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1 Cet article doit à la contribution de Michèle Dupré (GLYSI-CNRS) qui collabore au projet de recherche
collective financé par la DARES (Etat et acteurs sociaux en France et en Allemagne, dans les décennies
e
1960 et 1970) et a participé aux débats préliminaires à la rédaction de ce texte.
2
1994 ; Andofalto, Labbé 2006) sur le sujet oppose habituellement plusieurs modèles : le
modèle trade-unionist où le syndicat crée un instrument politique à son service ; le
modèle social-démocrate où parti et syndicat sont complémentaires chacun dans son
arène d’appartenance ; le modèle léniniste où le syndicat est la courroie de transmission
du parti ; enfin le modèle « pansyndicaliste » dominant historiquement en France et
réaffirmé dans la charte d’Amiens où, au-delà de l’indépendance réciproque des actions
conduites par le syndicat et le parti, « l’organisation corporative prenait en charge toute
l’expression de la classe ouvrière par ses luttes immédiates et par la révolution à venir
grâce à la grève générale » (Mouriaux 1986 p. 59).
En choisissant de travailler sur les cas français et allemands, nous proposons de
réfléchir à une comparaison qui met en perspective les trajectoires de deux modèles de
syndicalisme. Pour le modèle français, il existe deux temporalités et deux ordres de lutte.
Un ordre de lutte lointain, inscrit dans une perspective révolutionnaire, centré sur des
finalités politiques et un ordre de lutte proche, inscrit dans le quotidien de la condition
ouvrière, sur laquelle il faut agir ici et maintenant. Le modèle social-démocrate s’efforce
d’articuler objectifs proches et lointains. Le socialisme comme socialisation des moyens
de production est l’objectif central qui doit être atteint par des moyens légaux. Les luttes
syndicales doivent contribuer à l’affirmation et à la consolidation du projet socialiste,
mais elles doivent apporter aux ouvriers une amélioration continue de leur condition
quotidienne.
Le second choix auquel nous procédons dans cette contribution consiste à traiter
de l’organisation des rapports de pouvoir entre travail et capital dans l’entreprise. Cet
enjeu permet de rendre visible la multiplicité des arènes de confrontation entre capital et
travail, entre patronat et syndicats, mais aussi entre l’univers du politique et celui des
luttes syndicales. Ces enjeux renvoient aux formes de la représentation des salariés dans
l’entreprise, à leurs droits d’informations, de protection, aux diverses formes
d’association des salariés à la décision dans l’entreprise ou encore aux rapports avec les
gestionnaires de l’entreprise.
Pour saisir de façon comparative, les dynamiques d’institutionnalisation dans nos
deux cas, il nous semble indispensable de déterminer une grille d’analyse commune
organisée autour de trois éléments. D’abord, notre réflexion s’est centrée sur les acteurs
porteurs des revendications et des luttes. Ensuite, nous nous sommes intéressés aux
enjeux, à leurs formulations et problématisations. Enfin, nous considérons précisément
les lieux de la confrontation, que cette dernière prenne la forme de luttes sociales ou de
délibérations ou confrontations politiques. Ces différentes dimensions renvoient aux
catégories actuelles de l’analyse de l’action publique puisqu’elles évoquent des acteurs
sociaux de différents ordres (i), des idées, discours, débats publics ou catégories
opérationnelles qui donnent lieu à des formes d’institutionnalisation (ii) et qu’elles
évoquent enfin des arènes de confrontation qui renvoient à des institutions, mais plus
encore à des styles et formes de confrontation, à des types d’enjeux et à des forces
sociales et politiques bien précises (iii).
Dans le cas qui nous concerne, les acteurs pertinents sont divers. Il s’agit bien sûr
de représentants syndicaux ou patronaux, de représentants et membres des partis
politiques, d’acteurs ministériels ou publics, ou encore de membres de réseaux politiques
ou sociaux. Ces différents acteurs sont porteurs de discours, idées et alimentent des
débats publics qui forment des enjeux de lutte ou de confrontation. Ces activités de lutte
3
Enfin, nous limitons notre analyse à une période clé dans l’évolution des systèmes
de démocratie industrielle en France et en Allemagne, période qui s’ouvre dans les deux
pays autour d’une série de fortes crises sociales dans les années 68 à 69. Ces deux crises
se manifestent dans les deux pays à la fois dans le champ du travail – grèves massives –
et dans le champ politique. Leur analyse permet ainsi de bien comprendre les
articulations entre les deux univers qui nous intéressent ici.
