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Les Tricheurs (Le

Caravage)
tableau du Caravage

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Pour les articles homonymes, voir Les
Tricheurs (homonymie).
Les Tricheurs
Artiste Caravage
Date v.1595
Techniquehuile sur
toile
Dimensions
94,2 × 130,9
(H × L) cm
Mouvement
Baroque
N° AP 1987.06
d’inventaire
Localisation
musée d'art
Kimbell,

Fort Worth
(États-Unis)

Les Tricheurs est une peinture à l'huile


sur toile réalisée par le peintre italien
Caravage vers 1595. Un temps
considérée disparue jusqu'à sa
e
redécouverte à la fin du  siècle dans
une collection privée européenne, elle est
achetée en 1987 par le musée d'art
Kimbell de Fort Worth au Texas où elle
est désormais conservée.

Ce tableau de taille moyenne met en


scène trois personnages qui jouent aux
cartes : un jeune homme riche fait face à
un adversaire vu de trois-quarts dos qui
se révèle être un tricheur puisqu'il se
saisit d'une carte dans son dos tandis
qu'un complice lui indique des doigts la
valeur de celles du jeune dupé. Exposant
un épisode de la vie quotidienne à Rome,
l'œuvre présente les caractéristiques de
la scène de genre, mais elle s'en éloigne
également quelque peu par certains
aspects de mise en scène qui
empruntent au théâtre, notamment à la
commedia dell'arte. De façon plus
manifeste, le tableau, dans le but à la fois
de divertir le spectateur mais aussi de
l'instruire, pourrait être une allégorie de la
jeunesse victime de sa naïveté devant les
dangers du jeu.

La toile des Tricheurs est souvent


rapprochée d'une autre œuvre de
Caravage qui lui est contemporaine : La
Diseuse de bonne aventure. La proximité
de leur style et de leur thématique fait
que les critiques et historiens de l'art les
traitent fréquemment en parallèle. De
fait, la lecture de chacune pourrait
éclairer l'autre.

Les Tricheurs est une œuvre de jeunesse


de Caravage, dans laquelle il déploie le
style et la palette lumineuse et colorée
des débuts de sa période romaine, avant
d'adopter des teintes plus sombres et de
traiter plus volontiers de thèmes
religieux. Il semble que le tableau n'ait
pas de commanditaire particulier, le
créateur s'inspirant librement de thèmes
littéraires et théâtraux à la mode. Quoi
qu'il en soit, il retient l'attention du
cardinal Francesco del Monte qui devient
dès lors le premier mécène et protecteur
du peintre. De fait, Les Tricheurs participe
de la célébrité de Caravage et de son
œuvre : dans l'immédiat, en lui ouvrant
les portes des riches mécènes romains
puis, après sa mort, en créant un genre à
part entière dont le succès vaut au
tableau de multiples copies et variantes.

Description
Une scène de genre

Comparaison indicative de tailles entre une femme


de stature moyenne (165 cm) et le tableau
(94,2 × 130,9 cm).
L'œuvre est une scène de genre réalisée
sur toile, qui utilise comme médium de la
peinture à l'huile ; elle est rectangulaire
(94,2 × 130,9 cm) selon un format
horizontal[1] et de taille moyenne[2].

Le tableau met en scène trois hommes


représentés à mi-corps et qui occupent
tout l'espace de la toile[3] : deux font face
au spectateur et le troisième lui tourne le
dos[4]. Ils sont réunis autour d'une table
de jeu recouverte d'un tapis ottoman[5].
Ce tapis de type ushak est un accessoire
singulier par sa rareté autant que par son
prix ; Caravage l'emploie pourtant à trois
reprises, dans ce tableau mais aussi
dans le Joueur de luth version « del
Monte » (vers 1600) et plus tard dans le
Souper à Emmaüs de Milan (1606)[6]. Il
est d'ailleurs envisageable que cette
convocation d'un objet rare, exotique et
raffiné, constitue une forme d'hommage
au cardinal del Monte, qui fait
l'acquisition du tableau et dont la
collection d'art personnelle comprend
deux tapis de ce genre[7],[a].

Les deux personnages situés à droite et


à gauche disputent une partie de cartes ;
sans doute s'agit-il d'un jeu de zarro[8] ou
bien de prime, des précurseurs du
poker[9]. Sur l'un des angles de la table
repose un plateau de trictrac, ancêtre du
backgammon[5],[10]. Dans son habit
sombre et élégant, l'homme de gauche
se concentre sur son jeu et ne s'aperçoit
pas des manipulations des deux
autres[3]. Il est en effet la victime de son
adversaire d'en face, qui manipule dans
son dos une carte accrochée à sa
ceinture[11]. Le spectateur de la partie
placé au centre est en fait un complice
qui examine le jeu du jeune homme et
effectue des signes de la main pour
indiquer ce qu'il voit[2] ; ses gants ont le
bout des doigts coupés afin qu'il puisse
mieux sentir des cartes préalablement
marquées, ce qui atteste son statut de
tricheur professionnel[12],[13] ; bien plus, il
porte à la ceinture une dague
représentant une menace latente au cas
où leur jeune victime découvrirait la
tromperie[14].

