiers, qu’il ne faut pas répondre aux mensonges publicitaires alléchants, où l’on est toujours gagnant de
quelque chose… sans ne rien faire naturellement, qu’il est interdit, par photos, films, de mettre en scène, de façon humiliante,
telle ou telle personne mal-aimée (élève, enseignant…). Sachez que, selon une étude de l’Unaf d’octobre 2009, 7 % des 12-17
ans reconnaissent avoir déjà filmé leur prof. Si l’on en croit la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés),
les insultes pleuvent même sur les profs sur la Toile. C’est ce que l’on appelle le « cyberbullying » (terme anglais qui vient de
« bully » qui signifie « tyran ») qui est aussi pratiqué avec le portable, les blogs et aujourd’hui les réseaux sociaux. Interdit
encore de faire du copiage pour l’école (voir l’utilisation abusive de l’encyclopédie Wikipédia : un professeur raconte qu’un
jour, sur 30 devoirs d’histoire, 11 étaient identiques, les élèves s’étaient bornés à recopier des passages de l’encyclopédie en
question – précisons qu’ils ne sont pas les seuls à le faire, on peut ajouter les enseignants eux-mêmes, les écrivains…
— De la même manière, vous devez mettre en garde vos enfants contre les dangers de l’exhibitionnisme sexuel. Tout le
monde a entendu parler des jeux libertins auxquels se livrent aujourd’hui sur la Toile certaines adolescentes. On appelle cela le
« teen sex pics ». Il faut savoir qu’un adolescent de 10-15 ans sur deux utilise une webcam (dont plus de 60 % sans aucune
surveillance). Cela permet de filmer des ébats sexuels, des strip-teases minutieux, etc. Donc le conseil est le suivant : éviter
l’utilisation de la webcam – même avec ses amis, l’interdire absolument face à un inconnu. On ne sait jamais qui se cache
derrière l’autre ordinateur.
— Vous devez dire aussi à vos enfants qu’Internet ne doit pas les empêcher de nouer de vraies relations, des relations
RÉELLES, et qu’il faut naturellement qu’ils continuent de voir leurs amis et de pratiquer des activités avec eux.
Mais soyez ici rassurés. Contrairement aux idées reçues, l’utilisation des nouveaux médias ne semble pas, pour 84 % des 15-
18 ans, se faire au détriment d’échanges en face à face. D’après le sondage Ipsos/santé de mars 2012, les jeunes rencontrent
quotidiennement physiquement deux fois plus d’amis que les adultes (11 contre 5) et ils consacrent 2 h 30 en moyenne par
jour à parler de visu avec eux, soit deux fois plus que sur les réseaux sociaux.
— Si votre enfant passe beaucoup de temps sur Internet, c’est qu’il a stans doute un problème. Les études montrent en effet
que les adolescents en souffrance sont les plus gros consommateurs du Web. Il faut alors discuter et trouver une réponse
thérapeutique appropriée.
— Outre l’usage intensif d’Internet, avec les conséquences signalées plus haut pour les 8-12 ans, signalons un dernier danger,
celui des tâches multiples accomplies simultanément : envoyer un SMS depuis le portable, un e-mail depuis l’ordinateur tout
en rédigeant un commentaire à un ami Facebook, et en jetant un coup d’œil sur le poste de télévision. Les spécialistes
recommandent – à juste titre – d’essayer de rester concentré un temps donné sur une tâche spécifique, et une seule.
Isolement

Bon à savoir
Solidaires parce que solitaires, ainsi décrivions-nous les adolescents… il y a près de vingt ans (voir Le Peuple adolescent,
Julliard, 1994). Ce constat est plus vrai que jamais. Les adolescents, et avant eux les enfants, sont seuls, très souvent seuls. Ils
sont seuls à la maison. Quand ils rentrent de classe, leurs parents, eux, ne sont pas encore rentrés du travail : ce sont « les
enfants à la clé » comme on les a jadis nommés, ou les « enfants de 16 h 30 ». L’on voit déjà l’inquiétude de certaines familles
à l’annonce du ministre de l’Éducation du raccourcissement de la journée de classe. Si les enfants quittent l’école une heure
plus tôt, qui va assurer la prise en charge de l’heure qui suit ? Les municipalités manquent parfois de moyens : elles ne
pourront toutes assumer l’activité des élèves ainsi libérés.

Dangers

Tous âges
Ne négligez pas le sentiment de solitude de vos enfants.

Propositions

Tous âges
Soyez à l’écoute, montrez-vous disponibles.
Jeune adolescent(e)

Bon à savoir
L’enfant d’aujourd’hui se jette dans l’adolescence comme le chien fougueux sur son écuelle. L’enfant, très vite, en a assez
d’être petit, c’est-à-dire, en clair, d’être commandé, manipulé ; ce qui l’intéresse, c’est d’être grand. Alors, de plus en plus
précocement, il s’immerge dans la culture de ses « grands pairs » adolescents, adopte ses comportements, apprend à parler
comme eux, à se vêtir comme eux, à manger comme eux (de la restauration rapide de préférence), à écouter leurs musiques
(du rap, du rock, de la techno, de la pop, que sais-je encore ?), à pratiquer leurs sports (du skate ou du roller ou toute autre
pratique libre), à fréquenter assidûment Internet. Il s’imprègne de cette culture, au sens animal du terme. Il « s’adolescentise »
en somme.
Conséquence : à 8-9 ans, l’enfant prend congé de son enfance, déroutant à la fois parents, éducateurs et spécialistes, les uns et
les autres ne manquant pas d’être surpris de pareille « précipitation ». D’où, de leur part, par un « mécanisme de défense », le
« déni » du changement. Il faut pourtant qu’enfance se passe, non ?

Dangers

8-12 ans seulement


— Il ne faut ni être dans le déni de cette évolution ni en avoir peur. Certes, l’on vous dit que les enfants ne doivent pas grandir
trop vite, que c’est dangereux pour leur équilibre, qu’il faut que le « travail » de l’enfance se poursuive à son rythme, etc.
C’est absurde. Autant dire qu’au nom de la normalité il faudrait revenir à l’âge des cavernes, habiller les petites filles en
jupettes roses comme il y a cinquante ans, leur interdire l’envie de plaire…
— Le marketing, la publicité poussent au grandissement accéléré, à la maturation rapide. En juillet 2012, la presse nous
apprend ainsi que des baby-tablettes numériques sont à présent conçues pour des enfants dès l’âge de 18 mois. Et de nous
annoncer qu’en 2012 le marché des tablettes pour les 3-9 ans pourrait atteindre les 500 000 pièces. De quoi effrayer tous les
psys de la planète !

Propositions

8-12 ans seulement


Il faut traiter les 8-12 ans comme ce qu’ils sont : de jeunes adolescents. Donc, ranger les jouets au placard : vos enfants (parce
qu’ils n’en sont plus) n’en veulent plus. La preuve ? Cette enquête menée par le journal Le Monde à la veille de Noël 2012. Un
responsable commercial l’affirme : « Les enfants ont changé, ils sont mûrs plus vite, plus avertis qu’autrefois. » La faute en
incombe, précise ici ce responsable, à « l’évolution de la technologie bien sûr, mais aussi à l’exposition des enfants aux
médias, que ce soit un média passif comme la télévision, ou actif, comme Internet ou le mobile ».
Conséquence : le dernier achat de jouet se fait vers 9 ans, 9 ans et demi, alors qu’il y a vingt ans, c’était plutôt vers 11 ans (Le
Monde, 9-10 décembre 2012). Ce que veulent, en 2012-2013, les 8-9 ans, à l’image de Thomas, 8 ans, ce sont des ordinateurs
portables, des iPod. Les nouvelles technologies les passionnent.
Jeune maman

Les chiffres-clés (2011)


18 000 grossesses de mineures chaque année ;
13 500 IVG ;
4 500 naissances ;
35 % auront un autre enfant dans les deux ans.

Bon à savoir
Chaque année, en France, ce sont 18 000 jeunes filles mineures qui tombent enceintes ; 4 500 conservent leur bébé, devenant
ainsi jeunes mamans (elles étaient 11 000 il y a trente ans). À signaler qu’il y a trois fois plus de jeunes mères en Grande-
Bretagne et dix fois plus aux États-Unis. Ces événements sont néanmoins, et évidemment, jugés suffisamment sensationnels
pour que la télévision s’y intéresse. En 2011, plusieurs émissions seront ainsi consacrées aux grossesses et maternités de
mineures : « 16 ans et enceinte » sur MTV, « 17 ans et maman » (qui est la suite sur MTV), « Clem, maman trop tôt » sur TF1.
Un chanteur de R’n’B comme Colonel Reyel en fera même un tube : « Aurélie n’a que 16 ans, mais elle attend un enfant. »
Le profil de ces adolescentes est difficile à définir. Beaucoup sont cependant en échec scolaire et voient dans le fait d’être
maman l’occasion de devenir « quelqu’un ». Mère est en effet, même à ce jeune âge, un statut positif dans notre société.
Chercher la grossesse, c’est aussi parfois, pour une adolescente, le moyen de tester sa fertilité : voir si l’on est « capable » (un
peu l’équivalent du premier rapport sexuel chez le garçon). De combler des carences affectives, un sentiment d’abandon des
parents trop absorbés par leur travail.

Dangers

8-12 ans et 13-14 ans


Non concernées, ou peu concernées, par ce problème.

Autres âges
— Se mettre en colère est un mauvais réflexe, et nous passons sur les bordées d’injures !
— Conseiller, voire ordonner de ne pas garder l’enfant en recourant à une IVG est par ailleurs tout simplement monstrueux.
L’on connaît les arguments des parents : « Tu es trop jeune pour t’occuper d’un bébé », « Tu as tes études à poursuivre », « Tu
te rends compte quelle réputation on va avoir dans le quartier… après ça ! »

Propositions

8-12 ans et 13-14 ans


Pas ou peu concernées par cette question.

15-18 ans
— Bien sûr, il peut y avoir de « bonnes » raisons pour ne pas conserver un bébé. L’adolescente peut ne pas être prête
mentalement, ou bien ne pas être en mesure de conjuguer scolarité et soins au bébé (il faut rappeler déjà qu’entre 50 et 75 %
des jeunes filles abandonnent leurs études en cours de grossesse).
— Mais il faut parler calmement de la situation. S’il apparaît que la jeune fille a le désir sincère d’être maman, que c’est même
la chose la plus importante de sa vie, il faudra vous rendre à ses arguments et l’aider dans ce qui sera de toute façon une
épreuve, à l’issue incertaine de surcroît (les études montrent que les trois quarts des jeunes époux se séparent dans les cinq ans,
la mère restera donc seule à élever son enfant).
— Le bébé étant arrivé, le plus dur sera la répartition des rôles entre tous les membres de la famille. D’abord, la maman ne
doit pas se substituer totalement à sa fille et élever l’enfant à sa place (ce que font parfois aussi certains grands-parents). De la
même manière, l’enfant ne doit pas se soustraire aux tâches de soins et d’éducation du bébé. La jeune maman, après tout, est
responsable de son enfant, sa mère vient en soutien et en conseil.
Jeux dangereux

Bon à savoir
S’il est moins question aujourd’hui de jeux dangereux dans les médias (on les signale à partir du début des années 2000), ils
sont cependant toujours aussi présents dans les cours de récréation, voire dans les chambres personnelles des enfants et des
adolescents (dans ce cas, corde et ceintures servent souvent au « jeu »).
Selon des chiffres extraits d’une enquête Ipsos datant de mai 2007, un million et demi des 15 ans et plus, soit 4 % de cette
population, auraient pratiqué le fameux « jeu du foulard » (encore nommé « rêve indien »), qui consiste, on le sait, à retenir sa
respiration ou à serrer le cou jusqu’à perdre connaissance. Dans cette catégorie, 6 % disent y avoir joué alors qu’ils n’avaient
pas 5 ans, 29 % entre 6 et 10 ans, 48 % entre 10 et 14 ans et 28 % à 15 ans et plus. Le but du jeu est clair : ressentir des
sensations fortes, avoir des visions hallucinatoires. Les « joueurs » expliquent que ce « jeu » leur apporte un sentiment de
bien-être, l’impression de « planer », d’où la répétition du geste, parfois plusieurs fois par jour.
Les risques de la strangulation ou de la manipulation du sternum sont connus aussi. Freinant l’irrigation du cerveau, il peut
s’ensuivre coma, handicap, décès quelquefois (entre 10 et 15 par an chez les 7-18 ans).
Il existe une multitude de jeux similaires, comme le « jeu de la tomate » qui consiste à retenir sa respiration le plus longtemps
possible afin d’atteindre un niveau de « plénitude » (les fameuses sensations évoquées plus haut).
Il y a aussi d’autres jeux à risque, qui ne sont pas de strangulation, comme le « jeu de la canette » (les participants forment un
cercle et celui qui ne rattrape pas la canette est frappé par les autres). Le « petit pont massacreur » relève du même principe (le
ballon passe-t-il entre vos jambes, vous serez passé à tabac).

Dangers

Tous âges
Penser que cela n’arrive qu’aux autres, que vos enfants sont trop bien portants pour faire pareille bêtise. En réalité, ce jeu est
moins affaire de bien-portance ou de mal-portance que de défi entre copains, auquel il est parfois bien difficile de se
soustraire.

Propositions

Tous âges
Il vous faut repérer les indices de cette pratique, comme des traces suspectes dans le cou, une fatigue anormale ou des
problèmes de concentration en classe. Si de tels indices existent, ne réprimandez pas, essayez de savoir ce qui s’est passé, et
puis, comme toujours, faites un peu de prévention. Indiquez par exemple que serrer trop fort la carotide peut entraîner un arrêt
du cœur ou laisser des séquelles cérébrales. Si vous retrouvez votre enfant inanimé, il faudra alors essayer de le réveiller par
des gifles.
Jeux vidéo

Bon à savoir
Les jeux vidéo représentent un formidable marché. Depuis 2005, ce marché dépasse même, en chiffres d’affaires, celui de la
musique. La Wii, lancée en décembre 2006, est devenue rapidement la console de jeux la plus vendue en Europe : il s’en est
écoulé près d’un million, en Europe, en un seul week-end ! Il faut savoir qu’aujourd’hui neuf enfants sur dix jouent aux jeux
vidéo.
Nous n’avons pas la place pour exposer ici dans le détail tous les jeux à destination des adolescents. Signalons un jeu
particulièrement populaire, le GTA, un jeu de massacre sorti en 2004 (le 4e de la série a été produit en 2008) ; 7 millions
d’exemplaires de ce jeu ont été vendus en France et 70 millions dans le monde.
Comme nous l’avons vu pour Internet, les jeux vidéo ne sont pas dangereux en soi. Huit sur dix, d’après les spécialistes, ne
présentent pas de danger particulier. C’est une fois encore l’usage de ces jeux, quand il devient excessif, qui est
problématique. Situation fréquente chez certains joueurs. Plus de 40 % des parents (et 52 % des parents de garçons) trouvent
en tout cas que leurs enfants passent trop de temps à jouer, et un quart d’entre eux estime que ces jeux sont un sujet de dispute
en famille.

Le risque de cyberdépendance
Assurément, l’activité de jeu sur Internet est chronophage pour une raison simple : le joueur ne voit pas le temps passer. Il a
d’ailleurs un penchant à vouloir jouer la nuit, quand la maison est endormie, que les connexions sont de meilleure qualité et
qu’il y a donc plus de joueurs présents derrière leur écran. Car les jeux qui ont la préférence des joueurs sont bien sûr les jeux
en réseau. Il faut ici tout de même souligner que tout le monde joue aujourd’hui aux jeux vidéo, les filles comme les garçons,
les adultes comme les adolescents.
La cyberdépendance, plus importante dans des pays comme la Chine ou la Corée, touche en réalité toutes les classes d’âge, de
7 à 77 ans, selon la formule consacrée. Elle commence quand le joueur ne peut plus s’arrêter de jouer. Dès lors, le cycle
infernal débute. Le joueur se détache de toutes les activités qu’il pratiquait auparavant : sportives notamment. Et, bien sûr, en
raison de la fatigue accumulée, l’attention scolaire diminue et, avec elle, les bons résultats. La cyberdépendance peut, en outre,
provoquer des accès de colère, de véritables rages (voir ce spot mettant en scène un jeune Allemand en furie devant son clavier
bloqué), et conduire même au meurtre quelquefois (c’est arrivé récemment en Chine).

Dangers

Tous âges
Non seulement, il ne faut pas détourner les enfants et les adolescents des jeux vidéo, mais il faut les encourager à jouer un peu.
S’ils ignoraient totalement les derniers jeux à la mode par exemple, ils s’exposeraient à la marginalisation de leurs camarades
de classe.

Propositions

Tous âges
Avec les jeux vidéo, les enfants et les adolescents développent des qualités de rapidité et de réflexe, leur imagination aussi.
Dans certains jeux d’aventure, pour passer d’un stade à un autre, il faut réfléchir et persévérer. Dans d’autres, comme les jeux
de guerre, il faut de l’adresse. Les jeux en ligne, enfin, développent la sociabilité.
Un conseil : jouez avec vos enfants. Déjà 40 % d’entre vous le font. Il faut savoir à cet égard que les adolescents ne sont pas
les seuls à jouer aux jeux vidéo ; les adultes jouent beaucoup aussi. La moyenne d’âge du joueur vidéo est d’ailleurs
aujourd’hui de 34 ans.
Langage adolescent

Bon à savoir
Il a toujours existé un « langage jeune ». Les adolescents d’autrefois utilisaient beaucoup l’argot, langue assez crue issue du
monde de la prostitution et de la pègre. Ceux d’aujourd’hui s’appuient davantage sur le verlan, avec de nombreux emprunts à
d’autres langues comme l’arabe, le gitan, l’anglo-américain. Certains mots sont ainsi devenus très ordinaires et même banals,
comme « meuf » (fille), « keuf » (policier) – deux termes consacrés par Le Petit Robert il y a déjà vingt ans – et populaires
aussi bien chez les « lascars » des cités que chez les « petits bourges » des « beaux quartiers ».
Ce langage fonctionne, aujourd’hui comme hier, comme un signe de reconnaissance identitaire. Mais, dès qu’un mot est connu
(des adultes surtout), il est dépassé et vite abandonné. Ce langage se modernise donc sans cesse en s’enrichissant de nouveaux
mots ou d’anciens mots remaniés.

Dangers

Tous âges
— Ne méprisez pas ce langage, même – et nous y reviendrons –, si tous les mots ne sont pas acceptables. Les garçons
d’aujourd’hui ont leur « meuf », n’avions-nous pas nos « nana » ou « gisquette » ?
— En revanche, il ne faut pas tolérer les mots grossiers et orduriers, des mots dont le sens échappe parfois aux intéressés. Les
« sales bâtards », « conasses », « putes » – surtout si ces mots vous sont adressés – ne sont pas tolérables. C’est affaire de
respect dû d’ailleurs moins des enfants aux parents que de personnes à autres personnes. Entre humains, la convivialité doit
être de mise.

Propositions

Tous âges
Comme dans toute maison bien ordonnée, il y a une place pour chaque chose, dans la vie sociale, il y a un langage pour
chaque situation, chaque interlocuteur. Si, entre « potes », l’on parle le verlan, en classe ou, plus tard, dans les entreprises,
avec les profs ou les patrons, c’est le français que l’on parlera, et qu’il faudra parler si l’on veut s’intégrer. Soulignez-le à vos
enfants. Il existe aujourd’hui une réelle marginalisation de ceux et celles qui ne connaissant plus qu’une seule langue, celle de
leurs « potes », se retrouvent démunis par rapport aux autres jeunes (il faudra aussi perdre cet « accent cité » qui catalogue
trop).
Lecture

Bon à savoir
Toutes les études sociologiques (sérieuses) l’attestent : parvenus à l’âge de l’adolescence, les jeunes « décrochent » de la
lecture. Finis les Harry Potter tant aimés (plus de 20 millions d’exemplaires vendus) ! Selon une enquête du ministère de la
Culture, réalisée en 2012, si un tiers des adolescents de 11 ans lisent des livres « tous les jours », ils ne sont plus que 9 % à 17
ans (et majoritairement des filles – qui, selon une autre étude consommation junior de 2007 sont, chez les 11-14 ans, 44 % à
aimer lire, contre 29 % chez les garçons).
Il y a pire : 14,5 % des adolescents de 11 ans reconnaissent « ne jamais ou presque jamais lire un livre ». Un pourcentage qui
monte à 46,5 % chez les jeunes de 17 ans. Cette tendance se confirme depuis une trentaine d’années. Chaque génération lit
moins que la précédente.
L’image semble avoir définitivement pris le pas sur l’écrit. Une enseignante d’une classe de 5e à Montreuil (93) témoigne : «
Quand j’ai demandé à mes élèves s’ils préféraient lire sur papier ou s’asseoir devant un écran (pour des chats, des jeux, etc.),
ils ont choisi l’écran à 99,9 %. »
S’ils lisent encore un peu, ce sont des magazines, des BD : mangas en particulier (voir « Mangas »).