Après un premier relevé comparatif des situations de départ dans chacun des pays,
nous tentons de dresser un bilan comparé des configurations propres à chacun des cas
pour ce qui touche à l’organisation des rapports de pouvoir entre travail et capital dans
l’entreprise, à la veille des crises des années 68/69.
Dans un second temps, notre travail consistera à analyser les dynamiques de
changement qui résultent des périodes de sortie de crise. La déstabilisation des
régulations d’Etat ou des pratiques d’auto-régulation portées par les acteurs sociaux sont
des caractéristiques fortes du tournant des années 60 et 70 dans les deux pays. Une rapide
analyse des dynamiques discursives, des évolutions politiques, des réformes
institutionnelles permettra de comprendre le chemin parcouru de part et d’autre pour
échapper aux blocages (2). La confrontation croisée des dynamiques de sorties de crise
nous permettra, en conclusion, de dresser un bilan comparatif des modes
d’institutionnalisation dans les deux configurations nationales et d’interroger les modèles
nationaux
2 Montanmibestimmungsgesetz.
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Sur le plan politique, les positions sont tranchées. Les syndicats avaient entre les
deux guerres soutenu une version organisée du capitalisme – organisée autour des cartels
et du poids des banques – comprise comme une première évolution vers des logiques
structurelles compatibles avec la socialisation et dont ils attendaient une plus grande
facilité à négocier de façon organisée. Après guerre – programme de Düsseldorf de 1963
-, les syndicats adoptent une position de défense de l’économie de marché, garantie de
démocratie (Höpner, 2004). La position de fond du syndicat est ainsi majoritairement
calée sur celle du SPD3 même si l’horizon socialiste et révolutionnaire reste important au
sein du mouvement syndical. Mais la revendication d’association au pouvoir de contrôle
de l’entreprise est maintenue voire amplifiée dès que le SPD arrive au pouvoir dans le
cadre de la grande coalition. Face à cette position, les gouvernements conservateurs des
années 60 restent globalement hostiles et encouragés par le patronat qui ne souhaite
aucune extension des droits salariés dans l’entreprise. La mouvance « sociale » du parti
chrétien-démocrate, bien que très forte et proche des revendications syndicales, ne
parvient pas à mettre en marche la machine de la réforme.
Face à ce blocage généralisé, l’Etat se contente d’intervenir pour ouvrir des
concertations centralisées – à partir de 1963, puis de 1967 – portant sur une orientation
quant à des normes et des formes de croissance. Avant la grande coalition, il ne se pose ni
en médiateur, ni en facilitateur entre des parties patronales et syndicales bloquées front
contre front sur la plupart des dossiers de l’époque – réforme de l’apprentissage
industriel, extension de la co-détermination (Offe, 1975). A l’intérieur de la machine
gouvernementale et dans des réseaux proches du pouvoir cependant, la thématique d’un
rééquilibrage des rapports de pouvoir dans l’entreprise au profit du syndicat reste
alimentée. Des idées sont testées, des compromis sont tentés, des discussions sont
maintenues. Cependant, dans les forums publics, les positions restent opposées. Aucun
lien explicite entre le renforcement de l’implication du syndicat dans les consultations
macro-économiques et les relations de pouvoir dans l’entreprise n’est fait explicitement.
4 Benoît Frachon : « Les délégués ouvriers aux comités d’entreprise ne peuvent agir en 1948 comme en
1945.[…] Avant tout, il faut paralyser l’effort de ceux qui conduisent le pays à la ruine, au chaos, au
chômage, à la domination étrangère et à la guerre pour les expansionnistes américains » in La Revue des
comités d’entreprise, n°1, avril 1948, cité par Le Crom (1997), « Le comité d’entreprise une institution
sociale instable, communication au colloque « L’enfance des comités d’entreprise » 1996.