Les trois personnages se distinguent par


leurs vêtements : les deux complices
portent des habits aux couleurs
voyantes[4] qui semblent être des tenues
militaires[12] ; ceux de leur victime sont
plus discrets et plus raffinés[15]. De fait,
celui-ci affiche une classe sociale
supérieure par ses vêtements[12] mais
aussi par les traits plus fins de son
visage[3].

Malgré le resserrement de la scène, le


tableau propose un étagement des plans
très visible : l'angle de la table portant le
jeu de tric-trac permet d'identifier le
premier plan sur lequel se trouve
également la main du tricheur qui tient la
carte[13]. Au second plan se trouvent la
victime et le complice[5],[3]. Le dernier
plan est formé d'un fond uni dont la
neutralité fait ressortir les attitudes et
l'allure des personnages[16],[1]. La position
du plus jeune tricheur, qui s'avance vers
la table avec la main vue en raccourci
dans son dos, contribue à incorporer le
spectateur à la scène et ainsi — selon
l'historien de l'art Laurent Bolard — à le
transformer en complice de cette
scène[17].

L'éclairage de la scène est latéral, venant


de la gauche[18]. Le personnage de
gauche est celui qui reçoit
prioritairement la lumière : la clarté de
son visage contraste avec la carnation
sombre de ses adversaires[3].

État de conservation et
restauration

Le tableau est dans un excellent état de


conservation, en témoigne par exemple
la préservation du glacis de laque de
garance qui recouvre le vermillon du
cœur des cartes à jouer[2]. Cela fait dire à
son propriétaire actuel, le musée Kimbell,
que Les Tricheurs « fait partie des
œuvres les mieux conservées de
Caravage »[b].
Lors de son achat par le musée Kimbell
en 1987, le tableau fait l'objet d'une
restauration qui comprend un nettoyage
de sa surface. À cette occasion, une
bande de toile de 14 cm ajoutée sur son
bord supérieur après la création de
l'œuvre est retirée pour rendre au tableau
ses dimensions et son aspect
d'origine[2],[19].

Historique de l'œuvre
Datation et propriétaires
successifs
Le cardinal del Monte, futur mécène et protecteur de
Caravage, est probablement le premier acquéreur
des Tricheurs.
Portrait à la craie d'O.Leoni, 1616. Musée Ringling,
Sarasota (Floride).

Il est établi que la création du tableau est


postérieure à l'installation de Caravage à
Rome au début des années 1590. Quant
à la datation exacte, un consensus se
dessine parmi les chercheurs autour de
l'année 1595 : « vers 1595 » selon le site
du propriétaire de l'œuvre[2], « entre 1594
et 1595 » selon les historiennes de l'art
Sybille Ebert-Schifferer[20] et Helen
Langdon[21], ou « 1595-1596 » pour leur
collègue Sebastian Schütze[22].

Il semble que le tableau ne soit pas le


résultat d'une commande particulière :
Caravage l'aurait produit de son propre
chef selon un thème alors à la mode
dans les cercles littéraires romains, et ce
dans l'espoir d'en faciliter l'achat par l'un
de ses membres[23],[24].

Dans un premier temps, il semble que


Gerolamo Vittrici, camérier du pape et
beau-frère du peintre Prospero Orsi (un
proche de Caravage) aurait été intéressé
par l'achat du tableau avant de se
désister[25]. C'est finalement le cardinal
Francesco del Monte qui en fait
l'acquisition auprès du marchand d'art
maestro Valentini[25],[16], peut-être grâce à
l'entremise de Prospero Orsi comme
semble le suggérer Bellori[26]. Il est
ensuite acheté en 1628 par le cardinal
Barberini : il demeure dans sa collection
avant de passer dans celle des Colonna
di Sciarra en 1738, après que Cornelia
Barberini en hérite de son oncle le
cardinal Francesco Barberini puis épouse
Giulio Cesare Colonna di Sciarra[c]. En
1899, le tableau est vendu à Paris
— peut-être dans une « collection
Rothschild »[27] — puis sa trace est
perdue à partir de cette date[28]. Ce n'est
qu'en 1986 qu'il est retrouvé dans une
collection privée européenne. Il est
acheté un an plus tard par le musée
Kimbell au Texas[29], constituant dès lors
l'une des pièces maîtresses du fonds
permanent[2],[30].

Attribution

L'attribution à Caravage du tableau des


Tricheurs (conservé au musée d'art
Kimbell à Fort Worth) fait l'objet d'un
large consensus au sein de la
communauté scientifique[2],[31],[20],[4],[22].
Son cheminement est parfaitement
documenté jusqu'à la fin des années
1890[2], puis il est considéré comme
disparu faute de traces documentaires
fiables[4] ; en 1987 il fait l'objet d'un
travail de confirmation d'attribution après
avoir été retrouvé dans une collection
privée européenne[28]. Pour ce faire, les
historiens de l'art s'appuient sur les
copies dont il a fait l'objet et sur la
photographie qui en avait été prise avant
sa disparition[31] ; ils exploitent
également la description qu'en fait
Giovanni Pietro Bellori dans ses Vies des
peintres, ouvrage de 1672 donc
chronologiquement proche de la création
de l'œuvre :
« Dans ce tableau, Michele
disposa trois demi-figures qui
jouent aux cartes. Il peignit un
jeune homme ingénu vêtu de
noir, les cartes à la main,
personnage fort bien rendu sur
le vif ; en face de lui s'offre, de
profil, un jeune homme fourbe
qui s'appuie d'une main sur la
table de jeu et, de l'autre, tire
de sa ceinture, dans son dos,
une fausse carte ; le troisième
joueur, debout près du jeune
homme, lit dans son jeu et lève
trois doigts pour informer son
complice, lequel, tandis qu'il se
penche vers la tale, offre à la
lumière le dos de son pourpoint
orné de bandes noires, le tout
imité sans rien de feint dans le
coloris[32]. »