Dangers

Tous âges
Pas d’injonction à la lecture – de littérature par exemple. Pas de stigmatisation, pas de phrases du genre : « Au lieu de lire et
relire tes mangas, tu ferais mieux de lire de vrais livres, des romans classiques ! »

Propositions

Tous âges
La lecture est quelque chose d’important dans la construction identitaire. Elle apporte des figures d’identification utiles. Elle
est une réponse à l’ennui. Mettez entre les mains de vos enfants, d’abord des textes courts : il y en a de très beaux, ceux de
Camus par exemple.
Lolitas et lolitos

Bon à savoir
En mars 2012, Chantal Jouanno, sénatrice UMP, remettait à Mme Bachelot, ministre de la Santé, un rapport de 160 pages pour
lutter contre le phénomène d’« hypersexualisation des enfants ». Parmi les mesures phares proposées : l’interdiction de tous «
les concours de beauté avant 16 ou 18 ans, quelle que soit leur dénomination ». Principalement visés le « concours de mini-
miss », organisé en France depuis une vingtaine d’années, ainsi que tous les concours de village et autres défilés, mettant en
scène des petites filles de 3, 4 ou 5 ans, en maillot de bain.
Jean slim ou pantalon baggy, sac à main de marque, bijoux ou piercings, voici, à la sortie des écoles primaires ou du collège,
la silhouette des lolitas et lolitos (ces derniers, volontiers oubliés des médias). Les plus jeunes ont 6 ou 7 ans, les plus âgés 12
ou 13. Ce sont de « grands enfants » ou de « petits et moyens adolescents ». Grâce à des médias de plus en plus présents dans
leur quotidien – Internet concurrençant désormais la télévision –, ces garçons et filles s’imprègnent de la culture de leurs «
grands pairs », imitant leur langage, leurs codes vestimentaires, leurs goûts musicaux, leurs comportements et aspirations. Une
enquête que nous avons réalisée en 2002 montre que 35 % des enfants et adolescents de 7 à 11 ans veulent se faire tatouer.
Une façon de sortir de l’enfance.
Garçons et filles s’intéressent plus tôt à leur apparence, entrent plus vite dans des préoccupations de séduction. Les garçons se
veulent ainsi « virils-masculins » et les filles « féminines ». Cette évolution est à relier à un environnement médiatico-
commercial propice. La faute à la publicité et aux images sexuellement connotées. Le marketing qui s’est développé autour
des jeunes adolescents provoque une stimulation psychique (plus que sexuelle), un désir d’accès à l’âge supérieur. Des
vêtements parfois excessifs (sexy) sont présentés dans les magasins. On se souvient il y a quelques années de strings vendus à
des filles de 8 ans, ou, en Angleterre, de soutiens-gorge rembourrés.

Dangers

8-12 ans
— Certaines campagnes publicitaires vous encouragent à transformer vos grands enfants et vos jeunes adolescentes en « objets
de séduction ». D’autres, plus audacieuses encore, vous incitent à exhiber vos petites filles dans des défilés comme on le ferait
de simples poupées.
— Les « concours de beauté » ne sont pas un problème en soi, dès lors que la décence est respectée, que des intérêts financiers
ne sont pas en jeu, que les familles ne sont pas rémunérées pour la prestation de leur enfant. Dans le cas contraire, ne «
lolitisez » pas vos enfants !
— Une maman peut être l’amie de son enfant, en aucun cas sa copine. Il faut respecter la différence des générations.

Autres âges
Plus les années passent plus la séduction va occuper une place importante dans la vie des adolescents et des adolescentes. Il ne
sert à rien de vouloir vous opposer à cette évolution naturelle. Évitez des remarques comme « De mon temps, on s’habillait
sobrement », « Mes parents ne m’auraient jamais laissé sortir dans un pareil accoutrement ».

Propositions

8-12 ans
— Il n’est jamais trop tôt pour commencer l’« initiation à la féminité » de vos jeunes filles.
— Il est important de leur signaler, très tôt, que certains attributs ou accessoires sont réservés aux personnes adultes, comme
les chaussures à talons hauts. Que d’autres doivent être portés avec décence : pas de jupes XXX small (raie des fesses
apparente) par exemple.
— Enfants et adolescentes ne se rendent pas toujours compte des effets de leurs tenues.
Il faut leur expliquer que certains vêtements peuvent envoyer des messages « malsains » à ceux qui les regardent, préciser que
l’on n’est pas seul en société, que le regard et la perception de l’autre doivent être pris en compte. Il faut leur apprendre à
distinguer sphère publique et sphère privée, que si l’on peut porter un string dans sa chambre pour amuser ses copines, on ne
peut se déplacer ainsi dans la rue, que personne ne le fait.

Autres âges
Pratiquez le dialogue, aidez vos enfants à décrypter les images et le discours ambiant, tâchez de développer leur esprit critique.
Maisons des adolescents

Bon à savoir
Il a été décidé en 2004, à la suite d’une recommandation de la Défenseure des Enfants, qu’il y aurait une « Maison des
adolescents » (MDA) dans chaque département. Il en existe aujourd’hui un peu plus de 80 (en 2011, 17 départements n’en
avaient pas encore). À noter que la première Maison des adolescents a été ouverte au Havre en 1999.
Ces maisons ont pour mission d’informer, de conseiller, d’accompagner les adolescents, leurs familles et les professionnels en
charge d’adolescents.
Les maisons des adolescents sont des lieux polyvalents où l’adolescent est considéré à la fois dans sa dimension physique,
psychique, relationnelle et sociale, éducative. D’où les liens tissés avec l’ensemble des acteurs s’occupant d’adolescents. Les
MDA se proposent d’apporter une réponse globale qui intègre ces différents aspects de la vie des adolescents. Elles leur
offrent un accueil gratuit sur des plages horaires souples et adaptées.
Si les MDA s’adressent en priorité à des adolescents en difficulté de santé, elles sont ouvertes à tous ceux qui recherchent une
écoute, des informations sur une orientation scolaire par exemple. Les MDA s’adressent également aux parents d’adolescents.
Elles ont pour mission de répondre à leur besoin d’information et d’accompagnement. Ces actions peuvent être individuelles
ou collectives. Elles s’organisent souvent en articulation avec les Réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents
(REAAP), ainsi qu’avec les Points info famille (PIF). Elles font des parents des partenaires privilégiés pour tout ce qui
concerne la santé de leurs enfants. Les professionnels souhaitant obtenir un avis sur un adolescent ou des conseils pour son
orientation peuvent également solliciter les MDA.

Dangers

Tous âges
Ne croyez pas que les MDA ne soient que des maisons de santé. Si elles accueillent souvent des adolescents présentant une
pathologie particulière, elles accueillent aussi des adolescents qui éprouvent de simples difficultés familiales ou qui ont un
besoin d’écoute. Les MDA sont des lieux de soins au sens large du terme et, dans certaines d’entre elles, on y dispense aussi
des « soins culturels », comme à la Maison de Solenn, à Paris, où l’on peut venir se détendre en écoutant de la musique… ou
en faisant des essais de tenues vestimentaires.

Propositions

Tous âges
Face à un problème donné, vous pouvez vous trouver désarmés. N’hésitez pas à indiquer à « votre » adolescent l’adresse de la
MDA la plus proche. C’est parfois moins stressant pour un adolescent que d’aller chez un psy.
Mangas

Bon à savoir
En France, l’histoire des mangas, nés au Japon dans les années 1920, commence via des séries animées, avec de curieux
personnages, à la coiffure hirsute et au regard foudroyant. Nous sommes dans les années 1980, les enfants ont leurs émissions
phares à la télévision : Récré A2, Le Club Dorothée.
Le succès est immédiat : chez les garçons avec Goldorak, Dragon Ball, chez les filles avec Candy Candy, Signé Cat’s Eyes.
Conjuguées avec l’engouement pour les jeux vidéo, les premières BD mangas s’installent dans notre pays. Ce sont les fameux
shônen, destinés aux garçons, comme Dragon Ball et Naruto Dofus, mais dont un lecteur sur deux est une fille. Flairant le bon
coup commercial, les éditeurs français importent alors des collections entières de shôjo. Nous sommes au début des années
2000. C’est le succès tout aussi immédiat. Un titre comme Fruits Basket s’écoule par exemple à 2 millions d’exemplaires,
suivi de Nana, 1 million. Citons pour les filles, Sailor Moon, premier et plus gros tirage mondial.
Ces BD déroutent de nombreux parents, car elles se lisent à l’envers, avec des illustrations en gros plans, des cases qui se
chevauchent et de très longues onomatopées. On découvre dans ces petits livres toutes sortes de personnages et d’animaux
plus attachants les uns que les autres, de beaux garçons aux traits androgynes, des filles dotées de pouvoirs extraordinaires ou
simplement « kawaii » (mignonnes), comme Kilari, 14 ans.

Dangers

Tous âges
— Considérer ces BD comme vulgaires, violentes. Sachez que dans les yeux très expressifs des personnages, les jeunes
lecteurs et lectrices découvrent toutes sortes sentiments : la peur, la souffrance, le désir, la colère. Les mangas donnent aussi à
voir la naissance du sentiment amoureux, la découverte de la sexualité. Ils mettent au jour les hésitations, les doutes, les excès,
les angoisses. Certains psys disent ainsi qu’ils facilitent le « travail d’adolescence ». Tout au plus peut-on reprocher parfois à
ces BD de tomber dans certains clichés et stéréotypes de genre.
— Les mangas forment aussi une « école de sociabilité », insérée dans des réseaux d’échanges et de discussions passionnées.
On parle mangas entre amis sur Internet, on échange des informations, des impressions. On ne compte pas les blogs, les
forums, les journées et conventions diverses dédiées aux mangas (où l’on retrouve les cosplay, déguisements imitant les héros
de ces BD).

Propositions

Tous âges
Pour ne pas rester dans la critique stérile, lisez vous-même quelques mangas. Vous y découvrirez une grande créativité, dans
les ambiances, les costumes notamment. Si les shônen (pour les garçons) sont parfois un tantinet machistes, les shôjo (pour les
filles) sont plus délicats ; les valeurs altruistes et la méditation y sont plus développées.
Manifestations publiques

Bon à savoir
Depuis 1968, chaque génération d’adolescents conteste, en descendant dans la rue, des réformes éducatives ou la dégradation
du service public scolaire. C’est aussi une manière pour les élèves de signifier leur appartenance à la classe d’âge adolescente.
Les manifestants sont plutôt lycéens que collégiens. Ils défilent « tous ensemble » pour réclamer des moyens supplémentaires
pour bien travailler ou pour dénoncer une « mauvaise réforme ».
Quelques dates-clés : en novembre-décembre 1986, les lycéens, avec les étudiants, remettent en cause le projet du ministre
Devaquet dont ils craignent qu’il n’ait des conséquences sur le libre accès à l’université. Le projet est abandonné et le ministre
démissionne. En novembre 1990, ils manifestent pour obtenir de meilleures conditions de travail. Deux ans plus tard, en mars
1992, pour refuser une nouvelle réforme universitaire et lycéenne. Au printemps 1994 a lieu une grosse manifestation contre le
projet CIP (contrat d’insertion professionnelle), introduisant un Smic-jeune. Le projet est retiré et une grande consultation
nationale de la jeunesse lancée. En octobre-novembre 1998, les élèves dénoncent à nouveau la dégradation de leurs conditions
de travail. En février-avril 2005, ils manifestent pour la suppression du projet de modification du bac par introduction du
contrôle continu. Le projet est retiré. Un an plus tard, nouvelle grosse manifestation contre le CPE (contrat de première
embauche), jugé discriminatoire par rapport au contrat de droit commun. Le projet est retiré.

Dangers

8-12 ans
Non concernés.

Autres âges
Des formules du type : « Descendre dans la rue, ce n’est pas de ton âge. » Les adolescents ont le droit d’expression, donc de
revendication.

Propositions

8-12 ans
Non concernés.

Autres âges
Il vous appartient de rappeler à vos enfants qu’une manifestation n’est jamais sans danger, qu’il y a toujours des risques de
débordement, qu’il s’agit donc d’être prudent.
Mariage forcé

Bon à savoir
En 2005, l’on dénombrait environ 70 000 mariages forcés en France, la plupart concernaient des familles issues de
l’immigration, musulmanes généralement (Maghreb, Mali, Mauritanie, Sénégal, Turquie, Asie). Condamnées à ces mariages,
de nombreuses mineures qui n’avaient parfois pas plus de 13 ans.
Contrairement à une croyance tenace, ces pratiques ne sont pas imposées par l’islam, mais relèvent d’usages coutumiers,
souvent fort anciens. En mariant leur fille avec un jeune homme originaire de leur pays, les parents cherchent à affirmer leur
identité et à garder un lien avec leur culture d’origine. C’est aussi une manière de continuer de contrôler leurs enfants, de
veiller à la virginité des filles et donc à leur honneur. Le mariage est alors perçu comme un moyen d’éviter le « vagabondage
sexuel » des jeunes filles. C’est ainsi que de jeunes filles se retrouvent séquestrées, pendant leurs vacances, dans le pays
d’origine de leur famille. Promptement fiancées puis mariées.
En 2005, une loi a donc relevé de 15 à 18 ans l’âge légal du mariage des filles en France (auparavant, contrairement aux
garçons, elles pouvaient, avec dispense du président de la République, se marier à 15 ans).

Dangers

8-12 ans
Non concernés.

Autres âges
Le mariage d’une jeune fille mineure est désormais interdit en France. Vous ne devez plus contraindre vos enfants, parfois en
les faisant culpabiliser en cas de refus de leur part, au mariage forcé. C’est à votre honneur d’agir dans le cadre des lois de la
République.

Propositions

8-12 ans
Non concernés.

Autres âges
Le mariage est un libre choix fondé sur l’amour, non sur quelque intérêt ou coutume culturelle spécifique.
Maturité

Bon à savoir
La « maturité » n’est pas une notion qu’utilisent les scientifiques, qui lui préfèrent celle de « maturation ». Une chose est
certaine, il n’existe pas de maturité « supérieure ». L’on a longtemps cru que l’âge adulte marquait un couronnement dans un
parcours de vie. Nous savons, grâce à l’enseignement de Rousseau, qu’il n’en est rien, que chaque âge a sa maturité propre et
que, loin de se répartir en maturités « supérieures » et maturités « inférieures », les maturités sont simplement « différentes »
les unes des autres.
Au cours de la phase pubertaire, l’adolescent passe du stade de l’apparition des caractères sexuels secondaires à celui de la «
maturité sexuelle ». Cette maturité est capitale puisqu’elle ouvre la possibilité de procréer.

Dangers

Tous âges
Ne dites pas à votre enfant qu’il n’est pas mûr, qu’il ne peut pas comprendre telle ou telle chose. Les enfants, très jeunes,
peuvent comprendre toutes sortes de choses, à la condition qu’on les leur explique clairement.

Propositions

Tous âges
Puisque vous savez à présent que tout âge porte sa maturité, permettez à vos enfants de l’éprouver, en leur laissant faire des
expériences.
Mère d’adolescent

Bon à savoir
Les mères sont aujourd’hui omniprésentes dans la vie familiale, elles semblent même sur tous les fronts. Elles font assurément
beaucoup. Si, comme autrefois, elles gèrent toujours la maison – fonction qui, on le sait, se résume en grande partie à assumer
la plupart des tâches ménagères (les plus ingrates en tout cas) – elles sont en outre désormais massivement investies dans la
gestion au quotidien des relations avec les adolescents, filles et garçons.

Dangers

Tous âges
Attention à l’hyper-protection ! Un adolescent n’est plus un enfant. Sachez vous effacer… et faites confiance.

Propositions

Tous âges
Les mères nouent volontiers des complicités avec leurs filles. Pourquoi pas ! Mais attention à la confusion des générations. La
complicité n’est pas la fusion. Soyez amie de vos enfants, pas leur clone.
Mode

Un exemple significatif : les jeunes Allemands à la fin du XVIII e siècle


“ Les jeunes gens adoptent alors des tenues vestimentaires décontractées (qui contrastent avec les tenues raffinées des jeunes Français). Ils
portent des chemises dérubannées et laissent leurs cheveux flotter au vent.

PETER BLOS, LA SECONDE INDIVIDUATION, 1962

Bon à savoir
Les adolescents aiment être à la mode. C’est un souci très ancien en vérité. Charles Fourier, l’inventeur des phalanstères,
soulignait déjà, au XIX e siècle, combien, très vite, les petites filles sont attentives à leur parure (tandis que les garçons, notait-il,
préfèrent la malpropreté !). Une chose est certaine, la mode, vestimentaire en particulier, n’a longtemps concerné que la «
jeunesse dorée », n’a préoccupé que les jeunes filles ou les jeunes gens de « bonne famille ». Dans la seconde moitié du XVIII e
siècle par exemple, les jeunes Allemands portaient les cheveux longs (voir ci-dessus) et, sous le Second Empire, les jeunes
Français se frisaient les cheveux au petit fer.
C’est le phénomène américain des « teen-agers » qui étendra à la génération entière ces pratiques de mode.

Un marketing bien pensé


Ce goût de la mode, activé par un marché très offensif, se manifeste très tôt. À 8 ans, et souvent même avant, les filles ne
veulent plus porter la robe blanche à smocks ni de bandeau à fleurs dans les cheveux et pas davantage de souliers à brides. Les
garçons ne veulent plus de leur petit short gris et de leur coiffure « à la bébé ». Les uns et les autres veulent être habillés
comme des « ados ». De prestigieuses enseignes comme Jacadi ont bien compris le message. Fin mai 2011, la célèbre boutique
sortait sa première collection pour les 9-13 ans, baptisée « Jacadi Mademoiselle ». La petite jupe à carreaux, si elle est
maintenue, est incrustée de pans unis, le jean slim est gansé d’un galon chic, tel un smoking, et le blazer de laine est orné d’un
blason doré amovible.
Conséquence : désormais, les marques de mode enfantines montent en taille pour grandir avec leurs jeunes consommateurs. Il
faut ici souligner que les petits Français sont aujourd’hui plus grands et plus gros qu’il y a quelques années. Les petites filles
de 4 ans, qui, en 1991, mesuraient 100 cm et pesaient 15,4 kg, mesurent aujourd’hui 102,3 cm et pèsent 16,8 kg. À 11 ou 12
ans, les tailles « enfants » ne sont donc plus adaptées. La maison Charabia qui l’a bien compris a retravaillé les coupes de ses
vêtements, en transformant par exemple les robes à bretelles en robe avec mini-bustier. Une autre maison, Bonpoint, a même
lancé une ligne pour adolescentes, « Yam », ce qui veut dire « Y en a marre ».

Dangers

Tous âges
Il est déconseillé de vous moquer des tenues de vos enfants. L’adolescent a choisi d’être « gothique », ou de porter un
pantalon taille très basse, ou de se teindre les cheveux, pourquoi pas ? Des expressions du genre : « Tu as vu ta dégaine ? »
sont à éviter.