5« Je crois que les salariés ont le droit et le désir de devenir des possédants. Grâce à cette propriété, fut-elle
faible au départ, ils se sentiront liés à un système économique, même s’il reste en partie capitaliste et au
progrès de ce système » déclaration G. Pompidou, Premier ministre, septembre 1967 (CAC 970084, art. 1)
6 Mais le MRP rassemble lui-même des tendances hétérogènes de la droite classique aux gaullistes à la
recherche d’une 3° voie entre capitalisme et socialisme.
6
importantes qui séparent les deux pays dans la construction, par les acteurs politiques et
sociaux, des enjeux liés à la transformation des rapports de pouvoir dans l’entreprise.
En France, la thématique ne mobilise pas les acteurs sociaux. Il y a au contraire
un consensus implicite entre les acteurs des relations professionnelles pour se détourner
de cette perspective. Perçue par les syndicats comme un leurre susceptible de détourner la
classe ouvrière de ses objectifs révolutionnaires ou de mettre en péril l’autonomie
syndicale par rapport au patronat, elle n’est pas non plus comprise comme un moyen
permettant de servir d’éventuels objectifs proches du monde ouvrier. En Allemagne, au
contraire, la prise de pouvoir au sein de l’entreprise fait partie du répertoire de l’action
révolutionnaire du mouvement ouvrier. Ce répertoire est métamorphosé par les
développements historiques du milieu du 20ème siècle, mais il demeure un objectif perçu
comme une fin en soi – renverser ou rééquilibrer les rapports de pouvoir au concret dans
l’entreprise – mais aussi comme une étape vers l’établissement de rapports différents
entre le capital et la classe ouvrière. L’objectif d’une gestion harmonieuse, ancrée dans la
croissance et l’augmentation perpétuelle des standards économiques et sociaux,
orchestrée par un Etat neutre, voire bienveillant, à l’égard de la classe ouvrière, remplace
progressivement l’objectif révolutionnaire. La transformation des rapports de pouvoir
dans l’entreprise reste cependant un point de repère essentiel de la revendication ouvrière
allemande, cela seulement si le syndicat occupe la place centrale dans le dispositif.
En France, il n’y a pas d’articulation entre l’action politique et les acteurs des
relations professionnelles. Des liens différenciés entre partis de gauche et syndicats
coexistent plus ou moins explicitement. Tout au long de la Vème République, la droite
gouverne sans relais syndicaux ni même sans véritables relais patronaux, même si une
confrontation entre experts et représentants des forces économiques et sociales est
expérimentée au sein des instances de concertation du Plan. Devant la montée des conflits
sociaux et l’atonie de la négociation sociale, l’Etat cherche à relancer le dialogue social
sur les thématiques, alors émergentes, de l’emploi. La démocratie industrielle ne devient
jamais un objet politique, elle reste un objet de débat.
En Allemagne, les rapports entre le politique et l’univers des relations
professionnelles sont souvent articulés. Le jeu des doubles appartenances – SPD/DGB,
CDU/DGB ou CDU/patronat – très répandues réalise l’essentiel de ce travail
d’articulation. L’arène des relations industrielles est cependant particulièrement tendue à
propos de cet enjeu. Le politique remplit alors une importante fonction d’initiative et
institutionnalise des compromis qui n’ont souvent pas d’assise réelle dans le monde des
relations industrielles. Le travail d’institutionnalisation est alors à moitié accompli. Les
réinvestissements consentis par les acteurs des relations industrielles constituent alors la
seconde dimension et la seconde phase de l’institutionnalisation. Cette dynamique n’est
pas présente de la même façon en France où elle ne se concrétise que dans le champ de la
protection sociale.
2. Crises et sorties de crise : quels déplacements des discours et des positions, quels
changements institutionnels ?
La grande coalition qui débute en 1966 constitue une rupture politique essentielle
dans les relations entre les syndicats et l’Etat, mais aussi entre les syndicats et les partis.