En outre, les techniques picturales


utilisées constituent les éléments
fondamentaux sur lesquels les
scientifiques fondent leur opinion, telles
les marques d'incisions visibles dans la
peinture, qui servaient de repères au
peintre lors de la création et qui sont tout
à fait caractéristiques de sa manière[2].
Une analyse aux rayons X réalisée en
1987 par la conservatrice en chef du
musée Kimbell permet également
d'attester que le fond est réalisé avec du
blanc de plomb, ce qui est cohérent avec
les usages connus de Caravage[33]. Enfin,
lorsque les techniciens du Metropolitan
Museum ôtent une bande de toile qui
avait été ajoutée à une date inconnue
pour correspondre à un cadre trop grand,
ils font une découverte essentielle : au
revers de la toile originale se trouvent les
restes du sceau du cardinal del
Monte[33]. Cette découverte au dos du
tableau confirme son caractère
autographe : un tel sceau était apposé
sur les œuvres destinées à la collection
du cardinal lors de leur achat, et a aussi
été découvert sur un autre tableau du
maître, La Diseuse de bonne aventure qui
est contemporain des Tricheurs[2],[34].

C'est la publication d'un article de Denis


Mahon en janvier 1988 qui est
déterminante[35] : à compter de cette
date, l'attribution des Tricheurs de Fort
Worth à Caravage devient
universelle[36],[37].

Création
Sources d'inspiration
possibles
Le joueur de Hans Holbein (Danses macabres,
v.1527) est emporté en Enfer : le message moral à

l'encontre des amateurs de jeu d'argent est assez


clair.

La littérature en vogue dans les milieux


aisés romains constitue la source
d'inspiration la plus importante pour la
création des Tricheurs[23],[12]. Le tableau
subit notamment l'influence du roman
picaresque, genre littéraire né en
e
Espagne au  siècle et parvenu en
Italie dès cette période : il s'agit de récits
narrant les aventures de héros de basse
condition qui parviennent notamment à
soutirer leurs biens à de jeunes et naïfs
membres de la bonne société au moyen
de ruses ou de violence[23]. Sybille Ebert-
Schifferer parle ainsi de « pègre anoblie »
à propos de ces personnages qui se
retrouvent effectivement dans le
tableau[25]. Il semble que Caravage ait
découvert ce genre par l'intermédiaire de
son ami Prospero Orsi, dont le frère est
bien introduit dans les cercles littéraires
de la bonne société romaine[23].

D’autre part, de nombreux pamphlets et


même des traités entiers circulent
largement dans la Rome de l'époque au
sujet des jeux d'argent et des techniques
de triche qui y sont inévitablement
associées[38] : la ville est en effet
devenue particulièrement violente et
infestée de voleurs, tricheurs et
pickpockets[39]. Maintes proclamations
papales se succèdent à l'encontre des
joueurs, dont le vice contribue à la
déliquescence morale généralisée
— mais elles n'ont pas plus d'effets que
les traités moraux faisant également
florès sur le même thème[40]. Lorsque
l'historien de l'art allemand Joachim von
Sandrart écrit à propos de l’œuvre de
Caravage, en 1675, il mentionne
l'influence d'une gravure de Hans Holbein
le Jeune, dont le personnage de droite a
pu inspirer l'un de ceux présents dans La
Vocation de saint Matthieu, mais aussi la
figure du jeune homme de droite dans les
Tricheurs : l’œuvre de Holbein se situe
dans cette même lignée d'une
dénonciation morale montrant que la
turpitude mène à la mort[41].

Le tableau s'inspire également des


personnages, situations et mise en scène
de la commedia dell'arte, genre de théâtre
e
populaire local né au  siècle, dont les
protagonistes se distinguent par leur
naïveté ou, au contraire, leur ruse et leur
ingéniosité[12],[42]. Helen Langdon fait
remarquer à ce sujet que le cardinal del
Monte, qui fait l'acquisition du tableau,
est particulièrement friand à la fois de
jeux de cartes et de théâtre[43].

De possibles sources d'inspiration


thématique
Jan Matsys, la Joyeuse Compagnie, entre
1557 et 1563, Stockholm,
Nationalmuseum.

Giulio Campi, La partie d'échecs (vers


1535, Turin, Palais Madame, Museo
civico d'arte antica)
civico d arte antica).