Propositions

Tous âges
Essayez de comprendre les choix de vos enfants. Comparez-les avec les vôtres au même âge. Après tout, dans les années
1960, porter le jean ou la mini-jupe pour les filles, ou les cheveux longs pour les garçons, c’était déjà un vrai scandale pour les
parents.
Musique

Bon à savoir
Parce qu’elle occupe une place spéciale (et importante) dans la vie des adolescents, nous lui accordons par cette rubrique
l’attention qu’elle mérite. Rappelons que c’est avec elle et par elle que s’est forgée aux États-Unis, au milieu des années 1950,
la « culture jeune ». C’était alors le temps du rock and roll . Elvis s’en est allé, mais la musique est restée. Se sont ajoutés
d’autres genres musicaux, jugés tout aussi rebelles par les adultes comme le rap ou la techno. Un clivage musical subsiste
selon les origines sociales des jeunes. Ceux des cités sont plutôt « rap » (avec des groupes phares comme Sexion d’Assaut, La
Fouine, Orelsan ou Booba) ou « R’n’B », ceux des « beaux quartiers » plutôt « rock » ou « pop » (avec un retour remarqué du
groupe Téléphone). Une exception notable : le groupe 1995 (prononcez 1-9-9-5) écouté par tous les adolescents.
Les adolescents écoutent de la musique quotidiennement. La multiplicité des supports d’écoute leur permet aujourd’hui d’être
connectés en permanence, jour et nuit. Dès la fin du primaire, la musique devient une « culture de chambre », c’est-à-dire
autonome, loin des regards et de l’écoute des parents. On estime à environ 45 % le nombre de jeunes de 12-17 ans qui
téléchargent de la musique sur Internet.
Les adolescents sont donc dans un « bain musical » permanent. Il n’y a rien (ou presque rien) qu’ils ne fassent sans un fond
sonore : leurs devoirs, leurs sorties… La musique fait à ce point partie de leur vie quotidienne que, lorsqu’on leur demande de
citer leurs pratiques de loisirs, ils oublient fréquemment de la mentionner comme leur première pratique.
Grands écoutants de musique, les adolescents sont aussi de grands pratiquants (amateurs). Ils disposent à cet effet d’un fort
soutien et encadrement institutionnels (sous la forme notamment de salles de répétition).

Dangers

Tous âges
Rien ne sert de dénigrer. Chaque musique colle à son temps. Et puis, les goûts et les couleurs…

Propositions

Tous âges
Faites l’effort salutaire d’écouter ce qu’ils aiment. Personne ne vous demande de tomber en extase devant chanteurs et
chanteuses du moment.
Obésité

Bon à savoir
Si la progression de l’obésité ralentit en France, pour la première fois depuis quinze ans (Étude Obépi-Roche, octobre 2012),
pour se stabiliser autour de 32 % de la population globale, il faut savoir qu’un jeune Français sur cinq est en surpoids et que 4
% des 3-17 ans sont obèses (on compte par ailleurs 3 % d’obèses chez les enfants de grande section de maternelle et 9 % en
surpoids).
Nous sommes cependant loin de la situation américaine ou même anglaise (selon certaines projections, près de 40 % des
enfants et des adolescents anglais seront en surpoids en 2014), voire des situations espagnole, italienne ou grecque (23 % des
adolescents de 11 ans y sont déjà en surpoids).
La France est à ce jour dans une meilleure situation. Depuis la mise en œuvre, en 2001, du plan PNNS – Plan national
nutrition santé –, le pourcentage des 3-17 ans obèses est passé de 3,5 à 2,9 %, et celui des sujets en surpoids de 15,1 à 14,5 %.
Cependant, notre pays a doublé son taux d’obésité en douze ans, et, plus inquiétant, la maladie touche davantage les enfants.
Plus vulnérables, et plus réceptifs à la publicité et aux diverses stimulations du marketing agroalimentaire, ces derniers sont
devenus les premières victimes de cet environnement « obésogène ». La sédentarisation de leurs loisirs – télévision,
ordinateurs – mais aussi le stress, le manque de sommeil, la pollution sont les autres facteurs qui expliquent cette relative
dégradation du poids chez les 3-17 ans. Sans oublier la perte du rituel du repas familial (équilibré), conséquence de
l’éclatement de la famille traditionnelle.

Dangers

Tous âges
Comme sur d’autres sujets, la moquerie doit être proscrite. Des expressions comme « gros lard », « bouboule », que sais-je
encore, sont indignes, même en taquinerie, dans la bouche des parents. L’obésité en effet, contrairement à ce que l’on croit,
n’est pas toujours due à une surconsommation d’aliments. Elle peut être génétique, héréditaire. C’est du moins la thèse de
certains spécialistes comme le Dr Patrick Tounian qui, dans son livre L’Alimentation de vos enfants, enquête sur le marketing
et les idées reçues (éditions Denoël), explique que l’obésité est une « maladie constitutionnelle », et que, si elle a
considérablement augmenté ces quinze dernières années, c’est parce que le mode de vie et les habitudes alimentaires ont joué
le rôle d’interrupteurs capables d’allumer ces gènes enfouis. Le pédiatre suggère donc que la recherche identifie mieux les
enfants prédisposés au surpoids.

Propositions

Tous âges
Vous pouvez conseiller à votre enfant une activité physique régulière, et lui recommander de manger les fameux 5 fruits et
légumes par jour.
One Direction

Bon à savoir
Parmi les groupes emblématiques du moment, il y a évidemment One Direction. Ce groupe anglo-irlandais est omniprésent sur
le site Fan2.fr (site de référence des 12-18 ans, avec près de 2 millions de visiteurs par mois). Les cinq garçons âgés de 18 à 20
ans, très « sexy », ont aujourd’hui, dans le cœur des filles, détrôné l’icône Justin Bieber. Que l’on en juge par ces chiffres : 7,6
millions de followers sur Twitter, 10,8 millions de fans sur Facebook, dont 600 000 Français. Leur deuxième album, Take Me
Home, sorti en novembre 2011, est un nouveau succès, après leur premier intitulé : Up All Night.
Et l’on parle du retour des boys bands. C’est ainsi que l’on annonce l’arrivée prochaine sur le marché d’un girls band anglais,
Little Mix, déjà comparé outre-Manche aux célèbres Spice Girls. Dans les milieux bien informés, on dit que ce renouveau des
boys bands pourrait profiter à Tokio Hotel, le groupe allemand très célèbre (dont le dernier album date de 2009).
One Direction est le premier boys band 3.0, présent sur tous les supports : CD, DVD, livre, calendrier, bonnet, coque de
Smartphone, bouillotte…

Dangers

Tous âges
Rien ne sert pour vous de courir derrière les gloires passées. Vos enfants ont leurs stars à eux. Ne condamnez pas leurs choix.

Propositions

Tous âges
Informez-vous de ces musiques, écoutez-les. Il sera bien temps alors de déclarer votre amour ou désamour des musiques
actuelles.
Pathologies diverses

“ 90 % des adolescents vont bien… Ce sont les parents qui ne vont pas bien !„
PATRICE HUERRE, PSYCHIATRE, 2009

Bon à savoir
De l’aveu même des médecins et des psys, l’adolescence ne serait une période de souffrance psychique que pour 10 à 15 %
des sujets. C’est fort peu. Mais ce chiffre qui nous renseigne sur certaines pathologies ne nous dit pas grand-chose des mal-
être croissants chez les adolescents, dus à une conjoncture familiale, scolaire, professionnelle difficile. La conséquence est
qu’en réalité la totalité des adolescents connaît aujourd’hui, à un moment ou à un autre de leur vie, une « difficulté sociale » de
plus ou moins grande ampleur.
Mais revenons à la souffrance psychique médicalement observée. Les adolescents sont, comme les individus des autres âges,
affectés de diverses pathologies (qui ne sont pas toutes graves), liées, pour partie d’entre elles, à leurs conditions de vie. On
relève ainsi que 16 % des moins de 13 ans ont déjà eu une prescription médicamenteuse liée à des problèmes psychologiques
ou de comportement. Par ailleurs, un jeune sur deux en formation (lycéen, étudiant ou apprenti) déclare éprouver pareil
problème et 9 % reconnaissent des souffrances pouvant conduire à un diagnostic psychopathologique (enquête Opinion Way,
octobre 2010).

La fatigue et le stress
La forte consommation d’écrans le soir (télévision, téléphone portable, ordinateur) n’est pas non plus sans effet sur la qualité
du sommeil. Il faut savoir que les nuits des 11-15 ans sont écourtées en moyenne de 30 à 45 minutes par rapport à celles de
leurs camarades non « écrantistes ». Durant les « années-collège », le temps de sommeil diminue même de 20 minutes chaque
année, passant de 9 h 10 environ en 6e à 8 h 08 en 3e . Un adolescent sur cinq dort même moins de sept heures par nuit.
Conséquence : un tiers dit avoir des difficultés d’endormissement.
La fatigue est donc bien le premier problème rencontré par les adolescents : c’est un mal constant chez eux. Liée pour partie
aux écrans, comme nous venons de le voir, pour autre partie aux rythmes scolaires qui demeurent élevés en France. Cette
dernière situation est en effet génératrice de stress. Celui-ci se manifeste de diverses manières : par de la fatigue, des
migraines, de l’anxiété, de l’agressivité, des difficultés à agir… Certains spécialistes, comme André Klarsfeld, biologiste au
CNRS, recommandent donc, pour faire baisser le niveau de stress, de retarder le début des cours le matin à 9 h 30 ou 10
heures.
Autre problème : les fugues. On en dénombrait 47 000 en 2008, soit une augmentation de 17 % par rapport à 2005. Fort
heureusement, la plupart des fugueurs reviennent rapidement dans leur famille.

Les troubles du comportement alimentaire


Parmi les pathologies plus graves, il y a la « déprime » ; 20 % des filles de 11-15 ans et 11 % des garçons du même âge
avouent être déprimés. Il y a les suicides (voir « Suicide », p. 252) : 550 décès de moins de 25 ans chaque année (2e cause de
mortalité chez les jeunes après les accidents de la route). Il y a les troubles graves du comportement alimentaire. Parmi ceux-
ci, l’anorexie.
Ses causes en sont mal connues. Mais il existe une dimension sociale qui n’est pas négligeable : le culte de la minceur, parfois
extrême, chez les jeunes filles. On se souvient de ces faits divers tragiques ayant touché des top-modèles il y a quelques
années. En 2006, par exemple, Ana, une mannequin brésilienne, âgée de 18 ans et mesurant 1,74 m, succombait de maigreur :
elle ne pesait que 40 kg au moment de sa disparition.
L’anorexie mentale est une pathologie largement féminine (même si l’on commence à l’observer chez de jeunes garçons).
C’est une obsession de l’amaigrissement. Le refus de la nourriture peut, comme nous l’avons vu, avoir des conséquences très
graves, dès lors qu’il y a déshydratation et dénutrition irréversibles. Les conditions d’apparition de cette pathologie restent
assez mystérieuses. Elle peut surgir après un viol, un inceste, une tentative de suicide, mais, plus ordinairement, en cas de
difficultés de communication familiale, de ce que le professeur Courtecuisse nomme une « déshydratation affective ». Il y a
alors repli sur soi et amaigrissement progressif, qui entraîne l’arrêt des règles pour les adolescentes les plus âgées. On a pu dire
à cet égard que l’anorexie mentale était un refus de la sexualisation. Les cas les plus graves nécessitent une hospitalisation
incluant un isolement familial (total en début de traitement). La prise en charge est souvent double : psychologique et
nutritionnelle. À l’issue d’un bilan précis, le médecin fait absorber au patient, soit par perfusion, soit par voie orale, une
nourriture riche en minéraux et en vitamines. Cette « rééducation alimentaire », contraignante pour la patiente toujours
réfractaire, s’accompagne en principe d’un soutien thérapeutique.
Autre perturbation alimentaire : la boulimie. Il s’agit ici d’une conduite à la fois masculine et féminine. Elle se caractérise par
une « frénésie » alimentaire. Le sujet boulimique mange énormément en peu de temps, avec un sentiment de perte de contrôle
de soi.

Dangers

Tous âges
Tout symptôme « anormal » doit retenir votre attention. N’attendez pas : le temps n’arrange pas toujours les choses ! Dès
qu’une situation inédite se prolonge, il est temps de la signaler à un tiers expert qui vous informera de la marche à suivre.

Propositions

Tous âges
S’inquiéter, ce n’est pas s’affoler ni affoler l’adolescent. Informez-vous auprès de votre enfant des raisons de son attitude «
anormale » : repli sur soi, silences prolongés, refus d’alimentation, etc.
Penser

“ Cet adolescent si beau et si bien né avait le goût des idées et en parlait avec une ardeur incroyable.„
ANDRÉ MAUROIS, ARIEL OU LA VIE DE SHELLEY, 1923.

Bon à savoir
La grande découverte de l’adolescent, c’est une pensée personnelle. Contrairement à l’enfant qui pense longtemps comme ses
parents, ce qui explique l’absence de tout conflit avec eux, l’adolescent, armé de nouvelles capacités intellectuelles, découvre
qu’il peut désormais penser par lui-même.

Dangers

Tous âges
Des expressions comme : « Tu pourrais réfléchir avant d’agir » sont à proscrire. D’abord parce que les adolescents
réfléchissent beaucoup plus qu’on l’imagine. Ne considérez pas qu’ils ne peuvent que mal penser à leur âge.

Propositions

Tous âges
Découvrir à 12 ou 13 ans (ou plus tôt) que l’on pense enfin par soi-même a quelque chose d’exaltant. Participez à cette joie.
Père d’adolescent

Bon à savoir
Pauvres pères ! L’on dit tant de choses sur eux, tant de choses désagréables, que c’en est peine à entendre. Privés de leur
antique « puissance paternelle », délestés de leur ancien pouvoir conjugal, eux qui furent « les grands aventuriers des temps
modernes », selon le mot de Péguy, ne seraient plus que des « errants » dans un monde familial de plus en plus incertain et
féminisé.
Dans leur famille, les pères semblent donc en retrait, démoralisés, déconcertés par le nouveau « pouvoir féminin », comme
effacés de leur relation à leurs enfants.
Se posent alors des questions que l’on n’aurait pas osé imaginer jadis : qu’est-ce qu’être père ? Comment être un bon père ?
Les spécialistes interpellés disent alors que les pères doivent, comme jadis, assumer leur rôle. C’est oublier que les pères
d’autrefois existaient essentiellement par leur présence, il leur suffisait d’être là, symboles d’un pouvoir incontesté. Il faut
aujourd’hui que les pères inventent – et c’est la première fois dans l’histoire –, leur propre rôle.

Dangers

Tous âges
Enfants et adolescents manquent de plus en plus d’images masculines, et d’abord de l’image paternelle, ce qui est
préjudiciable pour les fils. La situation est particulièrement problématique en cas de divorce. Selon un rapport du Centre
d’analyse stratégique, publié en octobre 2012, en cas de séparation des conjoints, les pères revendiquent peu la résidence
principale ou en alternance, « par principe ou par autocensure ».
— Il est alors important que les mères, qui sont séparées, ou veuves, de leur conjoint, ne privent pas leurs enfants de la
présence, ou de la mémoire, de leur père.
— Il est pareillement important que les pères sachent se rendre disponibles pour leurs enfants. La loi du 4 mars 2012, qui a
établi le principe de coparentalité, leur rappelle qu’il est dans l’intérêt de l’enfant d’être élevé par ses deux parents.

Propositions

Tous âges
— Il faut aimer les adolescents, vos enfants. Pour les filles, chers papas, vous savez faire ; pour les garçons, c’est plus
compliqué, semble-t-il. Vous doutez parfois de l’amour de ces derniers. La relation avec eux ne serait que silences, non-dits,
tensions. Les apparences, il est vrai, demeurent contre vous. Que de malentendus ! On le sait, vous aimez sincèrement vos fils,
mais différemment que vous aimez vos filles. Et puis votre amour paternel est assurément moins expressif que l’amour
maternel de votre épouse, plus pudique. Quant à vos fils, n’en doutez pas, ils vous aiment aussi. Souvenez-vous de l’hommage
de Louis Pasteur à son père, Jean-Joseph, à qui il avouait « tout devoir » ou bien l’évocation pleine de tact de Chateaubriand
pour le sien avec lequel il ne s’entendait pas, et même des propos admiratifs de Freud pour son propre père, qui lui inspirait
une grande crainte.
— Quel est votre apport à vos fils et vos filles ? Vous êtes d’abord celui qui, avec votre épouse, les aide à se construire en tant
que personnes. Soyez attentif à leurs besoins, acceptez, comme Denis, papa de 50 ans, que vos enfants ne soient pas tels que
vous les avez idéalisés. Être père est un art, c’est aujourd’hui quelque chose que l’on doit prouver en permanence à son enfant,
avec ses propres qualités personnelles. Un beau défi, non ?
Personne

Bon à savoir
Au diable les étiquettes ! Sachez les oublier un instant. L’adolescent, comme avant lui le bébé ou l’enfant, est d’abord une
personne. Avec, donc, ses qualités… et ses défauts, comme n’importe quelle autre personne. La famille est aujourd’hui une
réunion de personnes dont chacune revendique ses droits. Le dialogue qui s’y noue est désormais un dialogue d’individus, plus
que de statuts.

Dangers

Tous âges
Savoir s’il faut traiter « ses » adolescents comme des enfants ou comme des adolescents n’est finalement pas la meilleure des
questions. Ne traitez pas les 8-18 ans comme des êtres inférieurs, mais comme des êtres humains doués de raisonnement et
d’intelligence.

Propositions

Tous âges
Grandissez vos enfants, et d’abord à leurs propres yeux : ils manquent tant d’estime de soi, quelquefois. Considérez-les
comme des citoyens.
Politique

Bon à savoir
La chose est certaine et confirmée par toutes les études, et depuis fort longtemps : les adolescents n’aiment pas la politique, la
politique « politicienne » s’entend. Ils n’aiment pas les hommes politiques, qui ne sont pas dans leurs personnalités préférées
quand on les interroge.
« Politique », à leurs yeux, reste synonyme de « corruption », de goût du pouvoir, d’éloignement des vrais problèmes des gens.
Pour les 8-12 ans, et même 13-14 ans, le monde politique est de surcroît incompréhensible. « Droite », « gauche », termes
utilisés par les responsables politiques, sont obscurs pour eux.

Dangers

Tous âges
Ne confondez pas « jeu politique » et « vie citoyenne ». Ne partagez pas l’idée, songeant aux seuls professionnels de la
politique, du « tous pourris ». Il est beaucoup de responsables dévoués, travaillant assidûment pour la cause publique.

Propositions

Tous âges
Expliquez la noblesse de « la » politique. Expliquez que les sociétés ont besoin de dirigeants pour les faire fonctionner.
Expliquez que la « nouvelle politique », que l’on appelle quelquefois « la démocratie participative », refuse de plus en plus de
distinguer « gouvernants » et « gouvernés », que chacun peut être l’un et l’autre à tour de rôle.
Faire de la politique, c’est faire vivre la Cité, tous ensemble, hommes et femmes, jeunes et adultes.
Populaire

Bon à savoir
Voilà bien le mot le plus « populaire » du moment : un adolescent se doit d’être « populaire ». Ce terme, qui,
étymologiquement, vient du latin populus qui désigne le « peuple », et qui est aujourd’hui plutôt employé comme un nom
commun, nous l’avons entendu déjà, mais comme adjectif qualificatif, il y a une douzaine d’années, dans les cours des
collèges. On disait alors d’untel qu’il était « populaire ». On dit aujourd’hui, de préférence : c’est un « populaire ».
Si l’on ouvre le dictionnaire de la langue française, l’on constate que le mot « populaire » entre dans le langage courant au XII e
siècle. L’on appelle alors « populaire » « celui qui plaît au peuple, au plus grand nombre ».
Mais il semble que les collégiens français actuels soient allés chercher le mot dans le vocabulaire américain. « Populaire »
viendrait ainsi de popular, qui désigne aux États-Unis l’élève à la fois « cool » et charismatique apprécié de ses pairs, le beau
gosse capitaine de l’équipe de foot ou de base-ball. Ce terme et l’idée sont très présents dans les séries américaines pour «
ados », à l’instar de High School Musical, où sont mis en scène des héros populaires très typés.