La disqualification de la politique ordo-libérale d’Erhard conduit à des pratiques d’action
concertée et de régulation globale associant les syndicats. Ces politiques permettent
certes de dépasser la crise économique de 1967 et d’éviter un véritable démarrage du
chômage, mais les syndicats ont dû consentir une modération salariale, vite contestée sur
le terrain. La constitution d’un bloc alliant droite et gauche au sommet du pouvoir
politique, sachant que les liens sont forts entre le SPD et le syndicat, donne l’impression
d’une absence d’opposition dans le pays (Klöne, Reese, 1990). Large coalition politique
et modération syndicale expliquent en partie la vigueur des troubles étudiants de 1968,
mais aussi l’ampleur des grèves sauvages de septembre 1969.
Les grèves de 1969 frappent l’opinion et les acteurs du domaine du travail non
seulement par leur ampleur, mais surtout parce qu’elles adressent une série de messages
explicites qui suscitent de la sympathie également dans le camp de la CDU et des
libéraux. Ces grèves marquent la détermination du monde salarié à se départir d’une
politique de modération systématique et d’auto-musellement au profit des attentes
patronales. Sur le plan du contenu, elles expriment la volonté d’en finir avec les pratiques
de progression des salaires sur la seule base des gains de productivité enregistrés dans les
branches.
La focalisation au centre de l’espace politique, caractéristique de la grande
coalition, n’est que difficilement comblée par le syndicat. De manière à équilibrer la
modération salariale par la participation des syndicats à l’action concertée, ces derniers
relancent avec vigueur leurs exigences dans le domaine de la co-détermination. Le projet
politique des syndicats est d’inscrire la co-détermination dans une gestion programmée et
intégrée de la société. Un conseil économique et social – Etat, partenaires sociaux et
société civile – prendrait en charge les politiques sociales, mais aussi la politique des
revenus, articulée à la gestion de la politique macro de l’Etat, en coordination avec les
orientations et les investissements consentis dans et par les entreprises privées (Klöne,
Reese, 1990, p.265).
En dehors de la mouvance sociale de la CDU, cette version complète du projet
syndical ne séduit pas grand monde à droite. En revanche, l’essentiel du parti social-
démocrate – en dehors du ministre fédéral de l’économie – soutient l’initiative syndicale
pour l’extension de la Mitbestimmung. La nouvelle Betriebsverfassungsgesetz de 1972
représente en la matière une avancée importante puisqu’elle augmente de beaucoup les
droits du Betriebsrat en matière sociale et de gestion du personnel, mais aussi parce
qu’elle introduit un droit de contrôle sur les choix économiques de l’entreprise ou encore
clarifie les relations entre Betriebsrat et syndicat. Enjeu d’une alliance forte entre
syndicat et SPD, cette loi ne donne pas lieu à des débats particulièrement passionnés car
elle fait explicitement partie du programme du deuxième gouvernement Brandt (1971) et
chacun la considère comme acquise (Lompe, 1990, p.313 et s). En revanche, la loi sur la
codétermination de 1976 qui réorganise les relations de pouvoir au niveau des conseils de
surveillance des entreprises donne lieu à une série de conflits violents.
Suite aux propositions du syndicat qui défend une extension des règles de parité à
toutes les grandes entreprises, le gouvernement fédéral joue un rôle actif : il confie à un
économiste conservateur, Kurt Biedenkopf, le soin de faire une évaluation des acquis et
des échecs de la loi de 52 dans les secteurs du charbon et de l’acier et d’adresser, sur la
9
7 En Allemagne, il existe deux filières de représentations des intérêts patronaux : selon une logique avant
tout économique – BDI – et selon une logique d’employeurs – BDA. La seconde filière est
traditionnellement beaucoup plus proche des revendications syndicales, notamment parce qu’elle a intérêt à
un renforcement des régulations de type conventionnel.
8 Discours de Jacques Chaban-Delmas à l’Assemblée nationale le 16 septembre 1969.
9 Au début des années soixante-dix, le juriste Y. Delamotte (1971) caractérisait la négociation collective en
France comme « un phénomène peu structuré dans le temps, d’une fréquence irrégulière » (p. 292).
10 Le législateur ne s’est généralement pas contenté de traduire en loi les accords mais a bien souvent
imprimé sa propre marque notamment en matière de formation professionnelle continue (Vincent 1997).
