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Autres temps, autres moeurs – La jeunesse en

décadence
La jeunesse mauricienne vit une situation alarmante et elle est en péril. Comme diraient les
vieilles personnes, les jeunes d’antan ne s’intéressaient pas à grand-chose si ce n’est la télé, la
famille et les potes. Néanmoins, la jeunesse d’aujourd’hui dégage une image bien plus ‘trash’,
avec les beuveries organisées, la sexualité, le mauvais usage de la technologie, entre autres. La
faute à qui ? Constat…

Les adolescents font frémir leurs aînés. On ne peut nier qu’il y a eu une grande évolution de la
jeunesse, mais on ne peut également pas nier le fait que des mauvaises habitudes ont
accompagné cette évolution. Elle peut même être qualifiée comme une évolution négative. En
témoignent les fêtes, les beuveries, les sorties organisées, la sexualité et la grossesse précoce, la
mauvaise utilisation des facilités de l’internet et de la technologie informatique.

Selon le sociologue Ibrahim Koodruth, il y a plusieurs facteurs qui ont contribué à cette chute de
comportement de la jeunesse. « Les parents ne donnent plus d’importance à leur rôle. Une fois
qu’ils ont admis leurs enfants à l’école ou au collège, ils deviennent négligents », dit-il.

Notre interlocuteur avance que de nombreux parents pensent qu’il ne suffit pas que de donner de
l’argent à son enfant pour l’envoyer à l’école. Ils ne prennent même pas l’initiative de s’assurer
que les enfants sont bel et bien à l’école. Souvent, les adolescents sortent de chez eux pour aller à
l’école, mais ils atterrissent dans les Pool Houses, les gares, les jardins publics, les salles de
cinéma, les rivières, les pensionnats, les plages, entre autres.

« Suite à cette négligence et aux fréquentations, les jeunes ont tendance à adopter de mauvaises
habitudes. Sinon, la méfiance envers la religion a joué un grand rôle dans la décadence de la
jeunesse. Auparavant, grâce à des valeurs religieuses, il y avait un certain contrôle sur les jeunes.
De nos jours, l’éducation religieuse n’a pas d’importance.

C’est ainsi que les jeunes ignorent l’importance de la religion », nous explique le sociologue.
Ibrahim Koodruth fait également ressortir que la mauvaise utilisation de la technologie est un
facteur qui a contribué à la chute de la jeunesse. Le SMS, le blog, les réseaux sociaux tels que
Facebook, Twitter, entre autres, sont désavantageux pour les jeunes en quelque sorte.

De plus, dit-il, les jeunes sont trop gâtés car ils obtiennent tout ce qu’ils demandent, notamment
le laptop, le téléphone portable dernier   cri, le iPod, le iPhone, le Notebook, entre autres.

Sinon, notre interlocuteur précise que les jeunes d’aujourd’hui interactent plus avec les amis
qu’avec les membres de la famille (cousins et cousines). Donc, les activités organisées entre amis
sont plus ou moins néfastes contrairement à celles familiales.

Ibrahim Koodruth tient pour responsable les enseignants pour avoir adopté une attitude de
laisser-aller envers les adolescents. Avec les nouveaux règlements, les enseignants ont peur de
prendre des sanctions. Rita Vencatasamy, travailleuse sociale et directrice de CEDEM, partage le
même avis que le sociologue. Selon elle, la situation des jeunes est devenue préoccupante. « La
décadence est le résultat d’un manque de formation des parents. Vingt ans auparavant, la
situation était différente, car les jeunes ont adopté la mauvaise tendance. Un manque
d’encadrement familial est également le facteur qui provoque la chute du comportement de la
jeunesse », dit-elle.

Sinon, Ibrahim Koodruth conseille aux parents de ne pas seulement se concentrer sur l’éducation
académique de leurs enfants. Un encadrement familial est également recommandé. « Il ne faut
pas se laisser embêter par les chantages émotionnels des enfants qui, par la suite, ont le pouvoir
pour toutes les autres décisions », dit-il.

Rita Vencatasamy avance que les jeunes n’ont plus vraiment d’ambition, et ils sont de plus en
plus attirés envers le gain matériel. Au niveau du social, les travailleurs sociaux organisent pas
mal d’activités pour éviter à ce que les jeunes ne tombent dans les travers de la société. Le
ministère doit organiser plus d’activités pour sensibiliser les jeunes, ajoute-t-elle.

Les clubs jeunes


Malgré la chute qu’a connue la jeunesse mauricienne depuis quelques années, plusieurs clubs ont
été lancés afin de conserver les valeurs liées à la jeunesse.

Silver Soul Club est une association lancée par des étudiants de l’Université de Maurice. Ce club
de jeunes a pour objectif de conserver et de promouvoir les différentes valeurs culturelles
présentes à Maurice. « La jeunesse mauricienne a effectivement connu une décadence.
Personnellement, je trouve que la tentation est là et elle est plus forte que tout. Les jeunes ne
réalisent toujours pas que cette décadence ne mènera à rien. Ce sont plutôt les valeurs et les
cultures que nous enseignent les parents et les grands-parents qui nous aideront à l’avenir »,
affirme Rajnissen Poonosamy, conseiller du club.