Quant aux sources d'inspiration


picturales, Bellori affirme que Les
Tricheurs constitue avec les productions
de cette période « les premiers traits du
pinceau de [Caravage] selon la manière
franche de Giorgione », même si le
tableau n'est pas décrit comme
directement inspiré des travaux du
peintre vénitien[44]. Le tableau n'est pas
non plus sans rappeler la scène de genre
lombarde La partie d'échecs de Giulio
Campi, dans sa représentation neutre et
objective d'une situation[45],[12],[13].
D’autre part, Caravage a peut-être à
l'esprit une fresque du Palais Borromée à
Milan, qui met en scène la tradition du
Jardin d'Amour dans lequel des
personnages de la bonne société jouent
aux cartes[4]. Enfin, dans Les Tricheurs,
Caravage use de procédés
iconographiques ou narratifs afin
d'impliquer le spectateur : jeux de
regards, actions que seul ce dernier peut
voir, etc. Le jeune peintre lombard s'est à
ce titre certainement inspiré de la
Joyeuse Compagnie de Jan Matsys,
flamand exerçant en France puis en Italie
dans les années 1544-1545[46].

Toutefois, même si certains éléments


d'inspiration antérieurs peuvent être
repérés, la critique est unanime pour
affirmer que Caravage fait avant tout
œuvre d'innovation avec Les Tricheurs et
La Diseuse de bonne aventure[47]. Helen
Langdon montre que son naturalisme n'a
en réalité rien de commun avec le
moralisme pesant de Campi ou de
Passarotti. Pour Andrew Graham-Dixon,
le Lombard introduit dans le monde de
l'art un tout nouveau concept : celui de la
scène de genre populaire[d]. Ses
Tricheurs ne relèvent ni de la satire des
peintres d’Europe du nord, ni de l'intimité
subtile propre à la peinture de genre
vénitienne : Caravage puise à ces deux
sources pour en proposer une synthèse
originale[49].
Place dans l'œuvre de
Caravage

Article détaillé : Période romaine de


Caravage.

Dans sa première période romaine, Caravage produit


des toiles lumineuses à l'image de ce Jeune Bacchus
malade (Détail. Galerie Borghèse, Rome, v. 1593).

Œuvre de jeunesse, Le tableau est réalisé


rapidement après l'arrivée de Caravage à
Rome[50]. En effet, il quitte
vraisemblablement sa Lombardie natale
au tout début des années 1590, alors
qu'il est seulement âgé d'une vingtaine
d'années, pour s'installer dans la capitale
des États pontificaux[51],[52]. Son arrivée à
Rome est marquée par la précarité[53] : le
jeune Lombard se trouve alors « sans
protection ni recommandation […] et si
démuni qu'il ne [peut] assurer sa
subsistance[54]. »[24]. Plusieurs
hébergements se succèdent avant qu'il
ne parvienne à intégrer l'atelier du peintre
maniériste Giuseppe Cesari, dit « le
cavalier d'Arpin », qui connaît un succès
certain sur le marché de l'art romain :
Caravage y est chargé de réaliser des
décors de fleurs et de fruits[54].

En dépit des difficultés matérielles qu'il


connaît alors, le jeune artiste produit des
toiles qui rencontrent déjà l’intérêt de
collectionneurs, dans un contexte
culturel très actif[55] : le Garçon pelant un
fruit (vers 1592), le Garçon à la corbeille
de fruits (vers 1593), le Garçon mordu par
un lézard (1593 - 1594) ou encore Le
Jeune Bacchus malade (entre 1593 et
1594)[51]. Le tableau des Tricheurs est
stylistiquement proche de ces œuvres
précoces, notamment par la luminosité
et la coloration qui s'y déploient,
contrairement aux productions plus
tardives où les ombres sont de plus en
plus marquées[16].

Durant cette première période romaine,


Caravage fait la rencontre du peintre
Prospero Orsi, de l'architecte Onorio
Longhi et peut-être du peintre sicilien
Mario Minniti, qui deviennent des
amis[24]. Ils l'aident notamment à
rencontrer un marchand d'art du quartier
de Saint-Louis-des-Français, « maestro »
Valentini, personnage identifié de façon
très variable selon les sources mais qui
pourrait être assimilé à Costantino
Spata[56],[e] : c'est donc ce Valentini qui
organise la vente des Tricheurs[16],[f].
Mais quelle que soit l'identité du vendeur,
l'important pour Caravage réside dans
l'identité de l'acheteur : le cardinal
Francesco Maria del Monte, sommité
ecclésiastique et amateur d'art très
éclairé, est charmé de sa découverte et
va désormais accueillir Caravage dans sa
maisonnée, contribuant largement à
lancer sa carrière[57].

Deux œuvres très proches

Caravage, La Diseuse de bonne aventure, vers 1594,


Paris, musée du Louvre.
Article détaillé : La Diseuse de bonne
aventure.