10
ces accords statutaires améliorant la situation immédiate des salariés, les principales
organisations syndicales11 élaborent des projets de société incluant de nouvelles formes
d’organisation du pouvoir des salariés dans les entreprises. La CGT, s’inscrivant dans la
dynamique du programme commun, propose dans l’hypothèse d’un changement du
pouvoir politique, des modes de « gestion démocratique » des entreprises nationalisées
pouvant être étendus sous certaines conditions aux entreprises privées. La CFDT, quant à
elle, tout en misant sur un changement politique, tente par des luttes dans les entreprises
de préfigurer la société autogestionnaire à venir.
11 Nous ne traiterons ici que de la CGT et de la CFDT dans la mesure où seules ces deux organisations
connaissent de fortes mutations dans la décennie considérée.
12 Benoît Frachon au XXX° congrès 1955 : « Le front populaire porté par les masses a commencé par des
victoires importantes, notamment pour la classe ouvrières. Mais ses victoires n’étaient pas la fin du
combat… Si le gouvernement pu décréter la pause, c’est que le rassemblement populaire n’était pas assez
solidement organisé dans les masses. Il lui manquait un réseau serré de comités de base qui auraient alors
joué un rôle décisif dans l’orientation de la politique » .
11
changement politique, la CGT se raidît alors à l’image du PC et se lance dans des luttes
plus radicales.
13 Rapport du bureau fédéral pour le 13ème congrès de la Fédération du bâtiment CFTC, présenté par Albert
Détraz en mars 1960 (Cité par Franck Georgi, p.773).
14 Circulaire N°1/68 du 15 mars 1968, archives CFDT n° 8H508.
12
Les syndicats CGT et CFDT face aux initiatives politiques de « réforme de l’entreprise »
Afin de promouvoir sa « société libérale avancée » dans le domaine social,
Giscard d’Estaing – élu en 1974 avec une courte majorité face au candidat de la gauche
unie sous la bannière du programme commun – reprend à son compte le thème de la
modernisation de l’entreprise, choix largement lié à l’alliance électorale passée avec les
centristes réformateurs. Dès juin 1974, le Premier ministre Jacques Chirac annonce la
création d’un comité de travail sur la réforme de l’entreprise composé de patrons de
sensibilité moderniste, de syndicalistes ouverts15 à la discussion et d’universitaires et
charge Pierre Sudreau, gaulliste de la première heure, de le présider. Les discussions sont
libres et ouvertes16, les divergences ne sont cependant pas gommées. Elles portent
principalement sur la place des syndicats dans l’entreprise et l’information économique
des salariés. Un des paragraphes du rapport final s’intitule « reconnaître le syndicat
comme partenaire ». En matière d’information économique, la position frileuse du
patronat rencontre celle des organisations syndicales pour qui « les extensions de
compétences ne pourraient aller jusqu’à conférer au CE un pouvoir de veto ou de
codécision »17. Au long des discussions du comité Sudreau, le modèle allemand de
cogestion18 a été « un non-dit qui a pesé sur les travaux »19. Les représentants syndicaux
lui préfèrent la notion de « pouvoir d’influence des salariés »20, le rapport propose une
formule de co-surveillance basée sur la participation facultative de représentants de
salariés qui n’auraient que des droits d’information.
15 La CFDT est représenté par Albert Detraz qui vient de quitter la direction de la CFDT et la CGT refuse
d’y participer formellement mais sera auditionné par les groupes de travail et en séance plénière.
16 De l’avis unanime des participants que nous avons rencontré.
17 Avis adopté par le Conseil économique et social, saisi par lettre du Premier ministre sur la réforme de
l’entreprise (session des 1er et 2 juillet 1975).
18 Selon le terme employé par les acteurs de l’époque pour désigner la codétermination.
19 Propos tenus par Jean-Maurice Verdier.
20 Idem
21 Déclaration d’Henri Krasucki le 23/02/74 repris dans l’Humanité du 24/09/74
13
l’entreprise afin que ceux-ci soient des « citoyens » à leurs postes de travail, dont
s’inspirera le droit d’expression des lois Auroux. Lors de la publication du rapport cette
organisation, tout en reconnaissant les intentions positives de la commission, regrette la
timidité des propositions et s’élève quelques mois plus tard contre le peu d’ambition du
Président de la République en matière de mise en œuvre de ce rapport.
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16