Par conséquent, le Silver Soul Club, comprenant 45 membres, tient à regrouper les jeunes pour
organiser des activités de partage de cultures au lieu de perdre du temps dans les travers de la
société. Selon le jeune conseiller du groupe, la meilleure solution pour empêcher la décadence
serait d’offrir la chance aux jeunes de s’exprimer. Pour cela, le club organise des sorties, anime
des causeries et des discussions et tente de se faire connaître dans la société.

D’autre part, l’Information Systems (IS) Society, autre association de jeunes, a pour but d’attirer
les jeunes vers l’informatique au lieu de passer leurs temps libre à adopter les mauvaises
habitudes. « Le club est ouvert à tous les jeunes, les étudiants du secondaire et de l’Université de
Maurice.

Nous organisons des activités afin d’attirer les jeunes vers la technologie. Il y a un temps où la
technologie dominait et c’est à cette époque que nous avons créé ce club, soit en 2006. Il est vrai
que les jeunes sont grandement attirés par l’informatique. Donc, nous essayons de guider les
jeunes vers leur avenir au lieu d’organiser des beuveries entre amis et commettre des actes
inacceptables, entre autres », avance Basant Lallah, fondateur de l’IS Society.   
L’avis d’un religieux
Le père Steve Babooram, responsable diocésain de la pastorale des jeunes, nous livre son
opinion : « Nous évoluons dans un monde de contrastes où les repères ne sont pas toujours bien
clairs pour les jeunes. Pour cause, on note une absence de repères ou un manque de volonté de
leur part pour avoir des balises dans leur vie d’adolescents.

D’autre part, parce que les adultes, ayant souvent une tâche difficile dans l’éducation de leurs
enfants à une période difficile de leur adolescence, ne leur donnent pas de repères suffisamment
clairs dans la formation de leur personnalité et la croissance de leur foi », dit le prêtre. Il ajoute
ceci : « Même si cela s’avère exact dans une certaine mesure, je veux sortir du cliché habituel
rapide qui parle de la décadence des jeunes Mauriciens aujourd’hui pour dire les aspirations et la
soif des jeunes que je rencontre au cœur même de leurs faiblesses et leurs possibles
incohérences.

Quels que soient le milieu de vie et la culture des jeunes, j’ai constaté une soif de fraternité, de
bonheur, de paix et de justice; une soif de grandir dans un environnement sain, de rencontres
avec d’autres jeunes afin de vivre et de grandir en amitié, afin d’aimer et d’être aimés, d’être
reconnus, valorisés, de faire l’expérience du sens d’appartenance à un groupe, à un mouvement
ou à un réseau de relations ».

Pour vaincre cette chute, il souligne que « nous disposons des formations (catéchèse, cours de
valeurs morales, prévention du VIH/Sida et des comportements sexuels à risque, vie chrétienne,
etc.) qui sont proposées aux jeunes pour les aider à se construire sur les plans humain, psycholo-
gique et spirituel afin qu’ils puissent se prendre en charge pour adopter des comportements
responsables et épanouissants face à leur vie et celle des autres ».

Le père Steve Babooram avance que ces différentes formations sont assurées par des groupes tels
que Groupe 40, YES, Pèlerins d’Espérance, Youth Alive, l’Aumônerie universitaire, Mouvement
d’Aide à la Maternité, Action Familiale et d’autres mouvements dans le diocèse. 

D’autre part, une formation est aussi proposée aux jeunes adultes qui désirent se former pour être
au service des jeunes dans les paroisses, dans les mouvements ou dans des groupes sociaux et
collèges. « L’Action Familiale, MAM, la Pastorale des jeunes et bientôt le département JCF de
l’Institut Cardinal Jean Margéot assurent ce type de formation, car il nous faut davantage de
personnes formées pour porter cette mission pleine de défis et d’enjeux.

Le suivi, le soutien et l’accompagnement des jeunes sont aussi importants pour évaluer,
maintenir et encourager le processus du changement de comportement », précise l’abbé
Babooram.

Une autre piste qui n’est pas la moindre, dit-il, c’est de cultiver en soi et auprès des jeunes la
Parole de Dieu : « Nous croyons qu’il est important de les rejoindre là où ils sont pour qu’ils
puissent faire l’expérience heureuse de découvrir Dieu dans leur vie à travers une rencontre per-
sonnelle avec le Christ. »

Ministère de la Jeunesse
Le Défi Quotidien a vainement essayé d’entrer en contact avec le ministère de la Jeunesse et des
Sports pour recueillir une déclaration de Devanand Ritoo, ministre de tutelle, sur le sujet, en sus
des programmes et activités qu’ils organisent pour les jeunes. Cependant, personne n’a répondu à
notre requête.