Les Tricheurs se rapproche


singulièrement, par sa composition et sa
thématique, d'un autre tableau du
peintre : La Diseuse de bonne aventure[16].
Les deux tableaux constituent un jalon
important de la carrière de Caravage,
puisque ce sont vraisemblablement les
premières toiles à attirer l'attention du
cardinal del Monte qui est l'un des clients
du marchand Spata : cet intérêt ouvre
alors à l'artiste de nouvelles portes au
sein des milieux artistiques romains de
l'époque[58].
En effet, les deux tableaux proposent un
cadrage, un format, des couleurs tout à
fait proches[59] et exposent le thème
commun de la naïveté dupée[4],[13],
représentée par un « jeune homme riche
trompé, vu comme un jeune écervelé aux
passe-temps frivoles »[12]. Le peintre s'y
attache à la représentation la plus
contemporaine et soignée des vêtements
de chacun des personnages[11], et les
deux œuvres semblent inspirées d'une
scène de théâtre influencée par la
commedia dell'arte, où les figures de
bohémiens et de bravi sont
particulièrement répandues[42],[60].
Les Tricheurs et La Diseuse de bonne
aventure ont parfois pu être perçus
comme des pendants[3] : outre leurs
caractéristiques physiques et
thématiques proches, les deux tableaux
sont contemporains, ils appartiennent à
la même collection et connaissent le
même succès[34],[47]. Néanmoins une
telle hypothèse est rejetée par la plupart
des chercheurs[16], notamment pour des
raisons stylistiques[61], et aussi à cause
de leur différence de dimensions[62]. Cela
n'empêche pas que le cardinal del Monte
ait pu les acheter en même temps pour
les inclure dans sa collection[7]. Il les
installe d'abord soit au palazzo Madama
où loge Caravage lorsqu'il intègre la
maisonnée del Monte, soit dans une
autre de ses résidences ; en 1615 le
cardinal acquiert le palais romain de
Matteo Avogadro et y dispose son
immense collection d'art, au centre de
laquelle figurent notamment ses
Caravage. Les Tricheurs et La Diseuse de
bonne aventure y sont accrochés
ensemble, tous deux installés dans des
cadres noirs identiques[63].

Processus de création

Chacun des personnages est créé de


façon indépendante : ce n'est que
lorsqu'une figure est peinte que Caravage
en conçoit une autre. Cette manière de
travailler le conduit à de nombreux
repentirs, comme le montre l'analyse par
réflectographie infrarouge : ainsi
Caravage a d'abord représenté dans son
entièreté la main gauche du complice,
puis l'a recouverte pour partie par le
corps du tricheur. De fait, l'absence de
dessin sous-jacent montre que son
travail n'est pas précédé par des
esquisses sur la toile, mais qu'il y peint
directement : il procède à des incisions
sur la peinture humide, incisions
constituant autant de points de repères
pour placer les éléments de la
composition — certaines sont visibles
sur le bout des doigts du jeune trompé et
le bord des cartes. Enfin il arrive que le
peintre manipule et étale la peinture
encore fraîche avec ses doigts, comme
cela se voit par exemple dans la soie du
brocart du complice[2]. Cela permet aux
spectateurs d'aujourd'hui de percevoir à
l’œil nu les empreintes digitales de
Caravage, ce qui est également possible
dans un autre tableau beaucoup plus
tardif, L'Adoration des bergers de
Messine[33].

Dans sa création, Caravage s'inspire de


modèles parfois récurrents : ainsi, le
jeune homme aux traits fins qui tire une
carte de sa ceinture figure régulièrement
dans les tableaux de sa période
romaine[64]. Bien que son identité ne soit
pas certaine, il pourrait s'agir d'un certain
Giulio, que d'autres peintres romains de
l'époque prennent également pour
modèle[64]. Son oreille de grande taille
est notable sur chacun des tableaux où il
apparaît, bien qu'il semble la dissimuler
en arborant cheveux longs et favoris[65].

Un modèle récurrent
Le Repos pendant la fuite en Égypte
(détail), v.1596-1597, Rome, galerie
Doria-Pamphilj.

Les Tricheurs.
Narcisse (détail et rotation), fin
e siècle, Rome, galerie nationale d'Art
ancien.

Analyse
Palette et tonalité
Les couleurs des costumes des tricheurs évoquent
des guêpes à l'affût d'une proie.

Lumineux et coloré, le tableau frappe par


l'intensité de ses couleurs[16] ; son
exécution soignée parvient à traduire
l'« effet atmosphérique de la lumière »[13].
L'historien et critique d'art contemporain
Giovanni Pietro Bellori, pourtant souvent
critique de l'art du maître lombard,
souligne qu'il n'y trouve « rien de feint
dans le coloris »[44].

La gamme de couleurs utilisée par


Caravage dans Les Tricheurs est celle qui
caractérise la peinture de Lombardie où
dominent rouges et ocres[16] ; la couleur
gris clair du fond confirme ce
rattachement aux productions du nord de
l'Italie[2]. Au contraire, de tels choix
l'éloignent de l'art de l'Italie centrale du
e
début du  siècle, qui est plutôt
marqué par l'emploi des couleurs
primaires ainsi que de la peinture
maniériste où dominent les tons clairs et
délavés[16]. Néanmoins, le peintre ne
s'enferme pas dans un nuancier figé,
comme le montre l'emploi sur la plume
du chapeau du tricheur d'un rose saumon
que Catherine Puglisi qualifie d'ailleurs
d'« inattendu »[16].

Le choix des couleurs participe de la


narration. Caravage joue en effet sur un
contraste tonal important entre les
couleurs sombres du vêtement du jeune
dupé et les couleurs vives de ceux des
deux tricheurs[45],[3]. À l'inverse, le teint
sombre de la carnation du complice[45],[3]
s'oppose à celui, plus clair, du visage du
jeune homme[3] ; enfin, la neutralité du
fond uniformément gris clair — appliqué
selon un procédé que Caravage utilisera
souvent par la suite[18] — met en valeur la
vivacité des couleurs choisies pour la
composition[16],[1],[2]. Ces couleurs ne
sont peut-être pas innocentes : les
rayures jaunes et noires des costumes
des tricheurs font penser à des guêpes
qui rôdent autour d'un festin de miel[62]. Il
est d'ailleurs permis de penser que le
festin a déjà été largement entamé,
comme en témoigne le jeu de tric-trac
repoussé sur le côté : le jeune homme a
dû perdre de l'argent à ce premier jeu et
tente donc maintenant de se refaire aux
cartes[62].