Être « populaire », c’est avoir la cote


Le profil « populaire » paraît se rencontrer surtout chez les garçons. Chez nous, le « populaire » désigne tout à la fois le garçon
qui rend service, qui fait rire, qui a du « bagout », qui est « diplomate », « va au contact des gens… leur demande comment ils
vont », explique Pierre-Louis, 12 ans, qui est un « populaire ». Comme l’indique l’historien Claude Lelièvre, « le populaire
d’autrefois, c’était le chef de bande, le costaud qui ne craignait pas l’affrontement physique », un peu à la façon Lebrac de La
Guerre des boutons. Tout élève rêve d’être un « populaire » ou, du moins, d’être l’ami d’un « populaire » (qui vous protège de
tout, comme du harcèlement).
Sur les forums Internet pour adolescents, on ne compte plus les appels au secours des 12-16 ans qui se demandent comment
être « populaire ».
Question. Mais pourquoi est-ce si important d’être (un) « populaire » aujourd’hui ? Dans le monde anonyme qui est le nôtre,
l’adolescent a besoin d’être reconnu, aimé. C’est quelquefois de l’ordre de la survie. D’où cette quête effrénée d’« amis » sur
Facebook : plus vous en avez plus vous êtes « important » (plus vous existez en réalité).
Si le « populaire » est le plus apprécié, le « bolos » (ou « bolosse ») est le plus critiqué, le plus moqué. C’est l’imbécile, celui
qu’on appelait encore il y a peu : le « bouffon ». Mais le revers de la médaille pour le « populaire », c’est qu’il doit le rester, et
rester tout en haut ce n’est pas simple. Comme disent les élèves plus ordinaires, « être populaire, ça te bouffe la vie, car à la
moindre petite faute, tu t’en prends plein la gueule par tes amis ou prétendus tels ».

Dangers

Tous âges
Il faut prendre cette question très au sérieux. L’élève qui n’est pas « populaire » risque de subir au quotidien les quolibets des
autres, de devenir quelquefois leur « souffre-douleur ».

Propositions

Tous âges
« Sois toi-même », « parle à tout le monde », « ne critique personne », voilà quelques conseils que vous pouvez donner.
Suggérez à vos enfants de pratiquer la gentillesse, l’humour, d’être serviables.
Pornographie

Bon à savoir
Nous avons vu que les adolescents, qui forment aujourd’hui la « génération numérique », fréquentent assidûment Internet, et
même de plus en plus jeunes.
Internet, on le sait, rime (entre autres) avec pornographie. Les adolescents accèdent donc à des sites de cette nature, non
seulement avec leur ordinateur (à la maison), mais (de plus en plus) avec leur Smartphone qu’ils ont en permanence sur eux.
Une première question est de savoir quelle est la quantité d’images pornographiques vues par les adolescents. Le Conseil
supérieur de l’audiovisuel (CSA) a demandé récemment à l’Institut TNS-Sofres de réaliser une étude qualitative sur le sujet.
En juin 2012, ce dernier a rendu son rapport. Il en ressort les conclusions suivantes : 43 % des 11-13 ans et 68 % des 15-17
ans ont déjà accédé à des contenus « choquants » sur le Web. Déjà, en 2004, il apparaissait que 80 % des garçons de 14-18 ans
et 45 % des filles de cette même tranche d’âge avaient vu, au moins une fois, un film pornographique. Ces chiffres sont
largement confirmés en 2012. Tous les adolescents soulignent l’extrême facilité à télécharger des films X sur Internet.

Dangers

Tous âges
Interdire l’ordinateur est illusoire. Les téléphones portables ? Impossible. Et puis n’oubliez pas qu’Internet, avec les jeux pour
les enfants, joue un rôle dans la construction affective et, pour les adolescents, avec les réseaux sociaux, un rôle de sociabilité
important.

Propositions

8-12 ans
— Ici, les logiciels de contrôle parental, que nous avons déjà signalés, qui sont disponibles gratuitement sur Internet ou
directement intégrés sur les ordinateurs, doivent vous permettre de surveiller (a minima ) l’activité. Mais vous devez savoir
que les pages censées être bloquées ne le sont pas toujours et que, de toute façon, de nouveaux sites pornographiques se créent
chaque jour. Même si les logiciels sont en principe automatiquement mis à jour, la protection n’est pas absolue. Vous pouvez
alors jouer sur la confidentialité du mot de passe pour accéder à ces sites, et le changer fréquemment. Sur les smartphones,
c’est plus compliqué. Les logiciels de supervision mis en place par les opérateurs sont encore sommaires.
— Il vous reste à communiquer avec calme et patience avec vos enfants. L’interdit de visionnage étant impossible à réaliser,
un peu d’« information éducative » est toujours la bienvenue. Il faut savoir que les images violentes, surtout chez les plus
jeunes, peuvent avoir un effet traumatisant.
— Enfin, soyez disponibles, dites à vos enfants que s’ils ont besoin d’une explication de ce qu’ils ont vu et a pu les choquer,
vous êtes là pour eux.

Autres âges
— Gardez-vous ici, plus encore que pour les plus jeunes, de la tentation de l’interdit.
— Gardez-vous pareillement de toute idée de « logiciel parental ». À l’âge de vos enfants, cela aurait pour eux quelque chose
d’humiliant et, de toute façon, ils ne tarderaient pas à trouver la parade pour déjouer votre logiciel.
— Trouvez le moyen de leur dire qu’à leur âge vous avez fait comme eux, que vous êtes allé voir parfois des films pornos au
cinéma, mais que vous saviez que tout ça, c’est de la fiction, que la sexualité réelle, c’est autre chose et, au début, un peu
compliqué.
Portable

Bon à savoir
Le portable ou mobile est l’outil de l’autonomie par excellence. Qu’il est loin le temps où l’adolescent n’avait d’autre choix
que d’utiliser le téléphone fixe des parents ! Avec le téléphone portable, loin du contrôle parental, l’adolescent peut contacter
qui il veut, quand il veut. Cet objet, aux configurations multiples aujourd’hui (Smartphone, iPhone…), a donc le vent en poupe
chez les adolescents : 49 % des 12-13 ans, 76 % des 14-15 ans, 95 % des 16-17 ans en ont un, et, ne les oublions pas, 19 % des
9-10 ans (ils sont 45 % en Belgique). Plus d’un tiers des 12-17 ans s’en servent aujourd’hui aussi pour naviguer sur Internet et
plus de 10 % pour envoyer des e-mails.
Les adolescents font un large usage de leur appareil (qui est aujourd’hui un Smartphone, que possèdent déjà 34 % des
adolescents de 10 ans).
Près de la moitié des 12-17 ans (47 %) reconnaissent se servir de leur mobile en classe et 54 % avouent avoir reçu des
messages ou des appels (audibles) en plein cours. Selon l’autorité des télécoms (Arcep), les 8-17 ans envoient 2 500 SMS par
mois, soit 80 par jour. Selon une étude britannique réalisée en 2008 auprès d’un millier de possesseurs de portable, les deux
tiers, et même les trois quarts des 18-24 ans, se disent « très angoissés » à l’idée de perdre leur téléphone. Une étude française
de 2012, réalisée par la société Mingle auprès de 1 500 utilisateurs, indique que 22 % d’entre eux, et 34 % des 15-19 ans,
jugent « impossible » de se passer de leur portable plus d’une journée.

Dangers

Tous âges
— Confisquer un portable à titre de sanction (n’oubliez pas qu’à plus de 60 %, c’est vous qui avez décidé de son achat !). Le
portable est un attribut identitaire chez les adolescents ; il fait partie de son « moi ». Retiré de sur-lui, l’adolescent peut avoir
le sentiment d’être littéralement « dépouillé », sans compter qu’il est alors déconnecté de ses pairs, autrement dit privé de
sociabilité. Est-ce bien le but recherché avec la sanction ?
— Il ne faut pas en outre utiliser le portable de vos enfants comme d’un moyen pour mieux les surveiller. Bien sûr, vous
justifiez cette attitude par le souci de pouvoir joindre vos rejetons à tout moment… au cas où il leur arriverait quelque chose !
(Or, sachez-le, plus d’un tiers d’entre vous reconnaît que « leurs » adolescents ne répondent pas à leurs appels.)

Propositions

Tous âges
Si vous ne voulez pas que vos enfants deviennent des accros à leur mobile, montrez l’exemple en ne l’étant pas vous-même !
En cas d’usage abusif, ou de risque d’abus de vos enfants, passez un « contrat » moral avec eux, où vous aurez décidé
ensemble de son mode d’utilisation. Recherchez le compromis : pas de portable à table par exemple (pour aucun membre de la
famille).
Premières fois

Bon à savoir
À chaque âge ses premières fois. Pour l’enfant, il y a, on le sait, la première colère (à l’accouchement), la première dent, les
premiers pas, la première classe, les premières amours…
À l’adolescence, il y a les « vraies » premières fois et les « fausses » premières fois. Parmi celles-ci, le « tomber amoureux »,
le premier baiser. Les enfants, à la petite hauteur de leur maturité, éprouvent déjà, dans les cours de récréation, des sentiments
amoureux, avec le baiser qui peut accompagner quelquefois ces sentiments (sur la bouche, furtivement, mais sans la langue).
Les « vraies » premières fois des adolescents se nomment : premières règles, premières éjaculations, premier baiser (avec la
langue), premier rapport sexuel complet, « première cuite », etc.

Dangers

Tous âges
— Il ne faut pas taire certaines premières fois quand on est parents. Ainsi est-il de votre devoir (vous, les mères) d’informer
vos filles de cet événement majeur que constituent les premières règles et de prévenir vos fils (vous les pères) de la première
éjaculation (qui est souvent nocturne). L’absence d’information peut conduire l’adolescent ou l’adolescente à s’inquiéter de ce
qui lui arrive (qu’il ou qu’elle peut ne pas trouver « normal »).
— Il faut en revanche faire preuve de discrétion s’agissant d’autres premières fois, comme le premier rapport sexuel. Chacun
doit faire ici sa propre expérience, en tâtonnant bien souvent.

Propositions

Tous âges
Il faut mettre en valeur ces premières fois qui surviennent. Les premières règles et la première éjaculation, comme le premier
grand amour, qui font entrer l’adolescente et l’adolescent dans la pleine dimension adulte.
Professeurs

Bon à savoir
Chacun d’entre nous le sait pour l’avoir expérimenté quand il était lui-même adolescent, il y a des profs sympas, d’autres pas,
des profs qui sont même « difficiles » parce qu’ils veulent par exemple avoir toujours raison. Il y a des profs exigeants et
intransigeants, mais aussi, heureusement, des profs intéressants, compatissants, heureux dans leur métier. Mais quels qu’ils
soient, les adolescents adressent à tous les mêmes griefs : une faible disponibilité. Et de pointer les manques multiples :
manque de temps à consacrer aux élèves, manque de contacts personnels, manque de dialogue ou de justice dans leurs
appréciations et notations.
Alors, conscients du problème, pour se faire aimer un peu de leurs élèves, certains profs les demandent comme « amis » sur
Facebook. Osons le dire ici : ce n’est pas une bonne idée. C’est en classe qu’il faut être l’ami de ses élèves (ce qui ne veut pas
dire copain ou copine).

Dangers

Tous âges
Il ne vous appartient pas d’accabler, par principe, les professeurs : ils font un métier difficile, mais il faut savoir entendre les
plaintes de vos enfants, qui ne sont pas toutes injustifiées.

Propositions

Tous âges
Apprenez à vos enfants combien le métier de professeur est aujourd’hui difficile. Un désaccord avec un enseignant ne doit
jamais conduire à lui manquer de respect, et encore moins à faire usage de violence à son égard.
« Projet X »

Bon à savoir
Voici l’un des films les plus emblématiques de l’actuelle génération : Projet X, comédie américaine réalisée en 2012 par Nima
Nourizadeth.
Rappelons l’histoire. Deux lycéens, Costa et JB planifient une fête pour l’anniversaire de leur ami Thomas, espérant de cette
façon accroître leur « popularité » auprès de leurs camarades de classe. Les parents de Thomas partent pour le week-end,
laissant le jeune homme seul à la maison, avec quelques recommandations, comme de ne pas inviter plus de 50 personnes et
ne pas utiliser leur voiture, une splendide Mercedes.
Thomas, pour ces raisons, n’a pas envie que la fête se passe chez lui. Mais il finit par y consentir. Il invite, en plus de ses
copains, la jeune Kirby, dont il est follement amoureux. La nuit tombe. Catastrophe ! Personne ne se présente à la fête.
Thomas s’inquiète. Soudain, les invités arrivent, mais en masse, bien plus nombreux que prévu. La fête dérape et se
transforme en un événement ingérable. Costa avoue alors à Thomas qu’il a passé des annonces sur plusieurs sites Internet,
ainsi que dans diverses radios locales : il craignait que personne ne vienne à la fête d’anniversaire de son ami. Un simple
anniversaire devient alors la plus grosse « teuf » étudiante jamais imaginée.

Dangers

Tous âges
Ne condamnez pas les fêtes, mais les excès auxquels elles peuvent donner lieu.

Propositions

Tous âges
L’amusement ne saurait se faire au détriment des autres et de leurs biens. Comme il se disait jadis : il faut savoir s’amuser. Ce
que, soit dit en passant, l’on peut faire sans boire (quand on a moins de 16 ans), ou sans boire démesurément (quand on est
plus âgé).
Respect

Bon à savoir
« Respect », chacun, dans notre société, n’a plus que ce mot-là à la bouche. Les adolescents (surtout ceux des cités) disent
qu’« on » (ils veulent dire les adultes) ne les respecte pas ; de leur côté, les adultes, qu’ils soient parents, enseignants ou
éducateurs spécialisés ne cessent de dénoncer les comportements irrespectueux de la jeunesse. Qu’en est-il exactement ?

Des reproches vieux comme le monde


Depuis la plus haute Antiquité, les aînés se plaignent de ce que les jeunes ne savent plus se tenir, n’ont plus de valeurs, ne
respectent plus rien. Écoutons Aristophane : « Les enfants et les jeunes gens, écrit-il, étaient bien plus surveillés autrefois
qu’ils ne le sont aujourd’hui… Dans les rues, chez leurs maîtres et leurs parents, ils paraissaient les yeux baissés, et avec un
maintien modeste. Ils n’osaient ouvrir la bouche en présence des personnes âgées ; et on les asservissait tellement à la décence
qu’étant assis ils auraient rougi de croiser les jambes. » Platon, dans La République, tiendra à son tour à peu près le même
langage : « Le père s’accoutume à traiter son fils en égal et à craindre ses enfants, le fils s’égale à son père et n’a plus ni
respect ni crainte pour ses parents, parce qu’il veut être libre. » La littérature française du XIX e siècle est elle aussi encore
pleine de ces plaintes parentales sur l’irrespect des enfants. Songeons au Poil de Carotte de Jules Renard ou au Petit Chose
d’Alphonse Daudet. Ernest Legouvé, auteur, en 1869, d’un remarquable ouvrage intitulé, Les Pères et les enfants au XIX e
siècle, le dit clairement : « C’est l’esprit général du temps, cet esprit d’égalité que les jeunes gens respirent », qui pousse à
l’insubordination.

Le respect : pour qui ? pour quoi ?


Le Code civil, on le sait, fait obligation aux enfants de respecter leurs parents. On ne sait rien en revanche du respect des
parents aux enfants. Un oubli ? Rien n’est moins sûr. Dans les sociétés traditionnelles, c’est-à-dire hiérarchiques, le respect, on
le sait, va toujours de l’inférieur au supérieur : c’est le sens unique. Le roi doit respect à Dieu, le père au roi, le fils au père, et
ainsi de suite. La règle est on ne peut plus claire : on ne respecte pas « ses » sujets, qui doivent seuls obéissance.
Dans les sociétés actuelles, qui se veulent démocratiques, c’est-à-dire égalitaires, voire « libertaires », le respect veut pour sa
part aller d’un individu à un autre individu, moins d’un statut à un autre statut. La règle est tout aussi claire : on se respecte
entre soi, sans considération de qui l’on est, puisqu’il n’y a plus, dans ces sociétés, ni riche ni puissant, ni pauvre, ni misérable.
Ainsi veut la loi démocratique.
Respect : de quoi parlons-nous exactement ? Les interprétations divergent. S’agit-il de politesse ? De comportements
particuliers ? Comme souvent, le dictionnaire de la langue française nous est d’un précieux secours. Ouvrons Le Petit Robert.
Le mot « respect », peut-on y lire, vient du latin respectus qui signifie « considération ». Respecter quelqu’un c’est donc, en ce
premier sens, le considérer, et, plus encore, selon le deuxième sens, « de façon admirative en raison de la valeur qu’on lui
reconnaît » (se dégage ici une idée à retenir, celle d’une considération qui se mérite). Très rapidement, les autres sens nous
entraînent vers la politesse, la déférence.
Autres questions. Respect de QUOI : de la loi, de la règle, de l’autorité ? Respect de QUI : des parents, des enfants, des
éducateurs ? Respect POUR QUOI : pour l’harmonie des rapports sociaux, le bien vivre ensemble ?
Il semble que nos sociétés soient passées, en matière de respect, des derniers sens aux premiers sens, qu’elles privilégient le «
contenu » au détriment des formes. Ce qui importe, dit très symboliquement ce père de famille, c’est moins la « politesse des
mots » qu’un certain comportement, de considération précisément.

Une notion en mutation


Incontestablement, la libéralisation des mœurs, consécutive au mouvement de Mai 68 et à l’essor du féminisme dans les
années 1970, a eu pour effet un rejet du formalisme et des « beaux » mots… jusqu’à un laisser-aller que l’on peut déplorer
aujourd’hui. Si, pendant des siècles, la « grossièreté », en effet, a été contenue, elle est aujourd’hui devenue plus banale ;
insultes et injures ont désormais droit de cité (voir « Violences »), ce qui fait dire aux parents, dépités, qu’après tout
l’important dans les relations avec les enfants, c’est d’abord la « politesse du cœur ». Bel aveu d’impuissance à redresser la
barre et à revenir à un langage plus « civil », non ? Il est vrai qu’eux-mêmes, comme parents et époux, ne sont plus tout à fait à
l’abri de ces dérives langagières que l’on nomme désormais « violences verbales ». Ce que l’on peut dire encore avec certitude
c’est que ce langage crû est appris par les enfants de plus en plus tôt : à l’école, dans les médias, avec les camarades ; qu’il sert
de solidarité générationnelle et permet, selon un scénario classique, de se démarquer des adultes. Enfin, ce langage n’est pas
l’apanage des catégories populaires ; les enfants et les adolescents des beaux quartiers l’utilisent eux aussi, à leur manière
(sans doute moins agressive… quoique !).
Ne nous laissons en tout cas pas abuser par ces mots peu civils (dont on peut regretter l’usage, voir ci-après), les adolescents
restent, dans leur for intérieur, plus respectueux qu’on l’imagine. Et d’abord envers leur famille qu’ils continuent d’aimer, en
dépit des divergences de vues qu’ils peuvent avoir avec elle quelquefois. « Touche pas à ma famille ! » semble devenu le
nouveau slogan. Respectueux ensuite envers l’école-institution dont ils ne contestent pas la légitimité, en dépit des violences
qu’ils peuvent exercer en son sein.
Il semble en tout cas que le respect ne soit plus partiel, mais universel (comme le suffrage) ; qu’il ne soit plus unilatéral, mais
mutuel. Les enfants attendent désormais que les parents les respectent aussi. D’ailleurs, la loi sur l’autorité parentale du 4 mars
2002 rappelle à ces derniers qu’ils doivent exercer leur autorité « dans le respect dû à la personne ». Ce n’est pas, on le sait,
toujours le cas.

