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L'art peut nous faire voir la ville autrement

S O C I A L . . .

U R B A N I S M E ,
Valérie Demarque, Nathalie Guez,
Dans le monde en 1900 : 10 % de la population Camille Jullien, Cécile Maurice créent
vit dans les villes, en 2000 : 50 % de la population l'événement avec ce Kit-jardin dans le
vit dans les villes. Une urbanisation centrifuge quartier de l'Eure au Havre Particules
élémentaires nécessaires et insuffisantes
relie les centres anciens aux villes nouvelles, dans ce secteur où la vie se passe à l'in-
ces agglomérations massives concentrent toute térieur ou dans les troquets chaleureux.
Le jardin puzzle évolue au fil des
l'imagerie de la nouvelle société de consommation. humeurs de ses locataires, micro-lieu
Agglomération d'hommes, de matières, ouvert à tous, modulable et itinérant,
petit territoire d'accueil et d'échange.
et de réseaux, concentration d'énergie mais aussi
de maux et de problèmes. Les villes explosent
A R T,

de toutes ces tentions, les centres sont en voie


de muséification avec un enfermement et une
perte de relations avec l'extérieur, la périphérie
se paupérise et s'exclut par une organisation

U T O P I E ,
complexe de la circulation et des transports.
La ville malade est devenue un laboratoire
pour les architectes et les artistes, tous essayent
H A B I TAT,

de repenser la ville, recréer du lien, véhiculer


un peu d'humanité dans ces grands ensembles.
Poser un regard sensible, apporter un peu de poésie
dans le paysage urbain les artistes s'y emploient
par de petits gestes, des décalages, des détour-
nements pour nous faire voir la ville autrement.

H A B I TAT,
U T O P I E ,

L'architecture du silence
Les lois urbanistiques espagnoles sur l'emplacement
des containers dans l'espace urbain définissent
parfaitement comment doivent être ces containers :
leurs dimensions, le matériau avec lesquels ils sont
faits, leurs emplacements… mais elles ne définissent
pas leurs usages. Santiago Cirugeda (Barcelone) utilise
ces vides sur la législation urbaine, pour ce qu'il
nomme des Stratégies d'occupation subversives, en
cherchant "de possibles trous et incertitudes qui

A R T,
Romain Pellas nomme ses sculptures sous le titre générique Encombrants. permettent aux différents groupes humains d'agir
Ce titre résume bien l'attitude de l'artiste : sauvage et rapide. Ces constructions librement". Dans Projet des containers, les gens paient En juin 2003 suite à l'invitation de la
leur permis à l'administration et ensuite peuvent galerie Roger Tator (Lyon 7ème), Emmanuel
se montent dans l'urgence, où coexistent le stable et instable, le savoir et
Louisgrand part à la reconquête d'un
ignorance, force et faiblesse. Assemblages de matériaux hétéroclites faire ce qu'ils veulent, un espace pour respirer, un
petit morceau de ville. Jailli de l'espace
(planche en bois, contreplaqué, mélaminé, briques, plastique, …) sont posés point de rencontre, des jardins pour enfants, salle
U R B A N I S M E ,

urbain l'Ilot d'Amaranthes, cette pièce


là dans l'espace public face à nos hésitations, Sculptures, poubelles ? Elles de lecture, une buvette…. monumentale, au-delà d'être une
posent la question du devenir. Est-ce l'instant ou la durée ? Quelle attitude, sculpture, est devenue un lieu d'expéri-
quelle décision, quel engagement critique ? mentation, un atelier à ciel ouvert où le
public pouvait voir durant l'été 2003 le
Bernard Murignieux se préoccupe des lieux délaissés des "non-lieux" pour faire jardin évoluer et l'artiste travailler en

S O C I A L . . .
propager ses Constructions parasites. Dessous de pont, grand mur borgne, bas ports, direct. Pour l'été 2004, l'artiste et la
sont les terreaux où se développent ces étonnantes constructions, de papier galerie Roger Tator entreprennent son
comme sur le boulevard périphérique à Lyon en 1997, de bâches plastiques pour extension afin de l'ouvrir à un plus grand
une construction lumineuse, à Super luxe galerie Roger Tator (Lyon 7ème), en 2003-04. nombre. Par le biais, d'une nouvelle
configuration d'espace et de clôture,
s'ouvre désormais un dialogue concret
avec les riverains invités à cultiver une
parcelle de terre sous la direction de
l'artiste. Greffon fertile au sein du tissu
urbain, l'image du végétal reprend ses
droits sur cette "dent creuse". Par cet outil Cédric Bernadotte (Toulon) avec une économie de
artistique non pérenne et l'implication
moyen affirmée, scotch, film d'emballage, bâche
des habitants du quartier, la volonté de
tous ses acteurs est d'occuper la phase plastique réinvente la vie; le mobilier urbain lui inspire
transitoire de ce No project's land, de de nouvelles situations, de nouvelles fonctions. La
redéfinir avec créativité ce site tout en ville, où toutes les formes sont possibles, plus
questionnant les choix urbanistiques à venir. ludique, plus multiple que les dispositions mono
fonctionnelles qui sont proposées. L'artiste prône
le repos dans ces villes en mouvement perpétuel,
et met en évidence que le citoyen a un rôle très
François Cini avec ses Perturbations passagères propose une "design attitude" important à jouer dans le développement et la
par une réappropriation de l'espace public. L'artiste dans l'environnement construction du milieu dans lequel il vit.
de la rue introduit des petits décalages perceptibles ou pas, pour intervenir
sur le quotidien des déplacements urbains. Infiltrer un marathon Attraper
son marathon, tourner lentement autour d'un abri bus Abri de circonstance
ou bien boire un thé sur un banc Les Communes au thé de Lyon.
Bruno Vincent

16 Décembre 2004 numéro 99 Décembre 2004 numéro 99 17

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