Une scène de genre innovante

Les trous au bout des doigts du complice dénotent


une volonté de réalisme du peintre (détail).
Les Tricheurs constitue, conjointement
avec La Diseuse de bonne aventure, une
œuvre qui assure au peintre une
reconnaissance immédiate par ses
contemporains grâce à son originalité et
ses innovations[29]. La principale
nouveauté tient dans la traduction de
l'intériorité psychologique des
protagonistes ou, selon les mots du
critique d'art Lionello Venturi, de
« l'expression de leurs états d'âme »[66],
c'est-à-dire l'« ingénuité de la victime, [la]
malfaisance inconsciente, toute
technique du tricheur, [et la] vulgarité
brutale du complice »[67]. Certes, une
telle expression du sentiment avait déjà
été traitée dans la production picturale
passée, selon le critique d'art André
Berne-Joffroy, mais elle ne l'avait été que
de façon caricaturale[29]. De fait, le
peintre tente au maximum d'éviter de
tomber dans l'exagération : s'il propose
une vision du complice à la limite de la
caricature, il lui oppose une
représentation naturaliste du jeune
dupé[13]. Son air calmement satisfait fait
écho à la qualité du jeu qu'il a entre les
mains : en effet, les trois doigts levés du
tricheur derrière lui indiquent qu'il détient
un brelan et qu'il est donc en mesure de
gagner la partie[8], ce qui peut expliquer
l'expression préoccupée du tricheur[68].
Seul le six de trèfle caché dans la
ceinture de son adversaire pourra sauver
celui-ci en lui offrant une suite de cartes
de la même couleur[8].

Le tableau semble pouvoir être considéré


comme une scène de genre[69], exposant
une scène de la vie quotidienne à Rome
dans laquelle les personnages
s'adonnent au jeu, occupation très
appréciée à l'époque[69],[13]. De fait, le
peintre émaille son tableau de détails
réalistes, tels les trous au bout des
doigts des gants du complice, réalisés
afin de mieux sentir des marques sur ses
cartes préalablement préparées[13],[12]. Il
semblerait même que Caravage, par cet
apport décisif des Tricheurs et de La
Diseuse de bonne aventure, réussisse à
établir le tableau de genre en Italie[70].

Pour autant, certains critiques d'art


hésitent à attribuer au tableau un statut
plein et entier de scène de genre, arguant
que si Les Tricheurs décrit une situation,
c'est dans un but exclusivement
pédagogique et moralisant[45]. De fait, le
peintre traite la scène avec l'artificialité
d'une pièce de théâtre, en prenant
notamment pour référence la commedia
dell'arte[42],[12] : comme une scène de
théâtre, la composition est resserrée sur
les protagonistes dans un cadre
horizontal, le tout sur un fond neutre[1] ;
de même, les deux complices, avec leur
gestuelle ample et leurs tenues voyantes,
se présentent selon ce mode théâtral[69].
Ainsi, selon Catherine Puglisi, l'aspect
théâtral dans sa mise en scène (comme
le montre le fond neutre devant lequel se
déroule l'action) extrait la scène de la
réalité[12]. Il n'y aurait pas là toutefois
d'innovation particulière, puisque ce type
d'approche narrative comme de mise en
scène ou en lumière est alors déjà en
vogue dans la peinture comme dans le
théâtre ; en revanche, le rejet par
Caravage du formalisme typique de ses
prédécesseurs maniéristes est notable
en ce qu'il apporte un élément de
naturalisme à la narration[71].
La commedia dell'arte est une source d'inspiration
pour la création des Tricheurs (Hieronymus Francken
I, La compagnie italienne I Gelosi en représentation à
Paris, vers 1590).

De façon plus consensuelle, les critiques


d'art tendent à considérer que le tableau
des Tricheurs est surtout une allégorie
réalisée dans le but d'édifier son
public[12],[2],[69] : il s'agit, comme le
résume le site du musée Kimbell, de la
mise en scène du « drame de la
tromperie et de l'innocence perdue dans
ce qu'elles ont de plus humain. »[g]. Ainsi,
le tableau explore simultanément trois
thèmes qui se retrouvent aussi dans La
Diseuse de bonne aventure[12] : le thème
de la frivolité de certaines
occupations[12] et en particulier des
dangers du jeu[10] ; le thème de la
tromperie[2],[69],[13] ; et celui d'une
jeunesse coupable de naïveté, auquel
s'adjoignent ceux de la fugacité de la
jeunesse et de ses désillusions[12].