Les « ados » en mal de respect


Chez les adolescents, le respect est une notion-clé. Ils souhaitent du respect pour eux-mêmes et pour les autres. Pour eux-
mêmes d’abord. Le respect, ils l’attendent surtout de leurs pairs. On ne dira jamais assez combien la société adolescente est
dure, brutale, soumise aux rapports de force quotidiens. Les adolescents le savent : parfois, « pour se faire respecter, il faut
savoir prendre le dessus », attaquer avant d’être agressé. L’adolescent attend aussi le respect en famille, c’est-à-dire de la
reconnaissance, de la considération pour ce qu’il est : une personne pleinement pensante, qui peut avoir ses propres points de
vue… que l’on doit précisément respecter. Le respect passe encore par la reconnaissance de son droit à l’intimité, à une vie
personnelle. Il ne veut plus être assujetti à l’autorité d’antan (quand il était enfant), au pouvoir dominant de ses parents. Il
aimerait que ces derniers soient désormais des guides et des interlocuteurs. L’adolescent aimerait enfin plus de respect entre
les hommes ; il s’insurge même de tant d’intolérances de par le monde, de tant de lâchetés et de compromissions.
Le respect a ses conditions que l’on ne saurait cependant oublier. Il repose sur des conventions, et notamment langagières. Les
mots blessent et rendent le vivre ensemble délicat. Il est malvenu, semble-t-il, de laisser penser que la brutalité du langage est
sans effet sur l’harmonie des rapports humains. Prenons quelques exemples chez les plus jeunes, là où commencent
quelquefois toutes les dérives. L’autre jour, dans le métro parisien, une jeune fille d’une quinzaine d’années, large sourire sur
son visage, disait à sa mère : « Si t’as pas plus [je ne saurais dire de quoi il s’agissait], t’es morte ! » C’est un autre jour, une
autre jeune fille disant à l’une de ses camarades : « Je m’en bas les couilles ! ». Et, bien sûr, n’oublions pas certains garçons
adeptes des usuels « Nique ta mère », « enculé de ta race », « sale bâtard », expressions qui émaillent nombre de leurs
conversations. Il faut en finir avec l’idée qu’il faudrait prendre tout cela au second degré, que les intéressés ne veulent pas dire
ce qu’ils disent avec ces mots incivils.
Mais soyons justes, les mots incivils ne sont pas l’apanage des jeunes : on les retrouve chez nombre d’adultes – nous
connaissons les expressions (plus classiques), telles que « gros con », « sale pute », « Va te faire enculer », etc. Il faut en finir
aussi avec ce langage ordurier.
Le respect, c’est aussi l’affaire de la société. C’est la nécessité pour elle d’une meilleure application en faveur des adolescents
de la Convention internationale des Droits de l’Enfant (voir rubrique éponyme) ; c’est la nécessité de permettre à chaque
adolescent de réussir son parcours de vie, scolaire d’abord, professionnel ensuite. C’est de la sorte qu’une société respecte ses
membres.

Dangers

Tous âges
Ne considérez pas la grossièreté ou de mauvaises conduites comme des choses qui ne seraient pas graves : elles le sont.
Chacun doit respect à l’autre.

Propositions

Tous âges
La vie en société repose sur des valeurs positives qui en assurent le bien-être et la sauvegarde. Le respect, doublé de la
tolérance et de la justice, fait partie de ces valeurs à protéger absolument.
Rêves

Bon à savoir
Les adolescents ont des rêves, mais des rêves « réalistes »… Des rêves qui, pourtant, paradoxalement, ne manquent pas
d’ambition : vouloir à 18 ans, voire avant, fonder une famille, être fidèle à son conjoint, avoir un travail stable, des revenus
corrects, un logement avec un petit jardin, c’est un projet « de haut vol » par les temps d’instabilité actuelle !
À l’occasion du Jamboree des Scouts et Guides de France qui s’est tenu à Jambville (Yvelines), du 27 au 31 juillet 2012, le
journal La Vie a enquêté et nous a longuement interrogé sur les résultats d’une étude menée auprès des 11-14 ans sur le sujet.
Nous reprenons ici les grandes lignes de nos déclarations d’alors, en nous appuyant sur les témoignages des jeunes.
À quoi rêvent les adolescents d’aujourd’hui ? Eugène, 13 ans, se verrait bien en tennisman professionnel ; Jeanne, du même
âge, en actrice à la Comédie française. Mais ces deux propos-là sont assez marginaux. L’on aspire d’abord à faire de bonnes
études, à avoir un bon travail, « une belle maison avec un jardin », précise Clément.
Autant dire que cette génération, contrairement à celle de 1968, a les pieds sur terre et pas la tête dans les nuages. Leurs rêves
sont, dans l’ensemble, très raisonnables. Pas d’idéalisme dans leurs propos. Ces jeunes-là ne veulent pas changer le monde,
mais s’y intégrer.
Cependant, une autre école, plus conviviale, avec des profs plus sympas et plus dynamiques, ne leur déplairait pas.

Dangers

Tous âges
« Tu n’es qu’un rêveur », dites-vous parfois à vos enfants. Mais l’utopie est utile. L’impensable d’aujourd’hui est souvent la
réalité de demain.

Propositions

Tous âges
Le monde est difficile, alors autant imaginer un avenir qui plaise, un métier de passion. Avec des efforts et de la ténacité, il est
possible de soulever des montagnes.
Rites de passage

Bon à savoir
Les sociétés ont toujours organisé des cérémonies publiques, autrement nommées rituels sociaux, pour réaliser le passage de
l’adolescence à l’âge adulte. Ces rituels donnaient accès à des libertés nouvelles, conféraient un statut supérieur aux initiés.
Ainsi, le revêtement de la toge virile par le jeune Romain faisait-il de lui un nouveau citoyen. Les rituels émancipaient les
enfants de leur famille. Dans les sociétés africaines, les enfants quittaient leurs parents pour aller vivre chez leurs oncles et
tantes.
On peut dire que c’étaient les nouvelles responsabilités conférées à l’issue d’épreuves initiatiques, souvent douloureuses, qui
donnaient aux rituels toute leur force.
Dans les sociétés traditionnelles occidentales, certaines initiations assuraient également la démarcation entre l’enfance et l’âge
adulte, comme l’adoubement du chevalier. L’historien Philippe Ariès qui a beaucoup étudié cette question rappelle que les
enfants étaient mélangés aux adultes dès qu’on les estimait capables de se passer des services et des soins de leur mère ou de
leur nourrice. À partir de 7 ans, ils (les garçons) entraient ainsi dans la communauté des hommes, partageaient avec eux les
travaux (et les jeux) de chaque jour. « Le mouvement de la vie collective, écrit Ariès, entraînait dans un même flot les âges et
les conditions, sans laisser à personne le temps de la solitude et de l’intimité. »
Certains événements marquants tinrent lieu ensuite de rituels de passage dans le monde adulte. Encore dans les années 1950,
le certificat d’études permettait aux enfants du peuple d’entrer en apprentissage puis de trouver un travail (manuel). Le
baccalauréat, de son côté, conduisait les enfants de la bourgeoisie vers les carrières de la fonction publique et les prestigieuses
professions libérales (Barreau, notariat…).
D’autres événements préparaient le passage vers le monde adulte, comme les fiançailles ou le service militaire (pour les
garçons). Puis le mariage, le premier enfant.
De tous ces rituels, il ne reste rien ou pas grand-chose dans les sociétés contemporaines.

Dangers

Tous âges
Ne condamnez pas les « défis » que les jeunes se lancent parfois entre eux. À la condition qu’ils ne soient pas dangereux, ils
sont utiles. Ils forment le caractère.

Propositions

Tous âges
Certains événements retrouvent grâce auprès des jeunes, comme le mariage ou la foi. Il est important qu’une vie soit scandée
d’étapes qui lui donnent sens et consistance.
Sanction

Bon à savoir
Qu’il est loin le temps des châtiments corporels ! Est-ce à dire que l’on ne punisse plus en famille ? Non, naturellement.

Dangers

Tous âges
Punir, sous quelque forme que ce soit, n’est pas d’une grande efficacité. Priver de télévision, d’Internet, de téléphone portable,
de sorties ne fait que suspendre le problème.

Propositions

Tous âges
À la punition, préférez l’explication. À l’exclusion, la réparation. Un pardon n’est jamais inutile non plus.
Service civique

Bon à savoir
Le service civique a été créé en mars 2010, à l’initiative du haut-commissaire à la Jeunesse, Martin Hirsch. Il s’adresse aux
jeunes de 16 à 25 ans, qui, en six, huit ou douze mois, se consacrent à une mission d’intérêt général, moyennant une
indemnisation de l’État. Les meilleurs volontaires sont récompensés par l’Institut du service civique, en pouvant accéder plus
facilement à certaines écoles comme Sciences Po (Lille et Lyon), le Conservatoire national des arts et métiers, l’École
centrale, l’École de management de Lyon, les universités (Cergy-Pontoise, Le Havre, Aix-Marseille), l’Institut du travail
social, et même certaines grandes entreprises.

Dangers

8-12 ans et 13-14 ans


Non concernés par ce dispositif.

15-18 ans
Les 16-18 ans sont concernés. Le service civique est une forme de reconnaissance sociale. Vos enfants, qui en ont fini avec
l’obligation scolaire et ne veulent pas poursuivre leurs études, peuvent trouver dans ce service actif le moyen de restaurer une
confiance perdue. Ne les découragez pas.

Propositions

8-12 ans et 13-14 ans


Non concernés.

15-18 ans
Parlez de ce dispositif à vos enfants. Ou répondez à leurs questions. Le service civique, outre le fait qu’il met les jeunes en
confiance, leur procure des missions concrètes, qui vont leur permettre de mobiliser des compétences (qu’ils ne soupçonnent
pas toujours eux-mêmes, comme prendre des initiatives ou travailler en équipe).
Sexualité

Le chiffre-clé
Âge du premier rapport sexuel : 17 ans et 4 mois pour les garçons, 17 ans et 6 mois pour les filles (contre respectivement 17
ans et 9 mois et 18 ans et 9 mois il y a trente ans).

Bon à savoir
La sexualité est aussi intimement liée à la puberté que le jour à la nuit. De ce point de vue, l’on peut dire que l’adolescence est
marquée par une « sexualisation » progressive de la pensée et du corps. Caractéristique que l’économie marchande sait
exploiter en exacerbant le « sexuel » chez l’adolescent, dès son plus jeune âge.
Entre 8 et 12 ans, le désir sexuel s’affirme. Contrairement à ce que l’on dit couramment, ce désir ne se réveille pas avec la
puberté : il n’a jamais été endormi. Tout au long de l’enfance, il évolue : dans ses formes, dans ses modes d’expression.
Très tôt, l’enfant connaît des émois, des préoccupations, des curiosités de nature sexuelle. À Freud revient le mérite d’avoir
mis en lumière cette « sexualité infantile » (entre 3 et 6 ans), dans des formes rudimentaires alors. Quand l’enfant grandit et
que vers 8-9 ans il devient un jeune adolescent, les choses peuvent se compliquer. La dernière enquête de 2011 d’Éric
Debarbieux, alors président de l’Observatoire international des violences à l’école, révèle ainsi des cas de harcèlement subis et
commis dans les écoles primaires et les collèges par des élèves âgés de 8 à 12 ans. La sexualité se fait alors agressive.
Entre 8 et 12 ans (et même avant), le jeune adolescent connaît alors beaucoup plus que l’instinct sexuel ; il connaît des
chagrins d’amour, dont les adultes se gaussent volontiers, et qu’en tout cas ils négligent ou mésestiment. Cet âge correspond à
ce que les psychanalystes appellent la « période de latence ».
Ce terme est inapproprié. Si par « latence » l’on entend l’arrêt, ou le ralentissement, vers 7-8 ou 9 ans, de l’activité sexuelle de
l’enfant ou son désintérêt soudain pour ces « choses-là », laquelle serait remplacée par quelque « sublimation » vers des
activités de nature plus culturelle ou artistique, l’on commet une erreur d’analyse.
La « sublimation » est un art difficile. Sublimer, « se sublimer », c’est, comme chacun sait, « se dépasser ». C’est dire que la
sublimation est une sorte de « filière d’excellence » réservée aux sujets les mieux dotés, intellectuellement et culturellement,
ce qui n’est pas à la portée de tous. Que font donc ceux qui ne « se subliment » pas ?
Les études scientifiques empiriques indiquent de toute manière que, tant par le corps que par l’esprit, l’enfant, ou ce que l’on
nomme tel, reste, dans les âges de la prétendue latence, un être totalement sexuel. Tout continue pour lui sur une ligne de
libido ininterrompue. Ce que la puberté va apporter, avec les modifications physiologiques, c’est la possibilité d’accomplir
l’acte procréateur et de s’engager, de manière plus affective, dans des relations plus durables.

Une découverte semée d’embûches


La vie sexuelle de l’adolescent n’est pas simple. Légale à partir de 15 ans (la fameuse majorité sexuelle française), cette vie se
heurte à de multiples obstacles et se voit confrontée à toute une série de dangers parfois mortels, comme le sida. D’où le
sentiment que si la vie sexuelle des adolescents n’est plus interdite comme jadis, elle leur est fréquemment déconseillée par les
personnes « autorisées » (parents en tête). Ajouté au danger mortel évoqué plus haut, le risque de grossesse « indésirée », ainsi
que l’impératif scolaire très « catégorique », tout est prêt pour en contrarier au moins les manifestations les plus précoces.
Peut-être faut-il voir là les raisons qui expliquent que l’âge moyen des premiers rapports sexuels complets reste,
invariablement, situé, depuis une vingtaine d’années, autour de 17 ans (soit un âge relativement élevé compte tenu d’un
contexte social fortement érotisé). Seuls 18 % des adolescents de 4e et 3e déclarent avoir déjà eu des rapports avec pénétration
(chiffre qui lui aussi semble rester stable depuis 2006).
Les adultes en réalité ne sont pas très clairs avec la sexualité de leurs enfants. D’un côté, ils se félicitent de la libéralisation des
mœurs acquise depuis 1968, d’un autre côté, ils s’inquiètent de l’exercice de cette liberté sexuelle des adolescents, et des
enfants. À ce sujet, Freud lui-même semble avoir été débordé, effrayé même, par la découverte d’une sexualité propre aux
enfants. Il en acceptera donc rapidement l’interdit social. Comme le rappelle Maud Mannoni, psychanalyste renommée, « cela
lui semble relever des “nécessaires contraintes” imposées par la sublimation. La répression sexuelle devient ainsi, dans l’esprit
de Freud, le garant le plus sûr d’une soumission intellectuelle et morale » (Mannoni, 1973).
De toute façon, il n’est pas simple de devenir un être pleinement sexuel. Cela passe par des tâtonnements, des essais, des
erreurs, des angoisses. Selon l’expression très mitterrandienne, il faut ici « laisser du temps au temps ». Aujourd’hui comme
hier, les premières expressions sexuelles sont donc balbutiantes. L’adolescent – et il le dit lui-même – veut se sentir prêt avant
de connaître le « grand jour ». Ainsi moins d’un adolescent sur cinq vit-il sa première relation sexuelle avant l’âge de 15 ans.
Entre 15 et 18 ans, près de la moitié des jeunes n’échangent que des baisers et des caresses.
Pourtant, tout devrait pousser les uns et les autres à une sexualité précoce. Télévision, Internet, presse écrite ne parlent-ils pas
de sexe à longueur de journée ?

Les prémices de la sexualité


Tout commence souvent, pour les garçons comme pour les filles, par cette vieille « pratique solitaire » de la « masturbation ».
Les études réalisées depuis un bon siècle en révèlent la fréquence : entre 80 et 95 % chez les garçons, entre 30 et 60 % chez les
filles. La masturbation pubertaire est dans le prolongement de la masturbation infantile, laquelle s’exprime alors d’autres
façons. Pour les adolescents, qui en sont, pour leur part, aux premières phases de la maturation sexuelle, cette pratique agit, de
l’aveu même des médecins, comme une soupape de sécurité, elle libère cette « surcharge énergétique quantitative » dont
parlait Freud.
Mais, souvent, dans le même temps, l’on observe les premiers gestes de la sexualité avec ou sans partenaire : baisers (d’abord
sans la langue), attouchements (d’abord au-dessus de la ceinture, selon la distinction savante faite par les Canadiens). Et puis
l’exploration devient de plus en plus poussée, les filles prenant fréquemment aujourd’hui l’initiative, pour peu qu’un garçon
leur plaise.
La pression des pairs n’est pas étrangère à la libération des gestes et de la parole sexuels. Pour se montrer à la hauteur de ses
copains ou de ses copines, l’adolescent doit au moins montrer son intérêt pour le sexe, avant d’aller plus loin. Il faut bien « le
faire » un jour (l’amour), disent en chœur garçons et filles. « C’est un examen de passage », note un garçon de 16 ans.
Songeons encore à ce que pense Jacquot, le personnage du roman de Jacques Lanzman, Le Jacquiot, qui n’a pas tout à fait 16
ans et qui ne veut surtout pas mourir puceau, parce que, dit-il, « mourir puceau, c’est comme de mourir avant d’être né ».

La sexualité adolescente et ses a priori


Il est d’usage de dire que la « première fois » n’a pas le même sens chez les garçons et chez les filles, qu’elle est une
manifestation de virilité pour les premiers, un acte d’amour pour les secondes. C’est une vision très réductrice des choses, à la
limite de la caricature. En réalité, le désir n’a pas de sexe, il est féminin autant que masculin, et cela vaut pareillement pour le
sentiment amoureux. Les enquêtes montrent ainsi des garçons très amoureux et des filles très « sexuelles ». Elles montrent
pareillement que les « garçons des cités », tant stigmatisés, ne sont pas nécessairement ces effrayants violeurs, adeptes de «
tournantes » de sinistre réputation. Nous connaissons des garçons « fleur bleue » qui vivent dans des conditions dégradées,
tandis que des garçons de plus beaux quartiers se montrent peu chaleureux envers leurs camarades-filles.
Il est encore d’usage de dire que désormais toutes les orientations sexuelles des jeunes sont également acceptées (par eux).
C’est profondément inexact. Nombre de travaux indiquent que l’homosexualité est très mal tolérée par les jeunes adolescents
mâles, plus mal encore dans les cités où l’adolescent gay n’a souvent d’autre choix que de dissimuler une sexualité, jugée non
conforme aux normes de la virilité dominante.
Il est un dernier usage qui est de séparer sexualité et sentiments, de mettre d’un côté les « mauvais jeunes », les « sexuels »
radicaux, de l’autre les « bons jeunes », les sentimentaux « extrêmes ».
De fait, les sentiments, de tout temps (hormis la période 1968-1975, celle des Valseuses, film-culte de ces années), ont
accompagné les relations sexuelles des adolescents. La nouveauté est que les pratiques sexuelles, du fait de la pornographie
ambiante, se sont incontestablement modifiées, dans le sens d’une radicalisation : elles sont, pour dire les choses autrement,
plus « hard ». Entre adolescents, l’on a aujourd’hui des audaces sexuelles inimaginables il y a encore vingt ou trente ans.
L’éducation sexuelle étant dorénavant largement dispensée par Internet, le niveau d’exigences pour satisfaire le partenaire
s’est accru. Nous avons des pratiques « excessives », tant chez les filles que chez les garçons, les jeunes filles sachant
désormais anticiper les besoins de leurs partenaires masculins. Mais, attention, le sentiment amoureux n’est pas menacé pour
autant. Une étude Ipsos-Cacharel, réalisée en novembre 2004 auprès de jeunes âgés de 15 à 35 ans, révèle que, pour 93 %
d’entre eux, il est important d’être amoureux et que les périodes sans amour sont sans attrait. À cet égard, le rêve du « prince
charmant » ou de la fille « super canon » n’est jamais très loin.
Enfin, pour tordre le cou à cette idée qui voudrait opposer les « pervers » d’un côté et les « gentils amoureux » de l’autre, nous
citerons ce que nous disait un jour un garçon d’une quinzaine d’années, qui résume assez bien l’état d’esprit d’ensemble : « Il
y a les filles avec qui l’on couche et la fille que l’on aime. »
En conclusion, l’on peut dire que rien ne change vraiment sur la planète-jeunes. Comme hier, les adolescents croient à la
famille qu’ils fonderont plus tard, à la fidélité qu’ils revendiquent. Ils veulent aussi des enfants. Très raisonnable tout cela, non
?