Questions à… Mahendranath Motah, psychologue


> Quel est le profil psychologique d'un adolescent de l'ancienne époque et celui de la société
moderne ?
Le profil est le même,  mais les expériences sont différentes. La crise identitaire est plus
prononcée, car les repères sont confus. Les parents et les grands-parents n’ont plus la même
importance vis-à-vis de la nouvelle génération. Il y a eu une évolution qui est néanmoins plus
négative que positive. La quasi-démission des parents, le rôle effacé des éducateurs, des
enseignants et d’autres figures des autorités, ont largement contribué à créer une situation plus
ambiguë pour les jeunes. Ainsi, tous les aspects, soit psychologique, social, éducatif, mental, et
moral de même que les attitudes ont  été affectés. En l’absence des repères, les choses sont
devenues plus confuses, avec des résultats que l’on constate à tout niveau.

> Quelles sont les raisons qui ont poussé les adolescents à changer de style de vie ?
La liberté de choisir leur style de vie ; le libre choix des comportements, les facilités d’accès a
diverses choses de la vie ; la libre circulation d’information dénuée de toute censure ; la
démission des parents; le rôle des médias; l’influence grandissante des facteurs déstabilisants tels
que l’alcool, la drogue, le tabac, le sexe, les auberges et les pensionnats, et la promiscuité sont
quelques-unes des choses qui ont contribué à l’état des choses.

> Comment est-ce que cette chute de comportement est-elle néfaste pour les adolescents ?
L’absence des repères, des modèles, d’autorité, et le libre accès à des facteurs déstabilisants
contribuent tous à faire du jeune une proie facile aux fléaux sociaux. La recherche d’identité
devient confuse. Le jeune se trouve dans une situation où il ne sait où aller, à qui parler, qui
écouter et comment trouver les réponses aux interrogations que lui pose sa nature inquisitrice. Le
comportement, les attitudes, les valeurs, le choix des choses de la vie sont affectés et le jeune se
retrouve dans des situations de plus en plus complexes. Il n’a d’autre choix que de faire comme
bon lui semble.

> Quel impact cela fait sur la vie familiale de l'adolescent ?


Les parents sont les premiers à être affectés et ils se demandent où ils ont fauté dans leur rôle
parental. Ils ont l’impression d’avoir tout fait, tout donné, tout dit, mais les enfants n’ont fait qu’à
leur tête. En grandissant, certains adolescents réalisent leurs faiblesses et retournent vers le droit
chemin. Ils se façonnent par eux-mêmes et font face aux défis de la vie. D’autres de plus en plus
nombreux se retrouvent dans l’incapacité de changer leur style de vie et s’y laissent aller, cela ne
trouvant pas le courage de chercher une autre solution et se vouent à une vie désinvolte, facile,
de débauche et sans but.

Témoignages
Adi (prénom fictif), 19 ans, vient de compléter ses études secondaires. Cet habitant de Curepipe
avance que les jeunes de l’époque ancienne étaient ennuyeux. « À l’époque, il n’y avait pas
grand-chose comme loisirs. Tout le monde regardait la télé, mais on ne peut finir tout notre
temps devant la télé.

Je préfère le temps moderne. Je sors avec mes amis, des filles et des garçons, pour aller au
cinéma, les soirées dansantes, dans les boîtes de nuit, pour les petites fêtes amicales, entre
autres », relate le jeune homme. Je trouve ce style de vie plus excitant que celui de l’époque
ancienne. Les jeunes ont tout simplement, et ils bougent avec la modernité de la société. Je ne
pense pas que c’est une chute de comportement », dit-il.
r Sania (prénom fictif), 16 ans, étudie en Form V. Cette habitante de Port-Louis rejette également
les propos de décadence de la jeunesse.

Selon elle, les jeunes d’aujourd’hui ne font qu’adopter les attitudes modernes. « Les jeunes de
l’époque ancienne ne faisaient que les choses qui étaient ‘in’ à l’époque et nous avons adopté les
tendances modernes. Il n’y a eu aucune décadence. Il est vrai que les jeunes d’avant menaient
une vie plus simple et moins compliquée. Cela convenait à leur style de vie et la société dans
laquelle ils vivaient. Pour nous, c’est différent », dit-elle.

r  Sudesh (prénom fictif), 67 ans, exerce comme marchand ambulant. Cet habitant de Port-Louis
affirme que la jeunesse mauricienne a effectivement connu une décadence. « Les jeunes de nos
jours sont devenus intolérables. Ils ne font qu’à leurs têtes. Les valeurs, les cultures et les
traditions n’ont aucune importance pour eux. Ils n’écoutent plus leurs parents. Heureusement que
mes enfants ont grandi dans un environnement sain.

Ils sont mariés et je n’ai  pas connu de problèmes à cause d’eux. Sinon, le mariage des jeunes de
nos jours finit généralement en séparation et divorce. Mes enfants sortaient avec des amis, mais
ils avaient des limites à respecter », nous dit le vieil homme.

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