Pour arriver à ses fins, Caravage met en


œuvre plusieurs stratégies. D'abord, les
personnages possèdent chacun leur
image bien définie et évoquent
clairement le bien ou le mal[13]. De plus,
le peintre appuie son propos en usant de
symboles, comme en est porteuse la
couleur jaune des vêtements des deux
complices, couleur traditionnellement
associée à la tromperie ou à la
fourberie[12],[17]. De même, plus
spécifiquement pour le thème de la
jeunesse naïve, Caravage évoque la
parabole biblique du fils prodigue dans
laquelle un fils retourne vers son père
après avoir dilapidé sa fortune[45],[12].
Enfin, dernière stratégie, le peintre mise
sur une implication du spectateur : il ne
se place pas en position de moralisateur
mais, par sa mise en scène (celui qui
regarde le tableau voit ce que le jeune
dupé ne peut voir) et par le rejet de la
caricature ou du grotesque, il propose au
spectateur d'entrer dans la scène et de
juger par lui-même[45]. De fait, dans Les
Tricheurs comme la Diseuse de bonne
aventure, Caravage présente un
moralisme tempéré au moyen d'une
apparente objectivité[12].

En toute hypothèse, il semble que le


peintre poursuive un but double,
conforme à la maxime antique « placere
et docere » (« plaire et instruire ») selon
laquelle le but de l'œuvre d'art consiste à
la fois à divertir le spectateur et à édifier
son jugement[42].

Postérité
Copies
Cette copie conservée au musée de l'ordre de Saint-
Jean à Londres pourrait être de la main du maître.

Plus de trente copies du tableau sont


connues[72] : c'est là un véritable record
des imitations caravagesques, qui
atteste du grand succès que rencontre
l’œuvre[73]. Ce succès ne se fait guère
attendre puisque les premières copies à
être documentées datent du tout début
des années 1620 : une première
appartenant au marquis Clemente
Sannesi (un document de 1621 indique
que le marquis se l'est fait voler alors
qu'il l'avait prêtée à Antonio Orsini pour
qu'elle soit copiée)[34],[74] et une autre au
banquier Ottavio Costa (inventaire datant
de 1633)[74]. Plus tôt encore, dès 1615,
Giulio Mancini écrit son intention
d'engager un bon peintre pour réaliser
une copie des Tricheurs[75]. Les
propriétaires de tableaux savent fort bien
à l'époque que la création et la diffusion
de copies d’œuvres à succès provoquent
une baisse de la valeur du tableau
original : aussi le cardinal del Monte
garde-t-il jalousement son tableau pour le
protéger des copistes. Il est possible que
Mancini contourne cette difficulté en
achetant la complicité de serviteurs du
cardinal pour introduire un copiste dans
sa maison, mais sans qu'il soit certain
que ses manœuvres rencontrent le
succès escompté[76].

En 1772, Giovanni Volpato reçoit


commande d'une gravure des Tricheurs,
afin de la publier dans un ouvrage de
Gavin Hamilton sur l'école de peinture
italienne[h]. Le succès de l'ouvrage et la
présence de la gravure de Volpato
relance la passion des copies du tableau
de Caravage, copies qui se multiplient
alors en Europe et en Amérique[77]. Cette
gravure permet d'ailleurs de constater
qu'à cette date, la bande de toile ajoutée
à une date inconnue dans la partie
supérieure a déjà été mise en place.
Toutes les copies suivantes qui
s'appuient sur le travail de Volato
intègrent cette modification qui ne
disparaît qu'au moment de la
restauration de 1987[77].

Parmi toutes les copies connues des


Tricheurs, l'une fait particulièrement
l'objet de débats quant à son attribution
car elle est considérée par certains
experts comme pouvant être de la main
de Caravage[78]. L'historien de l'art Denis
Mahon, grand spécialiste de l'art
baroque, en fait l'acquisition à Sotheby's
en 2006, au prix de 42 000 livres sterling
(soit alors environ 53 000 euros). Or
l'attribution ultérieure à Caravage par
plusieurs experts fait monter la valeur
estimée de la toile à 10 millions de livres
(soit alors environ 12,5 millions d’euros).
Cette nouvelle attribution signifie une
énorme perte financière pour le vendeur
Lancelot Thwaytes, qui décide de
poursuivre le groupe Sotheby's en
justice[79] mais est finalement débouté
de sa demande[80]. Depuis, ce second
tableau est exposé au musée de l'ordre
de Saint-Jean à Londres[81],[82]. Pour
autant, bon nombre d'historiens de l'art
s'opposent à cette attribution au peintre,
tel Sebastian Schütze, selon qui la qualité
de l'exécution est un élément
déterminant pour infirmer
catégoriquement cette hypothèse[83].
Enfin une autre copie appartenant à une
fondation lombarde est considérée par
certains experts comme possiblement
autographe, depuis une expertise par
analyse radiographique conduite en
2004[73].

Reprises

Les Tricheurs et La Diseuse de bonne


aventure constituent des inventions
picturales si novatrices que les suiveurs
du peintre travaillent rapidement à les
traduire en un genre pictural autonome :
le sujet rencontre un vif succès dans
l'Europe entière et apparaît sous forme
de nombreuses variantes et
versions[70],[2]. Le thème du jeune naïf
dupé — mais aussi le motif du
personnage de trois-quarts dos qui sort
une carte de sa ceinture — sont ainsi
repris moins de cinquante ans plus tard
par Georges de La Tour dans son tableau
Le Tricheur à l'as de trèfle[2], justement
conservé aussi à Fort Worth depuis
1981[84]. Cette œuvre ainsi que sa
version très similaire du Tricheur à l'as de
carreau, exposée au Louvre, sont des
reprises du thème développé par
Caravage[85].
Bon nombre d'autres artistes dits
« caravagesques » en reprennent
différents motifs, comme Bartolomeo
Manfredi[86], Valentin de Boulogne[87] ou
encore Nicolas Régnier[88] — au point
même qu'un tableau de Tricheurs comme
celui de Valentin est considéré jusqu'au
e
 siècle comme devant être de la main
de Caravage lui-même[89].