Dangers

8-12 ans
La sexualité est un sujet d’inquiétude… mais vous êtes souvent portés au silence. Or l’éducation sexuelle est d’abord votre
responsabilité. Ne rien dire est une erreur. Parlez sexualité, mais sans oublier l’essentiel : les sentiments.

13-14 ans
Ne soyez pas trop intrusifs. Rappelez-vous qu’avant 17 ans, il n’y a pas de rapports sexuels (complets).

15-18 ans
Vos enfants sont désormais majeurs sexuels. Ne les privez pas de la joie de leurs vraies premières amours. Des expressions
comme « Tu as bien le temps de penser à ces choses-là », « Pense d’abord à ta scolarité » sont à éviter.

Propositions

8-12 ans
Racontez à vos enfants vos premiers flirts, la rencontre avec votre conjoint. Ils auront l’impression de vivre des choses (et des
inquiétudes) normales.

13-14 ans
Réjouissez-vous de voir débarquer chez vous le « petit ami » ou la « petite amie », des baisers échangés. Dites-leur bien que «
c’est de leur âge » !

15-18 ans
La meilleure attitude à tenir est le silence. Soyez disponible si vos enfants veulent vous parler de leurs relations intimes. Mais
pas d’interrogatoire. Pas de complicité déplacée non plus.
Skin party

Bon à savoir
Ne faisons pas d’angélisme avec l’adolescence. C’est un monde qui peut être « trash ». Les « skins parties » font partie de ces
moments de « mise en danger » de la jeunesse. Sexe, défonce, provoc, voilà un cocktail détonant, directement issu de la série
britannique Skins, diffusée sur Canal+ à partir de 2007, puis sur Internet.
De quoi s’agit-il dans cette série ? D’adolescents déboussolés noyant leurs problèmes familiaux, scolaires et sentimentaux
dans la drogue, l’alcool et le sexe. Un exemple : l’épisode 10 de la saison 1. On y voit une défonce magistrale avec alcool et
cachets d’ecstasy.
Les « skinneurs-party » portent des vêtements provoquants : mini-shorts, jupes ultra-courtes, se déguisent avec des masques de
clown. Chacun, dans une « skin », peut arriver habillé comme il veut, boire ce qu’il veut. « L’important, explique une jeune
fille de 18 ans, c’est que ça choque. » Il n’y a ni interdits ni limites.
Ces soirées sont généralement organisées dans des lieux désaffectés ou chez de simples particuliers, « là où les gens peuvent
se lâcher », explique Pierre, 20 ans. Les participants sont prévenus, via Internet, au dernier moment de l’heure et du lieu de la
« skin ». Ils viennent de tous les milieux sociaux, des quartiers chics comme des cités. Leur motivation commune : « Aller le
plus loin possible sans se soucier du lendemain. »
Pour la sociologue Monique Dagnaud, auteur en 2008 de La Teuf, ces soirées illustrent le « pessimisme social » de la jeunesse
actuelle. Nous pensons pour notre part qu’elles sont le moyen d’anesthésier un présent fort peu glorieux.

Dangers

8-12 ans et 13-14 ans


De telles soirées ne sont pas destinées aux plus jeunes. Faites preuve de pédagogie. Dites votre inquiétude.

15-18 ans
N’interdisez pas absolument. Mettez plutôt en garde contre les risques de tels rassemblements.

Propositions

8-12 ans et 13-14 ans


Suggérez fortement d’autres types de soirées où l’amusement ne croisera pas nécessairement l’excès et l’illégalité.

15-18 ans
Même recommandation pour les 15-16 ans. Et faites preuve de plus de tolérance envers les 17-18 ans.
Soirée

Bon à savoir
Les noms changent, « surboum », « surprise-partie », « boum »…, le fait reste : la réunion des copains et copines pour faire la
fête. On nomme ces réunions aujourd’hui des « soirées ».
Vouloir réunir ses amis chez soi ou aller les visiter chez eux est un indice d’une volonté d’autonomie qui caractérise, on s’en
souvient, l’âge adolescent. Et, comme ce désir d’adolescence se manifeste de plus en plus tôt, il est naturel que ces demandes
soient formulées elles aussi de plus en plus rapidement, à 8-9 ans parfois.

Dangers

8-12 ans
— N’interdisez pas au motif, une nouvelle fois, que ce ne serait pas « de leur âge ». Il n’y a pas d’âge pour s’amuser. Discutez
avec vos enfants et proposez-leur une soirée… en après-midi avec volets fermés et rideaux tirés, pour faire comme…
— Sachez aussi faire la différence entre les 8-10 ans et les 11-12 ans. Pour ces derniers, acceptez que la fête dure un peu plus
longtemps et morde un peu sur la soirée.

13-14 ans
Vous pouvez à présent envisager une véritable « soirée » pour vos enfants. Ne prescrivez pas d’heure de fin de réunion
farfelue, comme 20 h par exemple. Pour les 13-14 ans, 21 heures, voire 22 heures est convenable. Pour les 14 ans, la
permission de minuit est une sage décision.

15-18 ans
Un peu plus de souplesse. À 16, 17 ou 18 ans, l’on peut sortir un peu plus souvent et rentrer un peu plus tard.

Propositions

Tous âges
À chaque âge sa fête. Plutôt diurne pour les 8-12 ans, avec un peu de nocturne (21-22 heures) pour les 13-14 ans. Plutôt
nocturne, avec discussion préalable sur les heures de retour, avec les plus âgés.
Sorties

Bon à savoir
Si tous les adolescents ne vont pas en « skin party », ni même en « boîtes de nuit » (certains sont trop jeunes pour cela), tous
(ou presque) aiment sortir. C’est en effet le seul moyen qu’ils ont de « se sortir » de la dépendance des parents, bien accablante
quelquefois.

Dangers

8-12 ans
Aménagez ensemble la sortie de vos plus jeunes adolescents.

13-14 ans
Inutile de demander à vos enfants de cette tranche d’âge où ils vont et avec qui. La plupart du temps, ils ne le savent pas eux-
mêmes. Pour se retrouver entre « potes », contrairement aux adultes, les adolescents ne se fixent pas de rendez-vous : ils n’ont
d’ailleurs pas d’agenda pour cela. Il y a une vingtaine d’années, nous avions eu l’occasion de vérifier la chose en observant
des groupes de skateurs (« planchistes à roulettes »). Ces adolescents ne convenaient jamais de rien entre eux, ni de l’heure ni
du lieu (sachant qu’ils seraient tous à la bonne heure et dans le bon lieu). L’adolescent est comme ça !

15-18 ans
Faites confiance.

Propositions

Tous âges
Ce qui aura été décidé ensemble devra être respecté par l’adolescent.
Sport et exercices physiques

Bon à savoir
Le sport est un facteur d’équilibre et d’épanouissement personnel. Les études montrent que les adolescents physiquement
inactifs et/ou qui se trouvent trop gros ou, au contraire trop minces, sont davantage touchés par la dépression et l’anxiété, mais
aussi par les troubles du comportement (agressivité, consommation de substances toxiques). En revanche, les adolescents
sportifs ont une meilleure image d’eux-mêmes que les autres adolescents.
Le sport éduque aussi à la responsabilité et à l’autonomie, au respect des règles, de soi et d’autrui. À cet égard, les sports
d’équipe sont les meilleurs.
Il faut savoir que le passage de l’enfance à l’adolescence marque le glissement de la culture institutionnelle, organisée – celle
du club –, à la culture personnelle, spontanée, le remplacement d’une culture apprise – par des coaches, des entraîneurs – où
l’on est d’abord « sujet » à une culture que l’on façonne soi-même et vous transforme en acteur.
D’où la préférence des adolescents pour des activités sportives « hors club », de rue, comme les pratiques de glisse
(skateboard, roller…) ou de ballon (football, basket-ball…). Du « sport en liberté » pour reprendre une expression courante.
Nous avons longuement développé cette question dans notre ouvrage Les Bandes, « l’entre soi » adolescent (DDB, 1re édition,
1993) pour ne pas avoir à en dire plus ici.
S’agissant de l’activité physique proprement dite, dans le temps scolaire, elle continue à n’occuper qu’une place mineure : 3
heures par semaine pour les écoliers, 4 heures pour les collégiens de la 6e , puis 3 heures pour ceux de la 5e à la 3e .
Finalement, seuls 31 % des collégiens ont une activité physique suffisante dans la semaine (au moins 1 heure par jour, cinq
jours par semaine). Un manque d’exercice qui les place parmi les plus mauvais élèves européens de la catégorie (30e sur 39).
Cela ne s’arrange pas ensuite. À partir de la seconde, les lycéens n’ont plus que 2 heures de sport par semaine. Enfin, dans
l’enseignement supérieur, le sport n’est plus obligatoire. C’est ainsi que plus d’un jeune sur trois (38 %) âgé de 18-24 ans
déclare ne pas faire de sport.

Dangers

Tous âges
Considérer le sport, et d’abord à l’école, comme une quantité négligeable. Les spécialistes sont formels : le sport a des vertus
incomparables. Il permet à chaque enfant, à chaque adolescent, de prendre conscience de son corps, de le maîtriser
(coordination, motricité, développement et mobilisation des ressources).

Propositions

Tous âges
Encourager la pratique régulière d’une activité physique, en se rappelant, comme nous l’avons dit, que non seulement elle
favorise l’épanouissement et accroît la confiance en soi, mais qu’elle permet aussi en classe d’avoir de meilleurs résultats dans
toutes les matières, telles que les maths et le français.
Suicide

Un triste fait divers


Harcelée au collège, une adolescente de 14 ans se jette du septième étage d’un immeuble du quartier des Minguettes à
Vénissieux (Rhône). Elle est entre la vie et la mort (9 octobre 2012).

Bon à savoir
S’il ne touche pas massivement la population adolescente, le suicide, qui est toujours une tragédie dans une famille, inquiète.
Aujourd’hui, chaque année 550 jeunes de 15-24 ans mettent fin à leurs jours, et au moins 40 000 tentent de le faire (à signaler
que, si les filles font plus de tentatives que les garçons, ce sont ces derniers qui meurent le plus – les filles utilisant des moyens
moins « définitifs », comme les psychotropes, tandis que les garçons recourent davantage à des moyens qui laissent peu de
chances de survie, comme les armes à feu ou la pendaison).
Il y a, toutes classes d’âge confondues, entre 10 000 et 12 000 suicides par an dans notre pays. Fort heureusement, la situation
française n’est en rien comparable à celle d’autres pays, comme le Japon ou l’Inde. Dans ce dernier pays, ce sont 125 000
personnes qui se donnent la mort chaque année (chiffres de 2008), dont de nombreux étudiants (chiffre non communiqué)
échouant à leurs examens.
Si – facteur d’espoir –, en raison notamment d’une meilleure prise en charge médicale, le nombre des jeunes suicidés français
a été divisé par deux en vingt ans, le chiffre des tentatives a, lui, toujours tendance à augmenter. Le nombre de suicides de
jeunes adolescents de 10-11, voire 12 ans est, pour sa part, lui aussi en hausse. L’année 2011 a été à cet égard riche en drames
touchant cette tranche d’âge.

Qu’en est-il du suicide chez les enfants ?


Dans son rapport sur le suicide des 5-12 ans (qui date de septembre 2011), le psychiatre Boris Cyrulnik affirme que les
chiffres sont sous-estimés. La quarantaine de cas recensés chaque année ne serait pas conforme à la réalité, qui tournerait aux
alentours d’une centaine. La raison en serait une classification en accidents d’un certain nombre de cas.
En réalité, mélangeant, dans la tranche des 5-12 ans, les enfants proprement dits (les 5-8 ans) et les très jeunes adolescents (les
8-12 ans), le psychiatre parvient à une mauvaise conclusion : ce n’est pas le suicide des grands enfants qui augmente, mais
celui des jeunes adolescents. Ce qui ne manque pas d’inquiéter. Le « mimétisme », à l’origine de l’entrée en adolescence, ne
toucherait donc plus seulement les pratiques culturelles ou sociales positives, mais les pratiques négatives ou dangereuses.
Phénomène d’autant plus préoccupant que ces gestes (souvent des pendaisons) n’exprimeraient plus nécessairement ce fameux
désir de « vivre autrement » dont parlent justement les psychiatres, mais un véritable « désir de mort ». Nous en reparlerons.
Évidemment, 550 suicides, c’est finalement très PEU par rapport à une population adolescente forte de 6 millions d’individus.
C’est d’ailleurs, rappelons-le, dans les tranches d’âge supérieures, et en particulier chez les personnes très âgées, que les décès
sont les plus nombreux.
Néanmoins, ces actes ne sont jamais à prendre à la légère. Il faut considérer toute tentative très sérieusement. Soyez vigilant,
d’autant qu’apparaissent de nouveaux motifs d’inquiétude. Évoquons-les rapidement. D’abord, les adolescents suicidants sont
de plus en plus jeunes. On repère des signes de mal-être profond de plus en plus tôt chez les enfants. Boris Cyrulnik le rappelle
dans son rapport. Ensuite, redisons-le, si la plupart des gestes suicidaires restent une manifestation d’une volonté de « vivre
autrement », non pas d’un « désir de mort », certaines tentatives aujourd’hui semblent, hélas, exprimer ce dernier désir d’en
finir avec la vie. L’adolescent paraît comme « acculé », la pression du quotidien est trop forte, il ne sait plus comment s’en
sortir : la mort lui paraît à présent la seule issue possible.
Les raisons du suicide sont évidemment complexes, multiples et souvent enchevêtrées : conflits familiaux, déceptions
amoureuses, pressions scolaires, solitude, réprimandes, agression physique ou sexuelle, découverte douloureuse d’une
homosexualité difficile à assumer (au début de découverte), mais aussi harcèlement (bullying), addictions multiples, jeux
vidéo violents, réseaux sociaux où insultes et moqueries sont légion.
Il n’y a pas en réalité UNE cause identifiable, mais une multitude de facteurs enchevêtrés, qui viennent souvent se greffer sur
des vulnérabilités personnelles.

Dangers
8-12 ans
C’est un âge encore sensible où une simple réprimande, familiale ou professorale, peut avoir des conséquences terribles. N’en
sous-estimez pas les conséquences. Différents signes peuvent vous alerter comme un isolement soudain : l’adolescent
communique moins avec vous, vous notez une baisse inattendue de ses performances scolaires.

Autres âges
— « Je ne comprends pas ton attitude. N’as-tu pas tout ce que tu veux à la maison ? Pense à tous ces enfants qui meurent de
faim dans le monde ? » Ce discours culpabilisateur et moralisateur n’aide en rien l’adolescent dans sa souffrance qui, à cet
instant, est sans doute immense.
— Enfin, ne prenez pas à la légère les avertissements de vos enfants (qu’ils postent de plus en plus sur leurs réseaux sociaux).
Les « Je vais me foutre en l’air » ou « J’en ai marre de la vie » sont toujours à prendre au sérieux.

Propositions

8-12 ans
Certains indices doivent vous interpeller : un changement d’humeur ou d’habitudes, un isolement dans la chambre, devant
l’ordinateur par exemple. Informez-vous discrètement pour savoir si votre enfant n’a pas quelque souci en classe : harcèlement
par exemple. Évitez de votre côté les réprimandes sévères.

Autres âges
— Soyez rassurants par des paroles de réconfort. « Je suis triste de te voir souffrir de la sorte. Ça me rappelle quand j’étais
adolescent moi-même. J’avais des tas de problèmes. Et je n’avais personne à qui en parler. Tu sais combien je t’aime. Est-ce
que je peux t’aider ? Tu sais, moi quand ça va mal, et tu peux me croire, ça m’arrive, j’essaie de me raisonner et de me dire
que la vie, c’est extraordinaire finalement. »
— Ce discours d’empathie mêlant des souvenirs de souffrances personnelles et vos propres sentiments actuels ne peut qu’être
rassurant pour l’adolescent. Savoir que quelqu’un d’autre, surtout vous, une personne adulte, a souffert au même âge peut lui
permettre de relativiser sa propre situation.
— Si vous avez repéré quelque signe inquiétant, essayez de convaincre votre enfant de la nécessité d’une écoute
psychologique.
Tabac

Bon à savoir
Les jeunes connaissent les discours dénonçant les méfaits du tabac. Ils savent le coût de plus en plus élevé des cigarettes
(depuis le 1er octobre 2012, le prix du paquet le moins cher est à 6,10 €). Et, pourtant ils fument, et même de plus en plus tôt –
en dépit de l’interdiction légale de vente aux mineurs depuis juillet 2010.
Selon les données de la Fédération française de cardiologie, entre 250 000 et 300 000 adolescents de 10 à 15 ans fumeraient
quotidiennement. D’après le baromètre de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), le tabac reste
même le produit toxique le plus consommé chez les 12-13 ans. Sans conteste, les « années-collège » sont celles de la
découverte de la cigarette (et de l’alcool, nous l’avons vu).
Zéfira a 15 ans et elle est collégienne de 3e en Loire-Atlantique. Elle fume 5 cigarettes par jour, à l’insu de ses parents. Elle a
commencé à 11 ans, pour « faire comme les plus grands ».
Selon la dernière enquête du bureau régional Europe de l’OMS (septembre 2012), un élève sur six fume quotidiennement en 3e
. Ils sont plus nombreux au lycée : 68,5 % des élèves de 17 ans. L’enquête de l’Observatoire français des drogues et des
toxicomanies (OFTD) de 2011 indique que le tabagisme quotidien chez les jeunes de 17 ans croît de 10 % aussi bien pour les
garçons que pour les filles. Environ 8 % consomment au moins 10 cigarettes par jour.

Dangers

8-12 ans
Non concernés, mais ne gardez pas le silence avec les 11-12 ans, la tentation commence à cet âge.

Autres âges
— « Arrête de fumer, tu vas te ruiner la santé ! ». Ces injonctions morales ne servent à rien, juste à renforcer le désir de
continuer.
— Abstenez-vous aussi de retourner la chambre de l’adolescent dans le but d’y trouver le produit interdit.

Propositions

8-12 ans
S’ils sont encore peu concernés par le phénomène, cela ne doit pas vous empêcher de distiller de-ci de-là des messages
préventifs en évoquant la nocivité du tabac.

Autres âges
a) Recourir à l’empathie :
« Je comprends ton désir de fumer, beaucoup fument aujourd’hui, et sans doute tes amis autour de toi. Je m’inquiète
cependant des conséquences de cette consommation : on dit tant de choses sur les dangers du tabac ! Ça me fait peur ! Je
t’aime tellement ! »

b) Avoir le souci d’informer :


Il y a quelques mois, dans un reportage à la télévision, un médecin disait que plus l’on commence à fumer tôt (avant 15 ans),
plus l’on devient « accro ». Sans compter les risques de cancer, les maladies respiratoires, etc.
L’idéal bien sûr est de ne pas fumer soi-même. Le bon exemple est toujours le meilleur des arguments. Si ce n’est pas le cas,
le parent fumeur – dans l’exemple de Zéfira, la mère – peut proposer à sa fille d’arrêter ensemble.
Elle pourrait dire ceci : « Tu vois, Zéfira, je fume depuis l’âge de 20 ans ; j’ai essayé d’arrêter plusieurs fois, ça n’a pas
marché. Toi, tu ne fumes que depuis un an, ce sera peut-être plus facile, en tout cas, à deux nous nous encouragerons. Ça
m’aiderait beaucoup ton soutien. Qu’en penses-tu ? »
« Twilight »

Bon à savoir
Si, il y a une vingtaine d’années, nous aurions parlé, comme film-culte, du Cercle des poètes disparus ou du Grand Bleu, nous
ne pouvons parler aujourd’hui que de Twilight, à la fois le formidable roman à succès de Stephenie Meyer (plus de 100
millions d’exemplaires vendus dans le monde), et des films qui l’ont adapté à l’écran à quatre reprises (plus d’un milliard de
dollars de recettes). Le cinquième épisode est sorti en salle en novembre 2012.
Il y a dans cette histoire tous les ingrédients qui permettent l’identification du lecteur ou du spectateur aux différents
personnages : de la romance (pour les filles, surtout, qui, nous l’avons vu, continuent de rêver du prince charmant), de l’action,
du danger (pour les garçons), de la peur, des hésitations.
Rappelons-nous du déroulement de l’histoire : la jeune Bella tombe amoureuse du jeune et beau vampire, Edward, « pas
méchant pour deux sous ». À ses côtés, elle a encore Jacob, un ami sûr, simple, toujours de bonne humeur, sur lequel elle peut
compter quoi qu’il advienne, qui la protège en permanence. Voilà bien un ami dont rêve toute adolescente ! Bella et Edward,
c’est un peu les amours contrariées de Roméo et Juliette.
Dans l’ultime chapitre de la saga, Révélation, la jeune fille, qui, en épousant son beau vampire, est devenue vampire à son
tour, est à présent jeune maman. Elle qui était craintive, a pris de l’assurance ; elle est désormais prête à tout pour défendre sa
petite fille, Renesmée, aux pouvoirs exceptionnels, notamment de la menace des Volturi, l’élite des vampires, qui sont
convaincus que l’enfant présente un danger pour leur communauté. Quant à Jacob, le jeune loup-garou rival amoureux
d’Edward, il s’est résigné à sa défaite et est devenu même un allié fidèle du jeune couple. La perspective d’un affrontement
pousse Edward et Bella Cullen à battre le rappel de toutes les familles de vampires pour se défendre.

Dangers

Tous âges
Le dénigrement est à exclure. À chaque époque, les adolescents ont eu leur film-culte. Si nous remontons très loin dans le
temps, il y a eu, chez nos aînés, Autant en emporte le vent, plus récemment, répétons-le, Le Cercle des poètes disparus, Le
Grand Bleu, Titanic.

Propositions

Tous âges
Le moins que vous puissiez faire est de comprendre que Twilight épouse parfaitement les désirs, les craintes, les espoirs des
adolescents. C’est un film très moral finalement où la gentillesse triomphe de la méchanceté, la vertu du vice. Edward est un
vampire « comme il faut » ; il ne tue pas ceux qu’il croise, il est même végétarien ; et, surtout, il est très prude à l’égard de
Bella, ne cède jamais à ses avances.
Les adolescentes peuvent se retrouver dans cette jeune fille qui est à la fois follement amoureuse et quelque peu dépressive.
Qui est prête à tous les sacrifices, y compris à se transformer en vampire elle-même pour séduire son « prince charmant ».
Vacances et loisirs

Bon à savoir
Les vacances, les loisirs, voilà des temps forts dans la vie des adolescents.
Côté loisirs : chez les 12-17 ans, le cinéma, avec des copains-copines naturellement, reste l’activité préférée… mais des filles
seulement : 20 % vont voir des films pour seulement 12 % des garçons (sondage Ifop, 2010). Ces derniers préfèrent les sports
collectifs (29 %), aller à des fêtes organisées par des amis (20 %), rester avec les copains/copines dans la rue, sur une place,
dans une galerie marchande (12 %) ou traîner dehors sans rien faire de particulier (12 %). Après le cinéma, les activités
préférées des filles sont : rester avec des copains/copines dans la rue, sur une place, dans une galerie marchande (17 %), aller
dans les centres commerciaux, magasins avec les copains/copines (17 % encore pour seulement 3 % des garçons !), pratiquer
un sport collectif (13 %), aller à des fêtes organisées par des amis (12 %), enfin traîner dehors sans rien faire de particulier (9
%).
Côté vacances : le besoin d’autonomie conduit les adolescents à vouloir très vite les passer avec leurs amis plutôt qu’avec
leurs parents. Si, avant 8 ans, les départs sans les parents sont rares, à partir de 8 ans (qui, rappelons-le, marque le début de
l’adolescence) et jusqu’à 13 ans, ils sont plus fréquents. L’on part alors en « colonies de vacances » ou « centres de vacances
». À partir de 14-15 ans, la demande pour partir seuls avec des amis se fait plus pressante.

Dangers

8-12 ans et 13-14 ans


Des vacances avec d’autres membres de la famille ne sont pas à exclure. Grands-parents, oncles et tantes peuvent être
d’appréciables hébergeurs.

Autres âges
À partir de 15-16 ans, les vacances obligatoires en famille (avec les parents) sont fortement décommandées. L’autonomie se
construit aussi durant le temps des congés, propice à faire toutes sortes d’expériences (notamment sexuelles).

Propositions

Tous âges
Le dialogue sur ce sujet avec les adolescents est le meilleur conseil que l’on puisse donner.
Valeurs

Bon à savoir
On les dit quelquefois « sans foi ni loi ». C’est une outrance bien sûr. Seuls 27 % des adolescents disent ne pas avoir de
modèles dans leur vie (sondage Ipsos/santé de mars 2012). La plupart expriment cependant un manque : ils aimeraient qu’on
leur enseigne davantage le respect des valeurs, l’honnêteté et la confiance en soi.
À quoi sont attachés les adolescents d’aujourd’hui ? Aux valeurs de toujours, telles que l’authenticité ou l’amour par exemple.
En cette période de crise, les valeurs refuges ont évidemment la cote, avec, en tête, la famille, la fidélité, un travail sûr. La
plupart des adolescents rêvent désormais plus de stabilité que d’aventure, plus de sécurité que d’entreprise. Ils veulent de la
fidélité aussi. L’on observe enfin qu’aujourd’hui les jeunes sont dans une relation affective aux choses et aux gens. Comme le
remarque la sociologue Monique Dagnaud, « pour eux les notions d’égalité et de partage consentis dans les rapports – que
ceux-ci soient de consommation, privés ou professionnels – sont une réalité acquise ». Les adolescents veulent de la confiance,
du respect mutuel, ils sont dans le « donnant-donnant », dans une logique de réciprocité fondée sur une confiance mutuelle.

Dangers

Tous âges
Il ne faut pas raisonner en termes uniquement de réussite matérielle. Une vie réussie passe par bien d’autres choses.

Propositions

Tous âges
Ce sont les valeurs qui font l’humanité et l’harmonie des sociétés. Il faut les nommer aux adolescents et veiller à leur
application, en commençant par soi-même, parents.
Vêtements

Bon à savoir
L’adolescence, c’est le royaume de la parure. La société adolescente (mais la société adulte ne lui ressemble-t-elle pas ?) est
donc très attentive à son apparence. Cette quasi-obsession du paraître traduit autant des exigences sociales que des besoins
naturels. Il faut, chez les jeunes garçons, se couvrir pour « oublier » son corps encore immature (alors qu’on le voudrait fort et
déjà adulte), ou, au contraire, chez les jeunes filles, le révéler dans toute sa caractéristique nouvelle (alors les « formes » sont
mises en avant). C’est selon le sexe. En grossière réduction, en début d’adolescence du moins, vêtements amples pour les
garçons qui, cherchent alors à cacher leurs carences en puberté, vêtements moulants pour les filles qui, au contraire, désirent
être vues dans ces modifications apparentes. Et la presse d’évoquer les nouvelles « lolitas ».
Aujourd’hui, une tenue est particulièrement à la mode : celle du « populaire » (voir rubrique du même nom). L’ayant
longuement décrite plus haut, nous n’y revenons pas ici.

Dangers

8-12 ans
Avant d’interdire (ce qu’il faudra peut-être faire), il faut expliquer. « Ma fille veut des habits de grande », titrait Le Monde (3
juin 2011). Ce désir est normal. Songerait-on à habiller un petit garçon ou une petite fille à la mode de nos grands-parents ?
Mais, sans doute, ne convient-il pas de laisser les enfants de cette tranche d’âge faire leurs achats tout seuls. Sans doute vos
conseils leur seront-ils utiles.

Autres âges
La bride est lâchée, les adolescents achètent eux-mêmes leurs vêtements.

Propositions

Tous âges
Les types de tenues sont affaire de goûts, et, bien sûr, ceux des adolescents ne sont pas ceux des adultes. En revanche, la
décence publique est un devoir. Même si l’exercice de distinction du permis et de l’interdit est toujours délicat à faire, il est
des tenues que l’on n’exhibe pas hors de la maison.
Violences scolaires et autres

Bon à savoir
La violence n’est pas seulement un fait, des actes, c’est aussi un sentiment, un ressenti, une perception. Ce qui est violence
pour les uns ne l’est pas nécessairement pour les autres.
La violence représente un vaste continent dans lequel poussent diverses variétés : violences physiques, morales, verbales,
psychologiques, sexuelles, personnelles, collectives. Il y a même les violences « muettes » ou « silencieuses », celles qui sont
faites d’inattentions à notre égard, ou le résultat de ce que nous autres sociologues nommons les « violences sociales »
(pressions scolaires, maltraitances familiales), qui conditionnent chez les jeunes des vécus d’abandon et d’insécurité.

Les adolescents en première ligne


Les adolescents, on l’oublie, sont les premières victimes des violences au quotidien. Ces violences sont d’abord des violences
verbales, faites d’insultes et d’injures, de rumeurs : sur Internet et les réseaux sociaux – c’est très à la mode –, violences
commises en face à face, dans les cours de récréation.
Les violences sexuelles, quant à elles, sont faites de petits gestes qui paraissent sans conséquence, comme des attouchements,
plus ou moins osés, des baisers dérobés. Attention : ici, la distinction « prudes » jeunes filles et « vilains » garçons ne résiste
pas à l’analyse. Les filles peuvent se montrer aussi, voire plus entreprenantes que les garçons eux-mêmes, et aussi grossières
qu’eux. Qui n’a entendu dans leur bouche des expressions comme : « Il a un beau petit cul, ce mec » ? Qui ne les a vues
toucher le sexe des garçons ?
Mais ces réalités ne sauraient faire oublier que les filles sont plus victimes que leurs congénères mâles et qu’aujourd’hui une
adolescente sur dix a déjà été agressée sexuellement. Selon un sondage Ifop, réalisé auprès de jeunes femmes de 18-25 ans
pour l’association Paroles de femmes, en novembre 2012, plus des deux tiers (68 %) disent avoir déjà été victimes de
violences, subies, en moyenne, pour la première fois, au collège ou au lycée, entre 14 et 15 ans (par violences, il faut entendre
moqueries ou insultes sexistes [dans les deux tiers des cas], harcèlement, agressions [plus de 50 %]).

Une violence de plus en plus banalisée


La violence est donc devenue la première inquiétude des parents pour leurs enfants. Racket et agressions devancent désormais
l’alcool et la drogue.
On ne peut en tout cas qu’être frappé par la dureté des rapports entre jeunes, qui se maltraitent au quotidien, de toutes les
façons possibles, qui ne sont pas spontanément gentils entre eux, se parlent mal. Interrogés, tous disent que se parler à coups
d’insultes ou d’injures, ce n’est pas très grave. « Tout ça, précisent-ils, c’est pour rigoler, faut pas le prendre au sérieux. » «
C’est notre façon d’être entre nous. » Nous serions donc face à des pratiques langagières banales, courantes, légitimes pour
leurs auteurs (et parfois pour les commentateurs et chercheurs eux-mêmes). Sans aucun doute.

Dangers

Tous âges
Ne sous-estimez pas la gravité des violences, de toutes les violences. Même supposées mineures (comme les violences
verbales), elles causent toujours des dégâts chez leurs victimes.

Propositions

Tous âges
Des relations sans violence d’aucune sorte sont possibles et souhaitables. Une fois encore, il y va de la dignité des hommes et
du bien-être de nos sociétés.
YouTube

Bon à savoir
Il n’y a pas que Facebook sur la planète Web, il y a aussi YouTube qui fête son 8e anniversaire. Cette plateforme de partage de
vidéos attire 800 millions de visiteurs par mois, dont plus de 25 millions en France. Quatre milliards de vidéos sont visionnés
gratuitement chaque jour dans le monde et soixante-douze heures de films sont mises en ligne… chaque minute. Grâce à
YouTube, l’on suit désormais en direct, sur son ordinateur, son téléphone portable ou sa tablette, tous les événements de la
planète. L’on y découvre aussi ses futures « idoles ». C’est sur YouTube que les filles ont découvert par exemple les chansons
du jeune Canadien Justin Bieber. Ses singles « Baby » et « One Time » ont ainsi été visionnés près de 4 millions de fois.
Aujourd’hui YouTube peut être considéré comme la première maison de disques du monde.

Dangers

Tous âges
Interdire aux enfants la fréquentation de ce site et d’y poster eux-mêmes leurs vidéos (« soft » bien entendu). Rappelons-nous :
Justin Bieber lui doit beaucoup, avec la complicité de sa mère il est vrai. C’est elle en effet qui a mis en ligne la vidéo du
concours remporté par son fils, à Stratford, en 2007 : Justin est alors âgé de 12 ans et le producteur d’Usher le remarque. La
star américaine du R’n’B l’invite à chanter chez lui, lançant ainsi sa carrière. Plus récemment, c’est l’Américaine Lana Del
Rey qui perçait sur le Web avec son tube « Video Games ». Chez les comiques, YouTube a aussi révélé Norman et Cyprien.

Propositions

8-12 ans
— Encourager les jeunes enfants à se familiariser avec ce site. Il faut vivre avec son temps, non ? Le Parisien (27 mai 2012)
relate l’histoire de Clément, 5 ans, demandant à son père de lui mettre une vidéo. Alice, sa sœur de 10 ans, se débrouille quant
à elle toute seule.
— Vous pouvez utilement aider vos enfants débutants. Montrez-leur comment accéder à des contenus : il suffit de taper des
mots-clés dans le moteur de recherche interne au site ou de surfer, un peu à l’aveuglette, d’une catégorie à une autre : humour,
films, animation, sports, ou bien encore de suivre les recommandations du moment, en cliquant sur l’image de son choix.
L’onglet « Parcourir les chaînes », en haut à gauche, permet enfin de regarder l’une des chaînes créées par des utilisateurs, des
blogueurs, des marques, etc., classées par thèmes et qui diffusent régulièrement des nouveautés.
À partir de 7-8 ans, vos enfants commenceront à se débrouiller fort bien tout seuls.

Autres âges
Laissez faire ! À chacun ses loisirs !
Conclusion

On a « dangerosifié » l’adolescence. Nous espérons vous avoir montré, et vous avoir convaincu, dans cet ouvrage, que cet âge
n’était pas un DRAME, qu’il pouvait même être un formidable temps de BONHEUR, tant pour les intéressés, les adolescents,
que pour leurs proches, parents en tête.
D’un point de vue biologique et mental, nous avons indiqué que tout allait bien, que la puberté, loin d’être un handicap, était un
formidable atout. Reprenant la formule de Marcel Proust, nous savons donc à présent que cet âge n’est « nullement ingrat », mais
au contraire « très fécond » : « le seul temps où l’on ait appris quelque chose », ajoutait ce même Proust. Tous les désordres
prétendument liés à la puberté – et la conclusion est d’importance – n’ont jamais été démontrés. JAMAIS ! En revanche, le
contraire, à savoir la fécondité de l’âge, l’est, et depuis fort longtemps, par de nombreux travaux scientifiques, tant français
qu’étrangers.
Cependant, notre société est dure, exigeante même (en classe surtout) avec les adolescents. Elle les presse, les oppresse, finissant
par les rendre souvent pour le moins inquiets, pour le pire malades.
Il faut cesser de tourmenter cette classe d’âge.
Adresses utiles

Les organismes et les institutions

Famille
Allô enfance maltraitée – Tél. : 119 ou 0 800 05 41 41
Allô grands-parents – Tél. : 01 45 44 34 93
Union nationale des associations familiales – 28, place Saint-Georges, 75009 Paris – Tél. : 01 49 95 36 00 – www.unaf.fr

Information jeunesse/droits des jeunes


Centre d’information et de documentation jeunesse (CIDJ) – 10, quai Branly, 75740 Paris – www.cidj.com
Droits des jeunes – www.droitsdesjeunes.gouv.fr

Jeux dangereux
Association de parents d’enfants accidentes (APEAS) – www.jeudufoulard.com

Maisons des adolescents


Il en existe dans la plupart des départements. Au Havre – 69, rue d’Ingouville 76600 – Tél. : 02 32 74 27 30 et
sec.maison.ado@ch-havre.fr ; à Marseille – 169, rue Paradis 13008 – Tél. : 04 91 37 33 77 ; à Paris, à l’Hôpital Cochin – 97,
boulevard de Port-Royal 75079 Paris Cedex 14 – Tél. : 01 58 41 24 24 – www.mda.aphp.fr

Parents d’élèves
Fédération des conseils des parents d’élèves des écoles publiques (FCPE) – 108-110, rue Ledru-Rollin, 75011 Paris –
www.fcpe.asso.fr
Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public (PEEP) – 89-91, boulevard Berthier, 75017 Paris – www.peep.asso.fr
Union nationale des associations de parents d’élèves de l’enseignement libre (UNAPEL) – 279, rue Saint-Jacques, 75005 Paris,
http://apel.asso.fr

Réseaux sociaux
Des cours aident aujourd’hui les adultes de tous âges à s’initier à Facebook. On peut consulter le site de la Cnil ou celui
d’associations. Orange, opérateur bien connu de téléphonie, assure lui-même de courtes formations dans plusieurs villes.
Cnil – www.cnil.fr
E-enfance – www.e-enfance.org et www.netecoute.fr
Orange – www.orange.fr

Soins/Santé
Doctissimo.fr- www.docissimo.fr
Drogue info service – Tél. : 0 800 231 313
École des parents et des éducateurs – Fédération nationale, 180 bis rue de Grenelle, 75007 Paris – Tél. : 01 47 53 62 70 –
www.ecolesdesparents.org
Fil santé jeunes – Tél. : 0 800 235 236 – www.filsantejeunes.com
Mission de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES), 66, rue de Bellechasse – 75007 Paris –
www.miviludes.fr

Suicide
J’indique les coordonnées des organismes et des institutions susceptibles de venir en aide à la fois aux adolescents et aux parents
rencontrant des événements dramatiques tel que le suicide d’un enfant suivi ou non d’un décès. Cette liste n’est pas exhaustive.
Allô écoute ado – www.alloecouteado.orget – Tél. : 0 800 506 602, de 17 heures à 20 heures.
Association Phare enfants-parents – Tél. : 0 810 810 987 – vivre@phare.org
Fédération SOS Amitié France – Tél. : 01 40 09 15 22, 24 h/24
Fil Santé jeunes – Tél. : 3234 ou depuis portable : 01 44 93 30 74 ; ligne ouverte tous les jours de 8 heures à minuit, animée par
des professionnels de santé.
SOS Suicide phénix : Tél. : 0 825 120 364, de 16 heures à 20 heures
Suicide Écoute – Tél. : 0 145 394 000, 24 h/24
Union nationale des amis et familles de malades psychiques (UNAFAM) : Ligne écoute famille – Tél. : 01 42 63 03 03
Bibliographie

Du même auteur (bibliographie sélective)


La Démocratie familiale, Paris, Presses de la Renaissance, 1990 (épuisé).
Les Bandes, « l’entre soi » adolescent, Paris, Desclée de Brouwer, 1993 ; 2e édition, 2008.
Le Peuple adolescent, Paris, Julliard, 1994, 2e édition, Mots Composés, 2011.
Adolescence en crise ? Vers le droit à la reconnaissance sociale, Paris, Hachette Éducation, 1998 ; traduit en espagnol en 2001.
Les Adolescents, Paris, Cavalier bleu éditions, coll. « Idées reçues », 2002, 2e édition, 2009 ; traduit en Chine en 2006.
Ne m’appelez plus jamais crise ! Parler de l’adolescence autrement, Ramonville-Saint-Agne, Érès, 2003.
La Famille, Paris, Cavalier bleu éditions, coll. « Idées reçues », 2005.
L’Adolescent est une personne, Paris, Le Seuil, 2006 ; Pocket, 2009.
Le Livre noir de la jeunesse, Paris, Presses de la Renaissance, 2007.
Père et fils, l’histoire d’un amour mal entendu, Montréal, Les Éditions de l’Homme, 2008 ; Marabout, 2012.
Manuel illustré à l’usage des adolescents qui ont des parents difficiles, Nantes, Éditions du Temps, 2009.
Antimanuel d’adolescence, toute la vérité, rien que la vérité sur les adolescents, Montréal, Les Éditions de l’Homme, 2009.
L’Adolescence pour les Nuls, Paris, First éditions, 2010.
Les Nouvelles Adolescentes, Paris, Armand Colin, 2010.
Le Bac inutile, Paris, L’œuvre, 2012.