Le tableau de Caravage inspire de


nombreux suiveurs.
Bartolomeo Manfredi, Les Joueurs de
cartes, 1618, Galerie des Offices
(Florence), détruit en 1993[90].

Valentin de Boulogne, Les Tricheurs,


v.1615-1618, Gemäldegalerie Alte
Meister (Dresde)
Meister (Dresde).

Georges de La Tour, Le Tricheur à l'as de


carreau, v.1635-1638, musée du Louvre
(Paris).

Notes et références
Notes

a. L'auteur John Varriano explore en


détail ces exploitations
d'accessoires : voir notamment le
chapitre Settings and Accessories
dans Varriano 2006, p. 114-126.
b. « The Cardsharps is among the best
preserved works by Caravaggio. »
(Musée Kimbell).
c. Le tableau de Fort Worth est parfois
désigné dans la littérature
spécialisée sous le titre « Les
Tricheurs Sciarra » ou bien « ex-
Sciarra » afin de le distinguer des
autres versions ou copies connues
(Berne-Joffroy 2010, p. 448).
d. Graham-Dixon emploie en anglais le
terme de « low-life drama »[48].
e. L'identification de « maestro
Valentino » au marchand Costantino
Spata n'est pas certaine : Gérard-
Julien Salvy signale qu'il pourrait
aussi s'agir du marchand français
Jacques Laudi ou Laudy (Salvy 2008,
p. 124). Helen Langdon, dans sa
monographie consacrée aux
Tricheurs, estime pourtant que
l'entremise de Spata est très
probable, notamment parce que son
commerce de tableaux est situé tout
près du palazzo Madama où réside le
cardinal (Langdon 2012, p. 8).
f. Le mystérieux maestro Valentini (ou
Valentino, selon les sources) pourrait
aussi s'appeler Valentin s'il est
français, comme pourrait en attester
le titre de « Monsù » qui lui est
généralement attribué, ce qui
constitue une italianisation de
« Monsieur » (Bolard 2010, p. 57-58).
g. « the drama of deception and lost
innocence in the most human of
terms. » (Musée Kimbell).
h. La gravure de Volpato est visible en
ligne, notamment sur le site de la
Royal Academy à Londres.

Références

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2. Musée Kimbell.
3. Schütze 2017,
chap. II. Vers l'autonomie artistique - 1592
, p. 82.
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5. Sybille Ebert-Schifferer 2009, p. 79.
6. Varriano 2006, p. 123.
7. Langdon 2012, p. 10.
8. Zuffi 2016, p. 63.
9. Langdon 2012, p. 1.
10. Schütze 2017, Catalogue des
œuvres, 8, p. 332.
11. Sybille Ebert-Schifferer 2009, p. 78.
12. Catherine Puglisi 2005, p. 78.
13. Schütze 2017,
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, p. 83.
14. Sybille Ebert-Schifferer 2009, p. 78-
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20. Ebert-Schifferer 2009, p. 79.
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22. Schütze 2017, Catalogue des
œuvres, 8, p. 330.
23. Ebert-Schifferer 2009, p. 77.
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26. Bellori et Pérol 1991, p. 16-17.
27. Berne-Joffroy 2010, p. 448.
28. Spike 2010, p. 20.
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42. Schütze 2017,
chap. II. Vers l'autonomie artistique - 1592
, p. 93.
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67. Lionello Venturi cité par Salvy 2008,
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Bibliographie
Ouvrages

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(dir.), Caravage, Editions Place des
Victoires, 2015
(ISBN 978-2-8099-1314-9), p. 29-
209.
Jacques Thuillier, Georges de La Tour,
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monographies », 1992 (réimpr. 1997),
318 p. (ISBN 2-08-010074-2).
(en) John Varriano, Caravaggio: The Art
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University Press, 2006, 183 p.
(ISBN 978-0-271-02718-0, présentation
en ligne , lire en ligne ).
Stefano Zuffi (trad. de l'italien par
Tiziana Stevanato), Le Caravage par le
détail, Hazan, 2016, 287 p.
(ISBN 978-2-7541-0968-0).

Articles

(en) Denis Mahon, « Fresh Light on


Caravaggio's Earliest Period: His
'Cardsharps' Recovered », The
Burlington Magazine, vol. 130, no 1018,
janvier 1988, p. 10-25.

Articles connexes
Liste de peintures de Caravage
Période romaine de Caravage
La Diseuse de bonne aventure

Liens externes
(en) Kimbell Art Museum, « The
Cardsharps » , sur kimbellart.org, 2019
(consulté le 20 février 2019) (notice de
l’œuvre sur le site du musée Kimbell).
Ressource relative aux beaux-arts :
Google Arts & Culture

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3.0 sauf mention contraire.

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