Ouvrages collectifs ou en collaboration


BEDIN, Véronique (dir.), Qu’est-ce que l’adolescence ?, Auxerre, Éditions Sciences humaines, 2009.
CIPRIANI-CRAUSTE, Marie, FIZE, Michel, Le Bonheur d’être adolescent, Ramonville-Saint-Agne, Érès, 2005.
LE BRETON David, MARCELLI Daniel, Dictionnaire de l’adolescence et de la jeunesse, Paris, PUF, 2011.
MALEWSKA-PEYRE, Hanna, TAP, Pierre (dir.), La Socialisation de l’enfance à l’adolescence, Paris, PUF, 1991.
RUANO-BORBOLAN, Jean-Claude (coord.), L’Identité, Auxerre, Sciences humaines Communication, 1998.
SERON, Claude, Au secours… on veut m’aider ! Paris, Fabert, 2006.

Autres sources bibliographiques


AMSELLEM-MAINGUY Yaëlle et TIMOTÉO Joaquim, Atlas des jeunes en France. Les 15-30 ans, une génération en marche,
INJEP, 2012.
BIRRAUX Annie et LAURU Didier, L’Énigme du suicide à l’adolescence, Albin Michel, 2012.
BRACONNIER Alain et MARCELLI Daniel, L’Adolescence aux mille visages, Odile Jacob, 1998.
BRACONNIER Alain, HANIN Bertrand et al., Choisir sa psychothérapie. Les écoles, les méthodes, les traitements, Odile Jacob,
2006.
CLOUTIER Richard, Psychologie de l’adolescence , Gaëtan Morin, 1996.
COSLIN Pierre-G., La Socialisation de l’adolescent , Armand Colin, « Cursus », 2007.
DAGNAUD Monique, La Teuf. Essai sur le désordre des générations , Seuil, 2008.
DOLTO Françoise, La Cause des adolescents , Pocket, 2003.
ERIKSON Erik H., Adolescence et crise : La quête de l’identité , Flammarion, « Champs Flammarion Sciences », 1972.
FAYON David, Facebook, Twitter et les autres , Éditions Pearson, 2011.
GASCAR Pierre, Vertiges du présent , Arthaud, 1962.
GOUDAILLIER Jean-Pierre, Comment tu tchatches ! Dictionnaire du français contemporain des cités , Maisonneuve et Larose,
2001.
HENNO Jacques, Facebook et vos enfants , Télémaque, 2012.
HUERRE Patrice, PAGAN-REYMOND Martine et REYMOND Jean-Michel, L’adolescence n’existe pas. Histoire des
tribulations d’un artifice , Odile Jacob, 1997.
JEAMMET Philippe (dir.), Adolescences. Repères pour les parents et les professionnels , La Découverte, 2004.
LECOCQ Titiou et LISARELLI Diane, Encyclopédie de la Webculture , Robert Laffont, 2012.
MEAD Margaret, Le Fossé des générations , Denoël/Gonthier, 1971.
MIMOUN Sylvain et ÉTIENNE Rica, Ados, amour et sexualité , Albin Michel, 2012.
RALLO-DITCHE Élisabeth, Images de l’adolescence dans quelques récits du XX e siècle , Corti, 1989.
THIERCÉ Agnès, Histoire de l’adolescence, 1850-1914 , Belin, 1999.
À propos de l’auteur

Né en 1951, Michel Fize croise tardivement la sociologie et la thématique de l’adolescence. Il entreprend d’abord des études de
droit à Paris, qu’il mène jusqu’au doctorat d’État, obtenu en 1981 avec une thèse consacrée à Maximilien Robespierre.
Jeune étudiant, il n’a que 22 ans, il entre comme vacataire au Centre national d’études et de recherches pénitentiaires du ministère
de la Justice. Il y reste dix ans. Observateur et analyseur de l’univers carcéral, il se transforme en sociologue « sur le tas »… et
déjà « sur le tard », au sein d’une équipe pluridisciplinaire, composée de psychologues, de démographes, de sociologues…
En 1983, il intègre le Centre national d’études et de recherches de l’éducation surveillée, qui devient le Centre de recherche
interdisciplinaire de Vaucresson (Criv) un an plus tard, avec le nouveau label CNRS. Dès lors, intégrant un groupe de recherche
sur les processus de socialisation des adolescents, il effectue son passage de la thématique pénitentiaire à celle de l’adolescence et
de la famille. Il participe néanmoins activement, de 1986 à 1988, au séminaire sur la prison républicaine organisée à la Maison
des Sciences de l’Homme, sous la houlette de Robert Badinter et Michelle Perrot. Il reste dix ans au CRIV.
Au moment où il rejoint le Centre d’ethnologie française, au début de l’année 1994, il est appelé par le Premier ministre Édouard
Balladur pour figurer parmi les onze personnalités chargées, après la révolte des jeunes contre le CIP (Contrat d’insertion
professionnelle), de faire au gouvernement des propositions visant à l’amélioration de la situation des jeunes en France. Trois ans
plus tard, il entre comme conseiller technique au cabinet de la ministre de la Jeunesse et des Sports, qu’il quittera, « remercié »,
un an et demi plus tard.
En 2006, après la fermeture du Centre d’ethnologie française, il rejoint, à sa demande, sous la forme d’une « mise à disposition »,
le ministère de la Défense. Il y conduit une réflexion sur le système « Défense 2e Chance », que la ministre Michèle Alliot-Marie
vient d’installer en faveur de jeunes volontaires en rupture familiale, scolaire ou sociale, destiné à les ramener vers les dispositifs
d’emploi.
En 2010, il réintègre la recherche au CNRS. Il demeure régulièrement sollicité par les médias.
Passionné de football, Michel Fize a joué en division amateur une quinzaine d’années.
Il aime aussi la lecture et par-dessus tout l’écriture. Il est l’auteur de près d’une trentaine d’ouvrages traduits en une demi-
douzaine de langues.
Michel Fize est aujourd’hui également consultant-médiateur parental. Il vient en aide, par ses conseils, aux familles en difficultés
relationnelles avec des adolescents.

Pour joindre l’auteur :


Michel FIZE
Sociologue au CNRS
Consultant-médiateur parental
4, square du Nouveau-Belleville, BL2
75020 PARIS
Tél. : 06 07 06 01 65
E-mail : michel.fize@club-internet.fr
Index

A
Adolescence
définition 22
mythes associés 4
origines du mot 3
Adoption 56
Adulte 58
Affirmation 26 , 160
Agressivité 15 , 31 , 51 , 62
Alcool 63 , 95 , 120 , 142 , 244 , 267
Alimentation 46 , 67 , 207
Amitié 69
Amour 69 , 71 , 76 , 78 , 87
chagrin d’ 238
de soi 116
faire l’ 241
gestes d’ 47
maternel 210
paternel 210
Argent de poche 73 , 106
Autorité 76 , 85
parentale 27 , 34 , 40
parentale, loi 228
Avortement 77

B
Bandes ordinaires 79
Banque 82
Besoins capitaux 84
Bonheur 73 , 89 , 271
Boys band 141
Bruit 91

C
« Call of Duty » 92
Cannabis 39 , 94 , 99 , 121 , 143
Chambre 97 , 165 , 175 , 199
isolement 255
Collège 4 , 22 , 34 , 46 , 63 , 99
années- 48 , 71 , 94 , 102 , 205 , 256
handicap 150
harcèlement 238 , 252
violences 267
Conduites d’excès 101
Conformisme 48 , 102
Conseils d’enfants et de jeunes 104
Consommation 105
d’alcool 63 , 65 , 143
de cannabis 94 , 96
de drogues 122 , 143 , 250
de tabac 99 , 257
Convention internationale des Droits de l’Enfant 29 , 107 , 230
Corps 109
adolescent 22
découverte du 109
et handicap 149
Gestalt-théorie 15
Crise
d’adolescence 5
parentale 112

D
Délinquant 114
Désir 116
d’adolescence XI , 246
de compréhension 27
de mort 116 , 253
de plaire 155
de soi 116
d’imitation 140 , 155
sexuel 116 , 238
Détenu 117
Deuil 119
de l’enfance 8 , 51 , 119
Drogues 121
de synthèse 121
douces 96
dures 95
Droits 56 , 123
des adolescents 123

E
Échec
amoureux 125 , 149
scolaire 64 , 125 , 127 , 161
École 127
dégoût de l’ 99
harcèlement à l’ 238
influence de l’ 35 , 228
nouvelle 21
Engagement 104 , 129
Ennui 95 , 127 , 131
Expérimenter 132 , 151
Exploits 80 , 133

F
Facebook 69 , 135 , 162 , 168 , 203 , 215 , 222
Famille
définition 24
Fans et Groupies 139
Fête 65 , 142
lieu d’expérimentation 143
Frères et sœurs 36 , 145
Fugue 146 , 206

G
Générosité 74 , 147

H
Handicap 149
et scolarité 150
et sexualité 149
Homosexualité 153
intolérance 241
Hyper-sexualisation 31 , 155
I
Idées reçues 158 , 167
Identité 35 , 36 , 132 , 160
Intelligence 161 , 211
Internet 26 , 34 , 69 , 97 , 162 , 170 , 184
cyberbullying 167
dangers d’ 166
forums de discussion 215
jeux en réseau 177
pornographie 162 , 164 , 216
réseaux sociaux 69
sexualité 240 , 242
Smartphone 218
téléchargement 199
violences verbales 266
Isolement 169 , 254 , 255
besoin d’ 120

J
Jeune adolescent 48 , 170 , 238
Jeune maman 172
Jeux dangereux 175
jeu de la canette 175
jeu de la tomate 175
jeu du foulard 175
petit pont massacreur 175
Jeux vidéo 162 , 177 , 189 , 254
« Call of Duty » 92

L
Langage adolescent 180
Lecture 166 , 182
difficultés d’apprentissage 125

M
Maisons des adolescents 187
Mangas 189
Manifestations publiques 191
Mariage forcé 193
Maturité 195
crise de la 112
sexuelle 123 , 195
Mère d’adolescent 196
Mode 32
enfantine 198
vêtements 264
Musique 32 , 91 , 141 , 142 , 164 , 199
culture de chambre 199
groupes 139
jazz 32
MP3 34
rap 32
reggae 33
rock 32 , 33
rock and roll 33
techno 33

O
Obésité 201
One Direction 139 , 141 , 203
P
Pathologies 16 , 153
anorexie mentale 206
déprime 206
diverses 205
fatigue 205
stress 205
suicide 206
troubles du comportement alimentaire 206
Penser 42 , 161 , 208
Père d’adolescent 209
Personne 79 , 113 , 159 , 211 , 229
Politique 212
Populaire 71 , 135 , 156 , 214
Pornographie 71 , 216 , 242
Portable 151 , 205 , 218 , 269
cyberbullying 167
Premières fois 220
Professeurs 222
Psychanalyse 13
analyse transactionnelle 14
Gestalt-théorie 15
programmation neurolinguistique (PNL) 15
Psychiatrie 12
Psychologie 12
Psychothérapie 16
thérapie familiale ou individuelle d’orientation psychanalytique 17
thérapie familiale ou systémique traditionnelle 17
Puberté
définition 30

R
Respect 47 , 223 , 226
de la vie privée 136
des lois 92 , 118
des règles 249
des valeurs 262
Rêves 141 , 231
Rites de passage 233

S
Sanction 20 , 219 , 235
Service civique 123 , 236
Sexualité 36 , 51 , 77 , 190 , 238
adolescente 241
et a priori 241
et sentiments 242
infantile 238
précoce 240
prémices de la 240
Skin party 244 , 248
Soirée 32 , 64 , 142 , 246
Sorties 80 , 120 , 165 , 248
Sport 33 , 34 , 133 , 170 , 250
Suicide 120 , 206 , 252

T
Tabac 95 , 256
Thérapies nouvelles
art-thérapie 18
thérapie comportementale ou cognitive 18
thérapie rogérienne 19
traitement ou communication personnaliste 19
Twilight 139 , 258

V
Vacances et loisirs 260
Valeurs 33 , 262
adolescentes 33 , 140
Vêtements 155 , 264
de marque 48
mode 102
sexy 32 , 184
Violences
physiques 266
psychologiques 266
scolaires 266
sexuelles 266
verbales 228 , 266 , 268

Y
YouTube 269
Table des matières

Dédicace

Avant-propos

Introduction
Une approche rigoureuse

Partie 1
QU’EST-CE QUE L’ADOLESCENCE ?

Chapitre 1 : L’adolescence au fil du temps


Un peu d’histoire pour commencer
Les origines du mot… et de l’idée
La construction des grands mythes associés à l’adolescence : « crise d’adolescence », « dangerosité »
La « crise d’adolescence »
La « dangerosité » de l’adolescent
La violence de l’adolescent

Chapitre 2 : Doctrines, théories et concepts


Doctrines et théories
Les théories et doctrines classiques de l’adolescence
L’approche médicale généraliste
La psychiatrie
La ou les psychologies
La doctrine psychanalytique
Les théories nouvelles : analyse transactionnelle, Gestalt-théorie, PNL
Les thérapies et traitements associés à ces théories et doctrines
Le traitement psychiatrique
Les psychothérapies
Les thérapies nouvelles de type comportemental/cognitif, art-thérapie et les thérapies humanistes de type rogérien ou personnaliste
La thérapie comportementale ou cognitive
L’art-thérapie
La thérapie rogérienne
Le « traitement » ou communication personnaliste
Concepts
Qu’est-ce que l’adolescence ?
Quelles tranches d’âge recouvre l’adolescence ?
Qu’est-ce que la famille ?
Que signifie être parent d’adolescent ?
Qu’est-ce que la puberté ?
La puberté est-elle une violence faite à l’individu ?
N’y a-t-il pas cependant des cas où le phénomène est réellement une cause de mal-être ?
Qu’est-ce que la culture adolescente ?
Qu’est-ce que la socialisation de l’adolescence ?

Chapitre 3 : Modèles éducatifs et méthodes de communication


Des consultations à tort et à travers…
Le chiffre-clé

Chapitre 4 : Différents âges d’adolescence


Et d’abord, combien sont-ils ?
Adolescents dès 8-9 ans
L’adolescent est un sujet… normal et bien portant

Partie 2
L’ADOLESCENCE AU QUOTIDIEN

Chapitre 1 : Conseils généraux avant d’ouvrir l’abécédaire


Premier conseil
Deuxième conseil
Troisième conseil
Quatrième conseil

Chapitre 2 : Abécédaire

Adoption
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Adultes
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Affirmation
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
Tous âges

Agressivité
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Alcool
Bon à savoir
Le phénomène d’hyperalcoolisation
Dangers
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans
Propositions
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans

Alimentation
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges
Amitié
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Amour
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Argent de poche
Le chiffre-clé
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Autorité
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Avortement
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Bandes ordinaires
Chose vue ce jour (30/10/2012)
Bon à savoir
Un besoin d’appartenance
Dangers
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans
Propositions
Tous âges

Banque
Bon à savoir
Des produits pour chaque âge
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
Tous âges

Besoins capitaux
Bon à savoir
Premier besoin : la confiance
Deuxième besoin : le dialogue et la communication
Troisième besoin : la sécurité
Quatrième besoin : l’autonomie
Cinquième besoin : les responsabilités
Sixième besoin : l’affection
Dernier besoin, capital : l’espoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Bonheur
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Bruit
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

« Call of Duty »
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans
Propositions
8-14 ans
15-18 ans

Cannabis
Bon à savoir
En quête d’apaisement
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
Tous âges

Chambre
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Collège
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans et 13-14 ans
15-18 ans
Propositions
8-12 ans et 13-14 ans
15-18 ans

Conduites d’excès
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Conformisme
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans
Propositions
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans

Conseils d’enfants et de jeunes


Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Consommation
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Convention internationale des Droits de l’Enfant


Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Corps
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans et 13-14 ans
15-18 ans
Propositions
8-12 ans et 13-14 ans
15-18 ans
Crise parentale
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Délinquant
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Désir
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Détenu
Le chiffre-clé
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Deuil
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Drogues
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Droits
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Échec amoureux, échec scolaire


Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

École
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Engagement
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Ennui
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Expérimenter
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Exploits
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Facebook et les autres réseaux sociaux


Le chiffre-clé
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans

Fans et groupies
Bon à savoir
Des idoles qui leur ressemblent
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Fête
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Frères et sœurs
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Fugue
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Générosité
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Handicap
Le chiffre-clé
Bon à savoir
Handicap et sexualité
Handicap et scolarité
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Homosexualité
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Hyper-sexualisation
Bon à savoir
Que désigne ce terme ?
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Idées reçues
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Identité
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Intelligence
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Internet
Un horrible fait divers
Bon à savoir
Que font les adolescents sur Internet ?
Qu’en est-il donc des « mauvaises rencontres » ?
La génération « digitale native »
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Isolement
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Jeune adolescent(e)
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans seulement
Propositions
8-12 ans seulement

Jeune maman
Les chiffres-clés (2011)
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans et 13-14 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans et 13-14 ans
15-18 ans
Jeux dangereux
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Jeux vidéo
Bon à savoir
Le risque de cyberdépendance
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Langage adolescent
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Lecture
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Lolitas et lolitos
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Maisons des adolescents


Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Mangas
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Manifestations publiques
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Mariage forcé
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Maturité
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Mère d’adolescent
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Mode
Un exemple significatif : les jeunes Allemands à la fin du XVIII e siècle
Bon à savoir
Un marketing bien pensé
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Musique
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Obésité
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

One Direction
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges
Pathologies diverses
Bon à savoir
La fatigue et le stress
Les troubles du comportement alimentaire
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Penser
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Père d’adolescent
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Personne
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Politique
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Populaire
Bon à savoir
Être « populaire », c’est avoir la cote
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Pornographie
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Portable
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Premières fois
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Professeurs
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

« Projet X »
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Respect
Bon à savoir
Des reproches vieux comme le monde
Le respect : pour qui ? pour quoi ?
Une notion en mutation
Les « ados » en mal de respect
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Rêves
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Rites de passage
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Sanction
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Service civique
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans et 13-14 ans
15-18 ans
Propositions
8-12 ans et 13-14 ans
15-18 ans

Sexualité
Le chiffre-clé
Bon à savoir
Une découverte semée d’embûches
Les prémices de la sexualité
La sexualité adolescente et ses a priori
Dangers
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans
Propositions
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans

Skin party
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans et 13-14 ans
15-18 ans
Propositions
8-12 ans et 13-14 ans
15-18 ans

Soirée
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans
Propositions
Tous âges

Sorties
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
13-14 ans
15-18 ans
Propositions
Tous âges

Sport et exercices physiques


Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Suicide
Un triste fait divers
Bon à savoir
Qu’en est-il du suicide chez les enfants ?
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Tabac
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

« Twilight »
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Vacances et loisirs
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans et 13-14 ans
Autres âges
Propositions
Tous âges

Valeurs
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges

Vêtements
Bon à savoir
Dangers
8-12 ans
Autres âges
Propositions
Tous âges

Violences scolaires et autres


Bon à savoir
Les adolescents en première ligne
Une violence de plus en plus banalisée
Dangers
Tous âges
Propositions
Tous âges
YouTube
Bon à savoir
Dangers
Tous âges
Propositions
8-12 ans
Autres âges

Conclusion

Adresses utiles
Les organismes et les institutions
Famille
Information jeunesse/droits des jeunes
Jeux dangereux
Maisons des adolescents
Parents d’élèves
Réseaux sociaux
Soins/Santé
Suicide

Bibliographie
Du même auteur (bibliographie sélective)
Ouvrages collectifs ou en collaboration
Autres sources bibliographiques

À propos de l’auteur

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